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Décisions

Cass. com., 21 septembre 2010, n° 09-68.604

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Favre

Rapporteur :

Mme Bélaval

Avocats :

SCP Defrenois et Levis, SCP Ortscheidt, SCP Piwnica et Molinié

Reims, du 8 juin 2009

8 juin 2009

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 7 août 2003, la société BNP Paribas (la BNP) a consenti à la société RIB (la société) un prêt de 200 000 euros garanti par une hypothèque conventionnelle de premier rang sur les locaux d'exploitation appartenant à la société ; que les 2 décembre 2003 et 20 juillet 2004, la société a été mise en redressement puis liquidation judiciaires, la SCP X... étant désignée liquidateur ; que le juge-commissaire a ordonné la cession de l'ensemble immobilier moyennant le prix de 110 000 euros et a admis la créance de la BNP à concurrence de 196 862, 17 euros à titre privilégié ; que par ordonnance du 9 juillet 2007, le juge-commissaire a dit que la BNP était classée en troisième position devant les sommes avancées par les AGS classées en quatrième position et ordonné le versement par le liquidateur à la BNP de la somme de 29 675, 55 euros à titre provisionnel ; que l'ordonnance a été frappée d'un recours qui a été rejeté par le tribunal ; que le liquidateur a déposé l'état de collocation du prix de vente de l'ensemble immobilier aux termes duquel la BNP ne venait pas en rang utile et ne pouvait percevoir de fonds ; que la BNP a contesté cet état ; 

Sur le premier moyen : 

Attendu que la BNP fait grief à l'arrêt d'avoir dit que l'ordonnance du juge-commissaire autorisant le paiement provisionnel des créances n'était pas revêtue de l'autorité de la chose jugée ni le jugement " d'appel " de cette ordonnance, alors, selon le moyen, que l'ordonnance du 9 juillet 2007, confirmée en appel par jugement du 3 décembre 2007 rendu sur appel de l'ordonnance du 9 juillet 2007, ne s'était pas limitée à accorder une provision à la BNP, le tribunal ayant dans son dispositif statué sur la question du rang des créanciers et particulièrement celui de la BNP, jugeant que la BNP est classée en troisième position devant les sommes avancées par les AGS classées en quatrième position ; que ce chef du dispositif, définitif, qui avait tranché une partie du principal, avait en conséquence l'autorité de la chose jugée ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 480 du code de procédure civile et 1351 du code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel a exactement retenu que la décision rendue en application de l'article L. 622-24 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises par laquelle le juge-commissaire ordonne le paiement à titre provisionnel d'une quote-part d'une créance définitivement admise dont le montant est fixé en fonction de l'existence, du montant et du rang des autres créances, dues ou susceptibles d'être dues, est une mesure provisoire qui n'a pas, au principal, l'autorité de la chose jugée ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le second moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 621-32, II et III, du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises ; 

Attendu qu'il résulte de ce texte qu'en cas de liquidation judiciaire, les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture sont payées par priorité à toutes les autres créances à l'exception de celles qui sont garanties par le super-privilège des salaires, des frais de justice antérieurs au jugement d'ouverture et de celles qui sont garanties par des sûretés immobilières ou mobilières spéciales et que les frais de justice postérieurs au jugement d'ouverture, notamment la rémunération des mandataires de justice, sont réglés dans l'ordre prévu pour les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture ;

Attendu que pour fixer l'ordre des créanciers conformément à l'état de collocation dressé par le liquidateur déposé le 23 octobre 2007 soit : premier rang : créance super-privilégiée des salariés : 80 824, 45 euros, deuxième rang : frais de justice, troisième rang : privilège des salaires : 99 557, 90 euros, quatrième rang : créance de la BNP : 196 862, 17 euros, l'arrêt retient qu'il résulte des articles 2375 et 2376 du code civil que le privilège général sur les immeubles prime les privilèges spéciaux tels que les garanties hypothécaires, que l'article L. 621-32 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises ne règle pas l'ordre entre les créanciers garantis par un privilège général sur les immeubles et les créanciers hypothécaires pour lesquels le droit commun doit s'appliquer et que les privilèges portant sur la totalité de l'actif dont celui des frais de justice passent avant les sûretés inscrites sur l'immeuble chaque fois qu'il n'y a pas de mobilier suffisant ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la créance hypothécaire de la BNP primait les frais de justice postérieurs au jugement d'ouverture, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur la seconde branche du moyen :

Vu l'article L. 621-32, II et III, du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises ; 

Attendu qu'il résulte de ce texte qu'en cas de liquidation judiciaire, les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture sont payées par priorité à toutes les autres créances à l'exception de celles qui sont garanties par le super-privilège des salaires, des frais de justice antérieurs au jugement d'ouverture et de celles qui sont garanties par des sûretés immobilières ou mobilières spéciales et que les créances de salaires postérieures au jugement d'ouverture sont réglées dans l'ordre prévu pour les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture ;

Attendu que pour statuer comme il fait, l'arrêt retient qu'il résulte des articles 2375 et 2376 du code civil que le privilège général sur les immeubles prime les privilèges spéciaux tels que les garanties hypothécaires, que l'article L. 621-32 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises ne règle pas l'ordre entre les créanciers garantis par un privilège général sur les immeubles et les créanciers hypothécaires pour lesquels le droit commun doit s'appliquer et que les privilèges portant sur la totalité de l'actif dont celui des salariés passent avant les sûretés inscrites sur l'immeuble chaque fois qu'il n'y a pas de mobilier suffisant ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher comme elle y était invitée, si les créances de salaires qui ne bénéficiaient pas du super-privilège étaient postérieures au jugement d'ouverture et si, dans ce cas, elles n'étaient pas primées par la créance hypothécaire de la BNP, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a dit que l'ordonnance du juge-commissaire autorisant le paiement provisionnel des créances n'était pas revêtue de l'autorité de la chose jugée et que le jugement d'appel de telles ordonnances n'était pas revêtu de l'autorité de la chose jugée, l'arrêt rendu le 8 juin 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens.