CA Agen, 1re ch. civ. sect. com., 31 mai 2021, n° 19/01025
AGEN
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Coffret de Chantier (SARL)
Défendeur :
A 2C Air Cost Control (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Schmidt
Conseillers :
M. Faure, M. Lacroix-Andrivet
Avocats :
Me d'Argaignon, Me Gagne, Me Richard
FAITS ET PROCÉDURE
Par correspondance du 2 octobre 2017 la société AIR COST CONTROL (A2C) a notifié à la SARL COFFRET DE CHANTIER « la rupture de leurs relations commerciales dès lors qu'elles ne sont plus satisfaisantes pour la société. Nos relations commerciales prendront fin le 31 octobre prochain ».
Les négociations en vue de parvenir à un accord ayant échoué, la société COFFRET DE CHANTIER, estimant la rupture injustifié et brutale, a assigné, le 3 juillet 2018, la société A2C devant le tribunal de commerce d'Auch pour obtenir payement d'une somme de 215 000 euros à titre de dommages et intérêts.
Par jugement en date du 19 juillet 2019, auquel le présent arrêt se réfère expressément pour plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties en première instance et des motifs énoncés par les premiers juges, le tribunal de commerce d'Auch a condamné A2C, outre aux dépens, à payer à la SARL COFFRET DE CHANTIER la somme de 54 000 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 3 juillet 2018, et celle de 1 500 euros à titre d'indemnité de procédure.
Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 29 octobre 2019, la SARL COFFRET DE CHANTIER a relevé appel des dispositions du jugement condamnant A2C, outre aux dépens, à payer à lui payer la somme de 54 000 euros avec intérêts à compter du 3 juillet 2018 et la déboutant du surplus de ses demandes
La procédure de mise en état a été clôturée par ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 24 février 2021.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
I. Moyens et prétentions de la SARL COFFRET DE CHANTIER, appelante
Selon dernières écritures enregistrées au greffe de la Cour le 21 février 2021, expressément visées par la Cour pour plus ample exposé des moyens et prétentions de l'appelante, la SARL COFFRET DE CHANTIER conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il lui allouait une indemnité de procédure de 1 500 euros, mais à sa réformation en ce qu'il a limité le montant de son indemnisation à la somme de 54 000 euros et l'a débouté du surplus de ses prétentions en demandant à la Cour de condamner la société A2C à lui payer les sommes de :
1°) 25 000 euros au titre de la réduction du préavis de rupture du contrat d'agent commercial en exposant qu'elle est fondée à soutenir que les relations entre les parties relèvent des prescriptions des articles 134-1 et suivants du code de commerce et à revendiquer le statut d'agent commercial dès lors :
- que les prescriptions de l'article 134-1 du code de commerce prévoient expressément que la charge du mandataire commercial peut se limiter à négocier des contrats et que l'agent commercial n'est nullement tenu de conclure des contrats commerciaux ni de suivre leur exécution ;
- qu'elle a développé pour A2C une activité d'agent commercial puisqu'elle négociait des contrats pour son compte, que l'absence d'immatriculation dans le registre des agents commerciaux est sans incidence dès lors qu'il s'agit d'une simple mesure de police administrative qui ne conditionne pas l'application du statut d'agent commercial ;
- que par ailleurs l'absence de contrat écrit ne constitue pas davantage un élément déterminant dès lors que le contrat d'agent commercial est consensuel, qu'il ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination qu'elles auraient donnée à la convention, mais des conditions dans lesquelles l'activité est effectivement exercée ;
- que dès lors, et en application de l'article L. 134-11 du code de commerce, la rupture du contrat d'agence commerciale à durée indéterminée liant les partes ne pouvait intervenir que moyennant un préavis, dont elle estime la durée à 13 mois ;
- que le non-respect de ces dispositions et la réduction du préavis à moins d'un mois lui ont causé un préjudice certain qu'elle chiffre à 25 000 euros, soit l'équivalent de trois mois de facturation ;
2°) 170 000 euros au titre de l'indemnité compensatrice du préjudice subi du fait de la rupture du contrat d'agent commercial en exposant qu'aux termes de l'article L. 134-12 du code de commerce, en cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice du préjudice résultant de la rupture, dont le montant est habituellement fixé par la jurisprudence à deux années de commissions brutes perçues par l'agent, ce qui l'autorise à revendiquer le paiement d'une somme de 170 000 euros.
Subsidiairement, dans l'hypothèse où la Cour retiendrait que les parties étaient liées seulement par une relation de courtage, la SARL COFFRET DE CHANTIER sollicite la condamnation de la société A2C à lui payer la somme de 80 804,85 euros, et encore plus subsidiairement celle de 69 500 euros au titre de l'indemnisation du préjudice subi du fait de la rupture brutale de relations commerciales établies, en application de l'article L. 442-6, I, 4° du code de commerce en faisant valoir :
- que M. de la GUERONNIERE, gérant de la société COFFRET DE CHANTIER travaillait avec la société A2C d'abord en qualité d'agent commercial jusqu'en 2004, puis sous forme de portage salarial à compter de 2004, jusqu'à ce que la société COFFRET DE CHANTIER prenne le relais en 2008 ;
- que l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce a vocation à s'appliquer à toute relation commerciale établie entre les entités économiques successives, y compris lorsqu'elle concerne plusieurs personnes successivement dès lors qu'il est établi que dans l'esprit des partenaires c'est la relation initialement nouée, qui s'est poursuivie avec les autres personnes ;
- que tel est le cas en l'espèce, l'existence de relations commerciales établies entre les deux entités n'étant pas discutable, ni discutée ;
- qu'aucun grief ne lui a jamais été adressé ni avant, ni au moment, ni après la notification de la rupture et que ce n'est qu'au cours de la procédure de première instance, pour s'opposer à l'indemnisation réclamée, que la société A2C s'est prévalue de fautes prétendument commises, fautes inexistantes dont l'invocation n'a pour seul but que d'échapper à ses responsabilités et à la juste indemnisation dont elle est redevable ;
- que le caractère brutal de la rupture totale de relations commerciales établies résulte de la durée du préavis, 29 jours, nettement insuffisante au regard des relations commerciales antérieures qui ont duré 13 ans, que l'appréciation que la durée du préavis qui aurait dû être observé a été sous-évaluée par le premier juge qui a retenu une durée de 12 mois alors que cette rupture aurait nécessité un préavis d'au moins deux ans ;
- qu'elle a dû prospecter deux ans pour parvenir à reprendre une activité commerciale de nature à compenser la défection de la société A2C et que sa rémunération était d'un montant mensuel moyen de l'ordre de 4 500 euros hors-taxes et hors défraiement ;
- que la marge de bénéfice était très élevée, de l'ordre de 95 % compte tenu de ce que les frais engendrés par l'activité été très peu élevés et qu'elle demande donc à la Cour de fixer le montant de son indemnisation à la somme de 80 804,85 euros, et subsidiairement à celle de 69 500 euros, ajoutant qu'il n'y a pas lieu d'opérer une quelconque déduction au titre de la crise économique impactant particulièrement le secteur aéronautique en raison de la crise sanitaire dès lors que cette indemnité aurait dû être payée depuis trois ans et aurait à tout le moins dû être provisionnée.
La SARL COFFRET DE CHANTIER sollicite enfin la condamnation de l'intimée aux entiers dépens et à lui payer la somme de 3 000 euros à titre d'indemnité de procédure à hauteur d'appel.
II. Moyens et prétentions de l'intimé, appelante incidente, la SAS A2C
Selon dernières écritures enregistrées au greffe de la Cour le 15 février 2021, expressément visées pour plus ample exposé des moyens et prétentions de la SARL A2C, l'intimée conclut au rejet de l'appel principal et, formant appel incident, sollicite l'infirmation du jugement en ses dispositions allouant à la société COFFRET DE CHANTIER la somme de 54 000 euros à titre d'indemnité, outre 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et à sa confirmation pour le surplus, en faisant valoir :
- que la société COFFRET DE CHANTIER ne peut se prévaloir du statut d'agent commercial dès lors qu'elle n'avait pas le pouvoir de négocier et de contracter au nom de la société A2C, que cela résulte du propre aveu de celle-ci, qui a précisé dans ses écritures que son activité se limitait à contacter les clients potentiels pour connaître leurs besoins et à les transmettre aux services d'A2C, qui les chiffraient et répondaient aux clients ;
- que si l'appelante affirme qu'elle disposait d'un pouvoir de négociation, elle n'en rapporte pas le moindre commencement de preuve, qu'elle a d'ailleurs indiqué elle-même dans ses écritures qu'elle ne disposait pas du pouvoir de contracter au nom de la concluante ;
- qu'il suffira pour rejeter l'existence d'un contrat d'agent commercial de relever que M. de la GUERONNIERE n'était inscrit au registre spécial des agents commerciaux que jusqu'au 3 janvier 2006, date à laquelle il en été radié, qu'entre 2006 et 2008 il a continué ses relations avec la société A2C dans le cadre d'un portage salarial puis qu'à compter d'avril 2008 il a créé sa propre société COFFRET DE CHANTIER afin de commercialiser des coffrets de chantier tout en continuant à collaborer avec la société A2C ;
- qu'aucun contrat d'agent commercial n'a été signé entre les parties et que la société COFFRET DE CHANTIER n'a pas sollicité son inscription au registre spécial des agents commerciaux ;
- que l'objet social de la société COFFRET DE CHANTIER est une activité de négoce de matériels et matériaux liés à la construction, de location de matériel lié à la construction, activité qui n'a aucune espèce de rapport avec les activités développées par la société A2C ;
- que la société COFFRET DE CHANTIER admet qu'elle n'avait aucun pouvoir pour signer le moindre acte engageant la société A2C ce qui suffit à caractériser qu'elle n'agissait pas au nom et pour le compte de la concluante, critère essentiel posé par l'article L. 134-1 du code de commerce ;
- que la société COFFRET DE CHANTIER ne réalisait aucune prise d'ordre de commande et confirme elle-même qu'elle ne pouvait pas signer de contrat au nom et pour le compte de la société A2C ;
- que ses relations avec la société COFFRET DE CHANTIER s'analysaient en un contrat de courtage, ainsi que l'a justement énoncé le jugement entrepris, l'activité de celle-ci consistant simplement à rapprocher des parties dans la perspective d'un contrat qu'elle ne négociait et ne concluait pas elle-même ;
- que dès lors toutes les demandes d'indemnité fondées sur un contrat d'agent commercial, qui sont par ailleurs exorbitantes, ne peuvent être écartées ;
- que c'est ensuite vainement que la société COFFRET DE CHANTIER se prévaut d'une rupture brutale de relations commerciales établies dès lors qu'il n'est pas sérieux de soutenir que dans cette hypothèse il aurait fallu respecter un préavis de deux ans ;
- que la durée des relations commerciales ne constitue pas un critère décisif pour apprécier la durée du préavis qui aurait dû être accordé, qu'il faut tenir compte des autres circonstances de l'espèce, et notamment du temps nécessaire pour organiser la reconversion et atténuer les désagréments posés par la rupture des relations commerciales établies
- que la société COFFRET DE CHANTIER n'apporte aucune preuve de la prétendue dépendance économique dont elle se prévaut alors qu'elle exerçait en parallèle une activité de négoce de matériel et matériaux liés à la construction, pas plus que des difficultés rencontrées pour se réorganiser.
- que le préjudice ne doit pas être évalué en fonction d'une baisse du chiffre d'affaires mais en fonction de la marge brute qui aurait pu être réalisée pendant la durée du préavis non accordé
- qu'à défaut pour la société COFFRET DE CHANTIER de verser l'intégralité de sa comptabilité pour les exercices 2015 à 2017, seule de nature à permettre de discuter de manière sérieuse et contradictoire du préjudice, le rejet intégral de ses demandes s'impose.
La société A2C sollicite enfin la condamnation de la société COFFRET DE CHANTIER aux entiers dépens et au paiement d'une indemnité de procédure de 3 000 euros.
MOTIFS DE L'ARRÊT
I. SUR LA RUPTURE DU CONTRAT D'AGENT COMMERCIAL
Pour confirmer les dispositions du jugement entrepris déboutant la société COFFRET DE CHANTIER de sa demande en dommages et intérêts pour rupture brutale du contrat d'agent commercial il suffira de relever :
- que l'article L. 134-1 du code de commerce dispose que l'agent commercial est « un mandataire qui, à titre de profession indépendante, sans être lié par un contrat de louage de services, est chargé, de façon permanente, de négocier et éventuellement de conclure des contrats de vente, d'achat, de location ou de prestations de services, au nom et pour le compte de producteurs, d'industriels, de commerçants ou d'autres agents commerciaux » ;
- qu'aucun contrat d'agent commercial n'a été signé entre les parties et que la société COFFRET DE CHANTIER n'a jamais été inscrite au registre spécial des agents commerciaux,
- qu'il résulte des propres explications de la société COFFRET DE CHANTIER qu'elle n'avait pas le pouvoir de contracter, ni même de négocier au nom de la société A2C, son activité se limitant à contacter les clients potentiels pour connaître leurs besoins et à les transmettre aux services d'A2C qui les chiffraient et négociaient avec les clients ;
- que la société COFFRET DE CHANTIER n'a jamais pris une commande et n'a jamais eu le pouvoir de signer un acte quelconque engageant la société A2C ;
- que la société COFFRET DE CHANTIER n'a donc jamais eu le statut d'agent commercial de la société A2C et qu'en conséquence les demandes en dommages et intérêts fondées sur la rupture brutale d'un tel contrat ne peuvent qu'être rejetées.
II. SUR LA RUPTURE DE RELATIONS COMMERCIALES ÉTABLIES
A titre liminaire il convient de rappeler :
- qu'aux termes de l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019, engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers (...) de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels,
- que ce texte a vocation à s'appliquer à toute relation commerciale établie entre les entités économiques qu'il cite, y compris lorsqu'elle a lié plusieurs personnes successivement, dès lors qu'il est établi que, dans l'esprit des partenaires, c'est la relation initialement nouée avec l'une qui s'est poursuivie avec l'autre ;
- que constitue une « relation commerciale établie » au sens de l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce, une relation « régulière, stable et significative », caractérisée par une continuité des contrats et un chiffre d'affaires significatif et exclusif, permettant légitimement à la victime de la rupture de s'attendre à la poursuite d'une relation s'inscrivant dans la durée et la stabilité.
En l’espèce, il résulte des pièces produites et des propres écritures de l'intimée qu'à partir de 2008 la société A2C et la société COFFRET DE CHANTIER ont entretenu des relations, régulières, stables et permanentes dans le cadre d'un contrat de courtage, caractérisant une relation commerciale établie au sens de l'article L. 442-6, I, 5°.
Pour la période antérieure, au cours de laquelle M. de la GUERONNIERE, gérant de la société COFFRET DE CHANTIER a travaillé avec la société A2C d'abord en qualité d'agent commercial jusqu'en 2004, puis sous forme de portage salarial de 2004 à 2008, l'existence de relations commerciales établies entre les parties au litige doit également être retenue, dès lors que si la relation a lié successivement des personnes juridiques distinctes et si les contrats étaient de nature différente, dans l'esprit des partenaires c'est la relation initialement nouée avec M. de la GUERONNIERE qui s'est poursuivie avec la société COFFRET DE CHANTIER, dirigée par celui-ci et dont l'activité demeurait comme précédemment la recherche de nouveaux clients et le développement de la clientèle d'A2C.
En conséquence, les dispositions de l'article L. 442-6, I, 5° sont applicables au litige, étant rappelé que cet article ne sanctionne pas la rupture de relations commerciales établies, mais seulement la brutalité de celle-ci et le non-respect d'un préavis conforme aux accords professionnels et aux usages.
Par courrier remis en main propre le 2 octobre 2017, la société A2C a notifié à M. de la Gueronnière, gérant de la société COFFRET DE CHANTIER, la rupture de leurs relations commerciales le 31 octobre 2017.
Compte tenu de l'ancienneté des relations établies, ce préavis de 29 jours était insuffisant pour permettre à la société COFFRET DE CHANTIER d'organiser sa reconversion et d'atténuer les désagréments causés par la rupture des relations commerciales établies. Par suite la brutalité de cette rupture apparaît caractérisée.
Pour s'exonérer de la responsabilité pesant sur elle en raison de la rupture brutale des relations commerciales établies, A2C invoque les dispositions finales de l'article L. 442-6, I aux termes desquelles les dispositions précédentes « ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure » et soutient que la rupture est justifiée par les fautes commises par la société COFFRET DE CHANTIER, dont le dirigeant se faisait rembourser des frais de déplacement tout en proposant ses services de covoiturage sur le site Blablacar, profitait de ses déplacements pour réaliser des ventes au bénéfice de sa société qui consacrait de moins en moins de temps à prospecter des clients pour le compte d'A2C.
Pour écarter cette argumentation il suffira de relever, d'une part, que ces prétendues fautes n'ont pas été mentionnées dans la lettre notifiant la rupture des relations commerciales entre les parties, qui indiquait seulement que celles-ci n'étaient plus satisfaisantes pour A2C, ce qui démontre le peu d'importance que A2C accordait à ces prétendues fautes, d'autre part et surtout, que cette dernière n'établit d'aucune manière les fautes dont elle fait état, se contentant de produire à l'appui de ce qui en l'état ne demeurent que des allégations, diverses pièces totalement dépourvues de valeur probante au regard des griefs formulés, et de tenter d'inverser la charge de la preuve en réclamant la justification par son adversaire de l'absence de comportement fautif dans l'exécution de son activité, alors que cette charge lui incombe totalement.
Compte tenu du fait que la société COFFRET DE CHANTIER exerçait, conjointement à son activité de courtage, une activité de négoce, le délai nécessaire pour permettre à la société COFFRET DE CHANTIER d'organiser sa reconversion et d'atténuer les désagréments causés par la rupture des relations commerciales établies, et donc le délai de préavis qui aurait dû lui être accordé, peut être évalué à 6 mois.
Le préjudice causé par la brutalité de la rupture correspond non pas à la perte de chiffre d'affaires, mais à la perte de la marge brute que la société COFFRET DE CHANTIER aurait pu réaliser durant les 5 mois de préavis dont elle n'a pas bénéficié (puisqu'elle a bénéficié d'un mois de préavis en octobre 2017). Il peut être chiffré, sur la base d'une marge brute annuelle moyenne de 50 336 euros pour les 3 derniers exercices, à la somme de 21 000 euros.
Le jugement entrepris sera donc infirmé pour limiter la condamnation de la société A2C à verser à la société COFFRET DE CHANTIER la somme de 21 000 euros
III. SUR LES FRAIS NON-RÉPÉTIBLES ET LES DÉPENS
Les dispositions des premiers juges relatives aux frais non-répétibles et aux dépens méritent confirmation.
L'équité n'impose pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel.
Chacune des parties succombant partiellement à hauteur d'appel, chacune conservera à sa charge les dépens par elle exposés.
PAR CES MOTIFS
La Cour statuant contradictoirement, par arrêt prononcé par sa mise à disposition au greffe et en dernier ressort ;
CONFIRME le jugement entrepris, sauf en ses dispositions allouant à la société COFFRET DE CHANTIER une indemnité de 54 000 euros
statuant à nouveau du chef infirmé et ajoutant au jugement,
CONDAMNE la société AIR COST CONTROL à payer à la Sarl COFFRET DE CHANTIER une somme de 21 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de la rupture brutale de relations commerciales établies ;
DEBOUTE les parties de leurs demandes en payement d'indemnité de procédure à hauteur d'appel ;
DIT que chacune des parties conservera à sa charge les frais et dépens par elle exposés à hauteur d'appel.