ADLC, 24 juin 2021, n° 21-D-14
AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE
Décision
relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la distribution d’articles de bricolage
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Jury :
Délibéré sur le rapport oral de M. Philippe Couton, rapporteur, et l’intervention de M. Joël Tozzi, rapporteur général adjoint, par Mme Fabienne Siredey-Garnier, vice-présidente, présidente de séance, Mme Laurence Borrel-Prat, Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, M. Jean-Yves Mano et M. Alexandre Menais, membres.
L’Autorité de la concurrence (section II),
Vu la décision n° 15-SO-06 du 12 mai 2015, enregistrée sous le numéro 15/0047 F, par laquelle l’Autorité de la concurrence s’est saisie d’office dans le secteur de la distribution des produits grand public de marque Kärcher ;
Vu le Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, et notamment le premier paragraphe de l’article 101 ;
Vu le livre IV du code de commerce, et notamment son article L. 420-1 ;
Vu les décisions de secret des affaires n° 17-DSA-326 du 2 août 2017, 17-DSA-320 du 1er août 2017, 17-DSA-325 du 2 août 2017, 17-DSA-319 du 31 juillet 2017, 17-DSA-324 du 2 août 2017, 16-DSA-176 du 8 juillet 2016, 16-DSA-265 du 1er septembre 2016, 16-DSA-272 du 2 septembre 2016, 16-DSA-280 du 7 septembre 2016, 17-DSA-120 du 16 mars 2017, 17-DSA-124 du 21 mars 2017, 17-DSA-126 du 22 mars 2017, 17-DSA-299 du 20 juillet 2017, 17-DSA-396 du 2 octobre 2017, 18-DSA-090 du 27 mars 2018, 18-DEC-121 du 23 avril 2018, 18-DEC-124 du 24 avril 2018, 18-DEC-134 du 2 mai 2018, 18-DECR-126 du 24 avril 2018, 18-DECR-173 du 6 juin 2018 et 20-DECR-500 du 15 octobre 2020 ; Vu les observations présentées par les sociétés Kärcher SAS, Alfred Kärcher GmbH & Co. KG (devenue Alfred Kärcher SE & Co. KG), Alfred Kärcher Beteiligungs-GmbH et le commissaire du Gouvernement ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Le rapporteur, le rapporteur général adjoint, les représentants des sociétés Kärcher SAS, Alfred Kärcher GmbH & Co. KG (devenue Alfred Kärcher SE & Co. KG) et Alfred Kärcher Beteiligungs-GmbH et le commissaire du Gouvernement, entendus lors de la séance de l’Autorité de la concurrence du 11 février 2021,
Adopte la décision suivante :
Résumé1
Aux termes de la présente décision, l’Autorité de la concurrence (ci-après, « l’Autorité ») prononce un non-lieu pour des pratiques concernant la distribution d’articles de bricolage, et plus précisément, de nettoyeurs haute pression de la marque Kärcher.
Il était reproché par les services d’instruction à la société Kärcher SAS (ci-après, « Kärcher ») d’avoir mis en œuvre, entre 2009 et 2011, des pratiques visant à imposer des prix de revente à l’ensemble de ses distributeurs, en violation des articles L. 420-1 du code de commerce et 101 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.
Il a été constaté que Kärcher communiquait à ses distributeurs des prix de revente dits « conseillés », via la diffusion de tarifs annuels et par le biais d’échanges bilatéraux.
Les pratiques relevées par les services d’instruction au titre de l’invitation de Kärcher au respect des prix conseillés s’appuyaient notamment sur :
· les conditions commerciales accordées par Kärcher à ses distributeurs et sa politique promotionnelle vis-à-vis de ses distributeurs et des consommateurs ;
· des discussions internes à Kärcher concernant les prix de revente au détail de ses produits ;
· plusieurs pièces relatives au respect des prix et, notamment, un argumentaire de négociation avec ses distributeurs évoquant l’existence de prix imposés, préparé par un consultant extérieur et diffusé lors d’un séminaire de formation des commerciaux Kärcher ;
· la réalisation de visites régulières par Kärcher auprès de distributeurs ; ainsi que
· la communication de données sur les ventes par ses distributeurs à Kärcher.
L’Autorité a considéré qu’au regard des éléments figurant au dossier, la preuve de l’invitation de Kärcher à ses distributeurs à mettre en œuvre la pratique illicite d’entente sur les prix visée par le grief notifié n’était pas rapportée. L’Autorité a estimé, par conséquent, que cette pratique n’était pas établie.
I. Constatations
1. Seront successivement présentés la procédure (A), le secteur d’activité (B), l’entreprise mise en cause (C) et les pratiques relevées (D).
A. LA PROCEDURE
2. Le 20 novembre 2012, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (ci-après, « DGCCRF ») a confié une enquête concernant les pratiques mises en œuvre dans le réseau de distribution des produits « Grand Public » de marque Kärcher à la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (ci-après, « DIRECCTE ») d’Aquitaine.
3. Sur autorisation du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Bordeaux du 7 décembre 2012, des opérations de visite et saisie ont été effectuées le 20 décembre 2012 dans les locaux de la SAS Kärcher (ci-après, « Kärcher »), de la SA Leroy Merlin France (ci-après, « Leroy Merlin »), de la SAS Brico Dépôt (ci-après, « Brico Dépôt
») et de la SA Cdiscount (ci-après, « Cdiscount »).
4. L’autorisation et le déroulement des opérations de visite et saisie ont fait l’objet de recours, puis de pourvois de la part de ces sociétés, rejetés, respectivement, par quatre ordonnances du 8 avril 2014 du premier président de la cour d’appel de Bordeaux et quatre arrêts du 14 octobre 2015 de la Chambre criminelle de la Cour de cassation2.
5. Par lettre du 11 mars 2015, la DGCCRF a adressé à l’Autorité de la concurrence (ci-après, « l’Autorité ») un rapport administratif d’enquête établi par la Brigade interrégionale d’enquête de concurrence Aquitaine Midi-Pyrénées Poitou-Charentes Limousin relatif aux pratiques suspectées d’entente entre Kärcher et ses distributeurs sur les prix de revente des produits Kärcher3.
6. Par décision n° 15-SO-06 du 12 mai 2015, l’Autorité s’est saisie d’office des pratiques mentionnées dans le rapport d’enquête.
7. Le 22 juin 2018, le rapporteur général de l’Autorité a adressé une notification de griefs pour des pratiques prohibées au titre du paragraphe 1 de l’article 101 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (ci-après, « TFUE ») et de l’article L. 420-1 du code de commerce aux sociétés Kärcher SAS, Alfred Kärcher GmbH & Co. KG (devenue Alfred Kärcher SE & Co. KG) et Alfred Kärcher Beteiligungs-GmbH.
B. LE SECTEUR CONCERNE
1. LES PRODUITS EN CAUSE
8. Les produits concernés par la présente procédure sont les nettoyeurs haute pression (ci-après,
« NHP ») de marque Kärcher à destination du grand public.
9. Les NHP sont des appareils de nettoyage propulsant de l’eau à haute pression grâce à un système de pompe à pistons. Ils permettent, en utilisant de l’eau ou des détergents, de désincruster la saleté de surfaces dures, comme un sol, un mur ou du mobilier de jardin, plus rapidement et facilement que les autres dispositifs de nettoyage (aspirateurs, autres types de nettoyeurs etc.)4.
10. Créés dans les années 50, et initialement uniquement destinés aux professionnels, les NHP Kärcher ont été proposés aux particuliers à partir de 19845. Leur succès a fait de Kärcher une marque éponyme, dont le nom est utilisé de manière générique pour désigner les NHP. Chaque année, Kärcher commercialise environ dix références qui figurent sur le tarif de l’année en question et moins d’une dizaine de références qui n’apparaissent pas sur le tarif de l’année. Les nouvelles références de produits sont commercialisées en magasin pendant une durée moyenne de deux ans6.
11. Par la suite, Kärcher a étendu sa gamme de produits à du matériel de nettoyage (aspirateurs, nettoyeurs vapeur, produits nettoyants etc.), à des articles destinés au jardinage (tuyaux, pompe, arroseurs etc.)7 et à des produits de nettoyage d’intérieur8.
12. En 2008, le département « Grand Public » représentait 45 % du chiffre d’affaires de Kärcher en France9. En 2009, les ventes de NHP généraient 63 % du chiffre d’affaires de ce département, contre 40 % en 201210.
2. L’ORGANISATION DU SECTEUR
13. Le secteur regroupe, en amont, les fabricants de NHP et, en aval, les distributeurs de ces produits.
14. Kärcher dispose d’une position prééminente sur le marché français de la fourniture de NHP. Sur la période 2009-2011, sa part de marché était, en effet, comprise entre 78,7 % et 80,5 % selon les années, les autres fabricants (Black & Decker, Lavorwash, Nilfisk, notamment) et les marques de distributeurs (ci-après, « MDD ») ne détenant, chacun, qu’une part de marché minime11.
15. S’agissant des distributeurs de NHP, au moment des pratiques en cause, les produits de la marque Kärcher appartenant à la gamme « Grand Public » étaient en grande majorité distribués dans les grandes surfaces de bricolage (« GSB ») et, dans une moindre mesure, dans les grandes surfaces alimentaires (« GSA ») ainsi que dans les grandes surfaces spécialisées (« GSS »)12.
16. Sur la période 2009-2011, avec plus de 72 % du chiffre d’affaires facturé par Kärcher, les quatre groupes de grande distribution suivants représentaient le principal canal de distribution de la gamme « Grand Public » des produits Kärcher :
- Kingfisher (enseignes Castorama et Brico Dépôt) ;
- Adeo (enseignes Leroy Merlin, Bricoman, Domaxel, Obi et Schiever) ;
- ITM Entreprises (enseignes spécialisées Bricomarché et Brico Cash) ; et
- Mr.Bricolage (enseignes Mr.Bricolage, Les Briconautes et Jardinautes)13.
17. Les revendeurs de produits Kärcher qui faisaient partie des enseignes mentionnées ci-dessus étaient soit des magasins intégrés, soit des magasins indépendants.
18. Dans le premier cas, les points de vente étaient des succursales qui assuraient la vente au détail, la fonction achat étant assurée par une centrale d’achat. Cette première catégorie incluait les enseignes Castorama14, Brico Dépôt15 et Leroy Merlin16.
19. Dans le second cas, les magasins étaient des sociétés indépendantes ou franchisées, qui achetaient la marchandise en leur nom, tout en bénéficiant des conditions commerciales négociées par le siège/la centrale de référencement. Tel était le cas des enseignes Mr.Bricolage17 ou Bricomarché18.
20. Les autres revendeurs de produits Kärcher avaient, de manière générale, recours à une centrale de référencement ou d’achat.
C. LES ENTITES CONCERNEES
21. Le groupe Kärcher, composé de la société allemande Alfred Kärcher GmbH & Co. KG devenue Alfred Kärcher SE & Co. KG et de ses filiales (ci-après collectivement, le « Groupe Kärcher »), fabrique et commercialise du matériel de nettoyage et de jardinage. Son chiffre d’affaires mondial s’élevait à 2,2 milliards d’euros en 201519.
22. La filiale française du Groupe Kärcher, la société Kärcher SAS (ci-après, « Kärcher »), enregistrée au RCS de Créteil sous le numéro 775 702 673, dont le siège social est situé à Bonneuil-sur-Marne, est chargée de la commercialisation des produits Kärcher en France. Pour les années 2009, 2010 et 2011, Kärcher a réalisé des chiffres d’affaires s’élevant respectivement à 148 264 040 euros, 157 704 404 euros et 182 854 028 euros20.
D. LES PRATIQUES CONSTATEES
1. LA POLITIQUE COMMERCIALE DE KÄRCHER
a) Les conditions commerciales accordées par Kärcher à ses distributeurs
23. Kärcher accorde des avantages financiers de différentes natures selon les distributeurs concernés. Entre 2009 et 2011, ces avantages consistaient, en premier lieu, en des remises sur facture21. Ils pouvaient, en deuxième lieu, prendre la forme de ristournes hors facture assises, notamment, sur le chiffre d’affaires du distributeur ainsi que sur les aspects qualitatifs de sa prestation. Kärcher rémunérait enfin la coopération commerciale et les services distincts de ses distributeurs, soit par une somme fixe, soit par une remise en pourcentage du chiffre d’affaires réalisé par le distributeur en question.
24. Le tableau ci-dessous synthétise les taux de remise sur facture, les taux de ristourne ainsi que les montants de coopération commerciale accordés aux cinq principaux distributeurs pour l’ensemble de la gamme des NHP Kärcher pour la période 2009-201122.
Tableau 1 : Conditions commerciales accordées par Kärcher à ses distributeurs
Source : Réponse de Kärcher du 4 avril 2017 à une demande d’informations des services d’instruction
b) La politique promotionnelle de Kärcher
25. Durant la période des pratiques en cause, Kärcher utilisait des outils de promotion ciblant les consommateurs23 et les distributeurs. Pour les besoins de l’espèce, seuls ces derniers seront présentés ci-après.
26. Les principaux outils promotionnels utilisés à l’égard des distributeurs consistaient en des offres de produits gratuits, des promotions sur les prix de vente, des remises globales conditionnées par certains montants de commandes et des animations en magasins.
Les produits gratuits ou « boni »
27. Kärcher récompensait régulièrement24 l’achat d’un certain volume de produits par ses distributeurs en leur octroyant des appareils ou accessoires gratuits25.
Les remises exceptionnelles et prix de vente promotionnels sur les achats
28. Kärcher accordait à certains de ses distributeurs des remises exceptionnelles sur facture sous réserve d’un certain montant d’achat26 ainsi que des prix de vente promotionnels sur certains articles27.
Les animations dans les points de vente
29. Afin de dynamiser les ventes de ses distributeurs, la société Kärcher leur proposait des journées d’animation en points de vente. Ces animations étaient accordées aux distributeurs selon des critères tels que les volumes d’achat28.
Les exclusivités
30. Kärcher pouvait, enfin, accorder des exclusivités à certains distributeurs sur des modèles particuliers de NHP, sous forme d’arrivages exclusifs ou d’exclusivités de lancement de nouveaux produits29.
Les déclarations des distributeurs concernant les promotions
31. Il ressort des déclarations des enseignes, représentées par les responsables de leur centrale d’achat ou de référencement, que, de manière générale, les prix et les actions promotionnelles applicables aux NHP Kärcher étaient décidés au niveau national, mais que leurs points de vente pouvaient effectuer des promotions sans obligation de demander l’accord de leur centrale (ou de Kärcher)30.
32. Plusieurs enseignes ont indiqué qu’elles s’adressaient à Kärcher pour obtenir une remise supplémentaire sur le prix d’achat, afin de la répercuter sur le prix de vente du produit31, sans qu’il s’agisse toutefois, comme l’a précisé Castorama, d’obtenir une autorisation préalable de Kärcher pour vendre un produit en promotion32. Leroy Merlin a également fait état de demandes de remises supplémentaires à Kärcher pour « écouler » ses stocks de produits anciens33. Ce type de négociation ressort par ailleurs d’échanges entre certaines enseignes et Kärcher34.
33. Certains points de vente ont déclaré qu’ils n’effectuaient pas (ou savaient qu’ils ne pouvaient effectuer) eux-mêmes des promotions sur les produits Kärcher et que les promotions, lorsqu’elles existaient, étaient gérées directement avec Kärcher par les centrales d’achat ou de référencement35. À l’inverse, d’autres points de vente ont indiqué pratiquer librement des promotions au niveau local36.
2. LA COMMUNICATION DE PRIX PAR KÄRCHER A SES DISTRIBUTEURS
a) La communication de prix de revente par Kärcher
34. Dans la période couverte par les pratiques, Kärcher communiquait les prix de revente indicatifs TTC de ses produits à ses distributeurs, soit par le biais de l’envoi des tarifs annuels pour les produits de gamme, soit à l’occasion d’échanges ponctuels, en général pour les produits hors gammes.
35. Dans une audition du 28 novembre 2014, le directeur du département « Grand Public » de Kärcher a indiqué à cet égard que : « [...] »37.
La diffusion de tarifs annuels par Kärcher
36. Peu avant leur entrée en vigueur, Kärcher diffusait les tarifs applicables pour l’année civile à venir à chaque catégorie d’acheteurs, revendeurs grand public maison et jardin, revendeurs spécialistes grand public maison et jardin et revendeurs GSA grand public maison et jardin.
37. Le directeur du département « Grand Public » de Kärcher lors de son audition, le 6 juillet 2017 a précisé que ces tarifs n’étaient pas nécessairement diffusés à l’ensemble des distributeurs : « nous avons communiqué des tarifs à nos distributeurs (centrales d’achat et points de vente) sauf aux points de vente lorsqu’ils appartenaient à des centrales d’achats intégrées qui ne souhaitaient pas que leurs points de vente aient communication des tarifs. Par exemple, Leroy Merlin et Castorama refusaient que les tarifs soient communiqués aux points de vente » (soulignement ajouté)38.
38. Les tarifs n’étaient pas non plus communiqués directement aux points de vente intégrés de Mr.Bricolage (soit un tiers environ des points de vente de cette enseigne)39.
39. Le tableau ci-dessous récapitule les tarifs revendeurs pour les produits grand public maison et jardin communiqués par Kärcher de 2009 à 2011 :
Tableau 2 : tarifs annuels diffusés par Kärcher
40. Pour chaque produit figurant sur ces tarifs apparaissaient, notamment, le prix d’achat brut du distributeur ainsi que le prix TTC de revente.
41. Cette communication se faisait essentiellement par l’envoi des tarifs accompagnés d’un courrier de transmission par lettre recommandée avec accusé de réception40. Occasionnellement, la communication des tarifs a pu être réalisée par voie électronique41.
42. Plusieurs documents saisis dans les locaux de Kärcher, ainsi que les déclarations de certains distributeurs, confirment l’envoi de ces tarifs42.
43. Pour la durée de la pratique alléguée, les tarifs avec lesquels les prix de vente des produits Kärcher sont comparés sont les suivants :
- pour l’année 2009, le « tarif revendeur Grand Public Maison 2009 » (ci-après, « Tarif 2009 »)43,
- pour l’année 2010, le « tarif revendeurs spécialistes Grand Public Maison » (ci- après, « Tarif 2010 »)44, et
- pour l’année 2011, le « tarif revendeurs spécialistes Grand Public Maison » (ci- après, « Tarif 2011 »)45.
La référence aux prix de revente en dehors de la communication des tarifs
44. Kärcher communiquait également à ses distributeurs des prix de vente indicatifs TTC par voie électronique ou lors de rencontres physiques, sans faire directement référence à ses tarifs annuels. Selon les cas, les prix de détail ainsi évoqués pouvaient ou non correspondre effectivement aux tarifs Kärcher.
45. Ainsi, dans un courriel du 19 janvier 2011, la société Cdiscount a adressé à Kärcher le message suivant : « Merci pour votre venue en nos locaux. Voici un récapitulatif de notre entrevue : … Déstockage à réserver : K215 à 59 € TTC : 800 pièces (stock exact à me communiquer : en attente de vos éléments tarifaires et délai »46.
46. Une note manuscrite du 1er mars 2011, trouvée dans le bureau d’un chef de produit de la société Brico Dépôt, prise à l’occasion d’un rendez-vous avec un représentant de la société Kärcher, atteste que les prix de vente au consommateur ont effectivement été évoqués lors de cet entretien47 :
47. Les prix des NHP de référence K7410+T300 et 7260+T300 cités sur cette note correspondent aux prix TTC donnés à titre indicatif dans le Tarif 2011 de Kärcher, soit respectivement 549,99 euros et 499,99 euros48.
b) La référence aux prix de vente communiqués par Kärcher en interne
48. Il ressort de l’instruction que les prix communiqués par Kärcher ont été évoqués lors de réunions internes à la filiale française du groupe Kärcher49.
49. Par ailleurs, certains comptes rendus de réunions internes à Kärcher montrent que la diffusion de prix conseillés uniformes, le niveau de marge sur le prix de revente ainsi que la connaissance par Kärcher des seuils de prix de revente psychologiques, qui, aux termes des éléments relevés au paragraphe 53, correspondent aux prix de revente, sont des points qui ont pu être évoqués lors de réunions entre la filiale française et le siège de Kärcher les 3 et 4 mai 2011 puis les 20 et 21 octobre 201150.
c) La volonté de Kärcher d’application des prix conseillés
50. Les services d’instruction ont relevé plusieurs documents faisant référence, selon eux, à la volonté de Kärcher de voir appliquer les prix qu’elle préconise.
51. Il s’agit, en premier lieu, d’un argumentaire commercial, dont des extraits sont présentés sous la forme d’un tableau reproduit ci-dessous51, sur lequel figure le logo de la marque Kärcher et qui a été saisi dans le bureau du directeur du département « Grand Public » de Kärcher lors des opérations de visite et saisie du 7 décembre 2012. Ce document mentionne, sous forme de questions/réponses, les éléments de langage pouvant être opposés à des objections susceptibles d’être formulées par des distributeurs des produits Kärcher dans le cadre de la négociation commerciale.
Tableau 3 : Extraits de l'argumentaire commercial saisi chez Kärcher le 7 décembre 2012
52. Il ressort de l’instruction que ce document a été préparé par un consultant externe dans le cadre d’une session de formation des commerciaux Kärcher dispensée le 7 décembre 201052.
53. Interrogé sur ce document, le directeur du département « Grand Public » de Kärcher a déclaré, le 6 juillet 2017, que : « [c]e document vient d’un consultant. Il répond aux questions imaginaires posées par un client-distributeur et propose des réponses qui pourraient être apportées. Nous sommes parfois proches de l’absurde dans les questions et les réponses proposées. Le « prix de vente psychologique » correspond à un prix de revente. La marque propose des prix de vente indicatifs car ce prix assure la meilleure vente possible du produit. En réponse à un distributeur qui dirait « vos produits sont chers », le document propose de répondre que ce prix est étudié et parfaitement positionné par rapport à la concurrence. Ce prix n’est pas un prix qui s’impose au distributeur. Il s’agit d’un prix maximum que Karcher a élaboré pour assurer la meilleure vente de ce produit »53.
54. Les principales enseignes de distribution des NHP Kärcher ont, quant à elles, indiqué soit ne pas avoir, lors de leurs échanges avec Kärcher, émis les objections envisagées dans l’argumentaire, soit avoir pu les émettre mais sans être confrontées au type de réponse figurant dans ce document.
55. Ainsi, dans une déclaration du 30 mars 2017, à la question « Quel commentaire pouvez-vous faire lorsque je vous présente le document suivant en provenance de Kärcher avec les objections « Pas assez de marge » (…), « les prix sont imposés » (…), « les prix de vos produits sont trop élevés » » les représentants de Castorama ont répondu que :
« De manière générale, nous constatons que c’est un argumentaire interne à Karcher, à utiliser à l’égard des chefs de secteurs. Les réponses dans le tableau sont en lien avec les préoccupations des magasins.
Concernant la première objection : oui, oui on a pu faire ce type d’objections car en tant que distributeur, nous souhaitons améliorer la rentabilité mais je n’ai pas de souvenirs d’avoir eu des réponses de cet ordre-là.
Concernant la deuxième objection : on n’a pas pu faire ce type d’objections, donc on n’a pas pu avoir ce type de réponse.
Concernant la troisième objection : nous avons eu ce type d’objection mais pas ce type de réponse et si j’avais eu ce type d’argument, je m’en serais souvenue »54.
56. Les représentants de Bricomarché ont déclaré le 23 mars 2017 : « nous n’avons pas eu ce type d’échanges avec des représentants de Karcher »55.
57. Dans une déclaration du 5 avril 2017, le directeur des achats de Mr.Bricolage a, quant à lui, répondu que :
« De manière générale, ce n’est pas un argumentaire adapté à un acheteur en Centrale mais plutôt celui d’un acheteur dans un point de vente.
En tant que Directeur des Achats, mes points de vente ne m’en ont pas parlé. (…)
Les représentants de KARCHER ne m’ont pas tenu ce genre de discours »56.
58. En second lieu, un document saisi au siège de Leroy Merlin, intitulé « Synergie Paris Ouest - 16/02/12 - Bois d’Arcy », faisant le bilan de l’année 2011 et portant sur les évolutions des rayons pour l’année 2012, relève que :
« Karcher : impose ses prix, sa pol commerciale Position de Massy : Kärcher en 2è position / Sterwins en 1ère position avec un positionnement extrêmement bas : à moitié prix des modèles équivalents chez Kärcher -> test pour voir comment cela marche. Et obj = attaquer Kärcher. Prise de risque car N°1 société » (soulignement ajouté)57.
59. Interrogé sur le contenu de ce document, un chef de produit de Leroy Merlin a, dans une déclaration du 17 décembre 2014, indiqué que : « [l]e terme « synergie » désigne une réunion régionale entre chefs de secteur LEROY MERLIN de magasins de la région »58.
60. Dans sa réponse du 18 mai 2017 à une demande d’informations, Leroy Merlin a par ailleurs expliqué que : « la centrale a pour seule fonction de référencer les fournisseurs et de négocier les conditions d’achat, tandis que les conditions de revente sont déterminées indépendamment par chaque magasin sur sa zone de chalandise. Une fois les conditions d’achat négociées, la centrale référence les produits, leur prix d’achat et un prix de revente conseil dans les systèmes d’information » (soulignement ajouté)59.
61. Il ressort de ce qui précède que la pièce saisie au siège de Leroy Merlin est le compte rendu d’une réunion régionale entre chefs de secteur dans la zone Paris Ouest et pourrait ainsi faire référence au prix de revente au consommateur des produits Kärcher.
d) Les visites et le rôle des commerciaux Kärcher
62. Il ressort des déclarations des distributeurs mentionnées ci-dessous que les commerciaux de Kärcher rendaient régulièrement visite aux distributeurs de produits Kärcher et pouvaient, à cette occasion, prêter attention aux prix de revente fixés par les distributeurs.
63. Ces réponses indiquent que les commerciaux de Kärcher effectuaient des visites mensuelles en points de vente pour échanger sur des éléments de politique commerciale tels que, notamment, l’implantation des rayons, les propositions de commandes, la présentation des produits, les promotions, les opérations commerciales ou encore le service après-vente60.
64. Certaines d’entre elles précisent que, bien que cela ne soit pas nécessairement leur objet principal, ces visites pouvaient être l’occasion pour les commerciaux de prendre connaissance des prix de revente fixés par les distributeurs61. D’autres soulignent en revanche une absence de relevés de prix systématique ou de remontée de prix de la part des distributeurs concernés62.
65. Le tableau ci-dessous présente, à titre illustratif, quelques déclarations des distributeurs interrogés sur ce point.
Tableau 4 : Déclarations des distributeurs concernant les visites des commerciaux Kärcher
e) La communication de données sur les ventes par les distributeurs de Kärcher
66. Il a été constaté par les services d’instruction que, sur la période 2009–2011, les contrats conclus par Kärcher avec ses distributeurs prévoyaient des clauses organisant la remontée d’informations sur les ventes. Kärcher accordait ainsi des remises supplémentaires à certains de ses distributeurs lorsqu’ils communiquaient ce type d’informations.
67. Les principales enseignes des deux principaux groupes distribuant des NHP Kärcher63, mais aussi d’autres distributeurs de taille plus modeste64, transmettaient régulièrement des informations à Kärcher sur les prix pratiqués en magasin, puisqu’ils communiquaient de façon mensuelle des éléments chiffrés dits « sorties caisses » ou la valeur de leurs ventes de produits Kärcher. Ces remontées d’informations étaient rémunérées par des remises à hauteur de 1 à 3 % du chiffre d’affaires hors taxe selon les distributeurs concernés65.
3. LA RECEPTION PAR LES DISTRIBUTEURS DES PRIX COMMUNIQUES PAR KÄRCHER
a) Le suivi des prix de revente indicatifs par les distributeurs
68. Sur la période 2009-2011, les services d’enquête de la DIRECCTE d’Aquitaine ont effectué des relevés de prix concernant plusieurs références de NHP de la marque Kärcher. Ces relevés de prix ont eu lieu à la fois dans les points de vente physiques, à partir des catalogues diffusés par les distributeurs et sur des sites internet.
Les relevés de prix dans les points de vente physiques
69. Entre le 21 octobre 2011 et le 1er décembre 2011, les enquêteurs ont effectué près de 1 600 relevés de prix de plusieurs références de NHP Kärcher au sein de 299 points de vente répartis sur l’ensemble du territoire national66. La plupart des points de vente concernés appartenaient à des enseignes ou groupements de la grande distribution relevant des catégories suivantes :
- les GSB : Bricoman, Brico Dépôt, Bricomarché, Casino, Castorama, Les Briconautes, Leroy Merlin, Mr.Bricolage, Weldom ;
- les GSA : Auchan, Brico Leclerc, Carrefour, Cora ;
- les libres services agricoles (« LISA ») : Gamm Vert, Jardiland, Point vert ; et
- le négoce de matériaux : Big Mat et Point P.
70. Les points de vente restants correspondent à des distributeurs sans enseigne pouvant faire appel à des centrales de référencement ou centrales d’achat pour leur approvisionnement en produits Kärcher.
71. La synthèse des constats issus des relevés de prix effectués figure dans les deux tableaux ci-dessous :
Les relevés de prix effectués en 2011 et portant sur les références de NHP figurant sur le Tarif 201167
Tableau 5 : Taux de suivis à partir des relevés de prix dans les points de vente physiques portant sur les références incluses dans les tarifs Kärcher en 2011
72. Le taux de suivi moyen des prix indicatifs figurant sur le Tarif 2011 s’établit ainsi à 97,7 %.
Les relevés de prix effectués en 2011 et portant sur des références de NHP ne figurant pas sur le Tarif 2011
Tableau 6 : Taux de suivi à partir des relevés de prix dans les points de vente physiques portant sur les références exclues des tarifs Kärcher en 2011
73. Le taux de suivi moyen des prix indicatifs ne figurant pas sur le tarif Kärcher 2011 est donc de 96,3 %.
74. Ainsi, sur l’ensemble des relevés de prix effectués, dans plus d’une vingtaine d’enseignes, du 21 octobre 2011 au 1er décembre 2011, il a pu être constaté un taux de suivi moyen des prix de vente indicatifs Kärcher supérieur à 97,5 %.
Les relevés de prix sur catalogues publicitaires
75. Sur la période 2009 à 2011, il a été procédé à 175 relevés de prix de référence de NHP Kärcher sur les catalogues publicitaires77 diffusés par :
- des GSB : Brico Dépôt, Bricorama, Bricomarché, Castorama, Leroy Merlin, Mr.Bricolage ;
- des GSA : Auchan, Cora, Brico E. Leclerc ;
- un groupe de négoce généraliste : le Groupe Chavigny.
76. Les enquêteurs ont relevé 155 prix de vente pour des références de NHP qui figuraient dans les tarifs de Kärcher et 20 prix de vente de références non mentionnées dans les tarifs de Kärcher.
Les relevés de prix portant sur les références de NHP figurant sur les tarifs Kärcher
Tableau 7 : Taux de suivi à partir des relevés de prix sur catalogues publicitaires portant sur les références incluses dans les tarifs Kärcher
Les relevés de prix portant sur les références de NHP ne figurant pas sur les tarifs Kärcher
Tableau 8 : Taux de suivi à partir des relevés de prix sur catalogues publicitaires portant sur les références exclues des tarifs Kärcher
77. Il résulte de ce qui précède que les prix des NHP Kärcher annoncés sur les catalogues publicitaires des distributeurs sont identiques aux prix donnés à titre indicatif par Kärcher dans ses tarifs dans plus de 98 % des cas.
78. D’autre part, lorsque le produit Kärcher n’est pas référencé sur ses tarifs, il est également constaté un alignement des prix à 1 % près par les différents distributeurs à hauteur de 100%.
Les relevés de prix en ligne
79. De multiples relevés de prix sur internet ont été effectués par les services d’enquête à différentes dates sur la période 2009-2011. Une étude de concurrence, « Service e-commerce - Audit univers du jardin sur internet », réalisée en juin 2011 par Leroy Merlin sur plusieurs sites internet a également été versée au dossier et analysée.
Les relevés effectués sur les sites internet des enseignes
80. Les enquêteurs de la DGCCRF ont effectué des relevés de prix sur les sites de vente en ligne d’enseignes disposant de magasins les 29 avril et 19 juillet 2010 et le 20 octobre 2011.
¨ Les relevés de prix réalisés au cours de l’année 2010
- Sur le site leroymerlin.fr
Tableau 9 : Relevés de prix réalisés sur le site internet de Leroy Merlin en 2010
- Sur le site castorama.fr
Tableau 10 : Relevés de prix réalisés sur le site internet de Castorama en 2010
¨ Les relevés de prix réalisés au cours de l’année 2011
Tableau 11 : Relevés de prix réalisés sur plusieurs sites internet en 2011
Les relevés effectués à partir d’un site comparateur de prix
81. Le 20 septembre 2010, les services d’enquête de la DGCCRF ont procédé à des relevés de prix sur le site internet www.acheter-moins-cher.com, qui recensait les prix de NHP Kärcher figurant sur les sites internet d’enseignes disposant de magasins ainsi que sur les sites internet d’enseignes, dites « pure players », ne disposant pas de points de vente physiques.
82. Le tableau ci-dessous synthétise les relevés réalisés sur les références mises en vente par plusieurs sites internet d’enseignes vendant des NHP Kärcher.
Tableau 12 : Relevés de prix effectués sur le site internet www.acheter-moins-cher.com en 2010
83. Ainsi, sur les 76 prix relevés, 62 étaient supérieurs ou égaux à 1 % près à ceux donnés à titre indicatif par Kärcher, hors frais de livraison, soit 81,68 % et 74 étaient supérieurs ou égaux à 1 % près à ceux donnés à titre indicatif par Kärcher, frais de livraison inclus, soit 97,36 %.
L’étude « Service e-commerce – Audit univers du jardin sur internet » de Leroy Merlin
84. Cette étude101, dont les résultats sont présentés dans le tableau ci-dessous, confirme les constats effectués par les services d’enquête sur les sites internet d’un certain nombre d’enseignes.
Tableau 13 : synthèse de l'étude « Service e-commerce – Audit univers du jardin sur internet » de Leroy Merlin
85. Ainsi, la totalité des prix relevés n’incluant pas de frais de livraison étaient supérieurs ou égaux à 1 % près à ceux donnés à titre indicatif par Kärcher.
Les prix de revente des NHP Kärcher fournis par les distributeurs
86. Certains distributeurs sollicités à cette fin ont transmis aux services d’instruction les données relatives aux prix qu’ils pratiquaient pour les NHP durant la période des pratiques en cause.
Brico Dépôt102
87. Brico Dépôt a communiqué le récapitulatif des prix pratiqués pour la vente de nettoyeurs à haute pression Kärcher comportant les prix « sortie de caisse » pratiqués par date pour chaque magasin sur l’ensemble de l’année 2010103. À partir de ces éléments, les services d’instruction ont pu opérer une comparaison des prix pratiqués avec les tarifs diffusés par Kärcher pour la même année.
Tableau 14 : Taux de suivi à partir des prix fournis par Brico Dépôt pour l'année 2010
88. Ainsi, sur les 22 957 prix de revente de NHP Kärcher communiqués par Brico Dépôt pour l’année 2010, 22 565 étaient supérieurs ou égaux à 1 % près aux prix indicatifs de Kärcher, soit un taux de suivi de prix de 81,73%.
Castorama104
89. Castorama a transmis le récapitulatif des prix pratiqués pour la vente de NHP Kärcher faisant état des moyennes mensuelles des prix sortie de caisse par magasin pour les ventes de NHP Kärcher en magasin sur l’année 2011105.
90. Sur la base de ces données, les services d’instruction ont pu opérer une comparaison avec les tarifs communiqués par Kärcher pour l’année 2011.
Tableau 15 : Taux de suivi à partir des prix fournis par Castorama pour l'année 2011
91. Sur les 8 774 prix moyens de revente fournis par Castorama, 6 868 étaient supérieurs ou égaux à 1 % près aux prix indicatifs de Kärcher, soit un taux de suivi de 71,75 %.
Leroy Merlin106
92. Leroy Merlin a transmis les données correspondant au « prix de base magasin », soit le prix communiqué par la centrale aux magasins107 au 1er janvier 2010 et au 1er juillet 2010108. L’enseigne a précisé à cet égard qu’« [i]l ne s’agit donc pas des prix effectivement pratiqués et les promotions ou baisses de prix applicables les autres jours du mois ne sont pas recensés. Leroy Merlin se réserve donc la possibilité de compléter ces éléments »109.
93. Ces éléments ont permis aux services d’instruction d’établir un comparatif entre les tarifs communiqués par Leroy Merlin et les tarifs conseillés par Kärcher pour l’année 2010.
Tableau 16 : Taux de suivi à partir des prix fournis par Leroy Merlin pour les 1er janvier 2010 et 1er juillet 2010
94. Sur les 2 846 prix relevés dans la base de tous magasins de Leroy Merlin, 2 845 prix étaient supérieurs ou égaux à 1 % près aux prix indicatifs de Kärcher, soit plus de 99,9 %.
Synthèse
95. Le tableau ci-dessous reprend les taux de suivi calculés à partir des données fournies par les distributeurs.
Tableau 17 : Synthèse des taux de suivi calculés à partir des données fournies par les distributeurs
b) Les déclarations des distributeurs relatives à l’application des prix de revente diffusés par Kärcher
96. Concernant les pratiques mises en œuvre sur la période 2009-2011, les enquêteurs de la DGCCRF ont recueilli, au cours de l’année 2010, les déclarations de plusieurs distributeurs sur l’application ou non des prix de revente donnés à titre indicatif par Kärcher et sur la possibilité de pratiquer des prix inférieurs aux prix indicatifs. Ces distributeurs ont été invités par les services d’instruction à compléter leurs déclarations en 2016 et 2017. Par ailleurs, d’autres distributeurs ont été entendus, sur ce point, par les services d’enquête ou d’instruction entre 2014 et 2017.
Les déclarations des distributeurs recueillies en 2010 et complétées en 2016-2017
97. Les déclarations des distributeurs concernés sont retracées dans le tableau ci-dessous.
Tableau 18 : Déclarations des distributeurs relatives à l’application des prix de revente diffusés par Kärcher avant 2010
Les déclarations des distributeurs recueillies après 2010
98. En 2014, les enquêteurs ont auditionné les représentants des sociétés Leroy Merlin et Brico Dépôt, qui avaient fait l’objet d’opérations de visite et saisie en 2012.
99. En 2016-2017, les enquêteurs ont également interrogé un certain nombre d’autres distributeurs (points de vente et/ou siège social de l’enseigne qui est une centrale d’achat ou de référencement). L’ensemble de leurs déclarations sont retracées dans le tableau ci-dessous.
Tableau 19 : Déclarations des distributeurs relatives à l’application des prix de revente diffusés par Kärcher après 2010
100. Il ressort des déclarations reproduites ci-dessus que les centrales d’achat ou de référencement des enseignes considèrent toutes qu’elles peuvent se référer ou non aux prix indicatifs figurant sur les tarifs de Kärcher, ou encore que les tarifs de Kärcher sont un des paramètres pour déterminer les prix de revente qu’elles préconisent à leurs points de vente. Elles ont également toutes déclaré que les points de vente, qu’ils soient intégrés ou indépendants, avaient toute liberté pour s’écarter du prix qu’elles préconisent122.
101. S’agissant des points de vente, trois types de comportement peuvent être identifiés.
102. Un premier groupe de distributeurs a expliqué qu’ils étaient contraints d’appliquer les prix indicatifs fournis par Kärcher, et ce, notamment, en raison :
- de la faible marge qu’ils dégageaient sur le matériel Kärcher123 ; et
- de l’application de la règle du seuil de revente à perte124.
103. Par ailleurs, certains distributeurs ont précisé que les prix conseillés par Kärcher leur servaient de référence et, pour certains, qu’ils étaient utilisés par la plupart des distributeurs125.
104. Un deuxième groupe de distributeurs a indiqué que, bien qu’ils n’y étaient pas contraints, ils appliquaient les prix indicatifs de Kärcher car « c’était une pratique usuelle »126, « par facilité »127 ou parce que cela leur permettait d’être « compétitifs par rapport aux concurrents »128.
105. Certains autres distributeurs ont affirmé qu’ils pouvaient appliquer des prix inférieurs aux prix indicatifs de Kärcher mais qu’ils ne le faisaient pas car ils n’avaient pas « l’utilité de le faire »129 ou parce qu’ils avaient constaté que les prix chez les concurrents étaient tous identiques aux prix indicatifs de Kärcher130.
106. Enfin, un troisième groupe a expliqué qu’ils n’appliquaient pas nécessairement les prix indicatifs de Kärcher ou les préconisations de leur centrale et qu’ils déterminaient librement leurs prix de revente, notamment en fonction de la concurrence locale ou de la marge131.
c) Les documents saisis lors de l’enquête concernant les niveaux de prix des produits Kärcher
107. Plusieurs documents saisis lors des opérations de visite et saisie font référence aux niveaux de prix des produits Kärcher.
108. Un premier document, saisi dans les locaux du siège social de Leroy Merlin et intitulé
« Synergie Paris ouest – 16/02/2012 – Bois d’Arcy » indique : « 1/ Tour de table des implantations / évolutions rayons pour 2012 … 2/ Points divers … Kärcher : impose ses prix, sa pol commerciale » (soulignement ajouté )132.
109. Comme il a été indiqué ci-dessus aux paragraphes 59 à 61, ce document correspond au compte rendu d’une réunion régionale entre chefs de secteur de la zone Paris Ouest et fait ainsi vraisemblablement référence au prix de revente des produits Kärcher.
110. Un autre document, saisi dans les locaux du siège social de Brico Dépôt et rédigé par la direction commerciale de cette société, fait référence à l’homogénéité des prix de vente des produits Kärcher :
« prendre des parts de marché et développer les contacts clients
® Donner une alternative aux clients par une offre MDD attractive par rapport à l’offre Kärcher présente au même prix chez tous les concurrents » (soulignement ajouté )133.
111. Enfin, courant mars 2009, un échange de courriels interne à Brico Dépôt illustre la préoccupation de cette enseigne face aux prix pratiqués par ses concurrents sur les produits Kärcher.
112. Dans un courriel du 3 mars 2009, le chef de secteur technique de Brico Dépôt à Saint Etienne Méons informe une représentante du siège de Brico Dépôt que, sur un catalogue publicitaire, l’enseigne Leroy Merlin a annoncé un prix de vente au détail inférieur au prix communiqué à titre indicatif par Kärcher :
« Leroy Merlin sur son catalogue « rénovation » valable du 4 au 30/03 p30 vend le nhp Kärcher k720mx + t racer 401.26 euros, nous ne pouvons pas nous aligner (prmp 341.5 ht), avons-nous une solution ? »134.
113. Le 13 mars 2009, la représentante du siège Brico Dépôt a répondu : « [p]as d’action sur ce produit car LM a afficher (sic) un erratum »135.
114. Entendu sur cet échange le 2 décembre 2014, le chef produit outillage de Brico Dépôt a déclaré que : « [p]our moi, il ressort de ces mels que le chef de secteur du magasin BD de St Etienne Meons constate que Leroy Merlin vend à 401,26 euros ttc alors que le prix d’achat dont il a connaissance (341,5 ht soit 408,43 ttc) est supérieur au prix de vente de Leroy Merlin. Il demande une solution au siège à savoir est-ce qu’il y a des marges arrières qui lui permettraient de baisser son prix. Le siège lui répond que Leroy Merlin a affiché un erratum (mél du 13-03). Le prmp est le prix de revient moyen pondéré (moyenne des prix d’achat des produits en stock en tenant compte des quantités en stock et du prix d’achat de chaque produit en retenant la méthode FIFO) »136.
115. Le 28 mars 2009, le directeur du magasin Brico Dépôt de Saint Etienne Méons, qui était en copie des échanges précédents, informe la représentante du siège de Brico Dépôt que :
« Suite à une visite chez Leroy Merlin Villars (42) ce jour, le NHP Kärcher 720 mx + T- racer est toujours à 401,26 €. Le vendeur m’a confirmé qu’il l’avait remis à ce prix malgré l’erratum (409.95€ à l’entrée (accueil). J’ai laissé au CS jusqu’à lundi matin pour remonter son prix. Merci de revoir Kärcher pour ce problème récurrent. Les deux dépôts stéphanois ont subi un préjudice durant toute cette période » (soulignement ajouté)137.
116. Interrogé au sujet des courriels des 3 et 28 mars 2009, le directeur du département
« Grand Public » de Kärcher a déclaré : « [c]oncernant la diffusion d’erratum, je pense que celle-ci est liée à des problématiques de seuil de revente à perte. Concernant la demande de Brico Dépôt de nous alerter, le distributeur veut nous interpeller sur le fait que lui, en appliquant ce prix avec ces conditions, se trouverait en dessous de son seuil de revente à perte »138.
d) Les échanges entre Kärcher et ses distributeurs concernant le niveau des prix
117. Si de nombreux distributeurs ont indiqué qu’ils n’informaient pas Kärcher lorsqu’ils constataient qu’un concurrent n’appliquait pas les prix conseillés par Kärcher, d’autres ont en revanche déclaré demander parfois des explications sur ce point aux commerciaux de Kärcher, notamment lorsqu’ils estimaient que leurs concurrents étaient susceptibles de vendre les produits en dessous du seuil de revente à perte.139
118. Ainsi, à la question « Informez-vous Kärcher lorsque vous constatez qu’un distributeur concurrent n’applique pas les prix conseillés de Kärcher ? Sous quelle forme ? », il a été répondu :
- « Oui / Téléphonique ou de vive voix »140 ;
- « Nous avons déjà été amenés à informer Kärcher dans un tel cas »141 ;
- « Oui j’en ai déjà discuté avec les resp Grand Compte successifs. Uniquement par téléphone, et le sujet reste évasif, car autant moi que eux savent qu’ils n’ont rien à dire sur les prix de la concurrence, que c’est libre »142 ;
- « Il peut arriver que l’on demande des explications au commercial si l’on constate qu’un concurrent est en mesure d’afficher des prix très inférieurs alors que nous sommes au SRP »143 ;
- « Si nous constatons un produit similaire à un prix inférieur à notre SRP nous demandons oralement des explications au représentant, mais cela s’arrête à ce niveau »144 ou encore
- « Oui cela arrive. On lui demande des explications concernant le concurrent qui applique des prix inférieur (sic) à nous »145.
119. À l’inverse, en réponse à la même question, d’autres distributeurs ont indiqué que :
- « Non. Nous rappelons que nous ne connaissons pas les prix de vente conseillés par Kärcher »146 ;
- « Non, nous n’informons pas Kärcher si on constate qu’un distributeur concurrent n’applique pas les prix de vente conseillés »147 ;
- « Non »148 ; et
- « Non pas le temps »149.
120. Il apparaît, en définitive, qu’une partie des revendeurs, et, notamment, ceux des enseignes Mr.Bricolage et Bricomarché, étaient susceptibles de tenir Kärcher informée des prix pratiqués par les concurrents lorsqu’ils ne respectaient pas les prix donnés à titre indicatif par Kärcher. Toutefois, dans le cas où les prix en question étaient inférieurs aux prix indicatifs, il n’est pas constaté que Kärcher demandait à ses distributeurs de remonter leurs prix de revente au niveau des prix indicatifs figurant sur ses tarifs.
E. RAPPEL DU GRIEF NOTIFIE
121. Le 28 juin 2018, le grief suivant a été notifié :
« Il est fait grief à la société Kärcher SAS (RCS n°775 702 673) en tant qu’auteure, et aux sociétés Alfred Kärcher Beteiligungs-GmbH et Alfred Kärcher GmbH & Co. KG en leur qualité de sociétés mères de Kärcher SAS, d’avoir pris part, entre 2009 et 2011, à une entente généralisée avec ses distributeurs pour fixer le prix de vente au détail des nettoyeurs haute pression de la marque Kärcher en violation des articles 101 TFUE et L.420-1 du code de commerce. Cette pratique est de nature à fausser le jeu de la concurrence, en raison de son objet et de ses effets, en maintenant un prix de détail artificiellement élevé des nettoyeurs haute pression de la marque Kärcher en France ».
II. Discussion
122. Dès lors que le grief notifié n’est pas établi, il n’y a pas lieu de se prononcer sur les moyens de procédure, invoqués par Kärcher, relatifs à la durée de la procédure, à l’atteinte au droit de ne pas s’auto-incriminer et aux principes de l’égalité des armes et du contradictoire.
123. Seront successivement examinés l’applicabilité du droit de l’Union (A), le marché pertinent (B) et le bien-fondé du grief notifié (C).
A. SUR L’APPLICABILITE DU DROIT DE L’UNION
1. LE DROIT APPLICABLE
124. L’article 101, paragraphe 1, du TFUE prohibe les accords ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à la concurrence et qui sont susceptibles d’affecter le commerce entre États membres.
125. Ainsi que l’expose la Commission européenne (ci-après, « Commission ») dans ses lignes directrices relatives à la notion d’affectation du commerce, la démonstration de l’affectation sensible du commerce impose la réunion de trois éléments : l’existence d’un courant d’échanges entre États membres portant sur les produits en cause, l’existence de pratiques susceptibles d’affecter ces échanges et, enfin, le caractère sensible de cette affectation150.
126. Dans ses lignes directrices relatives à l’affectation du commerce, la Commission établit un seuil de sensibilité, en deçà duquel un accord est présumé ne pas affecter sensiblement le commerce entre les États membres. Répondent à cette définition les accords pour lesquels :
- la part de marché totale des parties sur le marché communautaire affecté par l’accord n’excède pas 5 % ; et
- dans le cas d’accords horizontaux, le chiffre d’affaires annuel moyen réalisé dans l’Union par les entreprises en cause avec les produits concernés par l’accord n’excède pas 40 millions d’euros151.
2. APPLICATION AU CAS D’ESPECE
127. Les pratiques en cause dans la présente affaire consistent en des accords verticaux portant sur la liberté tarifaire des distributeurs des NHP produits par Kärcher.
128. S’agissant, en premier lieu, de l’existence d’échanges entre États membres portant sur les produits Kärcher, il a été constaté qu’au moment des pratiques le groupe Kärcher disposait de plusieurs sites de production en Europe et également de plusieurs filiales européennes de distribution, auprès desquelles, comme l’ont expliqué les représentants de Kärcher, les distributeurs présents sur le territoire national pouvaient s’approvisionner : « les distributeurs de produits Kärcher n’ont pas l’obligation de s’approvisionner en produits contractuels exclusivement auprès de la société Karcher SAS. Les distributeurs en France de produits Karcher sont libres de s’approvisionner auprès d’autres fournisseurs en France comme en dehors de France »152.
129. S’agissant, en deuxième lieu, de l’existence de pratiques susceptibles d’affecter ces échanges, les pratiques en cause sont relatives à la fixation des prix et concernent l’ensemble des distributeurs de produits Kärcher répartis sur tout le territoire national. Elles sont donc, par leur nature même, susceptibles d’affecter les échanges entre États membres.
130. S’agissant enfin du caractère sensible de l’affectation du commerce, comme il a été relevé aux paragraphes 14 et 22 ci-dessus, sur la période des pratiques, Kärcher détenait entre 78,7 et 80,5 % de parts de marché pour les NHP et réalisait un chiffre d’affaires annuel excédant 40 millions d’euros.
131. Il résulte de ce qui précède que le commerce entre États membres est susceptible d’être affecté de manière sensible par les pratiques en cause.
132. Celles-ci doivent donc être examinées au regard du droit de l’Union européenne et du droit national. Ce point n’est pas contesté par Kärcher.
B. SUR LE MARCHE PERTINENT
1. LE DROIT APPLICABLE
133. Il résulte de la jurisprudence du Tribunal de première instance des Communautés européennes (devenu Tribunal de l’Union européenne, ci-après, « Tribunal ») que
« l’obligation d’opérer une délimitation du marché en cause dans une décision adoptée en application de l’article [101 TFUE] s’impose à la Commission uniquement lorsque, sans une telle délimitation, il n’est pas possible de déterminer si l’accord, la décision d’association d’entreprises ou la pratique concertée en cause est susceptible d’affecter le commerce entre États membres et a pour objet ou pour effet d’empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l’intérieur du marché commun »153.
134. Ainsi, lorsque « les pratiques (...) sont recherchées au titre de la prohibition des ententes », le Conseil, puis l’Autorité, estiment qu’« il n’est pas nécessaire de définir le marché avec précision, comme en matière d’abus de position dominante, dès lors que le secteur et les marchés ont été suffisamment identifiés pour permettre de qualifier les pratiques qui y ont été constatées et de les imputer aux opérateurs qui les ont mises en œuvre »154.
135. Dans sa communication sur la définition du marché en cause, la Commission rappelle qu’« un marché de produits en cause comprend tous les produits et/ou services que le consommateur considère comme interchangeables ou substituables en raison de leurs caractéristiques, de leur prix et de l’usage auquel ils sont destinés »155.
136. L’Autorité estime que « [l]e marché, au sens où l’entend le droit de la concurrence, est défini comme le lieu sur lequel se rencontrent l’offre et la demande pour un produit ou un service spécifique. (...). Une substituabilité parfaite entre produits ou services s’observant rarement, [l’Autorité] regarde comme substituables et comme se trouvant sur un même marché les produits ou services dont on peut raisonnablement penser que les demandeurs les considèrent comme des moyens alternatifs entre lesquels ils peuvent arbitrer pour satisfaire une même demande »156.
2. APPLICATION AU CAS D’ESPECE
137. S’agissant du marché de produits, il apparaît que, eu égard à leurs spécificités techniques, et notamment leur rapidité et leur efficacité, les NHP ne paraissent pas substituables aux autres solutions de nettoyage. Il peut, d’ailleurs, être relevé que la marque Kärcher est utilisée dans le langage courant, par antonomase, pour désigner les NHP.
138. S’agissant de la délimitation géographique du marché, les pratiques en cause concernent la distribution des NHP Kärcher par des distributeurs répartis sur l’ensemble du territoire national. La dimension géographique du marché concerné au regard des pratiques examinées est donc nationale.
139. En tout état de cause, comme rappelé ci-dessus, lorsque les pratiques en cause sont examinées au titre de la prohibition des ententes, comme c’est le cas en l’espèce, il suffit que le secteur soit déterminé avec assez de précision pour permettre d’apprécier leur incidence sur la concurrence.
C. SUR LE BIEN-FONDE DU GRIEF NOTIFIE
1. SUR LA DEMONSTRATION D’UN ACCORD DE VOLONTES
a) Le droit applicable
140. Selon Kärcher, les services d’instruction, en estimant que la démonstration d’une police des prix n’était pas nécessaire, n’auraient pas respecté le standard applicable en matière de preuve d’une entente verticale sur les prix, lequel requerrait que soient démontrées l’évocation des prix recommandés par le fournisseur, la mise en place d’une police des prix par le fournisseur et l’adhésion significative des distributeurs à l’application des prix indicatifs. Sur ce dernier point, elle soutient que la preuve du caractère généralisé nécessite soit l’identification de chacun des distributeurs concernés et la preuve de leur participation à l’entente, soit la preuve de la généralité de l’acquiescement des distributeurs à la pratique anticoncurrentielle. Kärcher en déduit que la preuve de l’entente entre le fournisseur et quelques distributeurs est ainsi insuffisante à la démonstration d’une entente généralisée.
141. Il ressort d’une jurisprudence constante, tant en droit de l’Union qu’en droit français, que, pour qu’il y ait accord au sens de l’article 101, paragraphe 1 du TFUE, il suffit que les entreprises en cause aient exprimé leur volonté commune de se comporter sur le marché d’une manière déterminée157.
142. Selon le Tribunal, la preuve d’un tel accord « doit reposer sur la constatation directe ou indirecte de l’élément subjectif qui caractérise la notion même d’accord, c’est-à-dire d’une concordance de volontés entre opérateurs économiques sur la mise en pratique d’une politique, de la recherche d’un objectif ou de l’adoption d’un comportement déterminé sur le marché, abstraction faite de la manière dont est exprimée la volonté des parties de se comporter sur le marché conformément aux termes dudit accord »158.
143. La démonstration de l’accord de volontés peut ainsi se faire par tout moyen, étant rappelé que le Tribunal considère qu’il n’est pas nécessaire, en présence de preuves documentaires ou contractuelles, de procéder à l’examen de preuves additionnelles de nature comportementale159. Sur ce point, la Cour de justice a qualifié de « preuves documentaires directes » des éléments suffisamment explicites, tels que des notes internes, des déclarations, des comptes rendus de réunion, des projets d’ordre du jour ou encore des notes prises lors de réunions160.
144. La cour d’appel de Paris, saisie d’un recours contre la décision n° 18-D-26 de l’Autorité161, a rappelé, dans un arrêt du 16 janvier 2020, Canna France, que la démonstration de l’accord de volontés peut se faire par tout moyen. Dans ce même arrêt, la cour a également rappelé qu’en présence de preuves directes ou explicites résultant de documents ou de clauses contractuelles, « il n’est pas nécessaire de recourir à des preuves indirectes ou comportementales, constitutives d’un faisceau d’indices graves, précis et concordants, impliquant la caractérisation d’une application significative ou effective par les distributeurs des prix conseillés par le fournisseur »162.
145. Ainsi que l’a par ailleurs jugé la cour d’appel de Paris, dans son arrêt du 28 janvier 2009, Epsé Joué Club, il appartient à l’Autorité, pour démontrer le concours de volontés, d’établir « l’invitation d’une partie à l’accord à mettre en œuvre une pratique illicite et l’acquiescement de l’autre à cette invitation » (soulignements ajoutés)163.
146. Les lignes directrices de la Commission sur les restrictions verticales précisent, à cet égard, que la forme sous laquelle l’intention commune des parties est exprimée « n’est pas importante, pour autant qu’elle constitue l’expression fidèle de celle-ci »164. Selon la Commission, en l’absence d’accord explicite exprimant la volonté concordante des parties, il convient de prouver que la stratégie unilatérale d’une partie reçoit l’acquiescement de l’autre. L’existence d’un acquiescement tacite peut alors être démontrée, en vertu de la jurisprudence du Tribunal, dès lors que, « premièrement, (...) une partie exige, explicitement ou implicitement, la coopération de l’autre partie à la mise en œuvre de sa stratégie unilatérale et, deuxièmement, (...) l’autre partie se plie à cette exigence en mettant cette stratégie unilatérale en œuvre »165.
147. Par ailleurs, les lignes directrices précisent que l’acquiescement tacite « peut être déduit du niveau de la coercition exercée par une partie pour imposer sa stratégie unilatérale à l’autre ou aux autres parties à l’accord, en liaison avec le nombre de distributeurs qui mettent effectivement en œuvre la stratégie unilatérale du fournisseur dans la pratique. Par exemple, un système de suivi et de pénalités instauré par un fournisseur pour sanctionner les distributeurs qui ne respectent pas sa stratégie unilatérale dénote un acquiescement tacite à cette stratégie si ce système permet au fournisseur de mettre en œuvre sa stratégie dans la pratique »166.
148. S’agissant plus particulièrement d’une entente verticale sur les prix, la communication de prix de vente conseillés n’est pas en elle-même illicite167. Cependant, l’invitation faite par une tête de réseau à ses distributeurs de participer à une pratique de prix imposés est généralement démontrée par la diffusion auxdits distributeurs des prix de revente conseillés et par la mise en œuvre d’une surveillance des prix, qui permet d’établir que les prix dits « conseillés » sont en réalité des prix imposés168.
149. L’acquiescement des distributeurs est, quant à lui, généralement établi par l’application effective desdits prix, la Cour de cassation ayant précisé que « l’application significative des prix est une donnée de fait qui se prouve par tout moyen, notamment par des éléments quantitatifs, tels que des relevés de prix, mais aussi par des éléments qualitatifs, tels que des déclarations du distributeur ou par des pièces établissant sans conteste cette application »169.
150. La réunion de ces trois indices, qualifiée de « faisceau à trois branches », ne constitue toutefois qu’un mode de preuve généralement utilisé du concours de volontés des deux parties, lorsqu’il s’agit de démontrer une entente verticale sur les prix. La cour d’appel de Paris a par exemple jugé, dans son arrêt précité Beauté Prestige International, qu’« il y a entente collusoire lorsqu’il résulte des engagements de ce distributeur ou des comportements des parties (application par le distributeur des prix communiqués et mise en place, par le fournisseur, de mécanismes de contrôle des prix pratiqués) que ces prix sont en réalité considérés comme des prix imposés »170.
151. Sur ce point, la Cour de justice a rappelé, dans son arrêt du 6 janvier 2004, Bayer, qu’un accord interdit par l’article 101, paragraphe 1 du TFUE ne suppose pas nécessairement qu’il existe un système de contrôles a posteriori et de sanctions171. L’existence d’une surveillance, assortie ou non de sanctions, peut cependant constituer un indice de l’acquiescement des distributeurs, comme l’a rappelé la cour d’appel de Paris, dans son arrêt susvisé du 26 janvier 2012172.
152. En conséquence, et comme l’a rappelé l’Autorité à plusieurs reprises173, dans la mesure où la preuve d’un concours de volonté peut être rapportée par tout moyen, la démonstration d’une entente verticale sur les prix peut être établie au moyen d’indices documentaires ou comportementaux établissant l’invitation à la pratique litigieuse par le fournisseur et l’acquiescement de la part de ses distributeurs. Contrairement à ce que soutient Kärcher, la réunion des trois indices appartenant au « faisceau à trois branches » n’est donc pas nécessaire à l’établissement d’un accord de volonté.
153. De plus, il ressort de la jurisprudence rappelée au paragraphe 151 ci-dessus que l’argument selon lequel la démonstration d’une pratique de police des prix de la part du fournisseur sous la forme de mesures de coercition serait une condition sine qua non de la démonstration d’une entente verticale sur les prix doit être écarté.
154. Enfin, contrairement à ce qu’allègue Kärcher, et comme la Cour de cassation l’a rappelé dans son arrêt précité du 7 octobre 2014, Kontiki, il est suffisant, pour prouver le caractère généralisé d’une entente verticale, de démontrer qu’une part significative des distributeurs est concernée par l’entente : « la démonstration d’une entente verticale anticoncurrentielle généralisée au sein d’un réseau de distribution, impliquant des distributeurs représentant une part significative de la distribution concernée, ne requiert pas l’identification de tous les distributeurs ayant participé à l’entente »174.
b) Application au cas d’espèce
Sur la caractérisation d’une invitation de Kärcher à respecter les prix communiqués
155. Kärcher conteste avoir invité ses distributeurs à respecter une politique de prix pour la commercialisation de ses NHP. Elle soutient, à cette fin, d’une part, que les services d’instruction n’ont pas démontré qu’elle communiquait des prix conseillés à ses distributeurs, d’autre part, qu’aucun élément n’atteste de sa volonté de voir ces prix effectivement appliqués par les distributeurs.
Sur la communication de prix conseillés
156. Kärcher soutient tout d’abord ne pas avoir communiqué les prix de vente indicatifs de façon systématique à tous les points de vente, dès lors que s’agissant des enseignes Castorama, Brico Dépôt, Leroy Merlin et Mr.Bricolage, elle ne transmettait ses tarifs qu’aux centrales et non aux points de vente individuels, qui restaient, partant, libres de déterminer leur propre politique tarifaire
157. Sur ce point, il convient, premièrement, de souligner qu’il ressort des différents éléments exposés aux paragraphes 37 à 47 ci-dessus que Kärcher communiquait de façon habituelle des prix de revente conseillés à ses distributeurs, soit par la diffusion de tarifs annuels pour les produits de gamme, soit à l’occasion d’échanges ponctuels, en général pour les produits hors gammes.
158. En particulier, il ressort des déclarations du directeur du département « Grand Public » de Kärcher citées au paragraphe 37 que, durant la période 2009-2011, les tarifs Kärcher étaient, par principe, communiqués de façon régulière à ses distributeurs, sauf aux points de vente appartenant à des centrales d’achats ne souhaitant pas qu’ils aient communication des tarifs.
159. Deuxièmement, il ressort de la majorité des déclarations des distributeurs interrogés au cours de l’enquête que ceux-ci fixaient, en réalité, leurs prix en fonction des suggestions de leurs centrales175.
160. Dans ces conditions, il existe suffisamment d’éléments au dossier pour caractériser l’existence de la diffusion de prix de détail par Kärcher à ses distributeurs pour les NHP de marque Kärcher, sur la période comprise entre 2009 et 2011.
Sur la volonté de Kärcher que les prix communiqués soient effectivement appliqués par les revendeurs
161. Selon Kärcher, les deux documents – à savoir l’argumentaire commercial et le document intitulé « Synergie Paris Ouest » – respectivement évoqués aux paragraphes 51 et 58 ci-avant, sur lesquels s’appuient principalement les services d’instruction pour démontrer d’une part qu’elle avait exprimé de manière explicite la volonté que ses prix de vente indicatifs soient appliqués par les distributeurs, d’autre part qu’elle connaissait les marges et la rentabilité de ces derniers ne présenteraient aucun caractère probant.
162. S’agissant en premier lieu de l’argumentaire commercial, Kärcher soutient ainsi (i) que ce document serait non daté, (ii) que bien qu’il comporte son logo, il n’aurait pas été conçu par elle mais par un consultant externe, dans l’optique d’un séminaire de formation des commerciaux Kärcher, (iii) qu’il constituerait un document isolé qui n’aurait pas été diffusé en dehors de Kärcher, (iv) qu’il ne reflèterait pas la réalité de ses échanges lors des négociations avec ses distributeurs et, enfin, (v) que les services d’instruction auraient déformé sa teneur et sa portée en sélectionnant seulement quelques questions et en les sortant de leur contexte.
163. Sur ce point, il apparaît, tout d’abord, que ce document est bien contemporain des pratiques en cause, dès lors que la page de garde du programme du séminaire de formation des commerciaux de Kärcher au cours duquel il a été présenté mentionne la date du 7 décembre 2010176. En outre, bien qu’il ait été préparé par un consultant externe, la précision de certains des éléments dont il fait état, tels que la marge des distributeurs, le montant des remises ou ristournes, le taux de retour des produits, la progression des ventes d’un modèle de NHP, l’homogénéité des prix de vente des distributeurs ou la somme allouée par Kärcher à son plan média exclut qu’il ait pu être élaboré sans la collaboration active des équipes de Kärcher.
164. Toutefois, il ressort des déclarations des distributeurs mentionnées ci-avant aux paragraphes 54 à 57 que les questions et les éléments de réponse envisagés par ce document ne reflètent pas la réalité des échanges entre Kärcher et ses distributeurs durant la période des pratiques en cause. Par ailleurs, aucun élément du dossier ne permet d’établir que l’argumentaire commercial a été effectivement diffusé aux commerciaux de Kärcher ou que ces derniers se soient effectivement appuyés sur ses préconisations auprès des revendeurs.
165. S’agissant en second lieu de la mention « Karcher : impose ses prix, sa pol commerciale » figurant sur le document intitulé « Synergie Paris Ouest - 16/02/12 - Bois d’Arcy »177, elle ne saurait suffire à elle seule, en l’absence d’autres éléments concordants, à démontrer que les prix communiqués par Kärcher revêtaient le caractère de prix imposés. De fait, si, comme il a été rappelé aux paragraphes 62 à 65 ci-dessus, les commerciaux de Kärcher se rendaient régulièrement dans les points de vente afin de discuter d’éléments de politique commerciale tels que l’implantation des rayons, les propositions de commandes, la présentation des produits, les promotions, les opérations commerciales ou encore le service après-vente, et pouvaient, parfois, se renseigner sur les prix de détail pratiqués, aucun élément au dossier ne permet d’établir que ces visites avaient pour objet une surveillance des prix ou permettaient, le cas échéant, la mise en œuvre de mesures de coercition par Kärcher.
166. Pour le surplus des éléments relevés par les services d’instruction, il convient de relever, tout d’abord, qu’au regard des précisions apportées sur ce point au cours de l’instruction, il apparaît que les remontées d’informations prévues dans certains des contrats des distributeurs de Kärcher et mentionnées aux paragraphes 66 et 67 ne concernaient que des données statistiques agrégées de volume de ventes, et ne permettaient pas, partant, à Kärcher de connaître les prix de vente pratiqués par les distributeurs178.
167. Enfin, aucun élément au dossier ne permet de conclure que les conditions commerciales accordées par Kärcher à ses distributeurs ou sa politique promotionnelle, telles que présentées aux paragraphes 23 et suivants, ont permis à Kärcher d’encadrer ou de limiter la possibilité pour ses distributeurs de mettre en œuvre des actions promotionnelles.
Conclusion
168. Pour l’ensemble des motifs qui précèdent, et en l’état des éléments figurant au dossier, il convient de considérer que la preuve de l’invitation de Kärcher à ses distributeurs à mettre en œuvre la pratique illicite d’entente sur les prix visée par le grief notifié à Kärcher le 28 juin 2018 n’est pas rapportée et que, partant, il n’y a pas lieu de poursuivre la procédure.
DÉCISION
Article unique : L’Autorité de la concurrence considère, sur la base des informations dont elle dispose, que les conditions d’une interdiction au titre des articles 101 du TFUE et
L. 420-1 du code de commerce ne sont pas réunies. Il n’y a donc pas lieu de poursuivre la procédure.
NOTES :
1 Ce résumé a un caractère strictement informatif. Seuls font foi les motifs de la décision numérotés ci-après.
2 Cotes 23525-23569.
3 Cotes VC 3-152 / VNC 24548-24699 ; VC désigne version confidentielle et VNC la version non confidentielle des documents concernés.
4 Cote 24716.
5 Cote 8824.
6 Cote 25020.
7 Cote 24716.
8 Cotes 8824 et 24716.
9 Cote 8827.
10 Cote 24559.
11 Cote 21967.
12 Cotes 8827, 8831, VC 8854 / VNC 14203 et 24560.
13 Cotes 17525-17530.
14 Cote 15195.
15 Cote 15195.
16 Cote 15193.
17 Cote 15197.
18 Cotes 15071 et 15201
19 Cote VC 23874 / VNC 24426.
20 Cote 21989.
21 Pouvaient notamment être accordées des remises pour l’optimisation du service après-vente et des remises liées à des mesures d’optimisation de la gestion des commandes et des livraisons (remises dites « entrepôt » et « plateforme »).
22 Cote 22128.
23 Ces réductions étaient matérialisées par des offres de remboursement (« ODR ») qui permettaient aux consommateurs d’obtenir un remboursement différé d’une partie du prix qu’ils avaient acquitté pour l’achat de modèles définis, notamment de NHP.
24 À titre d’exemple, la facture de vente de Kärcher à Cdiscount n° 1732352546 du 31 mars 2010, fait état de quatre NHP K215 gratuits (cotes 11457-11458) ; la facture de vente de la S.A.S. Kärcher à la société Leroy Merlin n° 1732565154 du 27 janvier 2011 fait état d’un NHP K 3500 offert (cotes VC 9720 / VNC 14010, 9721).
25 Voir à titre d’exemple le document de présentation Kärcher intitulé « Scénario gratuités 2012 » (cotes 8711-8712) qui précise le nombre de machines offertes en fonction du nombre de machines commandées et livrées respectivement sur les périodes du 1er janvier au 30 avril 2011 et du 1er janvier au 30 avril 2012.
26 Par exemple cotes 7219 et 8716.
27 Voir par exemple pour le distributeur Leroy Merlin (cote 8718).
28 Cote VC 8843 / VNC 14192.
29 Cote VC 8778 / VNC 24468, 10003, VC 7206 / VNC 11781.
30 Brico Dépôt (cote 10005), Bricomarché (cote 15074), Castorama (cote 15093), Leroy Merlin (cote 21188) et Mr.Bricolage (cote 15125).
31 Castorama (cote 15093) et Leroy Merlin (VC 9358 / VNC 13648).
32 Cote 15093.
33 Cote VC 9358 / VNC 13648.
34 Voir par exemple un échange de courriel entre la responsable de l’enseigne Maginea et un représentant de Kärcher (cotes 7535-7536).
35 SARL GGB (cote 17535), Mr.Bricolage Auxerre (cote 21870), Mr.Bricolage Blois (cote 21865), Mr.Bricolage Libourne (cote 21767), Mr.Bricolage Moncel-Lès-Lunéville (cote 21900), Mr.Bricolage Paris 12 (cote 21773), Mr.Bricolage Romorantin (cote 21786), Mr.Bricolage Querqueville (cote 21759) et Mr.Bricolage Villefranche-sur-Saône (cote 21731).
36 Bricomarché Saumur (cote 21855), Mr.Bricolage Vouziers (cote 22039) et La Redoute (cotes 17549-17550).
37 Cote VC 8843 / VNC 14192.
38 Cote 21552.
39 Cote 24737.
40 Cote 21552.
41 Cotes VC 8512-8522 / VNC 13429, 13430, 13431, 13432, 13433,13434 et 13435.
42 Cotes 15089, VC 19816 / VNC 21185, 16192-16193, 20742, 20765, 20772, 20793, 20310, 15122, 11551,
11559, 11563, 16187, 17545, 20738, 17549, 17177, 15854 et VC 16831 / VNC 17729.
43 Cotes 8860, VC 8861-8871 / VNC 14210-14220.
44 Cotes VC 8890-8895 / VNC 14239-14244.
45 Cotes VC 8920-8925 / VNC 14269-14274.
46 Cotes 8531-8534.
47 Cote 8296.
48 Cote VC 8921 / VNC 14270.
49 Cotes 7219, VC 8844 / VNC 14193, 7401 et VC 8961 / VNC 14310.
50 Voir les cotes VC 11604-11611 / VNC 14703-14712, VC 11612-11615 / VNC 14713-14716.
51 Cotes 7605-7611, soulignements ajoutés.
52 Cotes 25471-25480.
53 Cote 21559.
54 Cotes VC 15091 / VNC 20836, 15092.
55 Cote 15075.
56 Cote 15126.
57 Cote 8724.
58 Cote VC 9358 / VNC 13 648.
59 Cote 19817.
60 Voir par exemple les déclarations suivantes : Bricomarché Auray (cote 20742), Bricomarché Caudry (cote 21690), Bricomarché Dieppe (cotes 20787-20789), Bricomarché Fécamp (cotes 20765-20766), Bricomarché Laval (cote 19462), Bricomarché La Flèche (cote 21548), Bricomarché Saumur (20793-20794), Bricomarché Mortagne-au-Perche (cotes 20772-20773), Mr.Bricolage Auxerre (cotes 21869-21870), Bricomarché Saumur (cote 20793), Mr.Bricolage Blois (cotes 21865), Mr. Bricolage Champniers (cote 22035), Mr.Bricolage Concarneau (cote 21914), Mr.Bricolage Epernay (cotes 21743-21745), Mr.Bricolage Estancarbon (cote 22031), Mr.Bricolage Libourne (cotes 21766-21768), Mr.Bricolage Querqueville (cotes 21757-21759),
Mr.Bricolage Moncel-Les-Luneville (cotes 21899-21901), Mr.Bricolage Paris 12 (cotes 21772-21773), Mr.Bricolage Romorantin (cotes 21785-21787), Mr.Bricolage Saint Malo (cotes 21720-21728), Mr.Bricolage Pontarlier (cotes 21917-21919), Mr.Bricolage Villefranche-sur-Saône (cotes 21730-21732), Mr.Bricolage Vouzier (cotes 22039-22040), Mr.Bricolage Estancarbon (cotes 22030-22031).
61 Voir par exemple les déclarations suivantes : Bricoman (cote VC 16831 / VNC 17729), ITM Equipement de la maison (enseigne Bricomarché) (cote 15073), Bricomarché Auray (cote 20742), Bricomarché Dieppe (cotes 20787-20789), Bricomarché Fécamp (cotes 20765-20766), Bricomarché La Flèche (cote 21548), Bricomarché Laval (cote 19463), Bricomarché Monteils - LAMO Sarl (cote 14975), Bricomarché Saint Malo (cote 21720), Bricomarché Saumur (20793-20794), Mr. Bricolage (siège) (cotes 15123-15124), Mr.Bricolage Auxerre (cotes 21869-21870), Mr.Bricolage Blois (cote 21865), Mr.Bricolage Champniers (cote 22035), Mr.Bricolage Concarneau (cote 21914), Mr.Bricolage Epernay (cotes 21743-21745), Mr.Bricolage Estancarbon (cotes 22030-22031), Mr.Bricolage Lesparre (cotes 22049-22050), Mr.Bricolage Libourne (cotes 21766-21768), Mr.Bricolage Moncel-Les-Luneville (cotes 21899-21901), Mr.Bricolage Querqueville (21757-21759), Mr.Bricolage Paris 12 (cotes 21772-21773), Mr.Bricolage Pontarlier (21917-21919), Mr.Bricolage Romorantin (cotes 21785-21787), Mr.Bricolage Saint Malo (cotes 21720-21728), Mr.Bricolage Villefranche-sur-Saône (cotes 21730-21732), Mr.Bricolage Vouzier (cote 22040), Brico Jardin (cote 17545), Castorama France (cote 19377) et Weldom (cote 15855).
62 Voir par exemple les déclarations suivantes : Mr.Bricolage Auxerre (cotes 21869-21870), Bricomarché Dieppe (cotes 20787-20789), Bricomarché La Flèche (cote 21548), Bricomarché Laval (cote 19463), Mr.Bricolage Concarneau (cote 21914), Mr.Bricolage Pontarlier (cotes 21917-21919), Bricomarché Caudry (cote 21690), Castorama France (cotes 19377 et VC 15 090 / VNC 20835), Groupe LDLC-Maginea (cote 17177), Groupe Maisadour Espaces verts (cote 20739) et Weldom (cote 15855).
63 Kingfisher avec ses enseignes Castorama et Brico Dépôt et Adeo avec ses enseignes Leroy Merlin et Bricoman.
64 Jardineries, pure players, GSA et GSB.
65 Voir notamment : Brico Dépôt (cotes VC 10053 / VNC 24470, VC 10092 / VNC 24471, VC 10137 / VNC 24472), Castorama (cotes VC 17366 / VNC 24456, VC 17382 / VNC 24457), Leroy Merlin (cotes 9467, 9468,
9518, 9606-9607, VC 9611 / VNC 24496), Bricoman (cotes 16887-16888, 16914-16915 et 16959-16960),
Weldom (cotes 15922-15923) et Cora, Bricorama, BAO, BHV, Ddiscount, Gamm Vert, Apex, Jardiland, Truffaut et 3 suisses (cote 22129).
66 Cotes 164-557 et 15577-15579.
67 Tarif 2011 (cotes VC 8920-8921 / VNC 14269-14270).
68 Le taux de suivi correspond à la proportion des prix de revente identiques au prix communiqué par Kärcher pour une référence donnée.
69 Tarif revendeurs spécialistes Grand Public Maison 2010 (cotes VC 8890-8891 / VNC 14239-14240).
70 Cotes 8532-8533.
71 Tarif revendeurs spécialistes Grand Public Maison 2010 (cotes VC 8890-8891 / VNC 14239-14240).
72 Tarif revendeurs GSA Grand Public Maison 2010 (cotes 8896, VC 8897 / VNC 14246).
73 Tarif revendeurs spécialistes Grand Public Maison 2010 (cotes VC 8890-8891 / VNC 14239-14240).
74 Cote 7467.
75 Tarif revendeur Grand Public Maison 2009 (cotes 8860, VC 8861 / VNC 14210).
76 Tarif revendeurs spécialistes Grand Public Maison 2010 (cotes VC 8890-8891 / VNC 14239-14240).
77 Cotes 558-6812 complétées par les cotes 19529-19811.
78 Même prix sur le Tarif 2009.
79 Même prix sur le Tarif 2009.
80 Le prix est de 159,95 € sur le Tarif 2011. 81 Le prix est de 199,99 € sur le Tarif 2011. 82 Le prix est de 299,99 € sur le Tarif 2011.
83 Le prix est de 349,99 € sur le Tarif 2011. 84 Le prix est de 429,99 € sur le Tarif 2011. 85 Le prix est de 499,99 € sur le Tarif 2011. 86 Le prix est de 549,99 € sur le Tarif 2011.
87 Tarif 2009 et Tarif 2010 (cotes VC 8861 / VNC 14210 et VC 8891 / VNC 14240).
88 Cote 15538.
89 Cotes 15543-15544.
90 Tarif 2010 (cote VC 8891 / VNC 14240).
91 Cote 15551.
92 Cotes 15553-15554.
93 Tarif 2010 et Tarif 2011 (cotes VC 8891 / VNC 14240, VC 8921 / VNC 14270).
94 Cote 205.
95 Cote 204.
96 Cote 203.
97 Cote 202.
98 Cote 206.
99 Tarif 2009 et Tarif 2010.
100 Tarif 2009 et Tarif 2010.
101 Cotes 7884-7901.
102 Les données prises en compte dans le calcul du taux de suivi incluent les références des NHP Kärcher ne figurant pas dans le tarif de l’année en cours.
103 Cote 20706.
104 Les données prises en compte dans le calcul du taux de suivi incluent les références des NHP Kärcher ne figurant pas dans le tarif de l’année en cours.
105 Cotes 17307 et 17499-17511.
106 Sur le fichier remis au format excel ont été sélectionnées toutes les références de nettoyeur haute pression figurant sur le tarif 2010 fournis par Kärcher à ses distributeurs avec leurs prix TTC de la base magasin.
107 Cote 19821.
108 Cotes 20303-20305.
109 Cote 19821.
110 Sur le Tarif 2010, figure la référence K5600+T200. Sur le Tarif 2011, figure la référence K5600+T250.
111 Soulignements et caractères gras ajoutés.
112 Les soulignements et les caractères gras sont ajoutés.
113 Les soulignements et les caractères gras sont ajoutés.
114 Les soulignements et les caractères gras sont ajoutés.
115 Les soulignements et les caractères gras sont ajoutés.
116 Les soulignements et les caractères gras sont ajoutés.
117 Les soulignements et les caractères gras sont ajoutés.
118 Les soulignements et les caractères gras sont ajoutés.
119 Les soulignements et les caractères gras sont ajoutés.
120 Les soulignements et les caractères gras sont ajoutés.
121 Les soulignements et les caractères gras sont ajoutés.
122 Voir par exemple Brico Dépôt (cotes 10005, VC 20312 / VNC 21211), Bricomarché (cotes 16193 et 15073),
Castorama (cotes 15088-15089, VC 15090 / VNC 20835), Leroy Merlin (cotes VC 9357 / VNC 13647, 19819) et Mr.Bricolage (cotes 15122-15123).
123 Voir par exemple La Redoute (cote 17549), Bricomarché Monteils (cote 14969), Bricomarché Fécamp (cote 20765) et CGO/Cofaq (cote 21998).
124 Voir par exemple Bricomarché Fécamp (cote 20765), Bricomarché Monteils (cote 14969) et Outillage-online (cotes 16184-16189).
125 Voir par exemple CGO/Cofaq (cote 11551), Comai/Cofaq (cotes 11557-11559) et Brico Jardin (cote 17545).
126 Voir par exemple La Redoute (cote 17549).
127 Voir par exemple Mr.Bricolage Vouziers (cote 22039).
128 Voir par exemple Brico Jardin (cote 17545).
129 Bricomarché Dieppe (cote 21908).
130 Bricomarché Auray (cote 21903).
131 Voir par exemple Bricomarché Auray (cote 21903), Bricomarché La Flèche (cote 21548), Bricomarché Mortagne-au-Perche (cote 20772), Bricomarché Saumur (cote 20793), Castorama Claye-Souilly, Le Havre, Lyon, Nantes, Strasbourg et Toulouse (cote 19376), CGO/Cofaq (cotes 13526, 21998), Mr.Bricolage Epernay (cotes 21743-21744), Mr.Bricolage Libourne (cote 21767), Mr.Bricolage Paris 12 (cotes 21772-21773), Mr.Bricolage Pontarlier (cotes 21918-21919), Mr.Bricolage Villefranche-sur-Saône (cote 21731), Groupe Maisadour Espaces verts (cote 20738) et Outillage-online (cote 16187).
132 Cote 8724.
133 Cote VC 8301 / VNC 12766.
134 Cote 8786.
135 Cote 8786.
136 Cote 10004.
137 Cote 8787.
138 Cote VC 8850 / VNC 14199.
139 Voir par exemple Bricomarché (cotes 20789, 20766, 19463, 20794 et 20773), Castorama (cotes VC 15090
/ VNC 20835, 19377) et Mr.Bricolage (cotes 21897 et 21914).
140 Bricomarché Auray (cote 20743).
141 La Redoute (cote 17550).
142 Outillage-online (cote 16188).
143 Mr.Bricolage Epernay (cote 21745).
144 Mr.Bricolage Moncel-Lès-Lunéville (cote 21901).
145 Mr.Bricolage Romorantin (cote 21787).
146 Castorama Claye-Souilly, Le Havre, Nantes, Toulouse, Blagnac et Strasbourg (cote 19377).
147 Bricomarché Dieppe (cote 20788).
148 Mr.Bricolage Vouzier (cote 22040).
149 Bricomarché Caudry (cote 21690).
150 Commission européenne, Lignes directrices relatives à la notion d’affectation du commerce figurant aux articles 81 et 82 du traité, JO C 101 du 27 avril 2004, p. 0081–0096, point 18.
151 Commission européenne, Lignes directrices relatives à la notion d’affectation du commerce figurant aux articles 81 et 82 du traité, JO C 101 du 27 avril 2004, p. 0081–0096, point 52.
152 Cote 21953.
153 Arrêt du Tribunal du 19 mars 2003, CMA CGM e.a. / Commission, T-213/00, EU:T:2003:76, point 206.
154 Décisions n° 05-D-27 du 15 juin 2005 relative à des pratiques relevées dans le secteur du thon blanc, paragraphe 28 ; n° 10-D-13 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la manutention pour le transport de conteneurs au port du Havre, paragraphe 221 et n° 11-D-02 du 26 janvier 2011 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la restauration des monuments historiques, paragraphe 364.
155 Commission européenne, Communication de la Commission sur la définition du marché en cause aux fins du droit communautaire de la concurrence, JO C 372 du 9 décembre 1997, point 7.
156 Décision n° 10-D-19 de l’Autorité de la concurrence du 24 juin 2010 relative à des pratiques mises en œuvre sur les marchés de la fourniture de gaz, des installations de chauffage et de la gestion de réseaux de chaleur et de chaufferies collectives, paragraphes 158 à 159.
157 Arrêts de la Cour de justice du 15 juillet 1970, ACF Chemiefarma / Commission, C-41/69, EU:C:1970:71, point 112 et du Tribunal du 26 octobre 2000, Bayer / Commission, T-41/96, EU:T:2000:242, point 67 ; arrêt de la cour d’appel de Paris, 28 janvier 2009, Epsé Joué Club, n° 2008/00255, p. 9, devenu définitif après les arrêts de rejet de la Cour de cassation du 7 avril 2010.
158 Arrêt du Tribunal du 26 octobre 2000, Bayer / Commission, T-41/96, EU:T:2000:242, point 173.
159 Arrêt du Tribunal du 6 octobre 2009, GlaxoSmithKline Services / Commission, T-168/01, EU:T:2006:265, points 83-84.
160 Arrêt de la Cour de justice du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a. / Commission, C-204/00, EU:C:2004:6, point 237.
161 Décision n° 18-D-26 du 20 décembre 2018 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la commercialisation des fertilisants liquides pour la production hors-sol dédiés à la culture domestique.
162 Arrêt de la cour d’appel de Paris du 16 janvier 2020, Société Canna France, n° 19/034107, p. 12.
163 Arrêt de la cour d’appel de Paris du 28 janvier 2009, Epsé Joué Club, n° 2008/00255, p. 9.
164 Commission européenne, Lignes directrices sur les relations verticales, JO C 130 du 19 mai 2010, point 25.
165 Commission européenne, Lignes directrices sur les relations verticales, JO C 130 du 19 mai 2010, point 25 faisant référence à l’Arrêt du Tribunal du 26 octobre 2000, Bayer / Commission, T-41/96, EU:T:2000:242.
166 Commission européenne, Lignes directrices sur les relations verticales, JO C 130 du 19 mai 2010, point 25.
167 Arrêt de la cour d’appel de Paris du 26 janvier 2012, Beauté Prestige International, n° 2010/23945, p. 44, non remis en cause sur ce point par l’arrêt de la Cour de cassation du 11 juin 2013, Beauté Prestige International, n° Y 12-13.961 - B 12-14.401 A 12-14.584 - N 12-14.595 Q 12-14.597 - R 12-14.598 U 12-14.624 - V 12-14.625, C 12-14.632 – V 12-14.648.
168 Décisions n° 20-D-04 du 16 mars 2020 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la distribution de produits de marque Apple, paragraphe 834 et n° 20-D-20 du 3 décembre 2020 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des thés haut de gamme, paragraphe 183.
169 Arrêt de la Cour de cassation du 7 avril 2010, Puériculture de France, n° 09-11853.
170 Arrêt de la cour d’appel de Paris du 26 janvier 2012, Beauté Prestige International, n° 2010/23945, p. 44, non remis en cause sur ce point par l’arrêt de la Cour de cassation du 11 juin 2013, Beauté Prestige International, n° Y 12-13.961 - B 12-14.401 A 12-14.584 - N 12-14.595 Q 12-14.597 - R 12-14.598 U 12-14.624 - V 12-14.625, C 12-14.632 – V 12-14.648.
171 Arrêt de la Cour de justice du 6 janvier 2004, Bayer, C-02/01 P, EU:C:2004:2, point 84.
172 Arrêt de la cour d’appel de Paris du 26 janvier 2012, Beauté Prestige International, n° 10/23945, non remis en cause sur ce point par l’arrêt de la Cour de cassation du 11 juin 2013, Beauté Prestige International, n° Y 12-13.961 - B 12-14.401 A 12-14.584 - N 12-14.595 Q 12-14.597 - R 12-14.598 U 12-14.624 - V 12-14.625, C 12-14.632 – V 12-14.648.
173 Décisions n° 20-D-04 du 16 mars 2020 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la distribution de produits de marque Apple, paragraphe 835 ; n° 20-D-20 du 3 décembre 2020 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des thés haut de gamme, paragraphe 186.
174 Arrêt de la Cour de cassation du 7 octobre 2014, Kontiki, n° 13-19.476.
175 Brico Dépôt Montauban (cote 11565-11566), Bricomarché (cote 20742), Bricomarché Fécamp (cote 20765), Castorama Claye-Souilly, Le Havre, Lyon, Nantes, Strasbourg et Toulouse (cotes 19375-19376), Mr.Bricolage Blois (cote 21865), Mr.Bricolage Epernay (cotes 21743-21744), Mr.Bricolage Libourne (cote 21767), Mr.Bricolage Moncel-Lès-Lunéville (cote 21900), Mr.Bricolage Paris 12 (cotes 21772-21773), Mr.Bricolage Querqueville (cotes 21758-21759), Mr.Bricolage Saint-Malo (cotes 21718-21721), Mr.Bricolage Romorantin (cote 21786), Mr.Bricolage Concarneau (cote 21914) et Mr.Bricolage Champnier (cote 22034).
176 Cote 25471.
177 Cote 8724.
178 Cotes 24955 à 24957.