CA Bordeaux, 1re ch. civ., 25 mai 2021, n° 18/03757
BORDEAUX
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Cofidis (SA)
Défendeur :
Selafa Mandataires Judiciaires Associes (ès qual.)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Potee
Conseillers :
M. Braud, Mme Vallee
Avocat :
Selarl Lexavoue Bordeaux
EXPOSE DU LITIGE
Jean-Claude L. a signé le 21 décembre 2015 un bon de commande établi par la société R & V Développement exerçant sous l'enseigne France Éco Rénov ' Myfirstappli, pour la fourniture et la pose d'une installation photovoltaïque sur sa maison d'habitation sise [...], pour un montant de 21 500 euros.
Le même jour, pour financer cette prestation, il a souscrit un emprunt auprès de la société Sofemo, remboursable en 120 mensualités de 249,52 euros avec assurance, au taux effectif global de 5,96 %.
Par exploit en date du 8 février 2017, Jean-Claude L. a assigné devant le tribunal d'instance de Bordeaux la société R & V Développement et la société Cofidis venant aux droits de la société Groupe Sofemo Financement.
Jean-Claude L. n'ayant remboursé aucune échéance, la société Cofidis a prononcé la déchéance du terme le 28 juin 2017.
Par jugement réputé contradictoire en date du 19 mars 2018, le tribunal a :
- Prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 21 décembre 2015 entre la société R & V Développement et Jean-Claude L. portant sur l'installation de panneaux photovoltaïques ;
- Prononcé la nullité du contrat de prêt affecté consenti le 21 décembre 2015 par la société Sofemo à Jean-Claude L. ;
- Condamné la société Cofidis venant aux droits de la société Groupe Sofemo Financement à restituer à Jean-Claude L. les sommes versées par lui jusqu'à ce jour correspondant aux échéances de remboursement du prêt payées ;
- Dit n'y avoir lieu à restitution du capital prêté à la société Cofidis par Jean-Claude L. ;
- Débouté la société Cofidis de l'ensemble de ses demandes contre Jean-Claude L. ;
- Condamné la société R & V Développement à verser à la société Cofidis la somme de 21 500 euros au titre de la perte du capital prêté ;
- Débouté Jean-Claude L. de sa demande en dommages et intérêts contre la société R & V Développement ;
- Débouté la société Cofidis de sa demande de dommages et intérêts contre la société R & V Développement ;
- Condamné in solidum la société Cofidis et la société R & V Développement à verser à Jean-Claude L. la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Débouté la société Cofidis de sa demande en payement émise de ce chef ;
- Ordonné l'exécution provisoire du jugement ;
- Condamné in solidum la société Cofidis et la société R & V Développement aux dépens de l'instance.
Par déclaration du 27 juin 2018, la société Cofidis a interjeté appel du jugement.
Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 26 mars 2019, la société anonyme Cofidis, dont l'une des enseignes est Sofemo Financement, demande à la cour de :
- Voir dire et juger Jean-Claude L. irrecevable et subsidiairement mal fondé en ses demandes, fins et conclusions et l'en débouter ;
- Voir dire et juger que l'appel formé par la société Cofidis est recevable et bien fondé ;
Y faisant droit,
- Voir dire et juger que les actes accomplis et le jugement entrepris, obtenu après l'interruption de l'instance, est réputé non avenu ;
- Voir constater dans ce cas de figure qu'à partir du moment où il n'y a pas de nullité du contrat de vente, il ne peut pas y avoir non plus de nullité du contrat de crédit ;
- Voir dire et juger que seules les dispositions du code de commerce sont applicables et en aucun cas les dispositions du code de la consommation ;
- Voir dire et juger que dès lors, Jean-Claude L. se devait d'être avisé et qu'il a traité d'égal à égal avec ses co contractants et qu'il n'a aucune protection particulière à revendiquer et que de surcroit, il se devait d'être avisé ;
- Voir subsidiairement et pour le cas où la cour viendrait à statuer au fond, dire et juger que les demandes de nullité tant du contrat de vente que du contrat de crédit sont irrecevables et en tout cas mal fondées observation faite que Jean-Claude L. doit respecter le principe du contradictoire à l'égard du vendeur ou de son liquidateur dans le respect du principe du contradictoire et notamment de l'article 14 du code de procédure civile ;
- Voir en tout cas débouter purement et simplement Jean-Claude L. de toutes ses demandes, fins, conclusions et autres prétentions ;
- Voir dire et juger n'y avoir lieu à nullité ou résolution des conventions pour quelque cause que ce soit ;
- Voir condamner Jean-Claude L. à payer à la société Cofidis avec intérêts au taux contractuel de 5,68 % l'an à compter du 31 juillet 2017 la somme de 25 249,77 euros ;
- Voir subsidiairement et pour le cas où par extraordinaire, la cour viendrait à prononcer la nullité ou la résolution du contrat de crédit par suite de la nullité ou la résolution du contrat de vente ou pour toute autre cause, condamner alors Jean-Claude L. à payer à la société Cofidis avec intérêts de droit à compter du jugement entrepris, le montant du capital prêté soit la somme de 21 500 euros ;
- Voir en outre et quel que soit le cas de figure condamner Jean-Claude L. à payer à la société Cofidis avec intérêts de droit à compter de l'arrêt à intervenir :
- Dommages et intérêts, procédure abusive et vexatoire..............3 000,00 euros
- Indemnité article 700 du C. P. C................................................2 500,00 euros
- Voir ordonner la capitalisation annuelle des intérêts dans le cadre de l'anatocisme ;
- Voir condamner Jean-Claude L. aux dépens de première instance et d'appel et dire que l'avocat soussigné pourra se prévaloir des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 13 juin 2019, Jean-Claude L. demande à la cour de :
À titre principal :
- Confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
- Débouter la société Cofidis venant aux droits de la société Groupe Sofemo Financement de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
- Condamner la société Cofidis venant aux droits de la société Groupe Sofemo Financement à verser à Jean-Claude L. la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- La condamner aux entiers dépens ;
À titre subsidiaire
Si par extraordinaire la cour ne retenait pas la nullité des contrats d'achat et de crédit affecté
- Débouter la société Cofidis venant aux droits de la société Groupe Sofemo Financement de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
- Prononcer la résolution judiciaire du contrat R & V Développement pour inexécution contractuelle ;
- Prononcer la résolution judiciaire de plein droit du contrat de prêt souscrit auprès de la société Cofidis venant aux droits de la société Groupe Sofemo Financement ;
- Dire et juger que la société Cofidis venant aux droits de la société Groupe Sofemo Financement ne pourra prétendre à quelque restitution des fonds prêtés que ce soit en conséquence de la faute commise à l'encontre du requérant ;
- Condamner la société Cofidis venant aux droits de la société Groupe Sofemo Financement à rembourser les échéances du prêt d'ores et déjà acquittées par le requérant et s'élevant à ce jour à la somme de 1 927,24 euros (somme à parfaire) ;
- Condamner la société Cofidis venant aux droits de la société Groupe Sofemo Financement à verser à Jean-Claude L. la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- La condamner aux entiers dépens ;
À titre infiniment subsidiaire :
- Accorder les plus larges délais de paiement à Jean-Claude L. ;
- Ordonner la déchéance de la Banque de son droit à solliciter la condamnation de Jean-Claude L. au paiement des intérêts.
La déclaration d'appel et les premières conclusions de l'appelante ont été signifiées à personne le 7 août 2018 et le 28 septembre 2018 à la société d'exercice libéral à forme anonyme Mandataires judiciaires associés « M. J. A. », en qualité de liquidateur judiciaire de la société R & V Développement, qui n'a pas constitué avocat.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 mars 2021 et l'audience fixée au 29 mars 2021.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur le caractère non avenu du jugement :
Aux termes de l'article 369 du code de procédure civile, l'instance est interrompue par l'effet du jugement qui prononce la sauvegarde, le redressement judiciaire ou la liquidation judiciaire dans les causes où il emporte assistance ou dessaisissement du débiteur.
Aux termes de l'article 372 du même code, les actes accomplis et les jugements même passés en force de chose jugée, obtenus après l'interruption de l'instance, sont réputés non avenus à moins qu'ils ne soient expressément ou tacitement confirmés par la partie au profit de laquelle l'interruption est prévue.
Sur ce fondement, l'appelante se prévaut de l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société R & V Développement par jugement du tribunal de commerce de Paris en date du 17 mai 2017, pour soutenir que le jugement querellé serait réputé non avenu.
L'article 372 ne peut toutefois être invoqué que par la partie au bénéfice de laquelle l'instance a été interrompue. Le moyen soulevé par la société Cofidis ne peut donc prospérer.
Sur le droit applicable :
Le débat ne porte pas sur la compétence matérielle de la juridiction, puisque la cour est en tout état de cause juridiction d'appel du tribunal qui a statué, mais sur la qualification civile ou commerciale du contrat.
L'appelante soutient que dès lors que la production électrique de l'installation était destinée à la revente, il s'agit d'un acte de commerce par nature de sorte que, peu important la qualité de non-commerçant de Jean-Claude L., le régime applicable à l'ensemble de l'opération est exclusif des dispositions du code de la consommation.
Aux termes de l'article L. 311-1, secundo, du code de la consommation dans sa rédaction applicable à la cause, au sens du chapitre relatif au crédit à la consommation, est considérée comme emprunteur ou consommateur, toute personne physique qui est en relation avec un prêteur, dans le cadre d'une opération de crédit réalisée ou envisagée dans un but étranger à son activité commerciale ou professionnelle.
Aux termes de l'article L. 110-1, primo, du code de commerce, la loi répute actes de commerce tout achat de biens meubles pour les revendre, soit en nature, soit après les avoir travaillés et mis en œuvre.
Il apparaît en l'espèce que le matériel acheté était en premier lieu destiné à être installé au domicile personnel de Jean-Claude L., qui n'a pas la qualité de commerçant puisqu'il est en retraite. Le contrat de vente comme le contrat de prêt accessoire ont été consentis en visant les dispositions du code de la consommation. En effet, les conditions générales du contrat de vente rappellent de manière expresse les dispositions dudit code applicables à la date du contrat et relatives au démarchage à domicile. Aussi bien, le contrat comprend le formulaire de rétractation prévu par ces dispositions, et contient une clause par laquelle le client reconnaît avoir pris connaissance desdites dispositions légales. Le contrat de prêt est conclu dans les termes d'un crédit à la consommation. Il comporte certes une mention en cas de crédit non soumis au code de la consommation, mais celle-ci n'est pas applicable en l'espèce, ce au regard des éléments produits par la banque. En effet, la société Cofidis se prévaut d'une fiche de dialogue, d'une fiche d'information précontractuelle contenant les informations européennes normalisées en matière de crédit aux consommateurs, et d'une consultation du fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers, formalités relevant du crédit à la consommation, de sorte qu'il y avait à tout le moins soumission volontaire à ces dispositions.
Il apparaît en conséquence que le contrat principal a été conclu entre un professionnel et un particulier consommateur, et obéit aux règles du code de la consommation sur le démarchage à domicile.
Le démarchage à domicile est ici établi puisque la société R & V Développement avait son siège à Paris, et que le contrat a été conclu à Mérignac, domicile de Jean-Claude L.. Aussi bien l'acte sous seing privé rappelle-t-il la faculté de renonciation en citant les textes applicables au démarchage à domicile.
Le prêt, accessoire du contrat principal, est un contrat de crédit affecté, consenti en vue de financer des dépenses relatives à l'acquisition d'une installation photovoltaïque. Le contrat de crédit ne comporte par ailleurs aucune disposition stipulant de manière expresse et dépourvue d'ambiguïté la destination professionnelle du prêt. Il relève donc également du code de la consommation.
Le moyen développé par la banque tendant à écarter dans le présent litige les dispositions du code de la consommation, n'est donc pas fondé.
Sur la validité du contrat de vente :
Le contrat principal conclu entre la société R & V Développement et Jean-Claude L. l'a été à l'occasion d'un démarchage à domicile. Il relève par suite du régime des articles L. 121-17 et suivants du code de la consommation dans leur rédaction applicable à la cause.
L'article L. 121-17, paragraphes I et III, dispose :
« I.-Préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :
« 1o Les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ;
« 2o Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d'exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu'il contient sont fixées par décret en Conseil d'Etat ;
« 3o Le cas échéant, le fait que le consommateur supporte les frais de renvoi du bien en cas de rétractation et, pour les contrats à distance, le coût de renvoi du bien lorsque celui-ci, en raison de sa nature, ne peut normalement être renvoyé par la poste ;
« 4o L'information sur l'obligation du consommateur de payer des frais lorsque celui-ci exerce son droit de rétractation d'un contrat de prestation de services, de distribution d'eau, de fourniture de gaz ou d'électricité et d'abonnement à un réseau de chauffage urbain dont il a demandé expressément l'exécution avant la fin du délai de rétractation ; ces frais sont calculés selon les modalités fixées à l'article L. 121-21-5 ;
« 5o Lorsque le droit de rétractation ne peut être exercé en application de l'article L. 121-21-8, l'information selon laquelle le consommateur ne bénéficie pas de ce droit ou, le cas échéant, les circonstances dans lesquelles le consommateur perd son droit de rétractation ;
« 6o Les informations relatives aux coordonnées du professionnel, le cas échéant aux coûts de l'utilisation de la technique de communication à distance, à l'existence de codes de bonne conduite, le cas échéant aux cautions et garanties, aux modalités de résiliation, aux modes de règlement des litiges et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d'État. [...]
« III.-La charge de la preuve concernant le respect des obligations d'information mentionnées à la présente sous-section pèse sur le professionnel. »
L'article L. 121-18 dispose : « Dans le cas d'un contrat conclu hors établissement, le professionnel fournit au consommateur, sur papier ou, sous réserve de l'accord du consommateur, sur un autre support durable, les informations prévues au I de l'article L. 121-17. Ces informations sont rédigées de manière lisible et compréhensible. »
L'article L. 121-18-1, alinéas 1 et 3, dispose :
« Le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l'accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l'engagement exprès des parties. Ce contrat comprend, à peine de nullité, toutes les informations mentionnées au I de l'article L. 121-17. [...]
« Le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au secundo du I de l'article L. 121-17. »
L'article L. 111-1, alinéa premier, du même code dispose :
« Avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :
« 1o Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;
« 2o Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 113-3 et L. 113-3-1 ;
« 3o En l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;
« 4o Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte, ainsi que, s'il y a lieu, celles relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l'existence et aux modalités de mise en œuvre des garanties et aux autres conditions contractuelles. La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés par décret en Conseil d'État. »
En l'espèce, les biens offerts et les services proposés sont désignés comme suit dans le bon de commande :
« Photovoltaïque. Production d'électricité. Étude, fourniture, installation comprise.
« Puissance 3000 Wc composé de 12 modules solaires photovoltaïques de type ... Puissance unitaire : 250 Wc certifiés NF EN 61215 classe II.
« Marque ... Modèle : ...
« Câblage, protections électriques, boîtier AC & DC, interrupteur/sectionneur, parafoudre, DDR 30M, coupe-circuit solaires 4 mm², démarches administratives, déclaration préalable de travaux (demande d'autorisation à la mairie), demande É. R. D. F. (Électricité Réseau Distribution France), demande de raccordement, élaboration de la demande de contrat d'achat É. D. F. A. O. A. (Agence Obligation d'Achat) et frais de raccordement pris en charge par France Éco Rénov ».
Le tribunal a exactement jugé que les caractéristiques des biens offerts et des services proposés ne sont ainsi pas désignés de manière précise. En particulier, ni le type, ni la marque, ni le modèle des panneaux ne sont mentionnés.
Seul est indiqué un prix global, sans distinguer le prix des biens vendus (ensemble photovoltaïque) et celui des services fournis (installation, démarches administratives).
Aucun renseignement n'est fourni sur la date ou le délai de livraison des biens ou d'exécution des services. L'article 4 Livraison ' Délais des conditions générales de vente figurant au verso du bon de commande reste évasif ; imprimé en caractères minuscules, il est au demeurant illisible (pièce no 4 de l'intimé).
Par ailleurs, l'article L. 121-21, alinéa premier, du code de la consommation dispose :
« Le consommateur dispose d'un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d'un contrat conclu à distance, à la suite d'un démarchage téléphonique ou hors établissement, sans avoir à motiver sa décision ni à supporter d'autres coûts que ceux prévus aux articles L. 121-21-3 à L. 121-21-5. Toute clause par laquelle le consommateur abandonne son droit de rétractation est nulle. »
En contradiction avec ces dispositions, et avec les mentions du bordereau de rétractation, les conditions générales du bon de commande rappelant la législation applicable mentionnent un délai de rétractation de sept jours.
Chacune de ces irrégularités est sanctionnée par la nullité du contrat. L'exécution volontaire du contrat ne peut en valoir confirmation qu'à la double condition que l'intéressé ait la connaissance précise du vice affectant l'acte et que soit caractérisée sa volonté non équivoque de couvrir ce vice. Il appartient à la société qui l'allègue de le démontrer, cela ne se présumant pas. Aucun élément ne permet d'envisager une volonté de ratification du contrat par Jean-Claude L., alors que la connaissance des vices de l'acte ne peut procéder de la reproduction aux conditions générales des dispositions légales du code de la consommation dans une version qui n'était plus en vigueur.
En outre, le fait d'attester la livraison le 25 février 2016, de conclure et d'exécuter un autre contrat (emprunt) ne suffit pas à établir la volonté de couvrir les irrégularités affectant le contrat de vente et services, alors que Jean-Claude L. a fait constater le 30 mai 2016 par Éric P. que l'installation n'était pas raccordée au réseau électrique, faute de fourniture d'un câble de liaison et faute de pose des compteurs d'électricité (pièce no 10 de l'intimé). Si la cour n'entend pas se fonder exclusivement sur les conclusions techniques de ce rapport d'expertise privée non contradictoire, elle ne peut cependant refuser d'examiner cette pièce régulièrement versée aux débats et soumise à la discussion contradictoire des parties. Les simples constatations matérielles qu'elle contient peuvent être reçues à titre de témoignage, étant relevé que l'appelante s'en prévaut également au besoin (pièce no 16 de l'appelante ; pages 4 et 7 de ses conclusions).
Sans qu'il y ait lieu d'examiner l'annulation du contrat pour dol, ou sa résolution pour inexécution et d'entrer davantage dans le détail de l'argumentation des parties, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat de vente conclu entre la société R & V Développement et Jean-Claude L..
Sur les conséquences de la nullité du contrat principal sur le contrat de prêt :
En application de l'article L. 311-32, alinéa premier, du code de la consommation dans sa rédaction applicable à la cause, le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé. Ces dispositions trouvent à s'appliquer puisque, ainsi qu'il a été jugé ci-dessus, le contrat principal n'est pas commercial.
La nullité du contrat de prêt emporte en principe remise en l'état antérieur et obligation pour l'emprunteur de restituer le capital emprunté sous la seule déduction des échéances payées, sauf faute du prêteur le privant de sa créance de restitution.
En l'espèce, Jean-Claude L. invoque plusieurs fautes du prêteur. La société Cofidis se prévaut pour sa part de l'attestation de livraison.
Or, il ne se déduit pas de cette seule attestation que la société Cofidis ait pu débloquer les fonds sans faute de sa part. En effet, le contrat de vente était affecté de plusieurs irrégularités sanctionnées par la nullité comme il a été relevé ci-dessus. Or, le prêteur qui verse les fonds sans procéder préalablement, auprès du vendeur et de l'emprunteur, aux vérifications qui lui auraient permis de constater que le contrat de démarchage à domicile était affecté d'une cause de nullité, est privé de sa créance de restitution du capital emprunté.
La société Cofidis oppose néanmoins que Jean-Claude L. ne subit pas de préjudice puisqu'il ressort de l'attestation de livraison qu'il dispose d'une installation photovoltaïque, de sorte qu'il ne peut être exonéré de l'obligation de rembourser le capital prêté.
Le prêteur qui a versé les fonds sans s'être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut être privé en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l'emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute (Civ. 1re, 25 nov. 2020, no 19-14.908).
Si la pièce no 10 de l'intimé peut être retenue en ce qu'elle contient la constatation par un tiers du défaut de raccordement de l'installation à la date du 30 mai 2016, elle ne saurait à elle seule faire foi du préjudice allégué par Jean-Claude L., comme l'a justement considéré le premier juge en considération du caractère non contradictoire de cette expertise privée. Ne peuvent ainsi être tenus pour établis les défauts de conformité dénoncés par Jean-Claude L. (défaut d'étanchéité, mauvaise position de l'onduleur), qui empêcheraient de raccorder l'installation au réseau électrique. Or, la société Cofidis fait valoir sans être contredite que le coût du raccordement d'une installation de production d'électricité photovoltaïque devant permettre de vendre de l'électricité à Électricité de France est désormais forfaitaire. Au regard du préjudice subi par l'emprunteur en lien avec la faute de la banque, il convient de le condamner à s'acquitter de partie de la créance de restitution du prêteur, à concurrence de 20 000 euros.
Conformément à la demande de la société Cofidis, cette somme portera intérêt au taux légal à compter du jugement entrepris, et la capitalisation annuelle des intérêts sera ordonnée dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil.
Réciproquement, la société Cofidis est tenue de restituer à Jean-Claude L. l'ensemble des sommes versées depuis l'origine du contrat.
Aux termes de l'article 1244-1 ancien, alinéa premier, du code civil, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, le juge peut, dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues.
Jean-Claude L. ne justifiant pas de sa situation, il n'y pas lieu de lui octroyer de délai de payement.
Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive :
La demande de dommages et intérêts pour procédure abusive présentée par l'appelante n'est soutenue par aucun argument ou moyen. Elle sera rejetée.
Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Aux termes de l'article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. Les parties obtenant partiellement gain de cause en l'espèce, chacune conservera la charge des dépens par elle exposés.
En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Sur ce fondement, il n'y a pas lieu à condamnation.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Déboute la société Cofidis de sa demande tendant à déclarer non avenu le jugement entrepris ;
Infirme partiellement le jugement en ce qu'il :
- dit n'y avoir lieu à restitution du capital prêté à la société Cofidis par Jean-Claude L. ;
- déboute la société Cofidis de l'ensemble de ses demandes contre Jean-Claude L. ;
Statuant à nouveau dans cette limite,
Condamne Jean-Claude L. à payer à la société Cofidis la somme de 20 000 euros, qui portera intérêt au taux légal à partir du 19 mars 2018 ;
Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil ;
Confirme toutes les autres dispositions non contraires ;
Y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu à condamnation au titre des frais irrépétibles d'appel ;
Laisse à la charge de chaque partie les dépens d'appel par elle exposés ;
Rejette toute autre demande plus ample ou contraire.