Cass. com., 19 octobre 2010, n° 09-68.377
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Favre
Rapporteur :
M. Rémery
Avocat général :
M. Bonnet
Avocats :
Me Le Prado, SCP Célice, Blancpain et Soltner
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 28 mai 2009), que la Société générale (la banque) a consenti à la société Cuisine centrale, devenue la société Yanka prestige (la société débitrice), un prêt dont le remboursement était garanti par les nantissements du fonds de commerce et du matériel de celle-ci, ainsi que par le cautionnement solidaire de M. X... (la caution) ; que la société débitrice ayant été mise en redressement judiciaire, la créance de la banque au titre du solde du prêt a été admise au passif à titre privilégié par un arrêt du 17 janvier 2008 ; que le plan de cession des actifs de la société débitrice, incluant le fonds de commerce et le matériel nantis, a été arrêté en faveur de la société Alyka (le cessionnaire) par un jugement qui a constaté l'accord de la banque pour limiter à une certaine somme le montant des échéances futures du prêt à la charge du cessionnaire ; que la banque a assigné la caution en exécution de son engagement ;
Attendu que la caution fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à la banque le montant du solde du prêt sous déduction des sommes versées par le cessionnaire, alors, selon le moyen :
1°/ que la caution solidaire du débiteur peut, comme toute personne intéressée, contester l'état des créances déposé au greffe, lequel n'acquiert autorité de la chose jugée à son égard quant à l'existence et au montant de la créance qu'à l'expiration du délai légal de réclamation ; que pour accueillir la demande en paiement de la société générale à l'encontre de M. X..., caution de la société Yanka prestige, l'arrêt relève que la décision de cette cour du 17 janvier 2008 ayant admis la créance de la banque au passif de l'emprunteuse a autorité de chose jugée et que la caution ne peut donc reprendre ses arguments de novation et de remise de dette sans venir à l'encontre d'une décision définitive de sorte que ceux-ci sont irrecevables ; qu'en statuant de la sorte sans constater ni que l'état des créances avait fait l'objet d'un dépôt au greffe et d'une publication au BODACC ni que le délai de recours ouvert à la caution était expiré, la cour d'appel a violé l'article 103 de la loi du 25 janvier 1985, l'article 83 du décret du 27 décembre 1985 ainsi que l'article 1351 du code civil ;
2°/ que dans ses conclusions signifiées le 7 janvier 2009, M. X... reprochait à la Société générale d'avoir accepté de purger sa créance moyennant le paiement d'une somme forfaitaire alors qu'elle bénéficiait, en garantie du prêt en cause, d'un nantissement du fonds de commerce et du matériel et soutenait que la banque, en acceptant la proposition de règlement forfaitaire du cessionnaire, l'avait privé de la possibilité d'être subrogé dans les droits de la banque nantie ; qu'en s'abstenant de répondre à ces écritures d'autant plus pertinentes que le tribunal ayant ordonné la cession de l'emprunteuse avait expressément constaté l'accord donné par la banque nantie à l'absence de transmission de la sûreté garantissant le remboursement du prêt cautionné, de sorte que la perte du nantissement résultant du jugement arrêtant le plan de cession était exclusivement imputable à la banque, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2314 du code civil et de l'article 93, alinéa 3, de la loi du 25 janvier 1985, devenu l'article L. 621-96 du code de commerce ;
Mais attendu, d'une part, qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des conclusions de la caution que celle-ci ait soutenu devant les juges du fond le moyen tiré de l'inopposabilité à son égard de l'admission de la créance de la banque au passif de la société débitrice en raison de la non-expiration du délai de réclamation ; que le moyen est nouveau et mélangé de fait et de droit ;
Attendu, d'autre part, que, selon l'article L. 621-96, alinéa 3, du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, la transmission au cessionnaire de la charge des sûretés garantissant le remboursement d'un crédit s'opère de plein droit, sauf accord entre le cessionnaire et le créancier titulaire d'une sûreté mentionnée par le texte ; qu'un tel accord ne résulte pas du fait que le créancier et le cessionnaire sont convenus du montant dû par ce dernier au titre des échéances futures du prêt garanti par la sûreté ; que, par ce motif de pur droit suggéré par la défense, l'arrêt se trouve justifié ; D'où il suit que le moyen, qui est irrecevable en sa première branche, ne peut être accueilli pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.