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Décisions

CA Paris, 1re ch. sect. concurrence, 20 avril 1989, n° ECOC8910063X

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Internougat (GIE)

Défendeur :

Ministre chargé de l'Economie

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Présidents :

M. Lemontey, M. Culie

Conseillers :

M. Schoux, M. Collomb-Clerc, M. Canivet

Avocat :

Me Loygue

Cons. conc., du 18 oct. 1988

18 octobre 1988

 

La cour,

Statue sur le recours formé par le GIE Internougat contre la décision n° 88-D 39 prise le 18 octobre 1988 par le Conseil de la concurrence (commission permanente) qui lui a infligé une sanction pécuniaire de 200.000 F pour retards d’exécution constatés.

Le GIE Internougat est concessionnaire, sur l’aire d’Allan de l’autoroute A7, d’un marché réservé aux producteurs locaux de nougat en vue de compenser les sujétions que leur a imposés l’ouverture de l’autoroute et le contournement de Montélimar.

Saisie, le 8 janvier 1980, par le ministre chargé de l’économie d’une plainte relative à une entente entre les fabricants de nougat, la com mission de la concurrence a émis, le 8 juillet 1980, un avis dont le ministre s’est, pour l’essentiel, approprié les termes dans sa décision n° 80-08 DC du 9 septembre 1980.

Cette décision, confirmée par un arrêt du Conseil d’Etat du 23 octobre 1985 :

1° Infligeait au GIE une sanction pécuniaire de 100000 F;

2° Enjoignait à celui-ci de prendre trois séries de décisions concernant son règlement et de nature à rétablir les conditions d’une saine concurrence; à cet égard, il lui était demandé :

- d’assouplir les règles d’adhésion en remplaçant la période de trois ans d’activité requise pour faire acte de candidature, par une période d’un an et en supprimant toute référence à la localisation du siège social dans les conditions posées ;

- de modifier les quotas conformément aux principes posés par l’assemblée générale du 27 juin 1980, avec effet au 1er jan vier 1981 ;

- de supprimer toute discrimination injustifiée qui pourrait exister dans les ventes par chaque producteur au G.T.E. et à ses autres clients; la décision précisait en outre, que le GIE sera tenu de répercuter dans les prix de vente au public les différences constatées dans ses prix d’achat aux fabricants.

3° Informait le GIE qu’il serait procédé à un nouvel examen de la situation dans un délai de trois ans.

 Sur nouvelle saisine du ministre du 29 septembre 1986, le Conseil de la concurrence constatait que le GIE ne s’était conformé à la décision qu’avec un retard abusif en ce qui concerne les règles d’adhésion et la détermination du prix de vente; qu’ainsi, par application des dispositions combinées de l’article 54 de l’ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945 et de l’article 59 de l’ordonnance du 1er décembre 1986, il y avait lieu de lui infliger la sanction pécuniaire ci-dessus mentionnée. En même temps, acte était pris de la suppression définitive par le G.T.E. des quotas d’approvisionnement.

Le GIE Internougat, demandeur au recours, fait valoir que les injonctions ministérielles se sont trouvées effectivement traduites dans les faits et que c’est en toute bonne foi que des insuffisances ou des omissions de texte n’ont pu n’être réparées qu’avec un certain retard; que dans ces conditions, la sanction infligée paraît injustifiée ou, en tout cas, disproportionnée tant au regard des griefs théoriques retenus qu’au regard des capacités financières d’une profession de modeste importance.

Le ministre chargé de l’économie a répondu aux moyens du demandeur en exposant notamment que la pratique suivie par le GIE ne saurait être valablement invoquée par lui pour minimiser la portée des retards apportés dans la mise en conformité de ses statuts avec la décision ministérielle demandant précisément une modification sans délai du règlement; il conclut à la confirmation de la décision attaquée.

Le Conseil de la concurrence n’a pas formulé d’observation.

Enfin, par ordonnance du 12 janvier 1989 du délégataire du premier président, il a été sursis à l’exécution de la décision à hauteur de la moitié de la sanction.

Cela étant exposé, la cour,

Sur le retard à l’exécution de la décision

Considérant que contrairement à ce qu’affirme Internougat, les modifications du règlement intérieur adoptées le 27 juin 1980 n’allaient pas, par anticipation, dans le sens de la décision ministérielle puisque cette dernière, qui les avait prises en considération, les avait, précisément, jugées insuffisantes pour rétablir les conditions d’une saine concurrence; que c’est donc, dès la notification de la décision du 9 septembre 1980 que le GIE devait modifier les clauses non conformes de son règlement intérieur ;

Considérant que si la modification relative aux quotas d’approvisionnement est intervenue dès le 24 avril 1981, celle concernant les règles d’adhésion n’a eu lieu que le 31 octobre 1985, postérieurement à une lettre de rappel du 2 juillet 1985;

Considérant, s’agissant du mode de fixation des prix, que l’arrêt du Conseil d’Etat du 23 octobre 1985, à la suite de l’injonction ministérielle de 1980, impliquait clairement la modification de l’article 4 du règlement du GIE tel qu’adopté le 27 juin 1980, ce qui n’a été fait que le 7 mars 1988, avec effet au l juillet 1988, à l’occasion de l’adoption d’un nouveau règlement intérieur;

Considérant ainsi que le retard apporté à l’exécution de la décision ministérielle de 1980 est manifestement excessif et justifie le prononcé d’une sanction;

Sur la sanction pécuniaire

Considérant que le montant de la sanction pécuniaire doit être fixée, aux termes de l’article 53 de l’ordonnance modifiée du 30 juin 1945, compte tenu notamment de la gravité des faits reprochés et de l’importance des dommages causés à l’économie ainsi que de la situation financière de la personne morale intéressée;

Considérant qu’il doit être tenu compte également du fait que nonobstant la modification du règlement, l’adhésion d’une société Morin, émanation du plaignant d’origine, a été reçue le 24 avril 1981, alors qu’elle ne satisfaisait pas au critère de trois ans d’ancienneté dans la profession;

Considérant ainsi, au vu des éléments dont la cour dispose, qu’il y a lieu de modérer le montant de la sanction infligée en le réduisant de moitié.

Par ces motifs,

Confirme, dans son principe, la décision attaquée;

En réformant l’article 1, inflige au GIE Internougat une sanction de 100.000 F;

Condamne le GIE Internougat aux dépens.