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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 3 sect. 2, 17 juin 2021, n° 17/13606

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Depil Tech (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Lis Schaal

Conseillers :

Mme Fournier, Mme Vassail

Avocats :

Me Magnan, Me Danays

T. com. Nice, du 1er juin 2017

1 juin 2017

Madame X a pris attache en 2015 avec la société DEPIL TECH en vue d'un projet de contrat de franchise.

Le 21 mai 2015, elle signait le document d'information précontractuel (DIP) et remettait à la société DEPIL TECH un chèque de 26 400 euros au titre des droits d'entrée de franchise pour Cergy Pontoise.

Ce chèque a été encaissé par DEPIL TECH le 1er juillet 2015 avant la signature du contrat de franchise et n'a pas communiqué à Mme X le DIP qui lui sera transmis en décembre 2015.

Après des désaccords entre les parties portant sur les locaux et le refus de DEPIL TECH de modifier les clauses du contrat de franchise par courrier du 15 mars 2016, X a renoncé à signer le contrat de franchise et a demandé la restitution du montant des droits d'entrée de franchise qui malgré mise en demeure, ce montant n'a pas été restitué par DEPIL TECH.

C'est dans ce contexte que X a fait assigner le 18 novembre 2016 la société DEPIL TECH aux fins à titre principal de la voir condamner à lui verser la somme de 26 400 euros au titre du remboursement des droits d'entrée et de maîtrise d'oeuvre outre une somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour rétention abusive et 2 500 euros au titre de l'article 700 du CPC.

Par jugement contradictoire du 1er juin 2017, le tribunal de commerce de Nice a condamné la société DEPIL TECH à payer à X la somme de 26 400 euros au titre des droits d'entrée et de maîtrise d'oeuvre indument perçue,

Dit n'y avoir lieu à dommages et intérêts,

Débouté les parties de toutes leurs autres demandes, fins et conclusions,

Condamné la société DEPIL TECH à payer à Mme X la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du CPC et aux entiers dépens.

Les premiers juges ont estimé que la somme de 26 400 euros ne devait être encaissée qu'à la signature du contrat de franchise alors que le DIP n'était transmis à Mme X qu'en décembre 2015.

Ils ont retenu qu'il n'avait pas été prévu une contrepartie financière en cas de dédit contrairement aux dispositions de l'article L 330-3 du code de commerce et que la société DEPIL TECH a revendu la zone réservée avant même la renonciation au contrat par Mme X.

Ils ont donc jugé que la société DEPIL TECH n'avait pas respecté la loi DOUBIN ni son propre contrat en encaissant la somme susvisée.

La société DEPIL TECH a interjeté appel de cette décision le 13 juillet 2017.

Par conclusions notifiées par le RPVA du 12 octobre 2017, auxquelles il est fait référence pour plus ample exposé des motifs, la société DEPIL TECH conclut :

A titre principal ;

Infirmer le jugement entrepris ;

En conséquence,

Débouter Mme X de sa demande de remboursement de la somme de 26 400 euros versée au titre des droits d'entrée,

A titre reconventionnel,

Dire et juger que Mme X a commis de nombreuses fautes lui ayant causé un préjudice certain,

Dire que son action en justice est abusive,

En conséquence,

Condamner Mme X à indemniser son préjudice à hauteur de la somme de 19 200 euros,

Condamner Mme X à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'action en justice abusive,

La condamner à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du CPC,

La condamner aux dépens.

L'appelante soutient que le document d'information précontractuel signé le 21 mai 2015 par les parties est source d'obligations et qu'en vertu de ce document Mme X a versé la somme de 26 400 euros au titre des droits d'entrée pour réserver la zone géographique par la société DEPIL TECH.

Elle ajoute que conformément au DIP, Mme X devait signer un contrat de franchise dans les 30 jours après la signature du DIP.

Elle fait valoir que la somme de 26 400 euros correspond à la rétribution de la société DEPIL TECH en échange de son savoir-faire et de l'exclusivité de la zone géographique et qu'elle était donc en droit d'encaisser la somme de 26 400 euros correspondant au droit d'entrée correspondant à une indemnité d'immobilisation puisque pendant toute la durée du contrat, le franchiseur s'interdit de signer un contrat de franchise portant sur un local situé dans la zone réservée.

Elle estime avoir exécuté et respecté ses engagements contractuels ce que Mme X n'a pas fait.

Elle estime aussi avoir subi un préjudice.

Par conclusions notifiées par le RPVA du 23 novembre 2017, auxquelles il est fait référence pour plus ample exposé des motifs, X conclut:

A la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a fait droit à sa demande de remboursement de la somme de 26 400 euros,

Le réformer sur le surplus,

Statuant à nouveau,

Condamner la société DEPIL TECH à lui payer la somme de 19 799,28 euros à titre de dommages et intérêts,

Condamner la société DEPIL TECH à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC au titre des deux degrés de procédure ainsi qu'aux dépens avec distraction au profit de Me Guillaume DANAYS.

Elle soutient que la loi DOUBIN particulièrement l'article L 330-3 du code de commerce et la jurisprudence en matière de la franchise n'ont pas été respectés par la société DEPIL TECH.

Elle fait valoir que le DIP n'est générateur d'aucune obligation à l'égard du futur franchisé, s'agissant d'une information précontractuelle à l'égard des candidats à la franchise afin de leur permettre de prendre connaissance d'informations liées à l'entreprise avant de s'engager ou pas dans la franchise.

Il ne s'agit pas d'un contrat et sa signature n'engage pas le candidat à la franchise.

Elle estime que la société DEPIL TECH a fait preuve de mauvaise foi d'autant plus que le droit positif français considère que l'épilation pratiquée autrement qu'à la cire ou à la pince constitue un acte médical et que le contrat de franchise proposé semble contraire au monopole médical.

L'intimée soutient avoir perdu une chance de devenir franchisée dans le domaine de l'esthétique. Elle explique avoir fait des recherches des locaux pour y installer son exploitation commerciale de franchisée alors qu'aucune attribution territoriale n'existait réellement ni au stade précontractuel ni au stade contractuel.

Elle expose avoir subi d'autres préjudices ayant été obligée de faire un emprunt de 28 400 euros et avoir dû payer les frais de géomètre pour les locaux, d'un montant de 394 euros.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 1er avril 2021.

SUR CE :

Attendu qu'en application de l'article L 330-3 du code de commerce le document d'information précontractuel (DIP) doit donner des informations sincères qui permettent de s'engager en connaissance de cause,

Qu’il s'agit d'une information précontractuelle comme il est indiqué en première page au bénéfice du candidat à la franchise avant la signature du contrat de franchise afin de lui permettre de prendre connaissance d'informations liées à l'entreprise avant de s'engager ou pas dans la franchise.

Qu’il ne constitue pas le contrat de franchise,

Que lorsque le versement d'une somme est exigé préalablement à la signature du contrat, notamment pour obtenir la réservation d'une zone, les prestations assurées en contrepartie de cette somme sont précisées par écrit ainsi que les obligations réciproques des parties en cas de dédit,

Qu’en l'espèce, il n'existe pas de dispositions dans le DIP concernant les prestations assurées en contrepartie de cette somme et les obligations réciproques des parties en cas de dédit,

Qu’en outre le droit d'entrée de 22 000 euros HT n'indique pas qu'il représente une réservation de zone, la facture indiquant des droits d'entrée et de maîtrise d'oeuvre ne pouvant constituer une indemnité d'immobilisation comme le soutient la société DEPIL TECH,

Que la société DEPIL TECH a encaissé la somme de 26 400 euros avant la signature du contrat de franchise alors que le droit d'entrée ne pouvait être encaissé qu'au moment de la signature du contrat de franchise et qu'il n'y avait pas obligation pour Mme X de signer le contrat de franchise sous réserve du paiement d'un dédit,

Que cela résulte du DIP qui indique: « Avoir également été informé de ce que la remise du DIP n'entraine aucune obligation pour le concédant d'avoir à signer le contrat de franchise ci-joint»,

Que cette liberté laissée au concédant s'applique au candidat à la franchise,

Que Mme X ayant renoncé à signer le contrat de franchise, la société DEPIL TECH n'était pas en droit d'encaisser la somme de 26 400 euros au titre des droits d'entrée et de maîtrise d'oeuvre selon facture du 1er juillet 2015,

Qu’en conséquence, c'est à juste titre que les premiers juges ont condamné la société DEPIL TECH à rembourser à Mme X la somme de 26 400 euros au titre des droits d'entrée et de maîtrise d'oeuvre,

Que le jugement entrepris sera confirmé de ce chef;

Attendu que Mme X sollicite l'indemnisation de son préjudice constitué par la perte de chance de devenir franchisée dans le domaine de l'esthétique, expliquant qu'elle a procédé à des recherches des locaux pour y installer son exploitation commerciale de franchisée alors qu'aucune attribution territoriale n'existait réellement ni au stade précontractuel ni au stade contractuel et qu'elle a subi d'autres préjudices, ayant été obligée de faire un emprunt de 28 400 euros et avoir dû payer les frais de géomètre pour les locaux, d'un montant de 394 euros,

Que ces frais sont liés à son projet de franchise et ne sont pas en lien direct avec le comportement de la société DEPIL TECH,

Qu’il convient donc de la débouter de cette demande, le jugement entrepris sera confirmé;

Attendu que la succombance de l'appelante entraine le débouté de ses demandes d'indemnisation de son préjudice supposé ;

Attendu que l'équité impose de condamner la société DEPIL TECH à payer à Mme X la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du CPC ;

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement et contradictoirement,

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Déboute les parties de leurs plus amples prétentions ;

Condamne la société DEPIL TECH à payer à Mme X la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du CPC ;

La condamne aux entiers dépens avec distraction au profit de Me Guillaume DANAYS.