Cass. 3e civ., 3 juillet 2013, n° 12-18.099
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Terrier
Rapporteur :
Mme Proust
Avocat général :
M. Laurent-Atthalin
Avocat :
SCP Baraduc et Duhamel
Sur le premier moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 25 janvier 2012), que la société Aldi marché (la société Aldi), preneuse à bail d'un ensemble immobilier a, par acte du 7 octobre 1997, sous-loué une partie de ces locaux à la société Tulle frais, aux droits de laquelle vient la société Aurillac frais (la société Aurillac) ; qu'en décembre 2008, la société Aldi a fermé le magasin qu'elle exploitait dans les locaux contigus à ceux sous-loués ; que la société Aurillac l'a alors assignée en prononcé de la résiliation du sous-bail à ses torts et en paiement de dommages-intérêts ; qu'en cours d'instance, les parties se sont accordées pour résilier amiablement le bail au 15 juillet 2009 ;
Attendu que la société Aurillac fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en paiement au titre du préjudice consécutif à l'abandon du centre commercial par la société Aldi, alors, selon le moyen :
1°/ que le bailleur commercial est tenu d'assurer au preneur la jouissance paisible des locaux loués ; qu'il engage sa responsabilité à ce titre lorsqu'il commet une faute de nature à dégrader ou supprimer l'environnement commercial des lieux loués ; qu'en l'espèce, la société Aurillac frais faisait valoir que le contrat de sous-location conclu avec la société Aldi marché avait créé une dépendance de son activité par rapport à celle du bailleur, puisqu'il lui imposait notamment une obligation d'exploitation effective pendant les douze mois de l'année, ainsi qu'une obligation prévoyant l'apposition de l'enseigne Aldi marché sur tous les supports publicitaires utilisés ; qu'elle exposait également qu'en quittant volontairement le centre commercial, la société Aldi marché avait de facto privé les lieux de toute commercialité, soulignant que « si l'enseigne principale n'avait pas existé, l'activité d'Aurillac frais n'aurait pu se déployer » ; qu'en écartant toute responsabilité de la société Aldi marché, au motif inopérant de l'absence de stipulation d'une obligation de maintien de la commercialité des lieux dans le bail, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la fermeture inopinée des lieux, qui impliquait la disparition de l'essentiel de leur commercialité, constituait un manquement fautif du bailleur à son obligation d'assurer la jouissance paisible des lieux loués, en l'état d'une complémentarité non contestée des activités d'Ald marché et d'Aurillac frais, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1719 et 1723 du code civil ;
2°/ que le bailleur commercial, comme tout cocontractant, est tenu envers le preneur d'une obligation de bonne foi ; que le bailleur manque à son devoir de loyauté envers le preneur lorsqu'il met fin unilatéralement à sa propre exploitation du centre commercial dans lequel se situent les lieux loués, qui se trouvent, par cette décision, désormais dépourvus d'attractivité commerciale ; qu'en l'espèce, la société Aurillac frais faisait valoir que le contrat de sous-location conclu avec la société Aldi marché avait créé une dépendance de son activité par rapport à celle du bailleur, puisqu'il lui imposait notamment une obligation d'exploitation effective pendant les douze mois de l'année, ainsi qu'une obligation prévoyant l'apposition de l'enseigne Aldi marché sur tous les supports publicitaires utilisés ; qu'elle exposait également qu'en quittant volontairement le centre commercial, la société Aldi marché avait de facto privé les lieux de toute commercialité, soulignant que « le bailleur qui se retire inopinément des lieux, pour aller transférer son activité plus loin, sans seulement offrir au sous-locataire la possibilité de le suivre dans les nouveaux lieux commet incontestablement une faute dont les conséquences financières sont catastrophiques » ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si la modification de l'environnement économique de l'activité de la société Aurillac frais était consécutive à une décision unilatérale de la société Aldi marché et si, en s'abstenant de toute proposition de nature à lui permettre de maintenir son exploitation dans des conditions satisfaisantes, cette société avait manqué à son devoir de loyauté, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134, alinéa 3, du code civil ;
Mais attendu qu'ayant exactement retenu qu'il n'existait pas d'obligation légale pour le bailleur d'un local situé dans un centre commercial ou une galerie commerciale d'assurer le maintien de l'environnement commercial et relevé qu'aux termes du contrat de sous-location, en l'absence de stipulation particulière, le bailleur s'était uniquement engagé à mettre à disposition les locaux visés au bail ce qu'il avait toujours fait, que les lieux n'avaient subi aucun changement de forme, et que la complémentarité non contestée des activités et les clauses relatives aux modalités d'exploitation n'établissaient pas une commune intention des parties d'obliger la société Aldi à maintenir son activité dans l'immeuble aussi longtemps que la sous-location perdurerait, la cour d'appel, qui a procédé à la recherche prétendument omise sur l'obligation de jouissance paisible et n'était pas tenue de procéder à une recherche non demandée sur le manquement à son devoir de loyauté par le bailleur, en a justement déduit que la société Aldi n'avait pas commis de faute en quittant les lieux ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le second moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.