Cass. com., 24 octobre 1995, n° 93-20.469
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Pasturel
Rapporteur :
M. Badi
Avocat général :
M. de Gouttes
Avocats :
Me Choucroy, Me Bertrand
Sur le premier moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, (Paris, 14 septembre 1993), que la procédure de redressement judiciaire ouverte à l'égard de la société VDS a été étendue à la société Brie viandes, et que M. X..., administrateur judiciaire, et M. A..., représentant des créanciers, en ont demandé l'extension à la société BVE ; que la cour d'appel, après annulation du jugement qui avait accueilli cette demande, a étendu à la société BVE la procédure de redressement judiciaire de la société VDS ;
Attendu que la société BVE fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le pourvoi, que, si l'article 7 de la loi du 25 janvier 1985, auquel se réfère la cour d'appel pour prononcer l'extension, prévoit effectivement que la procédure ouverte peut être étendue à une ou plusieurs autres personnes, l'article 3 de cette même loi ne prévoit la procédure de redressement judiciaire que dans le cas où une entreprise est dans l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible ; qu'il en résulte que la procédure de redressement judiciaire ne peut être étendue qu'à une personne physique ou morale en état de cessation des paiements ; qu'en étendant le redressement judiciaire de la société VDS à la société BVE sans constater si celle-ci était en état de cessation des paiements, la cour d'appel a violé l'article 3 et faussement appliqué l'article 7 de la loi du 25 janvier 1985 ;
Mais attendu que l'arrêt retient que la société BVE, société de façade dépourvue de toute autonomie financière, représentait une structure parasite introduite dans le groupe de M. Bischoff pour mettre le patrimoine immobilier de la société VDS à l'abri des créanciers de celle-ci ; qu'en l'état de ces constatations, qui font apparaître le caractère fictif de la société BVE, la cour d'appel, qui n'avait pas à rechercher si celle-ci était personnellement en état de cessation des paiements, a fait l'exacte application textes visés par le moyen ; que celui-ci n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que la société BVE fait le même grief à l'arrêt, alors, selon le pourvoi, qu'il résulte des termes mêmes de cet arrêt que, comme l'avait relevé la société BVE dans ses conclusions d'appel, les intimés n'avaient jamais invoqué le caractère fictif des sociétés pour demander l'extension du redressement judiciaire de la société VDS ; qu'en fondant sa décision sur un moyen relevé d'office, sans avoir préalablement invité les parties à lui présenter leurs observations, la cour d'appel a violé les droits de la défense et le principe du contradictoire édicté par l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que la société BVE avait fait porter l'argumentation de ses conclusions sur la notion de fictivité ; que cet élément était donc dans le débat et n'a pas été relevé d'office par la cour d'appel ; que le moyen est sans fondement ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que la société BVE reproche enfin à l'arrêt d'avoir jugé qu'elle n'était qu'une structure parasite introduite dans le groupe de M. Bischoff pour mettre à l'abri le patrimoine immobilier des poursuites des créanciers de la société VDS, alors, selon le pourvoi, qu'elle faisait à juste titre valoir dans ses écritures d'appel que, dès lors que les immeubles avaient été construits dans le cadre d'un bail à construction, la société VDS avait perdu tous droits sur eux à l'expiration de ce bail, si bien que la vente de ses droits immobiliers avec un substantiel bénéfice de 4 000 000 de francs constituait une opération éminemment bénéfique pour elle ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen parfaitement pertinent, la cour d'appel a violé les articles 455 et 458 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que l'arrêt retient que si l'opération de cession s'est soldée par une plus-value de 4 millions de francs, la société VDS a perdu dans cette opération tout le patrimoine immobilier acquis de ses deniers pour devenir occupante précaire des locaux tout en étant contrainte de verser des loyers servant à la société BVE pour acquérir la propriété du terrain et des constructions sur lesquelles seule portait la sous-location ; que la cour d'appel a ainsi répondu aux conclusions invoquées ; que le moyen n'est donc pas fondé ;
Sur la demande présentée au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile :
Attendu que MM. X... et A..., ès qualités, sollicitent, sur le fondement de ce texte, l'allocation d'une somme de 12 000 francs ;
Mais attendu qu'il n'y a pas lieu d'accueillir cette demande ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.