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Décisions

CA Rennes, 3e ch. com., 18 octobre 2011, n° 11/02954

RENNES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Procureur général près la Cour d'appel de Rennes

Défendeur :

Baudet Immobilier (SCI)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Poumarède

Conseillers :

Mme Cocchiello, Mme André

Avocats :

SCP Bazille, Me Gaborit

T. com. Saint-Nazaire, prés., du 11 avr.…

11 avril 2011

EXPOSE DU LITIGE

Par ordonnance du 11 avril 2011, le président du tribunal de commerce de SAINT-NAZAIRE a :

  • ouvert une procédure de conciliation,
  • nommé Maître Régis VALLIOT pour quatre mois en qualité de conciliateur de la société civile immobilière BAUDET IMMOBILIER,
  • dit que ce conciliateur aura pour mission
  • d'assister cette société dans les négociations entreprises et en cours actuellement en vue de l'octroi de lignes de cautions bancaires nécessaires à sa pérennité et à la hauteur de son activité prévisionnelle,
  • d'assister cette société dans les négociations entreprises et en cours en vue de renforcer ses fonds propres,
  • d'assister plus généralement la société , à la demande de celle-ci, dans toute autre solution de nature à permettre d'assurer sa pérennité,
  • dit que les émoluments du conciliateur seront arrêtés dans les conditions de la convention d'honoraires conclue par les parties le 20 décembre 2010.

Le procureur de la République près le tribunal de grande instance de SAINT-NAZAIRE en a relevé appel le 21 avril 2011. Il expose que seul le président du tribunal de grande instance est en application de l'article L 611-5 du Code de commerce susceptible de prendre une telle mesure pour une personne morale de droit privé non commerçante.

Monsieur le Procureur général a sur ces motifs, sollicité l'annulation de la décision du président du tribunal de commerce de SAINT-NAZAIRE.

Par conclusions du 4 octobre 2011, la société civile immobilière BAUDET IMMOBILIER et Monsieur MARION, gérant de cette société ont demandé à la cour de confirmer cette décision, et de statuer ce que de droit sur les dépens, exposant :

- que la société civile immobilière détenue à 99 % par la société par actions simplifiée CHANTIERS BAUDET est propriétaire des murs dans lesquels la société CHANTIERS BAUDET exerce son activité d'aménagement d'intérieur dans le secteur naval et dans le secteur terrestre,

- que la société CHANTIERS BAUDET a rencontré des difficultés financières et bénéficie depuis le 17 janvier 2011 d'une procédure de conciliation ordonnée par le président du tribunal de commerce de SAINT-NAZAIRE,

- que les discussions en cours pour trouver de la trésorerie tant pour la société civile immobilière que pour la société par actions simplifiée, le projet de vente des locaux à cette fin au profit de la SEM Régional des Pays de Loire rendent nécessaire la désignation, pour la société civile immobilière de Monsieur VALLIOT en qualité de conciliateur, lequel exerce déjà ces fonctions pour la société par actions simplifiée,

- que la maîtrise de l'ensemble justifiait "l'extension de la conciliation de la société par actions simplifiée CHANTIERS BAUDET à la société civile immobilière BAUDET IMMOBILIER", ce qui s'est révélé bénéfique aux deux sociétés.

SUR CE

Considérant que selon les articles L. 211-4 du code de l'organisation judiciaire et de l'article R. 211-4 du même code, "le tribunal de grande instance a compétence exclusive dans les matières déterminées par les lois et règlements, au nombre desquelles figurent les matières suivantes :...8° Sauvegarde, redressement judiciaire et liquidation judiciaire lorsque le débiteur n'est ni commerçant ni immatriculé au répertoire des métiers...", qu'il s'agit d'une compétence d'ordre public,

Considérant par ailleurs que l'article L. 611-5 du Code de commerce permet aux personnes morales de droit privé de bénéficier de la procédure de conciliation prévue par l'article L. 611-4 de ce code pour les personnes exerçant une activité commerciale et précise que le tribunal de grande instance est alors compétent et que son président exerce les mêmes pouvoirs que ceux attribués au président du tribunal de commerce,

Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces textes que la personne morale de droit privé non commerçante peut bénéficier de la procédure de conciliation de l'article L. 611- 4 du code civil, et doit alors porter sa demande devant le président du tribunal de grande instance seul compétent pour en connaître,

Considérant ainsi que l'ouverture de la procédure de conciliation pour la société civile immobilière BAUDET IMMOBILIER ne pouvait relever en aucun cas de la compétence du président du tribunal de commerce, quand bien même il aurait pu connaître quelques mois plus tôt d'une demande tendant aux même fins formée par une société commerciale du même groupe,

Considérant en l'espèce que la décision du président du tribunal de commerce doit être annulée,

Considérant que la société civile immobilière BAUDET IMMOBILIER supportera les frais de la présente instance,

PAR CES MOTIFS

La cour,

Annule l'ordonnance déférée,

Condamne la société civile immobilière BAUDET IMMOBILIER aux dépens.