Livv
Décisions

Cass. 3e civ., 16 novembre 1994, n° 92-18.280

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Beauvois

Rapporteur :

Mme Borra

Avocat général :

M. Baechlin

Avocats :

Me Guinard, SCP Célice et Blancpain

Nîmes, du 5 mai 1992

5 mai 1992

Sur le premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 5 mai 1992), statuant sur renvoi après cassation, que la Société générale, preneur à bail de locaux à usage commercial appartenant à M. X..., a donné congé au bailleur pour le 24 octobre 1984, date d'expiration de la première période triennale ; que le bailleur estimant le congé irrégulier a assigné la Société générale en paiement des loyers jusqu'à la fin du bail ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de décider que la signification du congé est régulière et a eu lieu le 20 avril 1984, alors, selon le moyen, 1°) que l'avis de passage et la lettre simple que l'huissier de justice doit adresser lorsque la signification à personne s'avère impossible doivent être datées ; que l'absence de date constitue une grave irrégularité, portant atteinte aux droits de la défense, qui entraîne nécessairement grief pour son destinataire et doit être sanctionnée automatiquement par la nullité de la signification ; qu'en l'espèce, en refusant de prononcer la nullité de la signification, dont ni l'avis de passage ni la lettre simple n'étaient datées, la cour d'appel a violé les articles 655, 656 et 693 du nouveau Code de procédure civile ; 2°) que la copie de l'acte signifié par un huissier de justice tenant lieu d'original pour la partie qui la reçoit, c'est la date figurant sur cette pièce qui doit être prise en considération pour le calcul des délais ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations souveraines des juges du fond que la copie du congé délivrée à M. X... porte la date du 24 avril 1984 ; qu'en estimant, néanmoins, que seule devait être prise en considération la date portée sur l'original de l'acte de signification, la cour d'appel a violé l'article 653 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu, d'une part, qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des productions que M. X... ait soutenu dans ses conclusions que les irrégularités invoquées lui avaient causé grief ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant exactement retenu que la signification en mairie étant réputée faite à domicile, la date de la signification était celle de l'avis de passage, la cour d'appel, se référant aux mentions de l'acte d'huissier de justice, a retenu, à bon droit, que la signification avait eu lieu le 20 avril 1984 ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen, pris en sa seconde branche :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de dire que le congé a mis fin au bail à compter du 24 octobre 1984, alors, selon le moyen, que le preneur commerçant qui donne congé au bailleur doit le faire par acte extrajudiciaire précisant clairement et suffisamment les motifs pour lesquels il est donné et non par une simple formule de style ; qu'en considérant que le congé donné " pour éviter la reconduction du bail " au-delà de la première échéance constituait un motif suffisant, la cour d'appel a violé les articles 3. 1 et 5 du décret du 30 septembre 1953 ;

Mais attendu que le preneur n'ayant pas l'obligation de motiver son congé, le grief est sans portée ;

Mais sur le second moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article 5, alinéa 1er, du décret du 30 septembre 1953 ;

Attendu que les baux soumis aux dispositions du décret du 30 septembre 1953 ne cessent que par l'effet d'un congé donné suivant les usages locaux et au moins 6 mois à l'avance ;

Attendu que, pour faire produire effet au congé délivré par la Société générale, la cour d'appel retient, par motifs adoptés, que le preneur n'avait la faculté de donner congé qu'à l'expiration d'une période triennale, soit en l'espèce le 24 octobre 1984, et qu'il y a lieu d'exclure l'application des usages locaux relatifs à la date de délivrance des congés ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit que le congé avait mis fin au bail le 24 octobre 1984, l'arrêt rendu le 5 mai 1992, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier.