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Décisions

TUE, 10e ch. élargie, 9 juin 2021, n° T-665/20

TRIBUNAL DE L'UNION EUROPÉENNE

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Ryanair DAC

Défendeur :

Commission européenne, République fédérale d’Allemagne, République française, Condor Flugdienst GmbH

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Kornezov (rapporteur)

Juges :

M. Buttigieg, Mme Kowalik Bańczyk, M. Hesse, Mme Stancu

Avocats :

Me Vahida, Me Laprévote, Me Blanc, Me Rating, Me Metaxas-Maranghidis, Me Birnstiel, Me Blazek

TUE n° T-665/20

9 juin 2021

LE TRIBUNAL (dixième chambre élargie),

Antécédents du litige

1 Condor Flugdienst GmbH (ci-après « Condor ») est une compagnie aérienne qui assure des vols charter et dont le siège se trouve à Kelsterbach (Allemagne). Elle fournit des services de transport aérien à des clients individuels et à des voyagistes à partir de Francfort, Düsseldorf, Munich et Hambourg (Allemagne), en se concentrant sur le marché des voyages d’agrément.

2 Condor était auparavant détenue par Thomas Cook Group plc (ci-après le « groupe Thomas Cook »). Le 23 septembre 2019, le groupe Thomas Cook a cessé ses activités et a été mis en liquidation judiciaire. En raison des liens opérationnels et financiers étroits entre celui-ci et Condor, cette dernière a également été confrontée à des difficultés financières et a dû, par conséquent, demander l’ouverture d’une procédure d’insolvabilité le 25 septembre 2019.

3 Le même jour, la République fédérale d’Allemagne a notifié à la Commission européenne une aide individuelle en faveur de Condor sous la forme d’un prêt au sauvetage de 380 millions d’euros bénéficiant d’une garantie d’État. L’objectif de cette mesure était de permettre à Condor de poursuivre ses activités jusqu’à ce qu’elle constitue ses propres réserves de liquidités lui permettant d’opérer indépendamment du groupe Thomas Cook. Ladite mesure visait ainsi à maintenir un transport aérien ordonné et à limiter les conséquences négatives pour Condor causées par la liquidation de sa société mère. Par décision du 14 octobre 2019, C(2019) 7429 final, relative à l’aide d’État SA.55394 (2019/N) – Allemagne – Aide au sauvetage à Condor, la Commission a approuvé l’aide.

4 Le 24 avril 2020, la République fédérale d’Allemagne a notifié à la Commission, conformément à l’article 108, paragraphe 3, TFUE, une autre aide individuelle en faveur de Condor, sous la forme de deux prêts garantis par elle assortis d’intérêts subventionnés. Cette mesure visait à indemniser Condor pour les dommages directement subis à cause de l’annulation ou de la reprogrammation de ses vols à la suite de l’instauration de restrictions de voyages, et en particulier des mesures de confinement, dans le contexte de la pandémie de COVID-19.

5 Le 26 avril 2020, la Commission a adopté la décision C(2020) 2795 final relative à l’aide d’État SA.56867 (2020/N, ex 2020/PN) – Allemagne – Indemnisation des dommages causés par la pandémie de COVID-19 à Condor (ci-après la « décision attaquée »), dans laquelle elle a conclu que la mesure en cause était constitutive d’une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, compatible avec le marché intérieur en vertu de l’article 107, paragraphe 2, sous b), TFUE.

Procédure et conclusions des parties

6 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 6 novembre 2020, la requérante, Ryanair DAC, a introduit le présent recours.

7 Par acte déposé au greffe du Tribunal le même jour, la requérante a demandé qu’il soit statué sur le présent recours selon une procédure accélérée, conformément aux articles 151 et 152 du règlement de procédure du Tribunal. Par décision du 2 décembre 2020, le Tribunal (dixième chambre) a fait droit à la demande de procédure accélérée.

8 La Commission a déposé le mémoire en défense au greffe du Tribunal le 21 décembre 2020.

9 En application de l’article 106, paragraphe 2, du règlement de procédure, la requérante a présenté, le 28 décembre 2020, une demande motivée d’audience de plaidoiries.

10 Sur proposition de la dixième chambre, le Tribunal a décidé, en application de l’article 28 du règlement de procédure, de renvoyer l’affaire devant une formation de jugement élargie.

11 Par actes déposés au greffe du Tribunal respectivement le 4 janvier 2021, le 27 janvier 2021 et le 28 janvier 2021, la République fédérale d’Allemagne, Condor et la République française ont demandé à intervenir dans la présente procédure au soutien des conclusions de la Commission.

12 Par décisions respectivement du 18 janvier et du 9 février 2021, le président de la dixième chambre du Tribunal a admis l’intervention de la République fédérale d’Allemagne et de la République française.

13 Par ordonnance du 11 février 2021, le président de la dixième chambre du Tribunal a admis l’intervention de Condor.

14 Par mesures d’organisation de la procédure signifiées respectivement le 19 janvier et le 11 février 2021, la République fédérale d’Allemagne, la République française et Condor ont été autorisées, en application de l’article 154, paragraphe 3, du règlement de procédure, à déposer un mémoire en intervention.

15 La République fédérale d’Allemagne a joint à son mémoire en intervention la version confidentielle de la décision attaquée. Lors de l’audience, la Commission et Condor ont chacune confirmé qu’elles n’avaient pas d’objection à ce que la version confidentielle de la décision attaquée soit communiquée à la requérante et à ce que le Tribunal y fasse référence dans la décision mettant fin à l’instance. Il en a été pris acte dans le procès-verbal de l’audience.

16 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

– annuler la décision attaquée ;

– condamner la Commission aux dépens.

17 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

– rejeter le recours comme non fondé ;

– condamner la requérante aux dépens.

18 La République française conclut à ce qu’il plaise au Tribunal de rejeter le recours comme étant irrecevable en ce qu’il tend à contester le bien-fondé de la décision attaquée et de le rejeter au fond pour le surplus. À titre subsidiaire, elle conclut à ce qu’il plaise au Tribunal de le rejeter au fond dans son intégralité.

19 À l’instar de la Commission, la République fédérale d’Allemagne et Condor concluent à ce qu’il plaise au Tribunal de rejeter le recours comme étant non fondé et de condamner la requérante aux dépens 

En droit

20 À l’appui du recours, la requérante, soulève quatre moyens tirés, respectivement, le premier, d’une violation des principes de non-discrimination, de libre prestation des services et de liberté d’établissement, le deuxième, d’une application erronée de l’article 107, paragraphe 2, sous b), TFUE et d’une erreur manifeste d’appréciation relative à la proportionnalité de l’aide, le troisième, de ce que la Commission aurait dû ouvrir la procédure formelle d’examen et, le quatrième, d’une violation de l’obligation de motivation au sens de l’article 296 TFUE.

Sur la recevabilité

21 La requérante fait valoir, aux points 33 à 41 de la requête, qu’elle a qualité pour agir en tant qu’« intéressée » au sens de l’article 108, paragraphe 2, TFUE et que « partie intéressée » au sens de l’article 1er, sous h), du règlement (UE) 2015/1589 du Conseil, du 13 juillet 2015, portant modalités d’application de l’article 108 TFUE (JO 2015, L 248, p. 9), ce qui lui permet d’introduire un recours en annulation visant à la sauvegarde de ses droits procéduraux à l’encontre de la décision attaquée, prise sans ouverture de la procédure formelle d’examen.

22 En tant que concurrente de Condor, les intérêts de la requérante seraient affectés par l’octroi de la mesure d’aide en cause qui permettrait à Condor de se maintenir sur le marché en tant que concurrent subventionné malgré les conséquences négatives de la pandémie de COVID-19. En revanche, la requérante, qui serait la deuxième plus grande compagnie aérienne en Allemagne, ne bénéficierait pas d’un tel soutien.

23 La Commission ne conteste pas la recevabilité du recours.

24 La République française considère que la requérante n’a pas qualité pour agir pour contester le bien-fondé de la décision attaquée et que, dès lors, les premier et deuxième moyens du recours sont irrecevables. En revanche, la République française ne conteste pas la recevabilité du troisième moyen du recours, la requérante étant, selon elle, incontestablement une partie intéressée au sens de l’article 108, paragraphe 2, TFUE, ni celle du quatrième moyen.

25 Il y a lieu de constater que la recevabilité du recours ne fait pas de doute pour autant que, par celui-ci, la requérante entend soutenir que la Commission aurait dû ouvrir la procédure formelle d’examen visée à l’article 108, paragraphe 2, TFUE.

26 En effet, dans le cadre de la procédure de contrôle visée à l’article 108 TFUE, deux phases doivent être distinguées. D’une part, la phase préliminaire d’examen instituée à l’article 108, paragraphe 3, TFUE, qui permet à la Commission de se former une première opinion sur la compatibilité de l’aide en cause. D’autre part, la procédure formelle d’examen prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE, qui permet à la Commission d’avoir une information complète sur les données de l’affaire. Ce n’est que dans le cadre de cette procédure que le traité FUE prévoit l’obligation, pour la Commission, de mettre en demeure les intéressés de présenter leurs observations (arrêts du 19 mai 1993, Cook/Commission, C‑198/91, EU:C:1993:197, point 22 ; du 15 juin 1993, Matra/Commission, C‑225/91, EU:C:1993:239, point 16, et du 15 octobre 2018, Vereniging Gelijkberechtiging Grondbezitters e.a./Commission, T‑79/16, non publié, EU:T:2018:680, point 46).

27 Lorsque la procédure formelle d’examen n’est pas ouverte, les parties intéressées, qui auraient pu déposer des observations durant cette seconde phase, sont dépourvues de cette possibilité. Pour y remédier, il leur est reconnu le droit de contester, devant le juge de l’Union européenne, la décision prise par la Commission de ne pas ouvrir la procédure formelle d’examen. Ainsi, un recours visant à l’annulation d’une décision fondée sur l’article 108, paragraphe 3, TFUE introduit par une partie intéressée au sens de l’article 108, paragraphe 2, TFUE est recevable lorsque l’auteur de ce recours tend à faire sauvegarder les droits procéduraux qu’il tire de cette dernière disposition (voir arrêt du 18 novembre 2010, NDSHT/Commission, C‑322/09 P, EU:C:2010:701, point 56 et jurisprudence citée).

28 Dans le cas présent, la procédure formelle d’examen n’a pas été ouverte par la Commission et la requérante invoque, dans le cadre du troisième moyen, une violation de ses droits procéduraux. Au regard de l’article 1er, sous h), du règlement 2015/1589, une entreprise concurrente du bénéficiaire d’une mesure d’aide figure incontestablement parmi les « parties intéressées », au sens de l’article 108, paragraphe 2, TFUE (arrêt du 3 septembre 2020, Vereniging tot Behoud van Natuurmonumenten in Nederland e.a./Commission, C‑817/18 P, EU:C:2020:637, point 50 ; voir également, en ce sens, arrêt du 18 novembre 2010, NDSHT/Commission, C‑322/09 P, EU:C:2010:701, point 59).

29 En l’espèce, il est incontestable qu’il existe un rapport de concurrence entre la requérante et Condor, le bénéficiaire de l’aide. En effet, la requérante a fait valoir, sans être contredite, qu’elle participait à la desserte aérienne de l’Allemagne depuis plus de 20 ans, qu’elle avait, en 2019, transporté 19 millions de passagers depuis l’Allemagne ou à destination de ce pays et qu’elle détenait environ 9 % du marché allemand, ce qui en faisait la deuxième plus grande compagnie aérienne en Allemagne. La requérante a également mis en exergue que son programme de vols pour l’été 2020, établi avant que la pandémie de COVID-19 n’éclate, comprenait 265 lignes au départ de 14 aéroports allemands. En outre, au paragraphe 15 de la décision attaquée, la Commission a constaté que certaines destinations desservies par Condor l’étaient également par la requérante et que ces compagnies aériennes étaient concurrentes en ce qui concernait la vente de « sièges secs », c’est-à-dire de sièges vendus directement aux clients individuels. La requérante est, dès lors, une partie intéressée ayant un intérêt à assurer la sauvegarde des droits procéduraux qu’elle tire de l’article 108, paragraphe 2, TFUE.

30 Il y a donc lieu d’admettre la recevabilité du recours en tant que la requérante invoque la violation de ses droits procéduraux.

31 Dans ce contexte, force est de constater que le troisième moyen, qui vise explicitement à obtenir le respect des droits procéduraux de la requérante, est recevable, compte tenu de la qualité de partie intéressée de celle-ci, ainsi que cela a été établi au point 29 ci-dessus. En effet, la requérante peut invoquer, aux fins de la préservation des droits procéduraux dont elle bénéficie dans le cadre de la procédure formelle d’examen, des moyens de nature à démontrer que l’appréciation des informations et des éléments dont la Commission disposait ou pouvait disposer, lors de la phase d’examen préliminaire de la mesure notifiée, aurait dû susciter des doutes quant à la compatibilité de cette dernière avec le marché intérieur (voir, en ce sens, arrêts du 22 décembre 2008, Régie Networks, C‑333/07, EU:C:2008:764, point 81 ; du 9 juillet 2009, 3F/Commission, C‑319/07 P, EU:C:2009:435, point 35 ; et du 24 mai 2011, Commission/Kronoply et Kronotex, C‑83/09 P, EU:C:2011:341, point 59).

32 Il convient de rappeler, en outre, que la requérante est en droit, pour démontrer la violation de ses droits procéduraux en raison des doutes que la mesure litigieuse aurait dû susciter quant à sa compatibilité avec le marché intérieur, d’invoquer des arguments tendant à démontrer que le constat de la compatibilité de cette mesure avec le marché intérieur auquel la Commission était parvenue était erroné, ce qui, a fortiori, est de nature à établir que la Commission aurait dû éprouver des doutes lors de son appréciation de la compatibilité de cette mesure avec le marché intérieur. Partant, le Tribunal est habilité à examiner les arguments de fond présentés par la requérante, afin de vérifier s’ils sont de nature à conforter le moyen expressément formé par elle concernant l’existence de doutes justifiant l’ouverture de la procédure visée à l’article 108, paragraphe 2, TFUE (voir, en ce sens, arrêts du 13 juin 2013, Ryanair/Commission, C‑287/12 P, non publié, EU:C:2013:395, points 57 à 60, et du 6 mai 2019, Scor/Commission, T‑135/17, non publié, EU:T:2019:287, point 77).

33 S’agissant du quatrième moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation, il convient de souligner que la méconnaissance de l’obligation de motivation relève de la violation des formes substantielles et constitue un moyen d’ordre public qui doit être soulevé d’office par le juge de l’Union et ne se rapporte pas à la légalité au fond de la décision attaquée (voir, en ce sens, arrêt du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C‑367/95 P, EU:C:1998:154, points 67 à 72).

Sur le fond

34 Il convient d’examiner d’abord le quatrième moyen.

Sur le quatrième moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation

35 Par son quatrième moyen, la requérante soutient, en substance, que la décision attaquée est entachée d’un défaut ou d’une insuffisance de motivation à plusieurs égards.

36 En particulier, la requérante fait valoir que la Commission n’a pas motivé à suffisance de droit, dans la décision attaquée, l’évaluation du dommage que la mesure d’aide en cause vise à indemniser, ce qui en substance l’empêcherait, ainsi que le Tribunal, de vérifier la proportionnalité de ladite mesure d’aide.

37 À cet effet, la requérante avance, notamment, dans le cadre de son deuxième moyen que la Commission n’aurait fourni aucune explication des raisons l’ayant amené à inclure, dans le calcul des dommages que la mesure d’aide en cause vise à indemniser, les coûts liés à la prolongation de la période d’insolvabilité de Condor à la suite de l’échec de la vente de cette dernière. La requérante critique à cet égard la motivation du paragraphe 79 de la décision attaquée. Or, les coûts susmentionnés étant d’un montant supérieur à la différence entre les dommages allégués et le montant de l’aide, la décision attaquée serait susceptible de donner lieu à une surcompensation et, dès lors, à une application erronée de l’article 107, paragraphe 2, sous b), TFUE.

38 La Commission, soutenue par la République fédérale d’Allemagne, la République française et Condor, conteste cette argumentation. Elle soutient, dans le cadre de sa réponse au deuxième moyen, qu’elle a dûment établi dans la décision attaquée, aux paragraphes 21 et 79, que la prolongation auparavant imprévisible de la procédure d’insolvabilité de Condor était une conséquence directe de l’événement extraordinaire en cause. Sans la pandémie de COVID-19 et les restrictions adoptées dans ce contexte, Condor n’aurait plus été soumise à la procédure d’insolvabilité en avril 2020. Elle explique que l’investisseur potentiel se serait retiré de l’accord d’achat en raison des difficultés économiques et financières rencontrées par Condor et lui-même du fait de la pandémie de COVID-19. Ainsi, la Commission allègue que la requérante critique, en réalité, le bien-fondé de son appréciation sur ce point et non la motivation contenue dans la décision attaquée à cet égard, laquelle permettrait de comprendre parfaitement son analyse.

39 Il y a lieu de rappeler, d’emblée, que, selon une jurisprudence constante, la motivation exigée par l’article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires ou d’autres personnes concernées directement et individuellement par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt du 8 septembre 2011, Commission/Pays-Bas, C‑279/08 P, EU:C:2011:551, point 125 et jurisprudence citée).

40 S’il est vrai que les institutions ne sont pas obligées, dans la motivation des décisions qu’elles adoptent, de prendre position sur tous les arguments que les intéressés invoquent devant elles au cours d’une procédure administrative, il n’en demeure pas moins qu’elles doivent exposer les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de leurs décisions (voir, en ce sens, arrêts du 10 juillet 2008, Bertelsmann et Sony Corporation of America/Impala C‑413/06 P, EU:C:2008:392, point 169 et jurisprudence citée, et du 18 septembre 2018, Duferco Long Products/Commission, T‑93/17, non publié, EU:T:2018:558, point 67).

41 Dans ce contexte, la décision de ne pas ouvrir la procédure formelle d’examen prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE doit uniquement contenir les raisons pour lesquelles la Commission estime ne pas être en présence de difficultés sérieuses d’appréciation de la compatibilité de l’aide concernée avec le marché intérieur et même une motivation succincte de cette décision doit être considérée comme suffisante au regard de l’exigence de motivation que prévoit l’article 296 TFUE si elle fait apparaître de façon claire et non équivoque les raisons pour lesquelles la Commission a estimé ne pas être en présence de telles difficultés, la question du bien-fondé de cette motivation étant étrangère à cette exigence (arrêts du 27 octobre 2011, Autriche/Scheucher-Fleisch e.a., C‑47/10 P, EU:C:2011:698, point 111, et du 12 mai 2016, Hamr – Sport/Commission, T‑693/14, non publié, EU:T:2016:292, point 54 ; voir également, en ce sens, arrêt du 22 décembre 2008, Régie Networks, C‑333/07, EU:C:2008:764, points 65, 70 et 71).

42 Aux termes de l’article 107, paragraphe 2, sous b), TFUE, lequel constitue la base juridique de la décision attaquée, sont compatibles avec le marché intérieur les aides destinées à remédier aux dommages causés par les calamités naturelles ou par d’autres événements extraordinaires. S’agissant d’une dérogation au principe général d’incompatibilité des aides d’État avec le marché intérieur énoncé à l’article 107, paragraphe 1, TFUE, l’article 107, paragraphe 2, sous b), TFUE doit faire l’objet d’une interprétation stricte. Dès lors, seuls peuvent être compensés, au sens de cette disposition, les désavantages économiques causés directement par des calamités naturelles ou par d’autres événements extraordinaires. Un lien direct entre les dommages causés par l’événement extraordinaire et l’aide étatique doit donc exister et une évaluation aussi précise que possible des dommages subis est nécessaire (arrêt du 23 février 2006, Atzeni e.a., C‑346/03 et C‑529/03, EU:C:2006:130, point 79).

43 La Commission doit, ensuite, vérifier si les mesures d’aide en cause se prêtent ou non à être utilisées pour remédier aux dommages causés par des événements extraordinaires et bannit des mesures de nature générale et indépendante des dommages prétendument provoqués par de tels événements (arrêt du 17 février 2021, Ryanair/Commission, T‑259/20, sous pourvoi, EU:T:2021:92, point 25). Il faut également que l’État membre concerné limite le montant de la compensation à ce qui est nécessaire pour remédier aux dommages subis par les bénéficiaires de la mesure en cause.

44 Il s’ensuit que les aides susceptibles d’être supérieures aux dommages directement causés par l’événement en cause ne relèvent pas de l’article 107, paragraphe 2, sous b), TFUE (voir, en ce sens, arrêt du 11 novembre 2004, Espagne/Commission, C‑73/03, non publié, EU:C:2004:711, points 40 et 41).

45 Ainsi, le fait générateur du dommage, tel que défini dans la décision attaquée, doit être la cause déterminante du dommage auquel l’aide en cause vise à remédier et être directement à l’origine de ce dernier. Un lien direct n’existera que lorsque le dommage est la conséquence directe de l’événement en question sans dépendre de l’interposition d’autres causes.

46 En l’espèce, en premier lieu, il convient de relever, qu’il ressort du paragraphe 11 de la décision attaquée que l’objectif de l’aide en cause est d’indemniser Condor pour « les dommages directement causés par l’annulation ou la reprogrammation de ses vols en raison des restrictions de voyages liées à la pandémie de COVID-19 et notamment des mesures de confinement ». Le paragraphe 84 de la décision attaquée confirme explicitement cet objectif de l’aide en cause.

47 En outre, dans la décision attaquée, la Commission a décrit en détail les restrictions de voyages imposées par les États membres et notamment par l’Allemagne. Elle explique que la pandémie de COVID-19 a abouti à des restrictions de voyages dans le monde entier et à la fermeture de la plupart des lignes de transport aérien de passagers. Pour cette raison, Condor a dû annuler ou reprogrammer la grande majorité de ses vols et immobiliser une grande partie de sa flotte (voir, notamment, paragraphes 4, 9 et 72 de la décision attaquée).

48 Au point 59 de son mémoire en défense, la Commission a explicitement confirmé que la mesure d’aide en cause visait à indemniser Condor pour ses « pertes dues à l’annulation ou à la reprogrammation de ses vols ayant fait suite exclusivement à l’imposition de restrictions de voyages liées à la pandémie de COVID-19 » et que la décision attaquée « ne prévo[yait] pas de compensation pour d’autres dommages susceptibles d’avoir été causés en raison de la pandémie de COVID-19 ». La Commission explique également que la méthode utilisée dans la décision attaquée pour l’estimation des dommages en cause n’inclut pas « d’autres sources de dommages », « en dehors des restrictions de voyages ».

49 Il est donc clair que, selon les termes mêmes de la décision attaquée et les arguments de la Commission dans son mémoire en défense, la mesure d’aide en cause vise à indemniser Condor pour les dommages directement causés par l’annulation et la reprogrammation de ses vols en raison des restrictions de voyages imposées dans le contexte de la pandémie de COVID-19, et non pour tout autre dommage lié plus généralement à ladite pandémie.

50 Dans ces circonstances, en deuxième lieu, il convient d’examiner, si, dans la décision attaquée, la Commission a exposé à suffisance de droit les raisons l’ayant amenée à considérer, notamment, que les coûts supplémentaires encourus par Condor en raison de la prolongation de la procédure d’insolvabilité, auxquels fait référence la requérante, étaient directement causés par l’annulation et la reprogrammation des vols de Condor en raison des restrictions de voyages imposées dans le contexte de la pandémie de COVID-19.

51 Il convient de préciser, en outre, qu’il incombe à la Commission, qui est chargée du contrôle de la compatibilité des mesures d’aide d’État avec le marché intérieur, de s’assurer de l’existence d’un tel lien de causalité.

52 En l’espèce, pour évaluer le montant du dommage que la mesure d’aide en cause vise à réparer, la Commission s’est fondée, en substance, sur la différence entre les prévisions des bénéfices avant impôt (ci-après les « BAI ») pour la période allant de mars à décembre 2020, effectuées avant et après l’annonce des restrictions de voyages et des mesures de confinement. Cette différence a été évaluée à 259,7 millions d’euros. En outre, la Commission a considéré « légitime » d’ajouter à ce montant des coûts supplémentaires encourus par Condor en raison de la prolongation de la procédure d’insolvabilité de cette dernière, lesquels n’étaient pas prévisibles lorsque les prévisions des BAI après la survenance de la pandémie de COVID-19 ont été réalisées (paragraphe 79 de la décision attaquée). Le montant de ces coûts supplémentaires a été évalué à 17 millions d’euros. Le montant total du dommage pour lequel Condor était censée être indemnisée a ainsi été porté à 276,7 millions d’euros.

53 L’origine des coûts supplémentaires a été explicitée aux paragraphes 18 à 21 de la décision attaquée, dont il ressort, en substance, que, depuis le mois de septembre 2019, c’est-à-dire bien avant que les restrictions de voyages en raison de la pandémie de COVID-19 ne soient imposées, Condor était placée en procédure d’insolvabilité et que le plan de restructuration élaboré dans le cadre de cette procédure prévoyait notamment sa vente à un nouvel investisseur. Toutefois, ladite vente a échoué lorsque ledit investisseur a annoncé, vers la fin du mois de mars 2020, sa décision de se retirer de la transaction envisagée. Aux termes du paragraphe 21 de la décision attaquée, l’« échec des efforts de vente entraînera une procédure d’insolvabilité prolongée », laquelle générerait les coûts supplémentaires, évalués à 17 millions d’euros.

54 Il semble ressortir des passages de la décision attaquée précités que les coûts supplémentaires en cause résulteraient de l’échec des efforts pour réaliser la vente de Condor. Cet échec aurait eu pour conséquence que la procédure d’insolvabilité, en cours depuis le mois de septembre 2019, n’aurait pas pu être close selon le calendrier initialement prévu, mais aurait dû être prolongée, ce qui aurait occasionné des coûts supplémentaires liés à cette procédure.

55 Toutefois, la décision attaquée n’explique pas en quoi les coûts supplémentaires engendrés dans le cadre de la prolongation de la procédure d’insolvabilité de Condor seraient directement causés par l’annulation ou la reprogrammation des vols de celle-ci en raison des restrictions de voyages imposées dans le contexte de la pandémie de COVID-19.

56 En effet, premièrement, il échet de relever que la Commission s’est limitée à indiquer, au paragraphe 79 de la décision attaquée, qu’elle considérait « légitime » d’ajouter les coûts supplémentaires engendrés dans le cadre de la prolongation de la procédure d’insolvabilité de Condor aux dommages réclamés, car ils n’étaient pas prévisibles au moment où les prévisions des BAI après la survenance de la pandémie de COVID-19 avaient été effectuées. Toutefois, le fait que lesdits coûts étaient ou non prévisibles à ce moment-là ne démontre pas qu’ils étaient directement causés par l’annulation et la reprogrammation des vols de Condor en raison des restrictions de voyages imposées dans le contexte de la pandémie de COVID-19. De même, il ne suffit pas d’indiquer, dans la décision attaquée, qu’il est « légitime » d’ajouter lesdits coûts, sans expliquer, de manière suffisamment claire et précise, les raisons pour lesquelles la Commission a considéré que la cause déterminante de ceux-ci résidait dans l’annulation et la reprogrammation susmentionnées.

57 Deuxièmement, la décision attaquée n’explique pas non plus quelle était la raison de l’échec de la vente de Condor. Il s’ensuit qu’il n’y a aucun élément dans la décision attaquée indiquant que cette vente aurait échoué à cause de l’annulation et de la reprogrammation des vols de Condor en raison des restrictions de voyages imposées dans le contexte de la pandémie de COVID-19.

58 Troisièmement, il ressort de la décision attaquée que la procédure d’insolvabilité, déclenchée dès septembre 2019, a été engagée en raison des difficultés financières auxquelles était confrontée Condor à la suite de la liquidation de sa société mère, et non pas en raison des difficultés liées à la pandémie de COVID-19. Ladite procédure et les coûts qui y sont afférents avaient donc pour origine une situation antérieure à la survenance de cette pandémie. Dans ces circonstances, il incombait à la Commission de s’interroger avec une attention particulière sur la question de savoir si l’annulation et la reprogrammation des vols de Condor en raison des restrictions de voyages imposées dans le cadre de la pandémie de COVID-19 étaient véritablement la cause déterminante des coûts supplémentaires encourus par Condor en raison de la prolongation de la procédure d’insolvabilité, et de motiver sa décision sur ce point à suffisance de droit.

59 En effet, même à supposer que cette pandémie ait compliqué les chances de voir la procédure d’insolvabilité close dans les meilleurs délais, comme l’a fait valoir la Commission lors de l’audience, il n’en demeure pas moins que rien dans la décision attaquée n’indique quel est, selon la Commission, le lien de cause à effet entre, d’une part, l’annulation et la reprogrammation des vols de Condor et, d’autre part, la survenance desdits coûts supplémentaires. En particulier, si la Commission a indiqué, au paragraphe 21 de la décision attaquée, que lesdits coûts étaient le résultat de l’échec de la vente de Condor, elle n’a précisé ni la raison de cet échec, ni de surcroît si, à la suite dudit échec, Condor était obligée de poursuivre la procédure d’insolvabilité ou si elle pouvait en sortir, nonobstant ledit échec. Le fait que, selon le paragraphe 21 de la décision attaquée, ladite prolongation allait durer deux à trois mois, tandis que, selon les paragraphes 92 et 93 de la même décision, la vente ultérieure de Condor a été considérée comme possible vers le mois de juin 2022, semble suggérer que Condor avait l’intention de ne plus être soumise à ladite procédure bien avant et indépendamment de la réalisation éventuelle d’une telle vente et indépendamment de celle-ci.

60 Quatrièmement, la Commission n’a pas non plus expliqué, dans la décision attaquée, la manière dont les coûts supplémentaires engendrés par la prolongation de la procédure d’insolvabilité avaient été évalués ainsi que le type de coûts concernés. En outre, elle n’a pas répondu à la question de savoir si la totalité de ceux-ci ou uniquement une partie avait été considérée comme étant directement causée par l’annulation et la reprogrammation des vols de Condor.

61 Dans ces circonstances, en l’absence d’autres éléments concrets et vérifiables dans la décision attaquée, il est impossible pour le Tribunal de contrôler si la Commission a pu conclure, sans éprouver des doutes à cet égard, qu’il existait un lien de causalité direct entre les coûts occasionnés par la prolongation de la période d’insolvabilité et l’annulation et la reprogrammation des vols de Condor en raison des restrictions de voyages imposées dans le contexte de la pandémie de COVID-19.

62 La Commission ne saurait tirer argument du fait que les autorités allemandes se sont engagées à vérifier ex post si le montant de l’aide dépassait le montant des dommages et à récupérer auprès de Condor toute surcompensation qui aurait pu en résulter (paragraphes 98 à 100 de la décision attaquée). En effet, la Commission ayant conclu, dans la décision attaquée, que les coûts liés à la prolongation de la procédure d’insolvabilité devaient être ajoutés aux dommages à indemniser, ladite vérification ex post portera uniquement sur la quantification précise de ces coûts et non sur la question juridique de savoir si lesdits coûts peuvent ou non faire l’objet d’une compensation au titre de l’article 107, paragraphe 2, sous b), TFUE.

63 Il s’ensuit que la décision attaquée est entachée d’une insuffisance de motivation à cet égard.

64 Il convient donc d’accueillir le quatrième moyen du recours, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres arguments avancés par la requérante dans le cadre de ce moyen.

65 Il convient également de relever que, selon la décision attaquée, les dommages causés à Condor ont été évalués à 276,7 millions d’euros, tandis que le montant de l’aide l’a été à 267,1 millions d’euros. Sur cette base, la Commission a conclu que la mesure d’aide en cause ne dépassait pas ce qui était nécessaire pour remédier auxdits dommages (paragraphes 96 et 97 de la décision attaquée). Il s’ensuit qu’une éventuelle déduction des coûts liés à la prolongation de la procédure d’insolvabilité, évalués à 17 millions d’euros, du montant total des dommages, dans l’hypothèse où la condition relative au lien de causalité directe ne serait pas remplie, ce que le Tribunal n’est pas en mesure de vérifier en raison de l’insuffisance de motivation dont est viciée la décision attaquée, aurait pour conséquence que le montant de l’aide dépasserait le montant des dommages en cause, ce qui serait susceptible de la rendre incompatible avec le marché intérieur, conformément à la jurisprudence citée au point 44 ci-dessus. Partant, l’insuffisance de motivation dont est entachée la décision attaquée à cet égard empêche le Tribunal de contrôler si c’est à bon droit que la Commission a estimé ne pas être en présence de difficultés sérieuses d’appréciation de la compatibilité de l’aide concernée avec le marché intérieur.

66 L’insuffisance de motivation dont est viciée la décision attaquée entraîne donc l’annulation de celle-ci.

67 Il y a donc lieu d’annuler la décision attaquée, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du recours.

Sur le maintien des effets de la décision annulée

68 Selon une jurisprudence constante, lorsque des considérations impérieuses de sécurité juridique le justifient, le juge de l’Union bénéficie, en vertu de l’article 264, second alinéa, TFUE, d’un pouvoir d’appréciation pour indiquer, dans chaque cas particulier, les effets de l’acte concerné qui doivent être considérés comme définitifs (voir, par analogie, arrêt du 22 décembre 2008, Régie Networks, C‑333/07, EU:C:2008:764, point 121 et jurisprudence citée).

69 Il résulte donc de l’article 264, second alinéa, TFUE que, s’il l’estime nécessaire, le juge de l’Union peut, même d’office, limiter l’effet d’annulation de son arrêt (voir, en ce sens, arrêt du 1er avril 2008, Parlement et Danemark/Commission, C‑14/06 et C‑295/06, EU:C:2008:176, point 85).

70 Conformément à cette jurisprudence, le juge de l’Union a fait usage de la possibilité de limiter les effets dans le temps de la constatation de l’invalidité d’une réglementation de l’Union lorsque des considérations impérieuses de sécurité juridique tenant à l’ensemble des intérêts, tant publics que privés, en jeu dans les affaires concernées empêchaient de remettre en cause la perception ou le paiement de sommes d’argent effectuées sur le fondement de cette réglementation pour la période antérieure à la date de l’arrêt (arrêt du 22 décembre 2008, Régie Networks, C‑333/07, EU:C:2008:764, point 122).

71 En l’occurrence, le Tribunal considère qu’il existe des considérations impérieuses de sécurité juridique justifiant la limitation des effets dans le temps de l’annulation de la décision attaquée. En effet, d’une part, la remise en cause immédiate de la perception des sommes d’argent prévues par la mesure d’aide en cause aurait des conséquences préjudiciables pour l’économie de l’Allemagne dans un contexte économique et social déjà marqué par les effets néfastes de la pandémie de COVID-19. D’autre part, il convient de tenir compte du fait que l’annulation de la décision attaquée résulte de l’insuffisance de la motivation de celle-ci.

72 Or, en vertu de l’article 266 TFUE, la Commission, dont émane l’acte annulé, est tenue de prendre les mesures que comporte l’exécution du présent arrêt du Tribunal.

73 Pour ces motifs, il y a lieu de tenir en suspens les effets de l’annulation de la décision attaquée jusqu’à l’adoption d’une nouvelle décision par la Commission. Eu égard à la célérité avec laquelle la Commission a agi à compter de la prénotification et de la notification de la mesure en cause, lesdits effets seront tenus en suspens pendant une période ne pouvant excéder deux mois à compter de la date du prononcé du présent arrêt au cas où la Commission déciderait d’adopter cette nouvelle décision dans le cadre de l’article 108, paragraphe 3, TFUE et pendant une période supplémentaire raisonnable si la Commission décide d’ouvrir la procédure prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE (voir, en ce sens, arrêt du 22 décembre 2008, Régie Networks C‑333/07, EU:C:2008:764, point 126).

Sur les dépens

74 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant succombé, il convient de la condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux de la requérante, conformément aux conclusions de cette dernière.

75 Par ailleurs, en vertu de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, les États membres et les institutions qui sont intervenus au litige supportent leurs propres dépens. En vertu de l’article 138, paragraphe 3, du règlement de procédure, le Tribunal peut décider qu’une partie intervenante, autre que celles mentionnées au paragraphe 1, supportera ses propres dépens.

76 Il convient donc de juger que la République fédérale d’Allemagne, la République française et Condor supporteront leurs propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (dixième chambre élargie)

déclare et arrête :

1) La décision C(2020) 2795 final de la Commission, du 26 avril 2020, relative à l’aide d’État SA.56867 (2020/N, ex 2020/PN) – Allemagne – Indemnisation des dommages causés par la pandémie de COVID-19 à Condor Flugdienst GmbH, est annulée.

2) Il y a lieu de tenir en suspens les effets de l’annulation de ladite décision jusqu’à l’adoption d’une nouvelle décision par la Commission en vertu de l’article 108 TFUE. Lesdits effets sont tenus en suspens pendant une période ne pouvant excéder deux mois à compter de la date du prononcé du présent arrêt au cas où la Commission déciderait d’adopter cette nouvelle décision dans le cadre de l’article 108, paragraphe 3, TFUE et pendant une période supplémentaire raisonnable si la Commission décide d’ouvrir la procédure prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE.

3) La Commission est condamnée à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par Ryanair DAC.

4) La République fédérale d’Allemagne, la République française et Condor Flugdienst supporteront leurs propres dépens.