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Décisions

ADLC, 20 avril 2021, n° 21-DCC-69

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

Décision

Relative à la prise de contrôle exclusif des actifs du groupe Arcadie Sud-Ouest par le groupe Bigard

ADLC n° 21-DCC-69

20 avril 2021

L’Autorité de la concurrence,

Vu le dossier de notification adressé au service des concentrations le 20 août 2020 et déclaré complet le 4 décembre 2020, relatif à l’acquisition d’actifs du groupe Arcadie Sud-Ouest par le groupe Bigard, formalisée par les offres de reprise en date du 5 août 2020, modifiées en dernier lieu le 21 août 2020, et le jugement du tribunal de commerce de Montpellier en date du 4 septembre 2020 ;

Vu le livre IV du code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ;

Vu les éléments complémentaires transmis par les parties au cours de l’instruction ;

Adopte la décision suivante :

Résumé1

Aux termes de la décision ci-après, l’Autorité a procédé à l’analyse de la prise de contrôle exclusif de certains actifs du groupe Arcadie par le groupe Bigard.

Le groupe Bigard est actif sur les marchés de l’abattage, de la découpe et de la transformation de viandes de boucherie. Il est également actif dans la fabrication de produits élaborés frais et surgelés, et exploite une activité de traiteur. La cible est composée de cinq sites du groupe Arcadie Sud-Ouest situés respectivement à Anglet, Auch, Gramat, Mont-de-Marsan et Tarbes.

Les parties sont toutes deux actives sur le marché de la première et de la deuxième transformation de bovins, d’ovins et de porc. En particulier, les parties sont amenées à traiter de la viande de bovins et d’ovins avec des signes officiels d'identification de la qualité et de l'origine (SIQO), sans pour autant être actifs sur les mêmes SIQO. Le groupe Bigard est également actif sur les marchés de la troisième et de la quatrième transformation de ces mêmes viandes.

À l’issue de son analyse, l’Autorité a écarté tout risque d’atteinte à la concurrence de nature horizontale, compte tenu des parts de marchés limitées de la nouvelle entité ou de la faible addition de parts de marché consécutive à l’opération. En effet, la part de marché de la nouvelle entité dépassera 25 % sur un nombre réduit de marchés. Pour la collecte d’ovins SIQO, le poids des parties sur les marchés de la collecte et sur celui de la vente de carcasses reste limité (moins de 30 % de parts de marché) et elles font face à de nombreux concurrents. Pour la vente de viande fraîche de veaux SIQO à destination des GMS*, la part de marché de la nouvelle entité s’élève à 55 % avec une addition liée à l’opération qui reste limitée (2 % seulement). En outre, il est apparu lors de l’instruction que l’essentiel de l’activité de l’acquéreur sur ce marché résulte d’un partenariat conclu entre le groupe Bigard et une enseigne de grande distribution, qui ne confère à la nouvelle entité aucune garantie d’activité et qui peut être renégocié chaque année. Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, l’Autorité a également écarté tout risque de nature verticale résultant de la présence simultanée des parties sur les marchés de la première et de la deuxième transformation de la viande.

L’Autorité a également écarté tout risque d’atteinte à la concurrence de nature verticale entre les marchés de la deuxième transformation de la viande d’une part, et ceux de la troisième et quatrième transformation d’autre part, sur lesquels seul le groupe Bigard est actif. L’Autorité a notamment considéré qu’il n’existe pas de risque de verrouillage de clientèle, malgré le poids de l’acquéreur sur certains marchés aval, dans la mesure où il est confronté à la concurrence d’opérateurs eux-mêmes verticalement intégrés en aval, disposant ainsi de débouchés garantis. En outre, l’Autorité a constaté que le renforcement de l’intégration verticale de la nouvelle entité permet d’écarter ce type de risque puisque Bigard s’approvisionne déjà, avant l’opération, prioritairement en interne et que la cible n’est elle-même pas active sur les marchés de la troisième et quatrième transformation.

La prise de contrôle exclusif de certains actifs d’Arcadie par le groupe Bigard a donc été autorisée sans condition.

 

I. Les entreprises concernées et l’opération

1.   La société Financière Bigard est la société de tête du groupe Bigard et est détenue par la famille Bigard. Le groupe Bigard est actif sur les marchés de l’abattage, de la découpe et de la transformation de viandes de boucherie. Il est également actif dans la fabrication de produits élaborés frais et surgelés, et exploite une activité de traiteur.

2.   La cible est composée de cinq sites du groupe Arcadie Sud-Ouest situés respectivement à Anglet, Auch, Gramat, Mont-de-Marsan et Tarbes.

3.    L’opération, formalisée par les offres de reprise déposées par le groupe Bigard en date du 5 août 2020, modifiées en dernier lieu le 21 août 2021, et le jugement du tribunal de commerce de Montpellier en date du 4 septembre 2020, consiste en l’acquisition par le groupe Bigard de cinq sites du groupe Arcadie Sud-Ouest. En ce qu’elle se traduit par la prise de contrôle exclusif des actifs cibles par le groupe Bigard, l’opération notifiée constitue une concentration au sens de l’article L.430-1 du code de commerce.

4.  Les entreprises concernées réalisent ensemble un chiffre d’affaires hors taxes total sur le plan mondial de plus de 150 millions d’euros (groupe Bigard : [>150 millions] d’euros pour l’exercice clos le 31 décembre 2019 ; actifs cibles : […] millions d’euros pour l’exercice clos le 31 mars 2020). Chacune de ces entreprises a réalisé en France un chiffre d’affaires supérieur à 50 millions d’euros (groupe Bigard : [>50 millions] d’euros pour l’exercice clos le 31 décembre 2019 ; actifs cibles : [>50] millions d’euros pour l’exercice clos le 31 mars 2020). Compte tenu de ces chiffres d’affaires, l’opération ne relève pas de la compétence de l’Union européenne. En revanche, les seuils de contrôle mentionnés au I de l’article L. 430-2 du code de commerce sont franchis. Cette opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du code de commerce relatifs à la concentration économique.

 

II. Délimitation des marchés pertinents

5.   Les parties sont simultanément actives sur les marchés de la première et de la deuxième transformation de la viande. Le groupe Bigard est également actif sur les marchés de la troisième et de la quatrième transformation de la viande. La pratique décisionnelle2 a opéré une segmentation entre les différents stades de la transformation de la viande, qui correspondent au cycle de traitement des animaux et de leur viande. La première transformation correspond à la collecte en vue de l’abattage de l’animal, à l’issue duquel les carcasses et les coproduits sont obtenus et vendus (A). La deuxième transformation comprend le désossage et la découpe des carcasses (B). La troisième transformation consiste en la mise sous barquettes de viande prête à cuire, destinée au consommateur final (C). Enfin, la quatrième transformation correspond à la fabrication de produits élaborés à base de viande (D).

 

A.  LA PREMIÈRE TRANSFORMATION

6.   Les activités de première transformation des parties se chevauchent sur les marchés de la collecte d’animaux vivants en vue de l’abattage (1) et les marchés de la commercialisation de carcasses (2) et de coproduits (3).

 

1. LA COLLECTE D’ANIMAUX VIVANTS EN VUE DE L’ABATTAGE

a)   Marchés de produits

7.  De manière constante, les autorités de concurrence nationale et européenne3 considèrent que dans le secteur de la viande, il existe autant de marchés distincts que d’espèces d’animaux abattus. En effet, pour tenir compte des tailles et des poids des animaux qui varient d’une espèce à l’autre, les abattoirs sont généralement équipés de matériel spécifique pour chaque type d’animal. Par ailleurs, pour certaines espèces, une sous-segmentation a été envisagée en fonction de la présence d’un signe de qualité4, compte tenu du cahier des charges applicables aux abattoirs. Un marché des ovins sous le label « Agneau de Sisteron » a ainsi récemment été envisagé5.

8.   Au cas présent, les parties sont simultanément actives en matière de collecte de bovins, d’ovins et de porcins.

Bovins

9.     La pratique décisionnelle nationale6 a tout d’abord distingué la collecte de veaux de celle d’autres bovins. Au sein de la catégorie des autres bovins, la pratique décisionnelle a ensuite opéré une segmentation entre les « jeunes bovins », animaux mâles non castrés de moins de deux ans, et les « gros bovins », compte tenu des différences relatives à leur prix d’achat, à leur qualité et à la destination finale de leur viande. En outre, les gros bovins sont classés en cinq catégories suivant leur conformation. Il s’agit des catégories E, U, R, O et P. Les conformations O et P regroupent essentiellement du bétail issu du troupeau laitier7, tandis que les conformations E, U et R regroupent essentiellement des bovins de races à viande. La pratique décisionnelle a ainsi opéré une sous-segmentation selon la conformation de l’animal, en raison des différences de prix, d’usage et de destination finale de la viande des bovins de race laitière d’une part, et des bovins de race à viande d’autre part. Il n’y a pas lieu de remettre en cause ces définitions à l’occasion de la présente décision.

10.   S’agissant des signes de qualité de la race bovine, l’Autorité a distingué les bovins relevant de l’appellation d’origine contrôlée « Bœuf de Charolles » des autres signes officiels d'identification de la qualité et de l'origine (label rouge « viande bovine de race charolaise », « agriculture biologique », indication géographique protégée et spécialité traditionnelle garantie).

11.   En l’espèce, les parties sont toutes deux actives sur la collecte de bovins relevant d’un signe officiel d’identification de la qualité et de l’origine mais ne sont en revanche pas actives simultanément sur la collecte de bovins de l’un de ces quelconques signes. Un marché général de la collecte de bovins avec des signes officiels d'identification de la qualité et de l'origine (ci- après, « SIQO »), en particulier de veaux SIQO, peut néanmoins être envisagé.

12.     Au cas présent, il n’y a pas lieu de se prononcer sur la délimitation exacte des marchés, les conclusions de l’analyse concurrentielle.

Ovins

13.    En ce qui concerne la collecte d’ovins, la pratique décisionnelle a envisagé une distinction entre la collecte de moutons et la collecte d’agneaux8. La pratique de l’Autorité a déjà retenu une segmentation supplémentaire entre les agneaux standards et les agneaux sous label « Agneau de Sisteron ». La cible est active dans la collecte d’agneaux sous label « Agneau des Pyrénées » et « Agneau du Quercy ». Cependant, l’acquéreur n’étant pas actif dans la collecte de ces labels, la question de l’existence d’un marché spécifique pour chacun de ces deux labels peut rester ouverte.

14.   Dans la présente décision, l’analyse sera menée sur un marché global des agneaux sous label.

Porcins

15.   S’agissant des porcins, les autorités de la concurrence ont envisagé une segmentation entre les porcs et les truies9. En effet, les truies sont plus lourdes que les porcs, ce qui implique l’utilisation de chaînes d’abattage différentes, et leur viande est essentiellement utilisée pour la fabrication de produits élaborés. Il n’y a pas lieu de remettre en cause ces définitions à l’occasion de la présente décision.

b)   Marchés géographiques

Bovins

16.   La pratique décisionnelle considère que les marchés de la collecte de bovins en vue de l’abattage revêtent une dimension locale en raison notamment de contraintes spécifiques pesant sur le transport sur de longues distances et de considérations relative à la qualité. Les éleveurs tendent en effet à privilégier la vente de leur bétail aux abattoirs situés à proximité de leurs sites d’élevage et les abattoirs assurent la plus grande partie de leur approvisionnement dans un rayon de 100 à 150 kilomètres autour de leur localisation, la provenance du solde étant fonction des disponibilités, des saisons et des opportunités commerciales. Compte tenu de l’existence de bassins d’approvisionnement plus ou moins larges selon la taille de l’abattoir, l’analyse concurrentielle est menée sur des zones de collecte de 100 à 150 kilomètres autour des abattoirs, représentant environ 80 % de l’approvisionnement, et jusqu’à 300 kilomètres pour tenir compte du solde d’approvisionnement10. Il n’y a pas lieu de remettre en cause ces définitions à l’occasion de la présente décision.

17.    En l’espèce, parmi les cinq sites cibles, seul le site d’Anglet est actif sur les marchés de la collecte de bovins en vue de l’abattage. Pour ce qui est des gros bovins, l’acquéreur ne dispose d’aucun abattoir actif dans un rayon de 300 km. En revanche, le groupe Bigard dispose d’un abattoir actif sur la collecte de veaux en vue de l’abattage à Caussade, situé à moins de 300 km d’Anglet.

18.    L’activité des parties ne se chevauche donc que sur le marché de la collecte de veaux en vue de l’abattage.

Ovins

19.   En ce qui concerne la collecte d’ovins, il a été considéré que le marché géographique pertinent pouvait être de dimension locale ou nationale11, sans préciser la taille exacte du marché local.

20.   La pratique décisionnelle considère que le comportement réel des opérateurs de collecte sur une zone donnée peut être précisé avec les données rassemblées sur la localisation réelle des agneaux collectés. Dans les marchés de distribution, il est généralement considéré que la zone de chalandise d’un point de vente peut être limitée à celle qui regroupe les clients représentant 80 % du chiffre d’affaires du point de vente ou 80 % des clients du point de vente, en fonction des données disponibles. Le solde est considéré comme une clientèle ponctuelle et non significative12. Cette méthode, dite des empreintes réelles, peut être reprise pour déterminer les zones de chalandise des abattoirs.

21.   En l’espèce, parmi les cinq sites cibles, seuls les sites d’Anglet et Gramat sont actifs sur les marchés de la collecte d’ovins en vue de l’abattage. L’acquéreur détient quant à lui un abattoir pour les ovins à Castres.

22.   La partie notifiante a déterminé la zone de chalandise de ces différents sites par la méthode des empreintes réelles. Il n’existe aucun chevauchement d’activité entre l’abattoir de Castres et celui d’Anglet. En revanche, il existe bien un chevauchement entre les empreintes réelles de l’abattoir de Castres et de celui de Gramat pour les seuls ovins standards.

23.    En conséquence, l’activité des parties se chevauche sur ces marchés au niveau local et national.

Porcins

24.  Les autorités de concurrence considèrent que le marché de la collecte de porcs en vue de l’abattage est de dimension locale, correspondant à une zone de 120 à 200 kilomètres autour des abattoirs13. Il n’y a pas lieu de remettre en cause ces définitions à l’occasion de la présente décision.

25.  En l’espèce, parmi les cinq sites cibles, seul le site d’Anglet est actif sur les marchés de la collecte de porcins en vue de l’abattage. Le groupe Bigard n’exploite aucun abattoir actif sur la collecte de porcins en vue de l’abattage dans un rayon de moins de 200 km.

26.  En conséquence, l’activité des parties ne se chevauche pas sur les marchés de la collecte de porcins en vue de l’abattage.

 

2. LES CARCASSES DE VIANDE ISSUES DE LA PREMIÈRE TRANSFORMATION

a)   Marchés de produits

27.   Selon la pratique décisionnelle14, les marchés des carcasses de viande issues de la première transformation sont segmentés selon le type d’animal.

28.   Au cas présent, les parties sont simultanément actives en matière de carcasses de bovins, d’ovins et de porcins.

29.  En ce qui concerne les carcasses de bovins, la pratique décisionnelle15 a considéré que ce marché pouvait être segmenté de la même façon que celui de la collecte de bovins en vue de l’abattage.

30.   Pour les besoins de la présente opération, un éventuel segment de la viande de bovins relevant de signes officiels d'identification de la qualité et de l'origine a également été étudié. Il n’y a pas lieu toutefois de se prononcer sur la pertinence de cette segmentation, dans la mesure où les conclusions de l’analyse concurrentielle demeurent inchangées, quelle que soit la segmentation envisagée.

31.   Pour les ovins, trois catégories d’animaux ont été distinguées : agneaux standards, agneaux sous label (labels rouge, appellations d’origine contrôlées, indications géographiques protégées, etc.) et moutons16. Il n’y a pas lieu de se prononcer sur la pertinence de cette segmentation, dans la mesure où, quelle que soit l’hypothèse retenue, les conclusions de l’analyse concurrentielle demeureront inchangées.

32.    En ce qui concerne les carcasses de porcins, la pratique décisionnelle n’a pas segmenté selon la catégorie d’animal.

33.    Enfin, pour l’ensemble des espèces citées ci-dessus, la pratique décisionnelle17 a considéré que chaque canal de distribution utilisé pour la commercialisation de carcasses de bovins ou de porcins issues de la première transformation (grandes et moyennes surfaces, ci-après « GMS », restauration hors domicile, ci-après « RHD », industries agroalimentaires, ci-après « IAA », et bouchers-charcutiers-artisans, ci-après « BCA ») constitue un marché distinct en raison de l’existence de besoins différents selon le type d’acheteurs, notamment en termes de volumes, de calibrage et de conditionnement. Il n’y a pas lieu de remettre en cause cette segmentation à l’occasion de la présente décision.

b)   Marchés géographiques

34. La pratique décisionnelle a considéré que les marchés des carcasses de viande issues de la première transformation sont de dimension nationale18.

35.  En l’espèce, les parties sont simultanément actives sur ces différents marchés.

 

3. LES COPRODUITS D’ABATTAGE

a)   Marchés de produits

36.   Les autorités de concurrence nationale et européenne19 ont segmenté le marché des coproduits entre les coproduits d’abattage impropres à la consommation humaine, eux-mêmes segmentés par type de coproduits, et les coproduits d’abattage propres à la consommation humaine et animale ainsi qu’aux usages pharmaceutiques, eux-mêmes segmentés par espèce animale et par canal de distribution. En outre, la pratique décisionnelle20 a relevé l’existence d’un marché des cuirs et peaux pouvant être segmenté selon l’espèce animale. Il n’y a pas lieu de remettre en cause ces définitions à l’occasion de la présente décision.

37.   En l’espèce, les parties sont simultanément actives sur l’ensemble de ces marchés pour les bovins, ovins et porcins.

b)   Marchés géographiques

38.   La pratique décisionnelle a considéré que les marchés des coproduits d’abattage sont de dimension nationale21.

 

B.  LA DEUXIÈME TRANSFORMATION

a)   Marché de produits

39.  Les « viandes issues de la deuxième transformation » correspondent aux viandes découpées et/ou désossées, souvent présentées sous vide pour une meilleure conservation, et vendues via différents canaux de distribution à des clients qui procèdent à une transformation ultérieure de cette marchandise en vue de sa présentation à la vente (piéçage, transformation en steak haché, etc.). Au sein de ce marché, la pratique décisionnelle22 opère une segmentation selon les espèces animales.

40.    Au cas présent, les parties commercialisent simultanément des viandes de bovins, ovins et porcins issues de la deuxième transformation.

41.    En ce qui concerne la viande bovine, la pratique décisionnelle23 a distingué la viande vendue sous la forme de muscle et celle vendue sous la forme de minerai. Le muscle provient en effet d’un même animal et a généralement pour destination la fabrication de pièces de viande portant des appellations différentes selon le muscle concerné (bavette, paleron, etc.), tandis que le minerai, qui constitue la matière première du steak haché, est composé d’un ensemble de divers muscles et est souvent le résultat du mélange de viandes d’animaux différents.

42.   Pour les besoins de la présente opération, un éventuel segment de la viande de bovins relevant de signes officiels d'identification de la qualité et de l'origine a également été étudié.

43.   S’agissant de la viande ovine, les parties ont proposé de segmenter ce marché de la même façon que celui des carcasses issues de la première transformation, en distinguant les agneaux standards, les agneaux sous label et les moutons. Il n’y a pas lieu néanmoins de se prononcer sur la pertinence de cette segmentation supplémentaire, dans la mesure où, quelle que soit l’hypothèse retenue, les conclusions de l’analyse concurrentielle demeureront inchangées.

44.   En ce qui concerne la viande porcine, la pratique décisionnelle24 a envisagé de faire des marchés de la deuxième et troisième transformation (voir ci-après) un marché unique, tout en laissant la question ouverte.

45.    Enfin, à l’instar des marchés de la première transformation, les marchés de la deuxième transformation ont été segmentés en fonction du canal de distribution, quelle que soit la viande considérée : GMS, BCA, IAA et RHD25.

46.   En l’espèce, il n’est pas nécessaire de se prononcer sur la délimitation exacte de ces marchés, les conclusions de l’analyse concurrentielle demeurant inchangées quelle que soit la délimitation retenue.

b)   Marchés géographiques

47.  La pratique décisionnelle26 a analysé les marchés de la deuxième transformation au niveau national quelle que soit la viande considérée. Cependant, elle a noté, pour la viande porcine, la tendance à l’augmentation des flux commerciaux transnationaux, ce qui suggèrerait une dimension géographique plus large que nationale27.

48.   La question de la dimension géographique de ces marchés peut toutefois rester ouverte, les conclusions de l’analyse concurrentielle demeurant inchangées quelle que soit la délimitation retenue.

 

C.  LA TROISIÈME TRANSFORMATION

a) Marchés de produits

49.    Les « viandes issues de la troisième transformation » correspondent aux viandes prêtes à cuire, conditionnées  sous  la  forme  d’Unités  de  Vente  Consommateur  Industrielles      (ci-après, « UVCI ») et directement présentables à la vente. Les marchés de la viande issue de la troisième transformation sont segmentés selon l’espèce et selon le canal de distribution28.

50.    Au cas présent, l’acquéreur commercialise des viandes de bovins, d’ovins et de porcins issues de la troisième transformation.

51.    En ce qui concerne la viande bovine vendue sous UVCI, la pratique décisionnelle a considéré que les steaks hachés constituent une catégorie particulière de produits, compte tenu de la place prépondérante qu’ils occupent dans les ventes totales de viande bovine. En outre, elle a opéré une distinction entre les steaks hachés frais et les steaks hachés surgelés, en raison de l’existence de différences de prix, de contraintes sanitaires de production et de modes de conservation entre ces deux types de produits29.

52.   S’agissant de la viande ovine, à l’instar de ce qui a été proposé par les parties s’agissant du marché de la deuxième transformation, une distinction entre les agneaux standards, les agneaux sous label et les moutons pourrait être envisagée. Il n’y a pas lieu néanmoins de se prononcer sur la pertinence de cette segmentation, dans la mesure où, quelle que soit l’hypothèse retenue, les conclusions de l’analyse concurrentielle demeureront inchangées.

53.    En ce qui concerne la viande porcine, la pratique décisionnelle30 a envisagé un marché de la viande fraîche regroupant les deuxième et troisième transformations, tout en laissant la question de cette délimitation ouverte.

54.   Enfin, s’agissant des ventes à destination des GMS et quelle que soit la viande considérée, la pratique décisionnelle a envisagé une segmentation selon le positionnement du produit (marque de fabricant ou « MDF »,  marque de distributeur ou    « MDD »,  marque de hard discount ou « MHD » et marque de premier prix ou « MPP »)31.

55.  En l’espèce, il n’est pas nécessaire de se prononcer sur la délimitation exacte de ces marchés, les conclusions de l’analyse concurrentielle demeurant inchangées quelle que soit la délimitation retenue.

56.   Le groupe Bigard est seul présent sur les marchés de la troisième transformation32.

b)   Marchés géographiques

57.    La pratique décisionnelle a estimé que les marchés de la troisième transformation revêtent une dimension nationale. Elle n’a cependant pas exclu que le marché du steak haché surgelé puisse être de dimension supranationale33.

58.   Au cas d’espèce, la question de la dimension géographique de ces marchés peut rester ouverte, les conclusions de l’analyse concurrentielle demeurant inchangées quelle que soit la délimitation retenue. L’analyse sera menée au niveau national.

 

D.  LA QUATRIÈME TRANSFORMATION

a)  Marchés de produits

59.   La quatrième transformation correspond aux produits élaborés à base de viande. La Commission européenne34 a ainsi défini ces produits comme des viandes de mammifères ou d’oiseaux crues, séchées, fumées ou cuites, contenant des ingrédients tels que du sel ou des épices. Cette définition a été reprise par l’Autorité de la concurrence35.

60.    Les autorités de concurrence nationales ont analysé plus spécifiquement les marchés de la charcuterie36, qui concernent principalement la viande de porc. Pour ces marchés, la pratique décisionnelle a opéré une segmentation en fonction de la famille à laquelle appartient le produit et du canal de distribution (GMS, IAA et RHF). Pour les GMS, a été envisagée une sous segmentation en fonction du mode de distribution (libre-service ou à la coupe) et du positionnement des produits37.

61.   S’agissant de la segmentation par famille de produits, l’INSEE, le ministère de l’agriculture et la Fédération Française des Industriels Charcutiers, Traiteurs, Transformateurs de Viandes (FICT) utilisent une nomenclature qui distingue vingt-trois familles de produits regroupés selon leur mode de préparation (crus ou cuits), la technologie employée (salage, séchage, fumage, cuisson, conserve, surgelés) et la nature de la viande employée (porc, volaille, bœuf, gibier, etc.). La pertinence de cette segmentation en vingt-trois familles de produits, n’a, à ce jour, pas été remise en cause, les opérations examinées ne posant pas de problèmes de concurrence même à ce niveau très fin de segmentation38.

62.   S’agissant de la segmentation, pour les GMS, selon le positionnement des produits39, entre, d’une part, les marques  de fabricant (« MDF »)  et, d’autre part, les marques de distributeur  (« MDD »), marques de premier prix (« MPP ») et marques hard discount (« MHD ») (ci-après désignées ensemble sous l’abréviation « MDD »), la pratique décisionnelle européenne et nationale s’est interrogée sur sa pertinence pour les marchés de la charcuterie salaison de porc, tout en laissant la question ouverte40.

63.    Il n’y a pas lieu de remettre en cause ces définitions à l’occasion de la présente décision. Le groupe Bigard est seul présent sur les marchés de la quatrième transformation.

b)   Marchés géographiques

64.  Les autorités de concurrence nationales et européennes ont retenu une dimension nationale pour les marchés de la quatrième transformation.

65.   Il n’y a pas lieu de remettre en cause la dimension nationale des marchés concernés à l’occasion de la présente opération.

 

III. Analyse concurrentielle

66.    L’opération emporte des effets horizontaux (A) dans la mesure où le groupe Bigard et la cible sont actifs simultanément sur les marchés de la première et deuxième transformation, mais également des effets verticaux (B), l’acquéreur étant également présent sur les marchés de la troisième et quatrième transformation.

 

A.  LES EFFETS HORIZONTAUX

 

1.  LA PREMIÈRE TRANSFORMATION

67.  Les activités de première transformation des parties se chevauchent sur les marchés de la collecte d’animaux vivants en vue de l’abattage (1) et les marchés de la commercialisation de carcasses (2) et de coproduits d’abattage (3).

a)   La collecte d’animaux vivants en vue de l’abattage

68.  Compte tenu de la délimitation géographique des différents marchés, l’activité des parties ne se chevauche que sur la collecte de veaux en vue de l’abattage (a) et sur celui de la collecte d’ovins en vue de l’abattage (b).

La collecte de veaux

69.   La cible n’est active sur le marché de la collecte de veaux en vue de l’abattage que sur le site d’Anglet. Le chevauchement s’opère avec l’abattoir de la partie notifiante situé à Caussade.

70.   Dans cette zone les parties disposeront d’une part de marché inférieure à 25 % sur le marché de la collecte de veaux en vue de l’abattage, quelle que soit la segmentation retenue.

71.   En conséquence, l’opération n’est pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur les marchés de la collecte de veaux en vue de l’abattage dans la zone d’Anglet.

La collecte d’ovins

72.  Il ressort des empreintes réelles des abattoirs des parties fournies par les parties qu’il existe un chevauchement d’activité entre l’abattoir de l’acquéreur situé à Castres et celui de la cible situé à Gramat, pour ce qui concerne les seuls ovins standards. En outre, la pratique décisionnelle n’a pas exclu que la dimension géographique de ces marchés soit nationale.

73.  Au niveau local, l’empreinte réelle de l’abattoir de la cible situé à Gramat recouvre les départements du Lot, de l’Aveyron et du Tarn. Dans une zone recouvrant ces trois départements, la part de marché de la nouvelle entité à l’issue de l’opération sera inférieure à 25 % s’agissant de la collecte d’ovins standards en vue de leur abattage.

74.   En outre, dans cette zone, la nouvelle entité sera confrontée à la concurrence de plusieurs opérateurs, notamment les groupes Ovimpex, Ruthème Viandes et Sodem.

75.   Au niveau national, la part de marché de la nouvelle entité restera inférieure à 25 % quelle que soit la segmentation envisagée, hormis sur le marché global de la collecte d’agneaux SIQO en vue de l’abattage. Sur ce marché, l’acquéreur et la cible disposent respectivement de [10-20] % et [10-20] %. À l’issue de l’opération, la nouvelle entité restera toutefois confrontée à la concurrence de concurrents importants, notamment ceux qui ont été cités précédemment au niveau local.

76.    En conséquence, l’opération n’est donc pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur les marchés de la collecte d’ovins au niveau national.

b)   Les carcasses de viande issues de la première transformation

77.    Sur les marchés des carcasses de viande, l’activité des parties se chevauche sur les viandes de bovins, d’ovins et de porcins.

Les carcasses de bovins

78.   Sur le marché des carcasses de bovins, la nouvelle entité disposera, quelle que soit la segmentation retenue, d’une part de marché inférieure à 25 %, ou inférieure à 50 % de parts de marché avec une addition de parts de marché inférieure à 2 points.

79.   En conséquence, l’opération n’est pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur les marchés des carcasses de bovins.

Les carcasses d’ovins

80.    Sur le marché des carcasses d’ovins, la nouvelle entité disposera, quelle que soit la segmentation, d’une part de marché inférieure à 25 %, ou inférieure à 50 % de parts de marché avec une addition de parts de marché inférieure à 2 points, hormis sur les marché des carcasses d’agneaux SIQO à destination de la GMS et de la BCA.

81.   Sur le marché à destination de la GMS, l’acquéreur et la cible disposent respectivement de [20- 30] % et [5-10] % de parts de marché. La part de marché de la nouvelle entité sera donc de [20- 30] %.

82.   La nouvelle entité restera confrontée à la concurrence de plusieurs concurrents nationaux41 ainsi qu’au contre-pouvoir important des enseignes de la GMS.

83.  En conséquence, l’opération n’est pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur le marché des carcasses d’agneaux SIQO à destination de la GMS.

84.   Sur le marché à destination de la BCA, l’acquéreur et la cible disposent respectivement d’une part de marché de [10-20] % et [10-20] %. La part de marché de la nouvelle entité sera donc de [20-30] %. Sur ce segment, la nouvelle entité restera confrontée à la concurrence de plusieurs concurrents nationaux42.

85.  En conséquence, l’opération n’est pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur le marché des carcasses d’agneaux SIQO à destination de la BCA.

86.   L’opération n’est donc pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur les marchés des carcasses d’ovins.

Les carcasses de porcins

87.  Sur le marché des carcasses de porcins, la nouvelle entité disposera, quelle que soit la segmentation, d’une part de marché inférieure à 25 %.

88.  En conséquence, l’opération n’est pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur les marchés des carcasses de porcins.

c)   Les coproduits issus de l’abattage

89.  Sur les marchés des coproduits propres à la consommation humaine et animale et aux usages pharmaceutiques comme ceux des produits impropres à la consommation, la part de marché cumulée des parties est inférieure à 25 %, quel que soit le segment considéré. S’agissant des marchés des cuirs et peaux, la part de marché cumulée des parties est inférieure à 25 %, ou inférieure à 50 % de parts de marché avec une addition de parts de marché inférieure à 2 points, quel que soit le segment considéré.

90.   En conséquence, l’opération n’est pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur les marchés des coproduits issus de l’abattage.

 

2. LA DEUXIÈME TRANSFORMATION

91.   L’activité des parties se chevauche sur les marchés de la viande fraiche de bovins, d’ovins et des porcins.

a)   La viande fraiche de bovins

92.   La part de marché de la nouvelle entité restera inférieure à 25 %, ou inférieure à 50 % avec une addition de parts de marché consécutive à l’opération inférieure à 2 points, quelle que soit la segmentation, sur l’ensemble des segments concernés à l’exception de celui de la viande fraiche de veaux SIQO à destination de la GMS.

93.   Sur ce marché, l’acquéreur et la cible disposent respectivement de 53 % et 2 % de part de marché. La nouvelle entité disposera donc de 55 % de part de marché.

94.   Il convient toutefois de noter que le changement de la structure du marché induit par l’opération est limité, compte tenu de la faible addition de parts de marché (2 points seulement). Par ailleurs, l’essentiel de l’activité de l’acquéreur sur ce marché résulte d’un partenariat conclu entre le groupe Bigard et l’enseigne […], dans le cadre d’une convention de partenariat. Or, ce partenariat est fondé sur un plan d’affaires, renégocié chaque année, dans le cadre de la convention de distribution conclue entre […] et Bigard. Selon la partie notifiante, Bigard ne bénéficie d’aucune garantie d’activité. En outre, […] peut rompre sa relation avec Bigard tous les ans, et aurait, dans ce cas, la possibilité de travailler avec d’autres opérateurs actifs dans l’Aveyron.

95.    À cela s’ajoute la pression exercée par la présence de plusieurs concurrents dont certains sont intégrés verticalement43 d’une part, et le fort contre-pouvoir dont disposent les enseignes de la GMS, d’autre part. L’opération n’est donc pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur le marché de la viande fraîche de bovins, y compris pour ce qui concerne les veaux SIQO.

b)   La viande fraiche d’ovins

96.    La part de marché de la nouvelle entité restera inférieure à 25 %, quelle que soit la segmentation retenue, hormis sur le marché de la viande d’agneaux à destination de la BCA.

97.    Sur ce marché, l’acquéreur et la cible disposent respectivement d’une part de marché de [20- 30]% et [5-10] %. La nouvelle entité disposera donc de [20-30] % de part de marché. Compte tenu de la pression exercée par la présence d’autres concurrents nationaux44, l’opération n’est pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur les marchés de la viande fraiche d’ovins.

c)   La viande fraiche de porcins

98.    La part de marché de la nouvelle entité restera inférieure à 25 %, quelle que soit la segmentation.

99.    En conséquence, l’opération n’est pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur les marchés de la viande fraiche de porcins*.

100.   L’opération n’est donc pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur les marchés de la deuxième transformation.

 

B. LES EFFETS VERTICAUX

101.    Une concentration verticale peut restreindre la concurrence en rendant plus difficile l’accès aux marchés sur lesquels la nouvelle entité sera active, voire en évinçant potentiellement les concurrents ou en les pénalisant par une augmentation de leurs coûts. Ce verrouillage peut viser les marchés aval, lorsque l’entreprise intégrée refuse de vendre un intrant à ses concurrents distributeurs (verrouillage des intrants), ou les marchés amont, lorsque la branche aval de l’entreprise intégrée refuse d’acheter les produits des fabricants et réduit ainsi leurs débouchés commerciaux (verrouillage de clientèle). Cependant, la pratique décisionnelle des autorités de concurrence considère, en principe, qu’un risque d’effet vertical peut être écarté dès lors que la part de marché de l’entreprise issue de l’opération sur les marchés concernés, amont et aval, ne dépasse pas 30 %45.

102.    En l’espèce, l’acquéreur est présent sur les marchés de la troisième et quatrième transformation, tandis que les deux parties sont actives sur les marchés de la première et deuxième transformation.

103.    Des effets verticaux sont susceptibles d’exister entre les marchés de la première et de la deuxième transformation (1) d’une part, et entre les marchés de la deuxième transformation et ceux de la troisième et quatrième transformation (2) d’autre part.

 

1. EFFET VERTICAL ENTRE LES MARCHÉS DE LA PREMIÈRE ET DE LA DEUXIÈME TRANSFORMATION

104.    La nouvelle entité pourrait décider à l’issue de l’opération de ne plus approvisionner ses concurrents présents sur le marché de la deuxième transformation en carcasses de bovins, ovins et porcins (verrouillage des intrants). La nouvelle entité pourrait également décider, pour ses activités de deuxième transformation de ne plus s’approvisionner en carcasses de bovins, ovins et porcins auprès de ses concurrents, les privant ainsi de débouché en vue de les évincer (verrouillage de la clientèle).

105.    Cependant, la part de marché de la nouvelle entité sur les marchés des carcasses et sur ceux de la deuxième transformation est inférieure à 30 %, quelle que soit la segmentation considérée, à l’exception de la viande de veaux SIQO.

106.     S’agissant des veaux SIQO, la nouvelle entité détient, à l’aval, une part de marché de l’ordre de 55 %, l’addition de parts de marché consécutive à l’opération étant de 2 points. La position de la nouvelle entité sur ce marché résulte en partie d’un partenariat avec l’enseigne […] qui peut être renégocié chaque année. Par ailleurs, les principaux concurrents de la nouvelle entité sont économiquement puissants et intégrés notamment en amont46.

107.    Compte tenu de ces éléments, dans l’hypothèse où la nouvelle entité mettrait en œuvre une stratégie de verrouillage de la clientèle, la capacité et les incitations de la nouvelle entité à la mettre en place ne serait que faiblement modifiées par l’opération. En outre, une telle stratégie n’aurait pas d’effet sensible sur les marchés de la deuxième transformation.

108.    L’opération n’est donc pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais des effets verticaux entre les marchés de la première et de la deuxième transformation.

 

2. EFFETS VERTICAUX ENTRE LES MARCHÉS DE LA DEUXIÈME TRANSFORMATION ET CEUX DE LA TROISIÈME ET QUATRIÈME TRANSFORMATION

109.      La nouvelle entité pourrait décider à l’issue de l’opération de ne plus approvisionner ses concurrents présents sur les marchés de la troisième et quatrième distribution en viande fraiche de bovins, d’ovins et de porcins (verrouillage des intrants).

110.      Cependant, la part de marché de la nouvelle entité sur les marchés de la deuxième transformation est inférieure à 30 %, hormis sur le marché de la viande de veaux SIQO à destination de la GMS. Sur ce marché, l’incrément lié à l’opération reste cependant très faible (inférieur à 2 %). En outre, la position de la nouvelle entité est principalement liée à l’existence d’un partenariat entre Bigard et […] qui peut être renégocié chaque année, tant dans son principe que dans les quantités concernées. Enfin, la nouvelle entité sera confrontée au contre- pouvoir important des acteurs de la GMS qui, ainsi qu’il l’a été expliqué précédemment, disposent de fournisseurs alternatifs pour ce type d’intrants.

111.    Compte tenu de ces éléments, dans l’hypothèse où la nouvelle entité mettrait en œuvre une stratégie de verrouillage des intrants, celle-ci n’aurait pas d’effet sensible sur les marchés de la troisième et quatrième transformation.

112.    La nouvelle entité pourrait également décider, pour ses activités de troisième et quatrième transformation, de ne plus s’approvisionner en viande fraiche de bovins, d’ovins et de porcins auprès de ses concurrents, les privant ainsi d’un débouché en vue de les évincer (verrouillage de la clientèle). Or, la part de marché de la nouvelle entité sur certains des segments du marché de la troisième et de la quatrième transformation est supérieure à 30 %.

113.   Il apparaît toutefois que les opérateurs concurrents de la nouvelle entité sur le marché de la deuxième transformation sont, pour une partie d’entre eux, eux-mêmes verticalement intégrés en aval, disposant ainsi de débouchés garantis. En outre, le renforcement de l’intégration verticale de la nouvelle entité ne paraît pas de nature à susciter ce type de risque puisque Bigard s’approvisionne déjà, avant l’opération, prioritairement en interne et que la cible n’est elle- même pas active sur les marchés de la troisième et quatrième transformation.

114.    En conséquence, tout risque d’effet vertical consécutif à la mise en place d’une stratégie de verrouillage des débouchés consécutive à l’opération peut être exclu.

115.    L’opération n’est donc pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais des effets verticaux entre les marchés de la deuxième transformation et ceux de la troisième et quatrième transformation.

 

DÉCIDE

Article unique : L’opération notifiée sous le numéro 20-145 est autorisée.

 

 

 

 

 

 

1 Ce résumé a un caractère purement informatif. Seuls font foi les motifs numérotés ci-après.

* Rectification d’erreur matérielle

2 Voir notamment la lettre C2008-100 du ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi du 17 février 2009 au conseil de la société Bigard relative à une concentration dans le secteur de la viande et les décisions de l’Autorité de la concurrence n° 16-DCC-178 du 15 novembre 2016 relative à la prise de contrôle exclusif des sociétés Dufour Sisteron, Ovimpex et Ovimpex Distribution par la coopérative Arterris et n°17- DCC-210 du 13 décembre 2017 relative à la fusion par absorption de la société Coopérative des Agriculteurs de la Mayenne par la coopérative agricole Terrena.

Voir notamment la décision de la Commission européenne IV/M.1313 Danish Crown/Vestjyske Slagterier du 9 mars 1999 et la décision     n° 16-DCC-178 précitée.

4 Voir notamment les décisions de l’Autorité de la concurrence n° 16-DCC-33 du 24 février 2016 relative à l’acquisition par LDC Volaille des actifs d’abattage, de commercialisation et de transport de volailles du groupe Agrial et les décisions n° 16-DCC-178 et 17-DCC-210 précitées. 5 Voir les décisions n° 16-DCC-178 précitée et n°16-DCC-208 du 9 décembre 2016 relative à la fusion par absorption de la société Sicavyl par la société Sicarev.

6 Voir notamment la lettre C2008-100 précitée ainsi que la décision n° 19-DCC-122 du 26 juin 2019 relative à la fusion des coopératives Actis Bovins, Caneca, CEBM, Charolais Horizon, Cialyn, Covido-Bovidocoop et Dauphidrom.

7 Les vaches laitières sont destinées à la production de lait. En fin de vie, elles sont généralement mises à l’engraissement et envoyées à l’abattoir. Elles sont alors communément appelés « vaches de réforme ».

8 Voir notamment la décision de la Commission européenne IV/M.1313 précitée et la décision de l’Autorité de la concurrence n° 16-DCC-178 précitée.

9 Décisions de l’Autorité de la concurrence n° 18-DCC-94 du 12 juin 2018 relative à la fusion absorption de la coopérative agricole Prestor par la coopérative agricole Aveltis et n° 15-DCC-144 du 23 octobre 2015 relative à la fusion par absorption de la société coopérative agricole porcine de la Manche par la société coopérative agricole de la Mayenne.

10 Voir la lettre C2008-100 précitée, ainsi que les décisions n° 16-DCC-178 et n° 19-DCC-122 précitées.

11 Voir notamment la décision de l’Autorité de la concurrence n° 16-DCC-178 précitée.

12 Voir le paragraphe 835 des Lignes directrices de l’Autorité de la concurrence relatives au contrôle des concentrations pour un exposé de cette méthode, et la décision n° 16-DCC-178 précitée pour son application à l’agriculture.

13 Voir les décisions n° 17-DCC-210 et 18-DCC-94 précitées.

14 Voir la décision n° 16-DCC-178 précitée.

15 Id.

16 Voir la décision n° 16-DCC-178 précitée.

17 Voir notamment la lettre C2008-100 précitée ainsi que la décision n° 16-DCC-178 précitée.

18 Voir notamment la décision n° 11-DCC-68 du 26 mai 2011 relative à la prise de contrôle exclusif des sociétés Poujol Frères et Poujol Froid par la société Arcadie Sud-Ouest.

19 Voir notamment la décision n° 16-DCC-178 précitée et la décision de la Commission européenne COMP/M.3605 Sovion/HMG du 21 décembre 2004.

20 Voir notamment la lettre C2008-100 précitée ainsi que les décisions n° 13-DCC-172 du 28 novembre 2013 relative à la fusion par absorption de la coopérative Géo par la coopérative Cavac et n° 11-DCC-68 précitée.

21 Voir notamment la décision n° 16-DCC-178 précitée.

22 Voir notamment la lettre C2008-100 précitée, et les décisions n° 11-DCC-68 précitée et n° 10-DCC-22 du 8 mars 2010 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Spanghero par la société coopérative Lur Berri. Voir également la décision COMP/M.3605 précitée.

23 Voir notamment la lettre C2008-100 précitée ainsi que la décision n° 10-DCC-22 précitée.

24 Voir notamment les décisions de l’Autorité de la concurrence n° 15-DCC-33 du 20 mars 2015 relative à la prise de contrôle exclusif de certains actifs du groupe Gad par la Société Vitréenne d’Abattage Jean Roze et n° 11-DCC-154 du 24 octobre 2011 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Financière du Forest par la société Centrale Coopérative Agricole Bretonne.

25 Voir notamment les décisions n° 15-DCC-33 et n° 11-DCC-68 précitées.

26 Id.

27 Voir notamment la décision n° 15-DCC-33 précitée.

28 Voir la lettre C2008-100 précitée et les décisions n° 15-DCC-33 et n° 11-DCC-68 précitées.

29 Id.

30 Voir notamment les décisions de l’Autorité de la concurrence n° 11-DCC-154 et n° 15-DCC-33 précitées.

31 Voir les décisions n° 15-DCC-33 précitée et n° 13-DCC-116 du 28 août 2013. relative à la prise de contrôle exclusif par le groupe VanDrie de la société Tendriade-Collet S.A.S.

32 Les actifs cibles pourraient être considérés comme présents sur les marchés de la troisième transformation de viande porcine si l’on considère que les marchés de la deuxième et de la troisième transformation sont confondus. L’analyse horizontale sera néanmoins menée au niveau de la deuxième transformation.

33 Voir la lettre C2008-100 précitée et la décision n° 11-DCC-68 précitée.

34 Décision de la Commission européenne COMP/M.1313 précitée.

35 Voir les décisions de l’Autorité de la concurrence n°10-DCC-22, n°11-DCC-68, n°11-DCC-154 et n° 15-DCC-33 précitées.

36 Voir la lettre du ministre de l’économie C2007-153 du 15 février 2008, Pierre Schmidt ainsi que la décision de l’Autorité de la concurrence n° 09-DCC-52 du 12 octobre 2009 relative à la prise de contrôle de la société Brocéliande ALH SA par le groupe Cooperl Arc Atlantique.

37 Voir notamment les décisions de l’Autorité de la concurrence n° 09-DCC-52 et n°11-DCC-154 précitées.

38 Voir notamment les décisions précitées n° 09-DCC-52 et n°11-DCC-154.

39 Voir notamment les décisions précitées n° 09-DCC-52 et n° 11-DCC-154 ainsi que la décision du ministre C2007-153 précitée.

40 Voir notamment les décisions précitées n° 09-DCC-52 et n° 11-DCC-154 ainsi que la décision de la Commission européenne COMP/M.4257 Smithfield/oaktree/Sara Lee Foods Europe du 28 juillet 2006.

41 Notamment Sovileg, Limovin et Alpes Provence Agneaux - Ovimpex.

42 Notamment Alpes Provence Agneaux – Ovimpex, Sodem et Sovileg.

43 Notamment Viandes de Corrève, Sobeval, Tradival, Kermene.

44 Par exemple, Alpes Provence Agneaux – Ovimpex, Sodem et Ruthène Viandes.

Rectification d’erreur matérielle

45 Voir paragraphe 678 des lignes directrices de l’Autorité.

46 Notamment, Sobeval/Van Drie, Tradival/Sicarev et SVA/Intermarché.