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Décisions

Cass. soc., 20 mai 1992, n° 90-44.061

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Cochard

Rapporteur :

M. Boittiaux

Avocat général :

M. Kessous

Avocat :

Me Ryziger

Cass. soc. n° 90-44.061

20 mai 1992

Sur le premier moyen :

Attendu que, selon l'arrêt attaqué (Paris, 14 mai 1990) et la procédure, M. X... a été engagé le 30 septembre 1987, par la société Le Joyau de la Marne, en qualité de directeur de restaurant pour une durée de 2 ans ; que la société a été mise en redressement judiciaire le 8 décembre 1987 et la date de cessation des paiements fixée au 31 mars 1987, puis a été mise en liquidation judiciaire le 28 janvier 1988 ; que M. X..., dont la rupture du contrat de travail est intervenue le 7 avril 1988 pour motif économique, a saisi les juridictions prud'homales le 21 juillet 1988 pour obtenir le règlement de créances salariales ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir prononcé la nullité du contrat de travail, alors que, selon le moyen, le liquidateur dispose d'un délai de 15 jours à compter de la publication au BODACC du relevé des créances pour le contester ; à défaut de cette contestation, le relevé des créances salariales visées par le juge-commissaire est revêtu de l'autorité de chose jugée ; qu'en estimant cependant que le liquidateur pouvait remettre en cause une créance salariale aux motifs que la procédure particulière enserrée dans de brefs délais destinée à assurer aux salariés dans les meilleures conditions la pérennité de la perception de ces salaires ne saurait priver le liquidateur, mieux informé, de poursuivre, devant le juge naturel du contrat de travail, la nullité dudit contrat, la cour d'appel a méconnu le principe de l'irrévocabilité de l'admission des créances et a violé les articles 123 et 134 de la loi du 25 janvier 1985 ; alors, d'autre part, que les institutions de garantie disposent d'un délai de 5 jours suivant la réception des relevés de créances salariales superprivilégiées et d'un délai de 8 jours suivant la réception des relevés des créances salariales privilégiées, pour contester lesdits relevés ; que M. X... avait fait valoir que le GARP avait reçu l'état de sa créance salariale le 13 septembre 1988 et que, dès lors, il avait jusqu'au 21 septembre 1988 pour notifier son refus au représentant des créanciers et qu'à aucun moment Me Y... ne l'avait informé du refus du GARP ; que dans ces conditions, ce n'est qu'à l'audience du conseil des prud'hommes du 6 octobre 1988, c'est-à-dire, hors délai, que le GARP avait indiqué son refus de garantir la créance de M. X... ; qu'en se contentant d'affirmer que M. X... ne peut se prévaloir de l'absence du refus du GARP alors qu'il a lui même précisément saisi le conseil des prud'hommes après la carence de cette institution, sans rechercher si l'absence de notification par le GARP de son refus de garantir la créance de M. X..., dans les délais prévus par l'article 143-11-7 du Code du travail, ne privait pas cet organisme de toute possibilité de contester la validité du contrat de travail de M. X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 143-11-7 du Code du travail et 82 du décret du 27 décembre 1985 ;

Mais attendu, d'une part, que les juges du fond ont relevé que le salarié avait lui-même saisi le conseil de prud'hommes pour obtenir la fixation de ses créances salariales et leur garantie par le GARP ; qu'il en résultait que la juridiction prud'homale pouvait statuer tant sur l'existence ou la validité du contrat de travail que sur les créances en résultant ; que, d'autre part, si le GARP est tenu de verser au représentant des créanciers ou du mandataire-liquidateur les sommes figurant sur les relevés des créances salariales dans les délais fixés par l'article L. 143-11-7 du Code du travail, aucune disposition ne prévoit que son refus de payer doive être formulé dans ces délais ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que M. X... fait encore grief à l'arrêt d'avoir déclaré nul le contrat de travail, alors, d'une part, que le jugement du conseil des prud'hommes, dont M. X... demandait confirmation, précisait que la société Le Joyau de la Marne, en situation difficile, avait fait appel à lui afin de tenter de redresser cette situation ; qu'en estimant cependant que les prestations respectives des parties étaient déséquilibrées et que, dès lors, le contrat devait être annulé, sans rechercher, comme elle y était invitée, tant par les conclusions de M. X... que par le jugement du conseil de prud'hommes, si l'engagement de M. X... ne correspondait pas à une nécessité pour l'entreprise, de telle sorte que les prestations respectives des parties auraient été équilibrées, la cour d'appel a privé sa décision de base légale, au regard de l'article 107 de la loi du 27 janvier 1985 ; et alors, d'autre part, que sont nuls de droit les contrats commutatifs conclus depuis la date de cessation des paiements lorsque les obligations du débiteur excédent notablement celles de l'autre partie ; qu'en se contentant d'affirmer que la charge salariale supportée par la société en situation largement obérée n'était pas en proportion de l'activité dispensée à son profit par M. X... sans rechercher, si l'obligation de l'employeur excédait notablement celle de M. X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 107 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Mais attendu que la cour d'appel a, par une décision motivée, souverainement apprécié l'existence d'un déséquilibre entre les prestations des parties au contrat ; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.