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Décisions

Cass. ass. plén., 21 décembre 1990, n° 88-15.744

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Drai

Rapporteur :

M. Lemontey

Avocat général :

M. Dontenwille

Avocats :

Me Goutet, Me Ryziger

TGI Draguignan, du 25 mars 1988

25 mars 1988

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal de grande instance de Draguignan, 25 mars 1988), que la société anonyme Roval, constituée en 1981 et dont le siège est à Lausanne (Suisse), a contesté son assujettissement à la taxe de 3 %, instituée par l'article 990 D du Code général des impôts issu de la loi du 24 décembre 1982, sur la valeur vénale des immeubles situés en France et possédés par des personnes morales dont le siège est hors de France ; que la société Roval a invoqué les dispositions de l'article 26 de la Convention fiscale franco-suisse du 9 septembre 1966 selon lesquelles " les nationaux d'un Etat contractant ne sont soumis, dans l'autre Etat contractant, à aucune imposition ou obligation y relative, qui est autre ou plus lourde que celle à laquelle sont ou pourront être assujettis les nationaux de cet autre Etat se trouvant dans la même situation " ;

Sur la loi applicable :

Attendu que le Directeur général des Impôts soutient que l'article 990 D du Code général des impôts doit être interprété conformément à l'article 105 de la loi du 29 décembre 1989 applicable en la cause en raison de son caractère interprétatif exprès, et qui dispose que " le siège des personnes morales s'entend de leur siège de direction effective, quelle que soit leur nationalité, française ou étrangère " ;

Mais attendu que le rattachement à un Etat, auquel se réfère l'article 26 de la Convention de 1966 pour interdire la discrimination n'est autre que la nationalité, laquelle, pour une société, résulte, en principe, de la localisation de son siège réel, défini comme le siège de la direction effective et présumé par le siège statutaire ; qu'il s'ensuit que l'article 105 de la loi du 29 décembre 1989 qui, au demeurant, ne pouvait rétroactivement préjudicier au contribuable dont les droits ont été reconnus, comme en l'espèce, par une décision de justice passée en force de chose jugée au sens de l'article 500 du nouveau Code de procédure civile, est sans influence sur la solution du litige ;

Sur le moyen unique :

Attendu qu'il est fait grief au jugement d'avoir accueilli l'opposition de la société à l'avis de mise en recouvrement de la taxe alors, selon le pourvoi, que les critères prévus par l'article 990 D du Code général des impôts reposent sur la notion de résidence indépendante de celle de nationalité et que les sociétés qui ont leur siège en Suisse et sont assujetties à la taxe litigieuse ne sont pas dans la même situation que les sociétés à prépondérance immobilière ayant leur siège en France et qui échappent à cette taxe ; qu'ainsi, le Tribunal a violé, par fausse application, l'article 26 de la Convention et, par refus d'application, les articles 990 D et 990 E du Code précité ;

Mais attendu, d'abord, que le critère retenu par l'article 990 D du Code général des impôts, pour délimiter son champ d'application, fondé sur la situation hors de France du siège des sociétés ne se distingue pas de la nationalité telle que définie par l'article 26 de la Convention franco-suisse du 9 septembre 1966 ;

Attendu, ensuite, que des sociétés françaises et suisses possédant des immeubles en France se trouvent dans la même situation au sens de l'article 26 de la Convention franco-suisse, la localisation de leurs sièges en France pour les unes et en Suisse pour les autres, donc leurs nationalités différentes, étant sans influence ;

Attendu, dès lors, que c'est à bon droit que le jugement attaqué a décidé qu'en application des dispositions de l'article 26 de la Convention, qui prévalent sur la loi française en vertu de l'article 55 de la Constitution, la société Roval ne pouvait être soumise à la taxe litigieuse à laquelle échappent les sociétés françaises se trouvant dans la même situation ;

Que le moyen n'est, donc, pas fondé ;

Sur la demande fondée sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile : (sans intérêt) ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.