Cass. com., 27 mai 2021, n° 18-17.760
COUR DE CASSATION
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Générale Biscuit Glico France (SA), Mondelez France (SAS), Mondelez Europe GmbH
Défendeur :
Griesson de Beukelaer GmbH & Co.KG, Solinest (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Rapporteur :
M. Mollard
Avocats :
SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, SCP Alain Bénabent
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 9 mars 2018), la société Générale biscuit Glico France (la société Glico) est titulaire de la marque tridimensionnelle française constituée de l'apparence du biscuit au chocolat dénommé « Mikado », déposée le 19 octobre 2005 sous le n 3 386 825 pour des produits en classe 30, ainsi que de la marque tridimensionnelle française constituée de l'apparence du biscuit au chocolat dénommé « Mikado King Choco », déposée le 29 mars 2010 sous le n 3 725 291 pour des produits en classe 30.
2. La société de droit suisse Mondelez Europe et la société Mondelez France (les sociétés Mondelez) sont les licenciées et sous-licenciées de ces marques.
3. La société de droit allemand Griesson de Beukelaer (la société Griesson) est titulaire des marques semi-figuratives françaises n 3 950 482 et 3 950 493 représentant les emballages sous lesquels sont commercialisés les biscuits au chocolat dénommés « Choc'Olé », déposées le 2 octobre 2012 pour des produits en classe 30. Les biscuits Choc'Olé sont distribués en France par la société Solinest.
4. Considérant que la commercialisation des biscuits Choc'Olé portait atteinte à leurs droits sur les marques tridimensionnelles n 3 386 825 et n 3 725 291, dont elles invoquent la renommée, la société Glico et les sociétés Mondelez ont assigné les sociétés Griesson et Solinest en contrefaçon de la marque tridimensionnelle n 3 386 825, atteinte à la renommée de cette marque et à celle de la marque tridimensionnelle3 456 n 3 725 291 et concurrence déloyale et parasitaire, ainsi qu'en annulation des marques semi-figuratives n 3 950 482 et 3 950 493.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en ses deuxième et troisième branches, et le quatrième moyen, ci-après annexés
5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
6. La société Glico et les sociétés Mondelez font grief à l'arrêt de les débouter de l'intégralité de leurs demandes en contrefaçon de la marque n 3 386 825, alors « que l'existence d'un risque de confusion dans l'esprit du public doit être appréciée globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d'espèce ; que l'existence d'une "famille" ou "série" de marques constitue l'un des facteurs pertinents dont il convient de tenir compte aux fins de l'appréciation du risque de confusion ; qu'en présence d'une famille ou série de marques, un tel risque résulte du fait que le consommateur peut se méprendre sur la provenance ou l'origine des produits ou services revêtus du signe incriminé et estimer, à tort, que celui-ci fait partie de cette famille ou série ; qu'en affirmant que "si l'appartenance à une famille de marques est susceptible de renforcer le risque de confusion entre les signes, encore faut-il que celui-ci soit caractérisé", quand il lui appartenait précisément de rechercher si, du fait de l'existence de la famille de marques tridimensionnelles correspondant à la gamme des biscuits "Mikado" invoquée par les sociétés Glico et Mondelez, il n'existait pas un risque que le public pertinent puisse croire que les biscuits incriminés étaient une déclinaison des biscuits "Mikado" ou, à tout le moins, provenaient d'une entreprise économiquement liée à ces sociétés, la cour d'appel, qui a ainsi écarté le risque de confusion sans prendre en considération tous les facteurs pertinents du cas d'espèce, a violé l'article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 713-3, b), du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n 2019-1169 du 13 novembre 2019 :
7. Aux termes de ce texte, sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, s'il peut en résulter un risque de confusion dans l'esprit du public, l'imitation d'une marque et l'usage d'une marque imitée, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l'enregistrement.
8. Lorsque la marque et le signe en conflit présentent une certaine similitude, l'appartenance de la marque à une famille de marques est un élément dont il convient de tenir compte aux fins de l'appréciation du risque de confusion. Dans ce cas, en effet, le risque de confusion résulte du fait que le consommateur peut se méprendre sur la provenance ou l'origine des produits ou services couverts par le signe litigieux et estimer, à tort, que ce dernier fait partie de cette famille de marques.
9. Pour rejeter la demande en contrefaçon de la marque tridimensionnelle n 3 386 825, l'arrêt, après avoir comparé cette marque et l'apparence du biscuit Choc'Olé, retient que, nonobstant l'identité des produits concernés, la faible similitude entre la marque et le signe en cause, pris dans leur ensemble, exclut tout risque de confusion pour le consommateur d'attention moyenne. Il énonce que si l'appartenance à une famille de marques est susceptible de renforcer le risque de confusion, encore faut-il que celui-ci soit caractérisé.
10. En statuant ainsi, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la marque prétendument contrefaite n'appartenait pas à une famille de marques et, à supposer que tel soit le cas, sans prendre en compte cette circonstance aux fins de l'appréciation du risque de confusion, alors qu'elle avait constaté une certaine similitude, fût-elle faible, entre la marque et le signe, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.
Sur le deuxième moyen, pris en ses première, deuxième, troisième, huitième et neuvième branches
Enoncé du moyen
11. La société Glico et les sociétés Mondelez font grief à l'arrêt de les déclarer mal fondées en toutes leurs demandes fondées sur une atteinte à la renommée des marques n 3 386 825 et n 3 725 291, alors : « 1°) qu'afin d'apprécier si une marque est renommée, le juge doit prendre en considération tous les éléments pertinents de la cause, à savoir notamment la part de marché détenue par la marque, l'intensité, l'étendue géographique et la durée de son usage, ainsi que l'importance des investissements réalisés par l'entreprise pour la promouvoir ; qu'une marque tridimensionnelle constituée par l'apparence d'un produit peut acquérir, en elle-même, une renommée, même si elle est systématiquement utilisée conjointement avec d'autres marques verbales ou figuratives, et même si elle5 456 n'est pas exploitée sous une forme strictement identique à celle figurant dans son enregistrement ; que constituent des éléments pertinents pour l'appréciation de la renommée d'une marque tridimensionnelle les preuves montrant la représentation de celle-ci sur des emballages de produits ou des supports publicitaires, fût-ce conjointement avec d'autres marques verbales ou semi-figuratives ; qu'en l'espèce, les sociétés Glico et Mondelez rappelaient que la marque tridimensionnelle n 3 386 825 protégeait l'apparence du biscuit "Mikado" classique et produisaient des éléments de preuve montrant la représentation de ce biscuit sur les emballages des produits "Mikado" et dans des campagnes publicitaires ; qu'en affirmant que l'exploitation ancienne, depuis 1982, "de la marque figurative (sic) représentant le biscuit Mikado", invoquée par les sociétés Glico et Mondelez, ne serait pas de nature à établir l'ancienneté de l'exploitation de la marque tridimensionnelle n 3 386 825 mais révélerait que les appelantes "n'ont de cesse d'entretenir la confusion entre cette marque et le biscuit ‘Mikado' et/ou les marques verbales ou semi-figuratives Mikado ou même Lu ou Glico, étrangères au présent litige", sans justifier en quoi les preuves invoquées par les sociétés Glico et Mondelez, relatives à l'exploitation de la représentation du biscuit "Mikado", tant sur les emballages des produits "Mikado" que dans des campagnes publicitaires, ne seraient pas pertinentes pour l'appréciation de la renommée de la marque tridimensionnelle n 3 386 825 représentant la forme d'un biscuit, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 713-5 du code de la propriété intellectuelle ; 2°) que le titulaire d'une marque enregistrée peut, aux fins d'établir la renommée de celle-ci, se prévaloir d'éléments prouvant sa renommée sous une forme qui n'est pas strictement identique à celle sous laquelle celle-ci a été enregistrée, dès lors que n'en est pas altéré le caractère distinctif ; qu'en relevant qu'avant 2005, les paquets "Mikado" ne laissaient voir que partiellement la forme des biscuits, sans constater que les signes ainsi utilisés sur les paquets de biscuits différeraient de cette marque par des éléments de nature à altérer le caractère distinctif de celle-ci ou que confrontés aux signes litigieux, le public serait conduit à penser qu'il ne s'agit pas du même produit que celui dont l'apparence est couverte par la marque tridimensionnelle n 3 386 825, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 713-5 du code de la propriété intellectuelle ; 3°) que le titulaire d'une marque tridimensionnelle peut, aux fins d'établir la renommée de celle-ci, se prévaloir d'éléments prouvant sa renommée sous une forme qui n'est pas strictement identique à celle sous laquelle celle-ci a été enregistrée, dès lors que n'en est pas altéré le caractère distinctif ; qu'en relevant que depuis 2005, le signe figurant sur les emballages n'était pas la reproduction de la marque tridimensionnelle n 3 386 825, sans indiquer en quoi le signe apposé sur les paquets différerait de la marque enregistrée, ni constater que ces différences seraient de nature à altérer le caractère distinctif de cette marque et qu'elles seraient telles qu'elles feraient obstacle6 456 à ce que l'usage de ce signe puisse constituer un élément pertinent pour l'appréciation de la renommée de la marque tridimensionnelle n 3 386 825, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 713-5 du code de la propriété intellectuelle ;
8 / qu'afin d'apprécier si une marque est renommée, le juge doit prendre en considération tous les éléments pertinents de la cause ; qu'en l'espèce, les sociétés Glico et Mondelez faisaient valoir que la marque tridimensionnelle n 3 386 825 protégeait l'apparence du biscuit "Mikado" classique ; qu'en se contentant d'affirmer que "l'étude réalisée en 2004 sur ‘le biscuit Mikado classique' et non à partir de la marque tridimensionnelle n 3 386 825, n'est pas plus pertinente pour démontrer la notoriété de cette marque", sans justifier en quoi la circonstance que cette étude porte sur le biscuit Mikado classique serait de nature à priver celle-ci de toute pertinence pour l'appréciation de la renommée de la marque tridimensionnelle n 3 386 825, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 713-5 du code de la propriété intellectuelle ;
9 / que le titulaire d'une marque tridimensionnelle peut, aux fins d'établir la renommée de celle-ci, se prévaloir d'éléments prouvant sa renommée sous une forme qui n'est pas strictement identique à celle sous laquelle celle-ci a été enregistrée ; qu'en relevant que "les mêmes motifs s'appliquent à la marque n 3 725 291 s'agissant des conditions d'exploitation sur les paquets de biscuits Mikado sous une forme qui n'est pas celle qui fait l'objet de la marque tridimensionnelle considérée", sans indiquer en quoi le signe apposé sur les paquets litigieux différerait de la marque enregistrée, ni en quoi ces différences seraient telles qu'elles feraient obstacle à ce que l'usage de ce signe puisse constituer un élément pertinent pour l'appréciation de la renommée de la marque tridimensionnelle n 3 725 291 auprès du public concerné, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 713-5 du code de la propriété intellectuelle. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 713-5 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n 2019-1169 du 13 novembre 2019, tel qu'interprété à la lumière de l'article 5, paragraphe 2, de la directive 2008/95/CE du 22 octobre 2008 rapprochant les législations des Etats membres sur les marques :
12. Il résulte de cet article que la reproduction ou l'imitation d'une marque jouissant d'une renommée pour des produits ou services identiques, similaires ou non similaires à ceux désignés dans l'enregistrement, engage la responsabilité civile de son auteur si elle est de nature à porter préjudice au propriétaire de la marque ou si cette reproduction ou imitation constitue une exploitation injustifiée de cette dernière.
13. Pour apprécier si une marque est renommée, le juge doit prendre en considération tous les éléments pertinents de la cause, à savoir, notamment, la part de marché détenue par la marque, l'intensité, l'étendue géographique et la durée de son usage, ainsi que l'importance des investissements réalisés par l'entreprise pour la promouvoir. Doit être notamment pris en compte l'usage de la marque sous une forme qui diffère par des éléments n'altérant pas son caractère distinctif dans la forme sous laquelle celle-ci a été enregistrée, la représentation bidimensionnelle d'une marque tridimensionnelle pouvant notamment faciliter la connaissance de la marque par le public pertinent lorsqu'elle permet de percevoir les éléments essentiels de la forme tridimensionnelle du produit.
14. Pour rejeter la demande des sociétés Glico et Mondelez fondées sur l'atteinte à la renommée des marques tridimensionnelles n 3 386 825 et n 3 725 291, l'arrêt retient, d'une part, que l'exploitation ancienne, depuis 1982, de la marque figurative représentant le biscuit Mikado n'est pas de nature à établir l'ancienneté de l'exploitation de la marque tridimensionnelle n 3 386 825 mais, au contraire, révèle que les sociétés Glico et Mondelez n'ont de cesse d'entretenir la confusion entre cette marque et le biscuit Mikado et/ou les marques verbales ou semi-figuratives « Mikado » ou même « Lu » ou « Glico », étrangères au présent litige, qu'en tout état de cause, avant 2005, les paquets de biscuits Mikado ne laissaient voir que partiellement la forme des biscuits et que, depuis 2005, le signe reproduit tant sur le devant des paquets que sur sa tranche, outre qu'il sert plutôt à illustrer le contenu du paquet de biscuits, n'est pas la reproduction de la marque en cause, d'autre part, que les mêmes motifs s'appliquent à la marque n 3 725 291 s'agissant de ses conditions d'exploitation sur les paquets de biscuits Mikado sous une forme qui n'est pas celle qui fait l'objet de la marque tridimensionnelle.
15. L'arrêt retient encore que l'étude réalisée en 2004 sur le biscuit Mikado « classique », et non à partir de la marque tridimensionnelle n 3 386 825, n'est pas plus pertinente pour démontrer la notoriété de cette marque.
16. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à exclure l'usage, avant et depuis leur enregistrement, des marques tridimensionnelles n 3 386 825 et n 3 725 291 sous une forme qui diffère par des éléments n'altérant pas leur caractère distinctif dans la forme sous laquelle celles-ci ont été enregistrées et, par conséquent, impropres à écarter cet usage comme insusceptible de rapporter la preuve de la renommée des mêmes marques, et sans justifier en quoi l'étude réalisée sur le biscuit Mikado était dépourvue de pertinence aux fins d'apprécier la renommée de la marque n 3 386 825 constituée de l'apparence tridimensionnelle de ce biscuit, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.
Sur ce moyen, pris en ses quatrième et cinquième branches
Enoncé du moyen
17. La société Glico et les sociétés Mondelez font le même grief à l'arrêt, alors :
« 4°) que dans leurs conclusions d'appel, les sociétés Glico et Mondelez faisaient valoir que les biscuits "Mikado" font l'objet, depuis au moins 1984, d'importantes campagnes de communication sur des supports (affiches et films publicitaires, communication digitale) sur lesquels la marque tridimensionnelle n 3 386 825 est représentée et mise en exergue ; qu'elles faisaient, en outre, état de l'importance du budget publicitaire consacré à la promotion des biscuits "Mikado" ; qu'en affirmant que les campagnes de communication et budgets publicitaires dont il est fait état, "lorsqu'ils se rapportent [à] la marque tridimensionnelle considérée et non à la marque semi-figurative Mikado", démontreraient "tout au plus le succès commercial du produit mais nullement la renommée de la marque", sans préciser en quoi le succès commercial du biscuit "Mikado", attesté par les campagnes de communication et budgets publicitaires invoqués, ne serait pas de nature à établir la renommée de la marque tridimensionnelle n 3 386 825 représentant l'apparence d'un biscuit, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 5°) qu'en cause d'appel, les sociétés Glico et Mondelez ont communiqué une nouvelle pièce 21-3 constituée de tableaux établis par l'agence de presse "Carat" et détaillant les investissements publicitaires réalisés en France pour différents biscuits, dont les biscuits "Mikado", sur la période 2011-2016 ; qu'en approuvant le tribunal d'avoir relevé, sur la base de la seule pièce 21 communiquée en première instance, que les données relatives aux frais de publicité et de communication pour les produits "Mikado" concernaient le groupe Mondelez et ne permettaient pas de savoir si ces dépenses concernaient la France, et en indiquant ensuite, après avoir relevé que les campagnes de communication et budgets publicitaires démontreraient tout au plus le succès commercial du produit mais nullement la renommée de la marque, que "la nouvelle pièce produite devant la cour (21-3 selon les appelantes mais plus vraisemblablement 21-2 selon le bordereau de communication de pièces) n'est pas de nature à remettre en cause cette situation", sans justifier en quoi la pièce 21-3, régulièrement versée aux débats pour la première fois devant elle, ne serait pas de nature à rapporter la preuve des investissements de publicité et de communication pour les biscuits "Mikado" en France, la cour d'appel a entaché sa décision d'une insuffisance de motivation, en violation de l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 455 du code de procédure civile :
18. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé.
19. Pour rejeter la demande des sociétés Glico et Mondelez fondée sur l'atteinte à la renommée de la marque tridimensionnelle n 3 386 825, l'arrêt retient que les budgets publicitaires et campagnes de communication dont il est fait état, outre qu'ils concernent Mondelez International, et même lorsqu'ils se rapportent à la marque tridimensionnelle considérée, démontrent tout au plus le succès commercial du produit mais nullement la renommée de la marque, et que la nouvelle pièce produite devant la cour n'est pas de nature à remettre en cause cette situation.
20. En statuant ainsi, sans préciser pour quelles raisons les budgets publicitaires et campagnes de communication consacrés à la promotion, en France, de la marque tridimensionnelle n 3 386 825 n'étaient pas pertinents aux fins d'apprécier la renommée de cette marque, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.
Sur ce moyen, pris en sa septième branche
Enoncé du moyen
21. La société Glico et les sociétés Mondelez font encore le même grief à l'arrêt, alors « qu'afin d'apprécier si une marque est renommée, le juge doit prendre en considération tous les éléments pertinents de la cause, à savoir notamment la part de marché détenue par la marque, l'intensité, l'étendue géographique et la durée de son usage, ainsi que l'importance des investissements réalisés par l'entreprise pour la promouvoir ; qu'en écartant la renommée de la marque tridimensionnelle n 3 386 825, sans s'expliquer, comme elle y était pourtant invitée, sur le volume des ventes et la part de marché des biscuits "Mikado" commercialisés sous la marque tridimensionnelle n 3 386 825, la cour d'appel, qui n'a ainsi pas apprécié la renommée de cette marque au regard de l'ensemble des éléments pertinents de la cause, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 713-5 du code de la propriété intellectuelle. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 713-5 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n 2019-1169 du 13 novembre 2019, tel qu'interprété à la lumière de l'article 5, paragraphe 2, de la directive 2008/95 :
22. La part de marché détenue par une marque est un élément pertinent aux fins d'apprécier si cette marque est renommée.
23. En rejetant la demande des sociétés Glico et Mondelez fondée sur l'atteinte à la renommée de la marque tridimensionnelle n 3 386 825, sans prendre en considération, ainsi qu'il lui était demandé, le volume des ventes et la part de marché des biscuits Mikado commercialisés sous cette marque, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.
Sur ce moyen, pris en sa dixième branche
Enoncé du moyen
24. La société Glico et les sociétés Mondelez font encore le même grief à l'arrêt, alors « que le juge doit prendre en considération tous les éléments pertinents de la cause, appréhendés dans leur globalité ; qu'en écartant la renommée de la marque n 3 386 825, au terme d'un examen d'une partie des éléments invoqués par les sociétés Glico et Mondelez (emballages des biscuits Mikado, campagnes de communication, budgets publicitaires, jugement du tribunal de grande instance de Strasbourg de 2006, livre de recettes "Mikado les meilleures recettes", extraits de comptes Facebook ou de Twitter, enquêtes auprès de consommateurs), envisagés chacun isolément, sans rechercher si, pris dans leur ensemble, tous les éléments pertinents invoqués par les sociétés Glico et Mondelez, qui incluaient, en outre, le volume des ventes de biscuits "Mikado" et la part de marché de ces derniers, n'étaient pas de nature à rapporter la preuve de la renommée de la marque n 3 386 825, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 713-5 du code de la propriété intellectuelle. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 713-5 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n 2019-1169 du 13 novembre 2019, tel qu'interprété à la lumière de l'article 5, paragraphe 2, de la directive 2008/95 :
25. Pour apprécier si une marque est renommée, le juge doit prendre en considération tous les éléments pertinents de la cause en recherchant si, pris dans leur globalité, ils démontrent que la marque jouit d'une renommée.
26. Pour rejeter la demande des sociétés Glico et Mondelez fondée sur l'atteinte à la renommée de la marque tridimensionnelle n 3 386 825, l'arrêt examine séparément chacun des éléments présentés au soutien de cette demande et retient qu'aucun ne rapporte la preuve de la renommée de la marque.
27. En se déterminant ainsi, sans rechercher si, pris dans leur globalité, ces éléments n'établissaient pas la renommée de la marque, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.
Et sur le troisième moyen
Enoncé du moyen
28. La société Glico et les sociétés Mondelez font grief à l'arrêt de les déclarer mal fondées en toutes leurs demandes fondées sur une atteinte à la renommée des marques n 3 386 825 et n 3 725 291 et de rejeter par-là même leurs demandes en annulation des marques Choc'Olé, alors « que pour solliciter l'annulation des marques "Choc'Olé" n 3 950 482 et n 3 950 493, les sociétés Glico et Mondelez faisaient, en particulier, valoir que celles-ci portaient atteinte à la renommée de leur marque tridimensionnelle n 3 386 825 ; qu'ainsi, la cassation à intervenir sur le deuxième moyen entraînera, par voie de conséquence, la cassation du chef de l'arrêt ayant rejeté les demandes d'annulation des marques "Choc'Olé" n 3 950 482 et n 3 950 493, et ce par application de l'article 624 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour Vu l'article 624 du code de procédure civile : 29. Selon ce texte, la censure qui s'attache à un arrêt de cassation est limitée à la portée du moyen qui constitue la base de la cassation, sauf le cas d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire. 30. La cassation prononcée sur le deuxième moyen entraîne la cassation, par voie de conséquence, de l'arrêt en ce qu'il déboute les sociétés Glico et Mondelez de leur demande d'annulation des marques semi-figuratives n 3 950 482 et 3 950 493 en tant qu'elle est fondée sur l'atteinte portée par ces marques à la renommée des marques tridimensionnelles n 3 386 825 et n 3 725 291.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief,
La Cour :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il confirme le jugement entrepris en tant que celui-ci rejetait les demandes reconventionnelles en annulation des marques tridimensionnelles françaises n 3 386 825 et n 3 725 291, rejetait les demandes en annulation des marques Choc'Olé fondées sur une contrefaçon de la marque n 3 386 825 et déboutait la société Mondelez France de sa demande fondée sur la concurrence déloyale et parasitaire, l'arrêt rendu le 9 mars 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne les sociétés Griesson de Beukelaer et Solinest aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette la demande formée par les sociétés Griesson de Beukelaer et Solinest et les condamne in solidum à payer aux sociétés Générale biscuit Glico France, Mondelez Europe et Mondelez France la somme globale de 3 000 euros.