Cass. com., 20 février 2019, n° 17-14.242
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Avocats :
SCP Piwnica et Molinié, SCP Spinosi et Sureau
Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu les articles L. 210-6 et R. 210-5 du code de commerce ;
Attendu, selon le premier de ces textes, que les personnes qui ont agi au nom d'une société en formation avant qu'elle ait acquis la jouissance de la personnalité morale sont tenues solidairement et indéfiniment des actes ainsi accomplis, à moins que la société, après avoir été régulièrement constituée et immatriculée, ne reprenne les engagements souscrits ; qu'il résulte du second que la reprise de tels engagements ne peut résulter que soit de la signature par les associés des statuts auxquels est annexé un état des actes accomplis pour le compte de la société, soit d'un mandat donné par les associés avant l'immatriculation de la société à l'un ou plusieurs d'entre eux, ou au gérant non associé, et déterminant, dans leur nature ainsi que dans leurs modalités, les engagements à prendre, soit encore, après l'immatriculation, d'une décision prise, sauf clause contraire des statuts, à la majorité ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 15 janvier 1999, M. S... a consenti un bail commercial à Mme V..., agissant pour le compte de la Sarl Discount moto center (la société), en formation ; qu'à la suite de désordres affectant la toiture de l'immeuble, objet du bail, M. S... et la société ont conclu, sous la condition suspensive de la vente de l'immeuble au profit de la SCI Val Reulos, en formation, un protocole d'accord aux termes duquel la société renonçait à demander des dommages-intérêts au bailleur, en contrepartie de l'abandon par ce dernier d'une action en recouvrement des loyers échus ; que se prévalant de la caducité de la promesse de vente, M. S... a fait délivrer, le 19 décembre 2006, à la société, un commandement de payer, visant la clause résolutoire du bail, de payer l'arriéré locatif ; que M. S... a, le 10 juillet 2007, fait délivrer à la société un congé portant refus de renouvellement et d'indemnité d'éviction ; qu'un arrêt de la cour d'appel du 10 février 2010 a constaté l'acquisition de la clause résolutoire au 19 janvier 2007 par l'effet du commandement du 19 décembre 2006 ; que la société a assigné M. S... en nullité du commandement de payer du 19 décembre 2006 et du commandement de quitter les lieux du 10 juillet 2007 ; que la société ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 15 mars 2017 et 21 juin 2017, la société SMJ, nommée liquidateur, a repris l'instance ;
Attendu que pour constater l'acquisition de la clause résolutoire du bail du 15 janvier 1999 à la date du 19 janvier 2007 et ordonner en conséquence à la société de libérer les lieux, l'arrêt retient que la reprise, par la société, des engagements pris par Mme V..., se présentant lors de la conclusion du bail comme la gérante d'une société en cours de formation, se déduit nécessairement des actions en justice que cette société n'a diligentées qu'en sa qualité de titulaire du bail et que la société s'est toujours présentée au cours des différentes instances comme ayant la qualité pour agir en tant que titulaire du bail ; qu'il ajoute que l'absence d'une annexe aux statuts listant tous les engagements passés pour le compte de la société en formation ou d'un mandat figurant dans un acte séparé ou encore d'une assemblée générale décidant après l'immatriculation de la société de reprendre les actes passés au cours de la période de formation de la société ne peut être invoqué car la société a ratifié le bail, par son comportement procédural constant et non équivoque, en qualité de preneur, et par sa participation à la transaction avec le bailleur ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs ;
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 novembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence la cause et les parties, dans l'état où elles trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.