CA Paris, 16e ch. A, 21 mars 2007, n° 05/23267
PARIS
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
GID (SCI)
Défendeur :
Pierre (Consort) , Manuel, De la Cooperation (SCI), Metellus, Tisme (Consort)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Duclaud
Conseillers :
Mme Imbaud-Content, M. Zavaro
Avocats :
Me Cordeau, Me Miserey, SCP Autier, Me Moisson
LA COUR
I. Sur le fond au principal :
Considérant que la SCI DE LA COOPERATION, Monsieur et Madame PIERRE, font valoir que le bailleur, pour obtenir la signature des baux, a commis un dol par réticence, en faisant signer aux locataires, pour un prix élevé et en toute connaissance de cause, des locaux à usage de bureaux en leur interdisant de les sous-louer, alors qu'il savait que les locataires, n'exploitant aucun commerce, ne pouvaient régler le montant des loyers qu'à la condition de sous-louer les lieux ;
Que de toute manière, selon les intimés, les deux conventions doivent être annulées sur le fondement d'une erreur de droit ; que l'erreur porte en l'espèce sur un élément substantiel, à savoir l'impossibilité de bénéficier du statut des baux commerciaux mais également l'impossibilité de sous-louer les locaux dont il s'agit ;
Mais considérant que les baux dont il s'agit ne sont nullement entachés par des conditions de passation dolosives ou d'erreur ; qu'en revanche il est certain que lesdits baux ne peuvent être qualifiés de baux commerciaux dès lors que le bailleur les a ainsi dénommés dans son seul intérêt ; que les locaux sont d'anciens ateliers qui n'étaient susceptibles de devenir des bureaux qu'après de gros travaux ; que la société GID n'a accordé pour l'un des baux qu'une brève dispense de loyer pour que les locataires puissent installer des radiateurs mobiles à huile dans les locaux ; que ni les locataires, personnes physiques, ni la SCI DE LA COOPERATION, en formation, n'avaient les aptitudes requises pour occuper les grandes surfaces louées pour ladite SCI elle-même ; que la SCI DE LA COOPERATION constituée manifestement dans le seul but de satisfaire à l'exigence du bailleur, a un objet limité, à savoir l'acquisition, la gestion et l'administration d'immeubles et de toutes opérations pouvant se rattacher directement ou indirectement à cet objet 'pourvu que ces opérations ne modifient pas le caractère civil de la société'; que les locataires, qui n'avaient pas la compétence pour apprécier la qualification s'en sont remis au bailleur ; que ces baux qui ne portaient ni sur un local commercial où se font des achats et des ventes, ni sur des bureaux commerciaux compte tenu de l'état délabré des lieux qui a appelé l'attention de la Mairie de Pantin sur leur utilisation, sont des contrats de droit commun régis par les dispositions du Code civil ; que ceux-ci sont réputés avoir été conclus pour une durée indéterminée de sorte que le congé qui n'est soumis à aucune formalité suffit à mettre fin au bail ;
Considérant qu'en l'espèce, la lettre avec avis de réception que Monsieur PIERRE, gérant de la SCI DE LA COOPERATION, a adressée à la SCI GID le 28 avril 2004 vaut congé et a mis fin aux deux baux à compter du 5 mai 2004, date de sa réception par la bailleresse ;
Considérant que les locataires, qui ne contestent pas ne pas avoir réglé les loyers jusqu'à cette date seront condamnés à payer :
* pour le local numéro 1 à 7 et 26 à 31 situé au premier étage, la somme de 10.259,34 '
* pour le local numéro 8 à 25 situé au deuxième étage, la somme de 32.822,36 ' ;
II. Sur le cautionnement :
Considérant que les cautions, qui sont déjà tenues au paiement des loyers à titre de co-locataires, font valoir que selon l'article 2012 du Code civil, le cautionnement ne peut exister que sur une obligation valable ; que les actes de cautionnement dont il s'agit sont l'accessoire de baux faussement qualifiés de baux commerciaux 'dont l'irrégularité, tant au regard des dispositions régissant les baux commerciaux que de celles de l'article 1109 du Code civil, ne peut être contestée' ; que les engagements des cautions dépassent très largement les facultés contributives de chacun des signataires, ce que le bailleur n'ignorait pas ; que le Tribunal doit être approuvé en ce qu'il a prononcé la nullité de ces actes compte tenu de la fraude et des manoeuvres dolosives du bailleur ;
Mais considérant que la requalification des deux conventions en baux de droit commun ne fait pas disparaître les obligations au paiement des loyers dont les montants ne sont pas affectés par cette requalification ; que l'engagement des cautions est limité aux conditions d'exécution des baux selon le droit commun dans la limite de sa durée, conditions qui n'alourdissent pas la portée de leur engagement ; que dès lors, les cautions seront condamnées à garantir le paiement des loyers arriérés tels que fixés plus haut par la Cour ;
III. Sur la remise en état des locaux :
Considérant que la société GID qui n'apporte aucun élément de preuve à cet égard sera déboutée de sa demande ;
IV. Sur les dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile :
Considérant qu'il ne paraît pas inéquitable de laisser la société GID supporter la charge de ses frais irrépétibles de procédure ;
Considérant que les intimés, qui succombent en partie, ne sauraient se voir allouer une somme sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
PAR CES MOTIFS,
Infirme le jugement déféré,
Statuant à nouveau
Condamne solidairement la SCI DE LA COOPERATION, Monsieur et Madame PIERRE et les consorts PIERRE à verser à la SCI GID la somme de 10.259, 34 ' au titre des loyers arriérés du premier étage et celle de 32.822,36 ' au titre des loyers arriérés du deuxième étage ;
Dit les consorts PIERRE en tant que cautions tenus à paiement de ces sommes,
Déboute la société GID de sa demande relative au paiement des réparations locatives,
Y ajoutant
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
Condamne la SCI DE LA COOPERATION, Monsieur et Madame PIERRE ainsi que les consorts PIERRE aux dépens de première instance et d'appel ; autorise Maître CORDEAU, avoué, à les recouvrer conformément à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.