Cass. com., 19 février 2013, n° 12-13.662
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Espel
Rapporteur :
M. Zanoto
Avocat général :
M. Le Mesle
Avocats :
Me Le Prado, SCP Lyon-Caen et Thiriez
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 27 janvier 2012), que la société VGC Distribution (le preneur) a été mise en redressement, puis liquidation judiciaires les 27 septembre et 8 novembre 2010, Mme X... (le liquidateur) étant nommée liquidateur ; que le 28 décembre 2010, la société Inter-Home ITH (le bailleur) a délivré au liquidateur un commandement visant notamment la clause résolutoire pour défaut de paiement des loyers échus depuis l'ouverture de la procédure collective jusqu'au 8 novembre 2010 ; que le 27 janvier 2011, le juge-commissaire a autorisé la cession du fonds de commerce de la société ; que, sur assignation du bailleur du 7 février 2011, le juge des référés a constaté la résiliation de plein droit du bail au 28 janvier 2011 et ordonné l'expulsion du preneur ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le liquidateur fait grief à l'arrêt d'avoir écarté la fin de non-recevoir soulevée devant la cour d'appel et d'avoir constaté l'acquisition de la clause résolutoire, alors, selon le moyen :
1°) que le bailleur peut demander la résiliation judiciaire ou faire constater la résiliation de plein droit du bail pour défaut de paiement des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement de liquidation judiciaire, dans les conditions prévues aux troisième à cinquième alinéas de l'article L. 622-14 du code de commerce et que ce dernier texte dispose que lorsque le bailleur demande la résiliation ou fait constater la résiliation du bail pour défaut de paiement des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement d'ouverture, le bailleur ne peut agir qu'au terme d'un délai de trois mois à compter dudit jugement ; qu'en faisant courir au jour du redressement judiciaire, ouvert le 27 septembre 2010, le délai de trois mois à compter duquel le bailleur pouvait demander de constater la résiliation de plein droit du bail au titre du commandement visant la clause résolutoire délivré le 28 décembre 2010, et non au jour de la liquidation judiciaire prononcée le 8 novembre 2010, la cour d'appel a violé les articles L. 622-14 et L. 641-12 du code de commerce ;
2°) que le bailleur demande la résiliation judiciaire ou fait constater la résiliation de plein droit du bail pour des causes antérieures au jugement de liquidation judiciaire ou, lorsque ce dernier a été prononcé après une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire, au jugement d'ouverture de la procédure qui l'a précédée, il doit, s'il ne l'a déjà fait, introduire sa demande dans les trois mois de la publication du jugement de liquidation judiciaire ; qu'en faisant courir au jour du redressement judiciaire, ouvert le 27 septembre 2010, le délai de trois mois à compter duquel le bailleur pouvait demander de constater la résiliation de plein droit du bail pour non paiement des loyers échus depuis le 27 septembre 2010, et non au jour de la liquidation judiciaire prononcée le 8 novembre 2010, la cour d'appel a violé l'article L. 641-12 du code de commerce et, par fausse application, l'article L. 622-14 du code de commerce ;
Mais attendu, d'une part, que l'action en résiliation du bail pour défaut de paiement des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement de liquidation judiciaire, prévue à l'article L. 641-12, 3°, du code de commerce, ne peut être engagée avant l'expiration d'un délai de trois mois à compter du jugement d'ouverture ; que le point de départ de ce dernier est soit la date du jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire lorsque celle-ci est prononcée immédiatement, soit celle du jugement d'ouverture de sauvegarde ou de redressement judiciaire en cas de conversion de la procédure en liquidation judiciaire ; que la cour d'appel a écarté, à bon droit, la fin de non-recevoir soulevée par le liquidateur ;
Attendu, d'autre part, qu'il ne ressort ni de l'arrêt ni des conclusions que le liquidateur a soutenu devant la cour d'appel que l'action en résiliation du bail engagée par le bailleur portait sur des causes antérieures au jugement de liquidation judiciaire ; que le grief est nouveau, mélangé de fait et de droit ;
D'où il suit que le moyen, irrecevable en sa seconde branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
Sur le second moyen :
Attendu que le liquidateur fait encore grief à l'arrêt d'avoir constaté l'acquisition de la clause résolutoire et jugé que ce contrat a été résilié le 28 janvier 2010, alors, selon le moyen :
1°) que l'acquisition de la condition résolutoire demandée par le bailleur à l'encontre d'un débiteur en liquidation judiciaire prend effet à la date de la demande en résiliation saisissant le juge ; qu'en jugeant que la résiliation pouvait être prononcée au 28 janvier 2010, après avoir constaté que le président du tribunal avait été saisi par acte du 7 février 2011, la cour d'appel a violé les articles L. 622-14 et L. 641-12 du code de commerce ;
2°) que toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux ; qu'en jugeant que la résiliation pouvait être prononcée au 28 janvier 2010, après relevé que le commandement visant la clause résolutoire avait été délivré le 28 décembre 2010, la cour d'appel a violé l'article L. 145-41 du code de commerce ;
3°) que le droit de résiliation reconnu au bailleur à l'expiration d'un délai de trois mois suivant le jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire pour défaut de paiement des loyers postérieurs à ce jugement ne peut plus être exercé lorsque la transmission du droit au bail à un tiers a été décidée par un jugement ordonnant la vente du fonds de commerce ; que le liquidateur et le bailleur exposaient que par ordonnance du 27 janvier 2011, le juge-commissaire avait autorisé le liquidateur à céder le fonds de commerce exploité par la société VGC Distribution à M. Y... pour le prix de 172 000 euros ; qu'en faisant droit à la demande de résiliation du bailleur au motif que la résiliation pouvait être prononcée au 28 janvier 2010, soit antérieurement à l'ordonnance du 27 janvier 2011, la cour d'appel a violé l'article L. 642-19 du code de commerce, ensemble les articles L. 622-14 et L. 641-12 du même code ;
Mais attendu qu'ayant relevé qu'un commandement de payer demeuré infructueux avait été délivré le 28 décembre 2010, l'arrêt en déduit que la clause résolutoire était acquise un mois après cette date ; que par suite, l'indication du 28 janvier 2010 portée dans l'ordonnance de référé constitue une simple erreur matérielle qui, pouvant être réparée selon la procédure prévue à l'article 462 du code de procédure civile, ne donne pas ouverture à cassation ; que le moyen n'est pas recevable ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.