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Décisions

CA Chambéry, ch. com., 18 décembre 2007, n° 07/01758

CHAMBÉRY

Décision

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

RAF (SARL)

Défendeur :

Bouvet (ès qual.), Avci

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Robert

Conseillers :

Mme Carrier, M. Betous

Avoués :

SCP Dormeval-Puig, SCP Bollonjeon-Arnaud-Bollonjeon

Avocats :

Me Cheham, SCP Visier-Philippe/Ollagnon-Delroise

CA Chambéry n° 07/01758

18 décembre 2007

 

Sur déclaration de cessation des paiements de l’intéressé et par jugement en date du 27 février 2006, le Tribunal de Commerce de CHAMBERY a ouvert la liquidation judiciaire de Monsieur Yonis AVCI exerçant une activité de ravalement de façades à CHAMBERY et désigné Messieurs COLLET et BOUVET en qualité respective de juge commissaire et de liquidateur.

Par exploit du 22 août 2006, Maitre BOUVET es qualité de liquidateur de Monsieur Yonis AVCI a fait assigner la Société RAF, ayant son siège social à DOMARIN (38) et exerçant une activité de plâtrerie peinture et façades, ainsi que son gérant Monsieur Yasin AVCI, fils de Monsieur Yonis AVCI, afin que la liquidation judiciaire de ce dernier soit étendue à la Society RAF constituée au mois d’octobre 2005 entre l’épouse de Monsieur AVCI et le fils de celui-ci, alors âgé de 21 ans.

Par jugement en date du 9 juillet 2007, le Tribunal de Commerce de CHAMBERY a mis hors de cause Monsieur Yasin AVCI, étendu à la Societé RAF la procédure de liquidation judiciaire ouverte à l’égard de Monsieur Yonis AVCI, déclare l’actif et le passif communs à ces deux débiteurs, dit qu’il existerait ainsi une seule procédure, dit que la procédure de liquidation judiciaire de la Society RAF serait réglée en des termes identiques à celle de Monsieur Yonis AVCI notamment concernant les organes de procédure et que la clôture de la procédure de ces deux débiteurs devrait intervenir au ternie d’un délai de vingt mois à compter du jugement et qu’à défaut l’affaire devrait revenir en chambre du conseil, dit que Maitre BOUVET en qualité de liquidateur devrait déposer au greffe la liste des créances déclarées par la Société RAF visée à l’article L 624-1 du Code de Commerce dans un délai de huit mois à compter de l’expiration du délai de déclaration des créances, dit que cette liste devrait reprendre les créances précédemment déclarés au passif de Monsieur Yonis AVCl déposée au greffe par Maitre BOUVET le 5 octobre 2006, désigne Maitre LOISEAU commissaire-priseur aux fins de réaliser l’inventaire et la prisée du patrimoine de la Société RAF ainsi que les garanties qui le grevaient, dit que l’inventaire devrait être déposé au Greffe dans le délai d’un mois de la décision, ordonne au Greffier de proc6der sans délai à la publicité du jugement nonobstant toute voie de recours ainsi que l’emploi des dépens en frais privilégies de liquidation judiciaire.

La Société RAF a interjeté appel de cette décision à l’encontre de Maitre BOUVET es qualité, du Ministère Public et de Monsieur Yonis AVCI.

Aux termes de ses dernières écritures signifies le 29 novembre 2007, elle conclut à l’infirmation du jugement déféré et au déboute des demandes de Maitre BOUVET.

Elle sollicite l’allocation de la somme de 2 000 € en application de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Elle conteste être une société Active, elle fait valoir que son activité n’est pas identique à celle de Monsieur Yonis AVCI, que le lieu d’exercice de cette activité n’est pas le même, que Yasin AVCI n’a pas laissé son père prendre en charge la gestion ou la direction de la société qui est à ce jour bénéficiaire.

Elle conteste que l’achat du camion et de la machine à projeter de Monsieur Yonis AVCI ait été fait sans facture. Elle conteste l’interprétation donnée par Maitre BOUVET es qualité aux déclarations de Madame AVCI et de son mari et soutient qu’il y avait un véritable affectio societatis lors de la création de la société. Elle conteste l’existence d’une confusion des patrimoines.

Suivant conclusions signifiées le 15 novembre 2007, Maitre BOUVET es qualité conclut à la confirmation du jugement défend 11 soutient la confusion de patrimoine et la fictivité de la société RAF.

II invoque les déclarations de Madame AVCI faisant apparaitre qu’elle était dépourvue de tout pouvoir de gestion par son mari et qu’elle a été débarquée de ses fonctions de gérante sans son accord, les documents signés par Monsieur Yonis AVCI qui attestent sa qualité de dirigeant de fait, le transfert du matériel et du personnel sans qu’il ait été préalablement licencié par Monsieur Yonis AVCI, la conservation des éléments essentiels du matériel qui établissent que l’activité exercée par la Société est le m6me et la fictivité du siège social qui correspond à I’adresse du cabinet comptable.

Le Ministère Public conclut à la confirmation du jugement déféré en soutenant que tant la confusion des patrimoines que la fictivité de la Société RAF sont caractérises.

Monsieur Yonis AVCI, qui n’a pas été assigné à personne, n’a pas constitué avoue.

MOTIFS DE LA DECISION

Selon I’article L 621-2 alinéa 2 du Code de Commerce, la procédure de liquidation judiciaire peut être étendue à une ou plusieurs autres personnes en cas de confusion de leur patrimoine avec celui du débiteur ou de l’activité de la personne morale. A cette fin, le Tribunal ayant ouvert la procédure initiale reste compétent.

La Société RAF a été immatriculée au RCS de BOURGOIN JALLIEU le 6 octobre 2005 et a commencé son activité immédiatement. Monsieur AVCI a interrompu son activité d’artisan le 30 septembre 2005 pour devenir salarié de la Société RAF. Les trois ouvriers salariés de Monsieur AVCI ont été repris immédiatement par la Société RAF sans licenciement ni démission préalable. Les contrats de travail conclus avec la Société RAF mentionnent qu’ils ont été embauchés en qualité de façadiers. Monsieur AVCI à d’autre part cédé à la Société RAF au mois d’octobre 2005 l’essentiel de son matériel constitué d’une machine à projeter et d’un camion. Le siège social de la Société RAF ne correspond à aucun local dont celle-ci aurait la jouissance personnelle mais à celui d’une Société « Mille et un services ».

Le transfert de l’essentiel du matériel d’exploitation permettant l’exercice d’une activité de façadier, I’embauche du même personnel avec la qualification de façadier suffit à établir que la Société RAF exerce, nonobstant son objet social déclaré, une activité identique à celle de Monsieur AVCI. II est d’autre part incontestable que son siège social dans l’Isère est fictif, ce que Monsieur AVCI a reconnu lors de son audition par Maître BOUVET le 8 mars 2006 en indiquant que la société « Mille et un services » était la comptable qui avait monté la Société RAF et préparé l’opération de reprise du matériel et des crédits y afférant.

Madame AVCI, dans deux courriers adressés à Maitre BOUVET aux mois de juin et de juillet 2006 a indiqué qu’elle n’était pas en capacité de gérer une entreprise, qu’elle ne s’était associée avec son fils et qu’elle n’avait été nommée gérante que parce que son mari ne pouvait pas se réinstaller en nom propre était en dépôt de bilan, qu’il détenait les chéquiers et les cartes bancaires de la société, qu’elle n’avait jamais touché le moindre dividende malgré sa qualité d’associée et que la comptable ne lui fournissait aucun renseignement sur la situation de la société sans en avoir préalablement référé à Monsieur AVCI. Elle s’est également présentée comme une femme de paille dans ses déclarations à la police au mois de janvier 2007 en indiquant que c’était son mari qui avait décidé de céder le matériel de son entreprise quand il avait su qu’il était en liquidation, qu’il avait fait les démarches administratives de création de la Société RAF avec la comptable et qu’elle-même s’était contenté de signer les documents. L’existence de dissensions entre les époux AVCI ne permet pas d’écarter ces déclarations qui sont circonstanciées et en cohérence avec les particularités précédemment relevées sur la constitution de la Société RAF.

La fictivité du rôle de Madame AVCI au sein de la société est corroborée par le fait qu’elle a été déchargée, à son insu et sans vote préalable des associés, de ses fonctions de gérante au bénéfice de son fils Yasin au mois de juin 2006, date à laquelle elle a exprimé ses doutes sur la gestion de son époux et son intention de divorcer. L’examen des chèques établis le 31 janvier 2006 par la Société RAF pour le rachat des crédits ayant financé le matériel de Monsieur AVCI dont elle s’est portée acquéreur fait d’autre part apparaitre que ceux-ci n’ont pas été signés par Madame AVCI ni par Yonis AVCI, la signature apposée sur ces chèques présentant par contre de nombreuses similitudes avec celle apposée par Monsieur AVCI sur les procès-verbaux de son audition par la police du mois de février 2007.

L’ensemble de ces éléments établit suffisamment que Monsieur AVCI a continué son activité artisanale sous un nouvel habillage officiel lui ayant permis d’alléger son passif initial et que la Société RAF a été constituée sans affectio societatis des deux associés qui en raison de leurs liens de famille n’ont pu que souscrire au projet de Monsieur AVCI.

Les attestations de trois entreprises dont il ressort qu’elles seraient désormais en relation d’affaires avec Monsieur Yacin AVCI sont insuffisantes à démontrer l’absence de fictivité de la Société RAF, Monsieur Yonis AVCI pouvant parfaitement former son fils à sa succession et le déléguer sur les chantiers ou dans la négociation de certaines marches.

La décision déférée sera en conséquence purement et simplement confirmée.

PAR CES MOTIFS LA COUR,

Statuant par mise à disposition au Greffe et par défaut,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions.

DIT que les dépens d’appel seront employés en frais privilégiés de liquidation judiciaire.