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Décisions

Cass. mixte, 6 décembre 1985, n° 82-14.122

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Rozès

Rapporteur :

M. Perdriau

Avocat général :

M. Cochard

Avocat :

SCP Lyon-Caen Fabiani et Liard

Rennes, 2e ch., du 14 mai 1982

14 mai 1982

Sur le pourvoi formé par Madame Armandine T. divorcée de Monsieur Joseph Le M. demeurant à Saint-Brieuc (Côtes-du-Nord) 16, rue du 71ème Régiment d'Infanterie, en cassation d'un arrêt rendu le 14 mai 1982 par la Cour d'appel de Rennes (2ème chambre) au profit de Monsieur Texier, demeurant à Saint-Brieuc (Côtes-du-Nord) 4, rue Georges Bizet, syndic de la liquidation des biens de Joseph Le M., défendeur à la cassation,

Mme T. s'est pourvue en cassation contre l'arrêt de la Cour d'appel de Rennes en date du 14 mai 1982,

Mme le Premier Président a, par ordonnance du 23 juillet 1985, renvoyé l'examen du recours devant une chambre mixte composée des première et deuxième chambres civiles ainsi que de la Chambre commerciale.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation suivants :

Premier moyen : "Ce moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement du Tribunal de Commerce se reconnaissant compétent pour statuer sur l'action en inopposabilité aux créanciers de l'état liquidatif compris dans la convention définitive réglant les effets du divorce sur requête conjointe et d'avoir jugé que le syndic n'était pas forclos, aux motifs que "si les créanciers ne peuvent remettre en cause la décision concernant le principe même du divorce de leur débiteur ... il leur est cependant loisible en vertu des dispositions d'ordre public des articles 29 et 31 de la loi du 13 juillet 1967 d'agir en inopposabilité de l'état liquidatif compris dans la convention définitive réglant les effets du divorce sur requête conjointe" et que "seule la juridiction ayant prononcé le règlement judiciaire ou la liquidation des biens peut en être saisie, et que "la forclusion est opposée vainement au syndic, dès lors que les articles 882 du Code civil et 869 du Code de procédure civile qui concernent le changement du régime matrimonial et la tierce opposition sont sans application en l'espèce ; qu'il en est de même de l'article 1104 du Nouveau Code de procédure civile, entré en vigueur le 1er janvier 1982", alors que le syndic agissant en inopposabilité d'actes juridiques inclus dans une convention définitive homologuée par un jugement de divorce sur requête conjointe ne pouvait que faire tierce opposition à ce jugement ; que cette voie de recours était recevable que ce soit en vertu de l'article 585 du Nouveau Code de procédure civile, en l'état du droit applicable en l'espèce, ou en vertu de l'article 1104 du Nouveau Code de procédure civile, applicable devant la Cour d'appel sous réserve de délai ; qu'en application de l'article 587 du Nouveau Code de procédure civile, celle-ci devait être intentée devant le Tribunal de Grande Instance (JAM) qui avait prononcé le divorce ; qu'en jugeant que les articles 29 et 31 de la loi du 13 juillet 1967 étaient applicables et en conséquence que le Tribunal de Commerce était compétent, la Cour d'appel a violé les articles 585 (1104), 587 du Nouveau Code de procédure civile, 29 et 31 de la loi du 13 juillet 1967".

Second moyen : "Ce moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir au fond ordonné une expertise afin de déterminer si les attributions faites à la femme ont une contrepartie réelle ou si elles ne constituent que des donations déguisées, aux motifs que les éléments de la cause ne permettent pas de déterminer si, s'agissant d'actes à titre onéreux la masse a subi un préjudice, alors que, d'une part, l'article 31 de la loi du 13 juillet 1967 exige que ceux qui ont traité avec le débiteur aient connu la cessation des paiements et qu'en ne donnant pas à l'expert la mission de déterminer si l'époux du débiteur connaissait la cessation des paiements en concluant la convention attaquée, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un manque de base légale, et alors que, d'autre part, l'appelante a dans ses conclusions, soutenu que la preuve de sa connaissance de la cessation des paiements devait être rapportée par le syndic et qu'en n'y répondant pas, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Nouveau Code de procédure civile".

Sur quoi, la Cour, statuant en Chambre mixte,

Sur le premier moyen :

Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué (Rennes, 14 mai 1982) qu'un jugement du 26 mai 1978 a prononcé le divorce des époux Le M. sur leur demande conjointe et homologué la convention définitive passée le 19 mai et contenant partage de la communauté, que le mari a été mis le 14 mai 1979 en règlement judiciaire, converti par la suite en liquidation des biens, avec fixation au 14 mai 1978 de la date de la cessation de ses paiements, que le syndic a assigné la femme devant le tribunal de commerce ayant ouvert la procédure collective pour que soient déclarés inopposables à la masse les donations, avantages, attributions et récompenses non causées portés à son compte dans le cadre des opérations de liquidation-partage, que le tribunal a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la défenderesse au profit du tribunal de grande instance et, au fond, a accueilli la demande, et que sa décision a été frappée à la fois d'un contredit et d'un appel ;

Attendu que Mme T., divorcée de M. Le M. fait grief à la Cour d'appel d'avoir dit, après avoir prononcé la jonction du contredit et de l'appel, que les premiers juges étaient compétents pour statuer sur l'action en inopposabilité alors, selon le pourvoi, que le syndic agissant en inopposabilité d'actes juridiques inclus dans une convention définitive homologuée par un jugement de divorce sur requête conjointe ne pouvait que faire tierce opposition à ce jugement ; qu'en application de l'article 587 du Nouveau Code de procédure civile, cette voie de recours devait être intentée devant le tribunal de grande instance qui avait prononcé le divorce ; qu'en jugeant que les articles 29 et 31 de la loi du 13 juillet 1967 étaient applicables et, en conséquence, que le tribunal de commerce était compétent, la Cour d'appel a violé les articles 585 ou 1104 et 587 du Nouveau Code de procédure civile, 29 et 31 de la loi du 13 juillet 1967 ;

Mais attendu que c'est à bon droit que l'arrêt retient, qu'en vertu des dispositions d'ordre public des articles 29, alinéa 2-2°, et 31 de la loi du 13 juillet 1967, il est loisible au syndic du règlement judiciaire ou de la liquidation des biens d'un des anciens époux d'agir en inopposabilité à la masse de l'état liquidatif compris dans la convention définitive réglant les effets du divorce sur demande conjointe ; que la Cour d'appel en a justement déduit que, seule, la juridiction ayant ouvert la procédure collective peut être saisie de cette action ; que le syndic ayant choisi d'invoquer les dispositions des articles 29 et 31 précités, c'est également à juste titre que la Cour d'appel a énoncé que la forclusion était vainement opposée au syndic, les textes relatifs à la tierce opposition se trouvant sans application en la cause ; que la moyen est dès lors mal fondé ;

Sur le second moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que Mme T. reproche en outre à la Cour d'appel d'avoir ordonné une expertise afin de déterminer si les attributions faites à son profit ont une contrepartie réelle alors, selon le pourvoi, d'une part, que l'article 31 de la loi du 13 juillet 1967 exige que ceux qui ont traité avec le débiteur aient connu la cessation des paiements et, qu'en ne donnant pas à l'expert la mission de déterminer si Mme T. connaissait la cessation des paiements de son mari lorsqu'elle a conclu la convention litigieuse, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un manque de base légale, et alors, d'autre part, que Mme T. avait, dans ses conclusions, soutenu que la preuve de sa connaissance de la cessation des paiements devait être rapportée par le syndic et que, en n'y répondant pas, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'en ce qu'il est dirigé contre la partie de l'arrêt qui, en son dispositif, se borne avant dire droit à prescrire une mesure d'instruction, le moyen est irrecevable ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE LE POURVOI.