Cass. 3e civ., 10 décembre 2008, n° 07-20.277
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Peyrat
Avocats :
SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Piwnica et Molinié
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 30 août 2007), que la commune de Valenciennes (la commune), propriétaire d'un local, l'a donné à bail à la société Val Karting (la société) pour y développer une activité de karting en intérieur ; qu'un voisin ayant agi à son encontre aux fins d'obtenir sa condamnation à exécuter des travaux d'insonorisation dans le local pris à bail, la société a assigné la bailleresse en garantie de toutes les condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre ;
Attendu que la commune fait grief à l'arrêt de la condamner à garantir la société de la condamnation au titre du coût des travaux de mise en conformité du local, alors, selon le moyen :
1°/ que l'obligation de délivrance du bailleur suppose une mise à disposition du bien objet du bail permettant l'affectation prévue originairement ; que le bien loué doit donc, compte tenu du droit applicable et de ses spécificités matérielles, pouvoir accueillir l'activité projetée dans le contrat de bail, peu important que des travaux d'aménagement soient nécessaires, particulièrement lorsque les parties ont convenu que le preneur prendra les lieux loués dans l'état où ils se trouvent le jour de l'entrée en jouissance ; que, dès lors, ne manque pas à son obligation de délivrance, en présence d'une telle clause, le bailleur qui met à la disposition du preneur un bien permettant l'affectation prévue, mais dont l'insonorisation ne suffit pas à prémunir le preneur de toute responsabilité vis-à-vis de tiers riverains du fait de son activité ; qu'en l'espèce, la commune a mis à disposition de la société un local permettant, compte tenu de la législation applicable et de la configuration des lieux, une activité de karting prévue au bail ; que le bailleur n'a donc pas manqué à son obligation de délivrance peu important que l'insonorisation du bâtiment n'ait pas été suffisante pour éviter toute responsabilité du preneur à raison du bruit résultant de son activité de karting, ce dernier ayant expressément accepté de prendre les lieux loués dans l'état où ils se trouvaient le jour de l'entrée en jouissance ; qu'en affirmant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1719 du code civil ;
2°/ qu'en l'espèce, la cour d'appel a elle-même constaté que "la clause de renonciation à recours contre le bailleur prévue au contrat (...) fait obstacle à ce que la société puisse réclamer la garantie du bailleur quant aux dommages et intérêts alloués aux époux X... résultant du trouble de voisinage" ; que la cour d'appel a donc retenu que, compte tenu de la convention conclue entre elles, la société Val Karting ne pouvait agir en garantie contre la commune en cas de condamnation pour trouble anormal de voisinage ; qu'en condamnant cependant le bailleur à garantir la société de la condamnation à réaliser des travaux d'insonorisation qu'elle avait été condamnée à réaliser pour réparer, en le faisant cesser, le préjudice causé aux époux X... et résultant du trouble de voisinage consécutif à l'exploitation du karting, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1134 du code civil ;
3°/ qu'en condamnant le bailleur à garantir intégralement le preneur de sa condamnation à faire réaliser des travaux d'insonorisation en vue de faire cesser le préjudice causé par le bruit de l'activité de karting sans rechercher s'il n'était pas au moins partiellement imputable à l'exploitant, à raison notamment du type de véhicules utilisés, de leur nombre et des horaires d'ouverture dont le preneur décidait seul, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant relevé, à bon droit, que le bailleur est obligé notamment de délivrer au preneur la chose louée et d'entretenir cette chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée et que la clause par laquelle le locataire prend les lieux dans l'état où ils se trouvent ne décharge pas le bailleur de son obligation de délivrance, constaté que les locaux avaient été pris à bail en vue de l'exploitation par la société de son activité de karting en intérieur, que le local ne comportait aucun dispositif d'insonorisation spécifique et qu'il ressortait d'une expertise judiciaire que les essais acoustiques n'étaient pas conformes à la réglementation, et retenu souverainement que des travaux importants s'imposaient compte tenu de l'inadaptation du hangar à l'activité envisagée, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, en a exactement déduit que la commune n'avait pas satisfait à son obligation de délivrance ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.