CA Paris, ch. 16 cabinet b, 17 juin 2004, n° 03/04850
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Boulanger
Défendeur :
Azem Père er fils (SCI)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Garban
Conseillers :
Provost-Lopin, Imbaud-Content
Avocats :
SCP Baufume-Galland, SCP Calarn-Delaunay, Me Rasseneur, Me Puylagarde
LA COUR,
Vu l’appel de ce jugement interjeté par M. Boulanger ;
Vu les conclusions de l’appelant en date du 20 janvier 2004 par lesquelles il demande à la cour :
- de reformer le jugement en ce qu’il l’a débouté de sa demande en paiement d’une indemnité d’éviction ;
- d’ordonner une mesure d’expertise aux fins d’évaluation du montant de l’indemnité d’éviction due par la bailleresse ;
- de confirmer le jugement sur le montant de l’indemnité d’occupation ;
- à titre subsidiaire, de n’ordonner le paiement d’intérêts au taux légal à sa charge qu’à compter de la décision de première instance en cas de confirmation de la décision du jugement relativement à l’indemnité d’occupation, ou à défaut de confirmation à compter de l’arrêt;
- de condamner la bailleresse à lui payer la somme de 3.000 € en application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Vu les conclusions en date du 22 janvier 2004 de la SCI Azem Père et Fils par lesquelles elle demande à la cour :
- de confirmer le jugement en ce qu’il a débouté M. Boulanger de sa demande tendant au bénéfice d’une indemnité d’éviction ;
- de l’infirmer pour le surplus ;
- de condamner M. Boulanger à lui verser une indemnité d’occupation d’un montant de 30.046 € par an en principal à compter du 1er juillet 2002 jusqu’à libération complète des lieux et remise des clefs ;
- de dire que cette indemnité sera révisée annuellement en fonction de la variation de l’indice INSEE du coût de la construction ;
- à titre provisionnel, si une mesure d’instruction était ordonnée, de condamner M. Boulanger à lui payer une indemnité d’occupation provisionnelle d’un montant de 15.000 € par an à compter du 1er juillet 2002 ;
- de dire que l’indemnité d’occupation sera productive des interdits au taux légal à compter du 1er juillet 2002, avec capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1154 du code civil ;
- a litre subsidiaire, si la cour infirmait le jugement en ce qu’il a refusé à M. Boulanger le bénéfice du statut ;
- de fixer l’indemnité d ’occupation dans les mêmes conditions que ci-dessus ;
- de lui donner acte de ce qu’elle ne s’oppose pas à une mesure d’expertise relative à la détermination du montant de l’indemnité d’éviction et de l’indemnité d’occupation ;
- en tout état de cause, de condamner M. Boulanger à lui payer la somme de 3.000 € en application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ;
SUR CE,
Considérant que M. Boulanger poursuit l’infirmation du jugement, soutenant qu’il exploite un fonds de commerce dans les lieux et peut prétendre au versement d’une indemnité d’éviction ; qu’il fait valoir :
- qu’il est immatriculé au registre des métiers depuis le 25 septembre 2000 pour une activité dans les lieux de “réparation automobile, installation, équipement, motorisation gaz et groupe électrogène”, activité qu’il exerce sous l’enseigne Vic Industries ;
- qu’il s’agit d’une activité conforme à celle prévue par le bail, ainsi qu’il ressort du constat du 28 octobre 2002 ; qu’en effet, les biens vendus sont des biens relatifs à l’activité automobile, permettant l’équipement des automobiles et la motorisation au gaz et groupe électrogène ; que le fait que le bail commercial vise “le garage des véhicules” est en relation directe avec l’activité de réparation automobile et n’a de sens que lie à cette activité ;
- que le motif de dénégation du statut invoque par la bailleresse ne vise que l’absence d’immatriculation au registre du commerce et ne fait aucune référence à une immatriculation au registre des métiers ; que si cette inexactitude n’entraine pas la nullité du refus de renouvellement, elle donne droit à une indemnité d’éviction ;
- que l’article L 145-1 du code de commerce ne prévoit pas une identité totale entre l’activité déclarée lors de l’immatriculation et l’activité autorisée par le bail ;
- que l’article L 145-8 du code de commerce dont fait état la bailleresse qui exige une exploitation du fonds pendant trois ans, vise l’hypothèse d’une déspécialisation du fonds, ce qui n’est nullement le cas en l’espèce ; qu’il exploite le fonds depuis la conclusion du bail, le 16 avril 1993 ;
Mais considérant que l’activité prévue au bail est celle de "'dépôt et vente de matériel, de matériaux, ainsi que garage des véhicules servant à ladite entreprise ", que M. Boulanger n’est pas immatricule pour cette activité au registre du commerce et des sociétés mais est inscrit depuis le 25 septembre 2000 au répertoire des métiers pour une activité de "réparation automobile, installation, équipement, motorisation gaz et groupe électrogène ”; qu’il s’agit de deux activités différentes qui, contrairement à ce que soutient M. Boulanger, ne peuvent dire assimilées ; qu’il ressort du constat du 28 octobre 2002 communiqué par M. Boulanger que, si des cartons sont stockes dans les lieux, il existe des établis sur lesquels sont disposés des matériels, la présence de ces établis montrant que M. Boulanger exerce effectivement une activité de réparation automobile et d’installation d’équipement qui n’est pas l’activité prévue par le bail;
Considérant qu’il apparait ainsi que le tribunal a à juste titre retenu que M. Boulanger n’était pas immatriculé pour l’activité autorisée par le bail ;
Considérant qu’à titre subsidiaire, M. Boulanger déclare que le statut des baux commerciaux doit être appliqué dans la mesure ou le local en cause peut être considéré comme l’accessoire du local principal loué à la même adresse, dans un local attenant appartenant également à la société Azem Père et Fils, par la société Vic Industrie ; que cette société, immatriculée au registre du commerce, dont il est salarié, exploite une activité d’installation d’équipement au gaz pour les véhicules à moteur;
Mais considérant que ce moyen ne peut prospérer alors que M. Boulanger n’est pas lui-même locataire du local attenant ;
Considérant que le jugement doit être confirmé en ce qu’il a dit que M. Boulanger ne pouvait prétendre ni au renouvellement de son bail ni à une indemnité d’éviction ;
Considérant que la société bailleresse soutient que l’indemnité d’occupation doit être évaluée à la valeur locative, déterminée dans les termes de l’article L 145-3 du code de commerce ; qu’elle sollicite la fixation de cette indemnité a la somme en principal de 30.046 euros, et, si la cour s’estimait insuffisamment renseignée sur le montant de la valeur locative, que soit ordonnée une mesure d’expertise ;
Mais considérant que l’indemnité d’occupation de droit commun, comme en l’espèce, n’est pas rattachée à la valeur locative des lieux et présente un caractère indemnitaire et compensatoire ; qu’il apparait que le tribunal a fait une exacte appréciation de la situation en la fixant au montant du dernier loyer augmente de 15% ; qu’il n’y a pas lieu de dire que cette indemnité sera révisée annuellement en fonction de la variation de l’indice INSEE du cout de la construction ;
Considérant que l’indemnité d’occupation étant évaluée à la date du jugement, 15 janvier 2003, il n’y a pas lieu d’ordonner le paiement des intérêts au taux légal sur cette indemnité à compter du 1er juillet 2002, comme le demande la bailleresse ; que la capitalisation des intérêts est de droit dès lors que les intérêts sont dus pour une année entière, qu’il y a lieu de l’ordonner dans les conditions de l’article 1154 du code civil ;
Considérant que, compte tenu de l’équité, la bailleresse doit être déboutée de sa demande tendant à l’allocation d’une indemnité au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
Confirme en toutes ses dispositions le jugement du 15 janvier 2003 ;
Ajoutant,
Dit que les intérêts dus au moins pour une année entière porteront eux-mêmes intérêts dans les conditions de l’article 1154 du code civil à compter du 6 aout 2003, date de la demande ;
Déboute la SCI Azem Père et Fils du surplus de sa demande ;
Condamne M. Boulanger aux dépens d’appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du nouveau code de procédure