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Décisions

Cass. com., 17 juillet 2001, n° 98-18.438

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Société des textiles français (Sté)

Défendeur :

Société générale (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Dumas

Rapporteur :

M. Métivet

Avocat général :

M. Jobard

Avocats :

Me Cossa, SCP Monod et Colin, SCP Célice, Blancpain et Soltner

Paris, 15e ch. B, du 30 avr. 1998

30 avril 1998

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 avril 1998), que par acte du 3 juillet 1987 la société à responsabilité Dicotex, devenue la Société des textiles français, s'est portée caution envers la Société générale (la banque) du remboursement d'une ouverture de crédit consentie à la Société de diffusion articles sportswear international (la société SODAS) ; que cette dernière ayant été mise en liquidation judiciaire, la banque a, le 18 mai 1993, assigné la Société des textiles français en exécution de son engagement de caution ; que celle-ci a prétendu ne pas être engagée par l'acte de caution en soutenant qu'il excédait son objet social, ce que la banque n'aurait pas ignoré ; que la Société des textiles français a été mise en redressement judiciaire le 6 novembre 1995, alors que l'instance engagée par la banque était pendante devant la cour d'appel ; qu'un plan de continuation a été adopté par jugement du 9 septembre 1996 ;

Sur la recevabilité du pourvoi, contestée par la défense :

Attendu que la banque soutient que le pourvoi est irrecevable, pour avoir été formé par la Société des textiles français, alors qu'un jugement ayant arrêté le plan de continuation de la société en désignant M. X... en qualité de commissaire à l'exécution du plan, seul celui-ci avait qualité pour poursuivre les actions introduites auparavant ;

Mais attendu que les dispositions de l'article 67, alinéa 2, de la loi du 25 janvier 1985, devenu l'article L. 621-68, alinéa 2, du Code de commerce suivant lequel les actions introduites avant le jugement qui arrête le plan, soit par l'administrateur, soit par le représentant des créanciers, sont poursuivies par le commissaire à l'exécution du plan ne concernent pas les instances qui étaient en cours à la date du jugement d'ouverture du redressement judiciaire ; que la fin de non recevoir doit donc être écartée ;

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :

Attendu que la Société des textiles français reproche à l'arrêt d'avoir fixé la créance de la banque au passif de sa procédure collective et d'avoir condamné M. X..., ès qualités, à payer une indemnité au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile alors, selon le moyen :

1°) qu'une société à responsabilité limitée n'est pas engagée par les actes de son gérant qui ne relèvent pas de son objet social lorsqu'elle prouve que le tiers savait que l'acte dépassait cet objet ou qu'il ne pouvait l'ignorer compte tenu des circonstances ; qu'aux termes de l'article 2 de ses statuts, tels que rapportés par l'arrêt, son gérant n'avait le pouvoir d'effectuer toutes opérations financières sans l'accord des associés qu'à la condition qu'elles fussent nécessaires à la réalisation ou au développement de l'objet social ; que dès lors, la cour d'appel ne pouvait rejeter le moyen de défense qu'elle tirait des dispositions de l'article 49 de la loi du 24 juillet 1966 et des énonciations de ses statuts, sans établir que le cautionnement donné par son gérant avait été nécessaire à la réalisation ou au développement de son objet social ; qu'en s'abstenant de procéder à cette constatation que commandaient ses propres constatations, la cour d'appel a violé le texte susvisé, ensemble l'article 1134 du Code civil ; et que du même coup en se déterminant sans avoir constaté que le cautionnement donné par elle fût nécessaire à la réalisation ou au développement de son objet social, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des mêmes textes ;

2°) qu'en se fondant sur "une certaine communauté d'intérêt" voire "une communauté d'intérêts évidente" qui aurait existé entre le débiteur et la caution du seul fait que les deux sociétés avaient les mêmes associés et des activités voisines, sans préciser en quoi aurait consisté la communauté d'intérêts déduite de ces deux seuls éléments, qui démontraient au contraire la création de deux entités juridiques totalement indépendantes, ni surtout en quoi elle aurait contribué à la réalisation ou au développement de son objet social, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 49 de la loi du 24 juillet 1966 et 1134 du Code civil ;

3°) qu'à supposer qu'elle ait motivé sa décision par référence au fait que le crédit avait été accordé par la banque à la société SODAS en formation pour aménager son fonds de commerce, la cour d'appel s'est alors fondée sur le seul intérêt de cette dernière qui ne pouvait se confondre avec la condition prévue dans ses statuts en l'absence de confusion des patrimoines des deux sociétés ou de fictivité de l'une ou de l'autre ; qu'en se déterminant de la sorte, la cour d'appel a violé l'article 49 de la loi du 24 juillet 1966 et 1134 du Code civil ;

Mais attendu que c'est souverainement que l'arrêt, qui constate que la Société des textiles français et la société SODAS avaient les mêmes associés et un objet social très rapproché, a estimé qu'il existait entre elles une communauté d'intérêts ; que dès lors qu'il n'était pas établi, ni même allégué que le cautionnement litigieux était contraire à l'intérêt social, la cour d'appel a pu décider qu'en raison de cette communauté d'intérêts, il n'était pas étranger à l'objet social et a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.