CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 23 juin 2021, n° 17/04101
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Doux Aliments (SARL)
Défendeur :
Compagnie Financière et de Participations Roullier (SA), Timab Industries (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Dallery
Conseillers :
M. Gilles, Mme Depelley
Avocats :
Me Lehman, Me David, Me Guyonnet
La société Doux Aliments (la société Doux), venant aux droits des sociétés Doux Aliments Sologne, Doux Aliments Bretagne et Doux Aliments Vendée, est spécialisée dans l'élevage avicole et fabrique des aliments destinés aux volailles, notamment à partir de matières minérales comme le phosphate.
La société Timab Industries (la société Timab), qui est venue aux droits de la société Timac en 1997, est une filiale de la société Compagnie Financière et de Participation Roullier (la société CFPR), qui fait partie du groupe Roullier, produit et commercialise des matières premières minérales destinées à l'alimentation animale.
De 1992 à 2004, des produits alimentaires destinés aux volailles ont été fabriqués sur les sites de production des sociétés Doux Aliments Bretagne et Doux Aliments Vendée en y incorporant le phosphate acheté tant auprès de la société Timab que de la société CFPR.
Au cours de la même période, les sociétés Doux Aliments Sologne, Doux Aliments Bretagne et Doux Aliments Vendée ont également acheté, auprès de la société Timab, du phosphate nécessaire à la fabrication des aliments pour volailles qu'elles produisaient.
Par décision (2010) 5001 final, du 20 juillet 2010, relative à une procédure d'application de l'article 101 TFUE et de l'article 53 de l'accord EEE (affaire COMP/38866 - Phosphates pour l'alimentation animale), la Commission européenne a condamné six groupes de producteurs de phosphates destinés à l'alimentation animale à hauteur de 175.647.000 euros, pour avoir participé, pendant trente ans, à une infraction unique et continue ayant consisté en un partage d'une grande partie du marché européen des phosphates pour l'alimentation animale, sous la forme de quotas de vente par région et par client et de coordination des prix et des conditions de vente.
Les sociétés Timab Industries et la CFinancière et de Participation Roullier (CFPR) ont été condamnées pour avoir participé à cette entente, du 16 septembre 1993 au 10 février 2004.
Cette décision faisait suite à quatre demandes de clémence et l'ouverture d'une procédure de transaction acceptée par tous les membres de l'entente, à l'exception des sociétés Timab et CFPR.
Aux termes de cette décision, il a été établi, d'une part, que les deux sociétés productrices de phosphate « ont pris part à une infraction unique et continue à l'article 101 TFUE et, à compter du 1er janvier 1994, à l'article 53 de l'accord sur l'Espace Économique Européen, par laquelle elles se sont entendues concernant la vente de phosphates alimentaires utilisés dans les aliments pour animaux » (point 3 de la décision) et, d'autre part, que « L'entente globale a duré au moins 34 ans et 10 mois [...] Les entreprises suivantes sont considérées comme responsables de l'infraction pour les périodes indiquées: Timab Industries SA : au moins du 16 septembre 1993 au 10 février 2004, Compagnie Financière et de Participation Roullier au moins du 16 septembre 1993 au 10 février 2004 » (point 6 de la décision).
Sur la base de ces constatations, la société Timab a été condamnée, solidairement avec la société CFPR à une amende de 59.850.000 euros.
Dans ces conditions, s'estimant bien fondées à demander la réparation du préjudice subi du fait des excédents de facturation illicites établis entre 1993 et 2004, les sociétés Doux Aliments Bretagne et Doux Aliments Vendée ont, par exploit du 17 décembre 2014, assigné la société CFPR devant le tribunal de commerce de Quimper.
Par une autre assignation du même jour, les sociétés Doux Aliments Sologne, Doux Aliments Bretagne et Doux Aliments Vendée ont également assigné la société Timab devant le tribunal de commerce de Quimper des mêmes chefs de demandes.
Par jugement du 20 mai 2015, le Tribunal de l'Union a confirmé la décision de la Commission. La Cour de justice a ensuite rejeté le recours contre le jugement.
Par jugement du 9 octobre 2015, le tribunal de commerce de Quimper s'est déclaré incompétent et a renvoyé, devant le tribunal de commerce de Rennes, les deux affaires qui ont été enrôlées respectivement sous les numéros 2015F00497 et 2015F00498.
Le 30 juin 2016, les sociétés Doux Aliments Sologne, Doux Aliments Bretagne et Doux Aliments Vendée ont fait l'objet d'une fusion-absorption au profit de la société Doux Aliments, qui est venue à leurs droits par conclusion d'intervention volontaire.
Par jugement du 12 janvier 2017, le tribunal de commerce de Rennes a :
prononcé la jonction des affaires enrôlées sous les numéros 2015F00497 et 2015F00498,
débouté les sociétés Compagnie Financière et de Participation Roullier et Timab de leur demande de sursis à statuer,
dit que l'action engagée par la société Doux Aliments est prescrite,
débouté la société Doux Aliments de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
condamné la société Doux Aliments à payer à la société Compagnie Financière et de Participation Roullier la somme de 5.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,
condamné la société Doux Aliments à payer à la société Timab la somme de 5.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,
débouté les parties de leurs autres demandes, plus amples ou contraires,
condamné la société Doux Aliments aux entiers dépens.
Par déclaration du 23 février 2017, la société Doux a interjeté appel à l'encontre de ce jugement.
Par jugement du 4 avril 2018, le tribunal de commerce de Rennes a ouvert une procédure de liquidation à l'encontre de la société Doux et a désigné la SAS David-Goic et la SELARL EP & Associés en qualité de mandataires liquidateurs ; ces derniers sont intervenus volontairement à la présente instance par conclusions régularisées le 27 avril 2018.
Par arrêt du 6 février 2019, la cour de céans a : infirmé le jugement du tribunal de commerce de Rennes en date du 12 janvier 2017 en toutes ses dispositions :
rejeté la fin de non-recevoir de prescription, Evoquant l'affaire au fond, dit que les sociétés CFPR et Timab ont commis des fautes au sens de l'ancien article 1382 du code civil dans sa version alors en vigueur,
dit que ces sociétés ont concouru à la réalisation du préjudice subi par la société Doux, venant aux droits des sociétés Doux Sologne, Bretagne et Vendée,
AVANT DIRE DROIT sur la réparation du préjudice de la société Doux
ordonné une expertise,
désigné Gildas de Muizon, expert auprès de la Cour d'appel de Paris, Cabinet Deloitte, 6 place de la Pyramide, Paris La Défense, 92 908, avec mission d'évaluer les préjudices subis par les sociétés Doux et résultant de l'entente commise par les sociétés CFPR et Timab de septembre 1993 à février 2004 et notamment d'évaluer :
le surcoût occasionné aux sociétés Doux durant cette période par la mise en place de cette entente,
les taux d'actualisation des préjudices, permettant de calculer « le préjudice de trésorerie » allégué,
fournir à la cour tous les éléments lui permettant de fixer le préjudice,
pour ce faire, établir un scenario contrefactuel pour déterminer le niveau de prix qui aurait prévalu en l'absence d'entente, notamment au regard des évolutions postérieures des prix acquittés par la société Doux ou facturés par les sociétés CFPR et Timab après la cessation de l'entente litigieuse,
dit que l'expert aura accès aux dossiers des parties et à leur comptabilité ainsi qu'à tout élément de facturation de celles-ci,
dit que l'expert devra préalablement communiquer aux parties un pré-rapport et recueillir contradictoirement leurs observations ou réclamations écrites dans le délai qu'il fixera, puis joindra ces observations ou réclamations à son rapport définitif en indiquant quelles suites il leur aura données,
rappelé qu'en application de l'article 276 du code de procédure civile, les parties devront dans leurs dernières observations ou réclamations reprendre sommairement le contenu de celles qu'elles avaient précédemment présentées, à défaut de quoi, elles seront réputées abandonnées, fixé à 30 000 Euros le montant de la provision à valoir sur la rémunération de l'expert que verseront les sociétés CFPR et Timab entre les mains du régisseur d'avances et de recettes de la cour d'appel de Paris et ce, avant le 27 février 2019,
rappelé qu'à défaut de consignation dans le délai, la désignation de l'expert sera caduque, toute conséquence étant tirée du refus ou de l'abstention de consigner,
dit que l'expert déposera le rapport de ses opérations au greffe de la cour dans les six mois de sa saisine par signification qui lui sera faite de la consignation,
dit que l'affaire sera examinée à l'audience de mise en état du mardi 8 octobre 2019,
sursis à statuer sur la réparation du préjudice,
réservé les dépens,
ordonné, conformément aux dispositions combinées des articles 15, alinéa 2 du règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil du 16 décembre 2002 relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 101 et 102 du traité et R. 470-2 du code de commerce, que cet arrêt soit notifié par le greffe de la cour d'appel, par lettre recommandée avec accusé de réception, à la Commission européenne, à l'Autorité de la concurrence, ainsi qu'au ministre chargé de l'économie.
L'expert a déposé son rapport au greffe de la cour d'appel le 15 octobre 2019.
Vu les dernières conclusions de la société DOUX, déposées et notifiées le 9 février 2021, priant la cour de :
vu les dispositions de la décision de la Commission européenne du 20 juillet 2010, vu l'arrêt de la cour d'appel de PARIS du 6 février 2019, vu la Directive du Parlement et du Conseil n° 2014/104/UE du 26 novembre 2014, vu les dispositions de l'article 1382 ancien du Code civil, vu l'article 15 « Coopération avec les juridictions nationales » du règlement CE n° 1/2003 du 16 décembre 2002 relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 et 82 du Traité,
CONDAMNER solidairement la société TIMAB INDUSTRIES et la société COMPAGNIE FINANCIERE ET DE PARTICIPATION ROULLIER à payer à la société DOUX ALIMENTS, représentée par la SAS DAVID-GOIC, elle-même représentée par Maître Isabelle GOIC et la SELARL EP & Associés, elle-même représentée par Maître Jordy PAGANI, - ses mandataires liquidateurs :
La somme de 67.413€ au titre de la surfacturation de 1993 à 2000,
La somme de 109.176€ au titre de la surfacturation de 2000 à 2003,
La somme de 30.000€ au titre du préjudice moral,
CONDAMNER solidairement la société TIMAB INDUSTRIES et la société COMPAGNIE FINANCIERE ET DE PARTICIPATION ROULIER à verser à la société DOUX ALIMENTS, représentée par la SAS DAVID-GOIC, elle-même représentée par Maître Isabelle GOIC et la SELARL EP & Associés, elle-même représentée par Maître Jordy PAGANI, - ses mandataires liquidateurs, la somme de 45.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
LES CONDAMNER sous la même solidarité aux dépens dont distraction au profit de Maître Hervé LEHMAN, Avocat, en application de l'article 699 du même Code.
Vu les dernières conclusions des sociétés CFPR et TIMAB déposées et notifiées le 11 mai 2020, demandant à la cour de :
vu le code civil, notamment les articles 1153 (devenu 1231-6) et 1382 (devenu 1240), vu l'arrêt de la Cour de céans en date du 6 février 2019, Constater que les préjudices économiques allégués par la société DOUX ALIMENTS, représentée par la SAS DAVID-GOIC, elle-même représentée par Maître Isabelle GOIC et la SELARL EP & Associés, elle-même représentée par Maître Jordy PAGANI, es qualité de mandataires liquidateurs, en relation avec l'entente ne sont pas établis,
En conséquence :
Rejeter les demandes formées au titre de ces préjudices économiques,
Constater que le préjudice moral allégué par la société DOUX ALIMENTS, représentée par la SAS DAVID-GOIC, elle-même représentée par Maître Isabelle GOIC et la SELARL EP & Associés, elle-même représentée par Maître Jordy PAGANI, es qualité de mandataires liquidateurs, a été invoqué tardivement et n'est, en tout état de cause, pas établi,
En conséquence :
A titre principal : déclarer irrecevable la demande formée au titre du préjudice moral,
A titre subsidiaire : rejeter la demande formée au titre du préjudice moral,
EN TOUT ETAT DE CAUSE :
Fixer au passif de DOUX la somme de 30.000 euros, CFPR et Timab étant chacune créancière de la somme de 15.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi que le montant des entiers dépens.
SUR CE LA COUR.
La cour, par son arrêt du 6 février 2019, ordonnant une expertise, a dit que les sociétés CFPR et Timab ont commis des fautes au sens de l'ancien article 1382 du code civil dans sa version alors en vigueur et dit que ces sociétés ont concouru à la réalisation du préjudice subi par la société Doux, venant aux droits des sociétés Doux Sologne, Bretagne et Vendée, sursoyant à statuer sur la réparation du préjudice.
Sur le préjudice subi par la société DOUX du fait de l'entente, à laquelle Timab/CFPR ont participé au moins de septembre 1993 à février 2004 selon la Commission européenne, concerne la commercialisation de phosphates pour l'alimentation animale (ci-après « PAA »), un composé chimique permettant de couvrir les besoins en phosphore des animaux, qui constitue un complément alimentaire important pour l'élevage des bêtes.
Les sociétés Doux fabriquaient des aliments pour volailles dans lesquels elles incorporaient des PAA achetés notamment auprès de Timab/CFPR, à savoir des phosphates bicalciques (DCP), un des types de PAA les plus commercialisés.
Conformément à sa mission, l'expert a procédé à l'établissement d'un scenario contrefactuel pour déterminer le niveau de prix qui aurait prévalu en l'absence de l'entente commise par Timab/CFPR de septembre 1993 à février 2004 au regard des évolutions postérieures des prix acquittés par Doux auprès de Timab/CFPR après la cession de l'entente litigieuse et compte tenu des facteurs exogènes devant être distingués des effets imputables à l'entente.
Pour évaluer les effets de l'entente en excluant l'impact des facteurs exogènes tels que les variations des prix des principaux intrants, l'expert a recouru à une comparaison économétrique dans le temps afin de déterminer de manière statistique l'impact de chaque variable sur le prix et d'identifier l'éventuel surcoût qui serait spécifiquement attribuable à l'entente. En approfondissant ses analyses, l'expert a identifié trois périodes durant l'entente qui montrent des différences sensibles au niveau de la dynamique des prix observés : une première période jusqu'à la fin de l'année 2000 durant laquelle les prix des PAA restent relativement stables, une seconde période comprise entre la fin de l'année 2000 et le mois de janvier 2003 pendant laquelle l'évolution des prix des PAA à la hausse ne suit pas le coût de l'évolution de l'acide phosphorique à la baisse et une dernière période entre février 2003 et la fin de l'entente au cours de laquelle les prix des PAA subissent une chute importante indépendante du coût de l'acide.
L'expert conclut qu'aucun effet spécifique à l'entente n'est mis en évidence ni avant novembre 2000, ni après janvier 2003 jusqu'à la fin de l'entente en février 2004, mais qu'en revanche, un effet significatif de l'entente sur les prix des PAA est mis en évidence entre novembre 2000 et janvier 2003, conduisant à un surcoût de 7,7 % en ne retenant que l'impact de l'entente, sans l'effet de choc de demande lié à la crise de la vache folle Il en conclut que le surcoût occasionné à la société Doux s'élève à 81 937 euros. Il ajoute avoir établi l'absence de répercussion auprès de clients indirects, de sorte que le préjudice subi par Doux en raison de l'entente commise par Timab/CFPR s'établit à 81 937 euros.
Après actualisation de ce montant au mois d'octobre 2019, par application du taux d'intérêt légal, en l'absence d'éléments communiqués par Doux sur ses emprunts et dettes et sur l'usage que celle-ci aurait fait des sommes dont elle a été privée, il dit que le montant du « préjudice de trésorerie » s'établit à la somme de 27 239 euros. Il conclut que le préjudice subi par Doux s'établit à 109 176 euros, préjudice qui devra être actualisé à la date effective d'indemnisation.
S'agissant de la période 1993-2000
Selon la société Doux par ses liquidateurs, s'agissant de la période 1993-2000, il est inimaginable que les parties au cartel aient pris le risque de s'entendre, pendant sept ans, sur des hausses de prix et des quotas, sans en tirer le moindre avantage.
Elle invoque l'article 17 de la Directive 2014/104/UE qui précise qu'il « est présumé que les infractions commises dans le cadre d'une entente causent un préjudice » et qu'il appartient à la société Timab de renverser cette présomption.
Elle affirme que le juge national a l'obligation d'interpréter le droit français à la lumière de la directive.
La société appelante invoque également le principe d'effectivité du droit communautaire, disant que celui-ci commande que la victime d'une entente puisse obtenir réparation du préjudice qui découle de cette pratique illicite et que les modalités des recours indemnitaires effectuées devant les juridictions nationales ne doivent pas rendre pratiquement impossible ou excessivement difficile cette réparation.
S'agissant de l'application aux faits de l'espèce, la société Doux soutient que l'expert a méconnu ces principes en retenant que l'absence de certains éléments de comparaison pour la période 1993-2000 rendait impossible l'évaluation d'un préjudice, ajoutant que le fait d'exiger de la victime d'une entente anticoncurrentielle qu'elle soit en mesure de rapporter tous les éléments de comparaison pour une période remontant à plus de vingt ans revient à rendre impossible ou excessivement difficile la réparation du préjudice.
La société Doux considère que la figure 2 du rapport d'expertise montre qu'après le début de l'entente, en 1994, les prix ont connu une hausse brutale faisant valoir qu'avant la participation de Timab à l'entente, ces prix connaissaient une baisse, et qu'à partir du moment où celle-ci a participé à cette entente, la baisse a cessé cédant la place à une hausse. La société Doux en déduit que l'entente a permis, de 1994 à 2000, de maintenir ces prix à un niveau constant alors que l'application des prix de début 1993 lui aurait permis de payer un prix moindre et qu'elle a donc payé un surcoût de 1994 à 2000, constituant son préjudice.
A tout le moins, la société Doux considère qu'elle a subi une perte de chance de négocier des meilleurs prix et que cette possibilité lui aurait offert une chance d'obtenir une baisse des prix comparable à celle qui a eu lieu en 1992-1993, soit une baisse de l'ordre de 15 %. La société appelante allègue que les montants résultant de l'évaluation de cette perte dechance doivent également bénéficier de la revalorisation financière. Elle affirme que ses achats, de septembre 1993 à octobre 2000 s'élevaient à 359 544€ et qu'un pourcentage de 15 % représente la somme de 53 931 €. Ainsi, selon la société appelante, l'application du même coefficient de revalorisation que celui retenu par l'expert pour la période postérieure représente la somme de 13 482 €, ce qui conduit à un total de 67 413 euros.
Les sociétés CFPR et Timab rétorquent qu'il n'y a pas eu de surfacturation entre 1993 et 2000 et que cela est corroboré par le rapport d'expertise, dans lequel aucune des méthodes utilisées ne permet de conclure à la probabilité d'un effet.
En premier lieu, elles soutiennent que la société Doux ne peut trouver aucun fondement dans le droit de l'Union européenne pour justifier ses prétentions, faisant valoir que les dispositions de la Directive 2014/104/UE ainsi que d'autres textes de l'Union européenne sont inapplicables au cas d'espèce puisque l'action a été introduite le 17 décembre 2014, c'est-à-dire avant l'entrée en vigueur de la Directive (i.e. le 26 décembre 2014). Elles ajoutent que la Directive ne prévoit pas que les ententes produisent un effet durant la totalité de leur durée, mais qu’« il est présumé que les infractions commises dans le cadre d'une entente causent un préjudice », présomption simple. Elles s'appuient sur les conclusions du rapport d'expertise, confirmant le constat de cette cour selon lequel « les factures produites par la société Doux, qui montrent une stabilisation des prix durant l'entente, n'apportent à l'évidence pas la preuve des prétendues surfacturations ».
En second lieu, les sociétés intimées font valoir que la société Doux ne peut trouver dans les faits aucun fondement à ses allégations, et que celle selon laquelle « le bon sens et l'évidence » voudrait que l'entente a nécessairement produit un effet n'a aucune portée, et ce d'autant plus quand le groupe Doux qui a été reconnu coupable d'une entente sur les prix entre concurrents entre 2000 et 2007, devrait savoir qu'une entente ne produit pas nécessairement des effets. Les sociétés intimées affirment que les éléments du dossier démontrent que les prix de vente de DCP de Timab auprès de Doux étaient inférieurs aux prix des autres fournisseurs, que le prix de l'acide phosphorique a connu une augmentation constante de 1992 à 2000 et que la marge brute de Timab auprès de Doux était ainsi beaucoup plus forte en 1992 (avant l'entente) qu'après septembre 1993, de sorte qu'aucun préjudice économique subi par Doux pendant cette période ne peut être retenu.
En troisième lieu, les sociétés intimées soutiennent que la société Doux ne justifie pas juridiquement sa demande et que la perte de chance alléguée de bénéficier d'un prix inférieur de 15 % n'est aucunement étayée, de même que le chiffre de 15 %. Elles soutiennent à cet égard que la société ne fournit pas de méthode de calcul alternative à celle de l'expert qu'elle critique. De surcroît, les sociétés intimées retiennent que la société Doux demande la reconnaissance d'un surprix de 15 % concernant une période pour laquelle le rapport d'expertise conclut à l'absence d'effet, mais de « seulement » 7,7 % pour une période où le rapport d'expertise conclut à l'existence d'un effet, ce qui leur paraît incohérent. Enfin, les sociétés intimées affirment que, sur le terrain de la perte de chance, la société Doux doit établir quelles étaient les probabilités que, sans l'entente, Timab la fasse effectivement bénéficier d'un prix inférieur de 15 %, et qu'elle applique ces probabilités au montant dont elle demande réparation et non pas former une demande correspondant à la totalité de ce prétendu surprix.
Sur ce, la Cour retient en premier lieu que la Directive 2014/104/UE invoquée par Doux entrée en vigueur le 26 décembre 2014, transposée en droit interne par l'ordonnance n° 2017-303 du 9 mars 2017, n'est pas applicable à une entente qui a eu lieu de septembre 1993 à février 2004, comme en l'espèce.
Par conséquent, Doux ne peut se prévaloir de la présomption posée par l'article 17 de la Directive 2014/104/UE et l'article L. 481-7 le transposant, en vertu desquels il est présumé jusqu'à preuve du contraire qu'une entente entre concurrents cause un préjudice.
En revanche, Doux invoque à bon droit, le principe d'effectivité et de primauté du droit européen. Ainsi, en vertu de l'arrêt Courage (CJCE 20 septembre 2002 aff C-453/99), toute victime d'une pratique anticoncurrentielle doit pouvoir agir devant les juridictions nationales pour demander réparation de son préjudice. Egalement, en vertu de l'arrêt Manfredi (CJUE 13 juillet 2006, aff C-295/04) et le principe d'équivalence, la victime doit pouvoir demander réparation non seulement du dommage réel mais aussi du manque-à-gagner, sans pouvoir s'enrichir.
Il appartient donc à Doux de démontrer l'existence d'un préjudice causé par cette entente au cours de la période litigieuse.
En second lieu, s'agissant de l'absence d'effet de l'entente de septembre 1993 à octobre 2000, la Cour observe que le rapport d'expertise et les pièces produites ne mettent pas en évidence des effets de l'entente, ce qui ne signifie pas qu'il n'y en a pas eu.
Le scenario contrefactuel retenu par l'expert qui consiste à comparer les prix facturés par Timab/CFPR pendant l'entente puis après la cessation de celle-ci, pour déterminer le niveau de prix qui aurait prévalu en l'absence d'entente sur le même marché, non utilement critiqué et aucune autre méthode n'étant proposée, doit être approuvé.
Les prix pendant l'entente et après l'entente facturés à Doux par Timab/CFPR que l'expert a calculés, font apparaître un prix moyen respectivement de 239 € par tonne et de 336 € par tonne, soit un écart de 97 euros par tonne. Mais, ainsi que l'indique l'expert, cette comparaison n'est pas pertinente dans la mesure où elle ne tient pas compte des facteurs exogènes à l'entente qui ont pu avoir un impact sur le niveau des prix, au premier lieu desquels le niveau des coûts des principaux intrants utilisés par Timab/CFPR pour produire les PAA, et principalement l'acide phosphorique et qu'il convient également de tenir compte de l'évolution des coûts de production de Timab (coûts énergétiques, de personnel, et divers).
Pour évaluer les effets de l'entente en excluant l'impact des facteurs exogènes tels que les variations des prix des principaux intrants, l'expert recourt à une comparaison économétrique dans le temps afin de déterminer de manière statistique l'impact de chaque variable sur le prix et d'identifier l'éventuel surcoût qui serait spécifiquement attribuable à l'entente. Au cours de la première période jusqu'à la fin de l'année 2000, l'expert observe une relative stabilité des prix des PAA et relève qu'aucun effet spécifique à l'entente n'est mis en évidence avant novembre 2000.
Force est de constater que les appelantes ne démontrent pas d'effet spécifique imputable à l'entente ainsi qu'il leur incombe, la seule augmentation des prix de vente étant insuffisante à cet égard.
En outre, il ne peut être retenu que la charge de la preuve et le niveau de la preuve pour la quantification du préjudice de Doux ont rendu l'exercice du droit à des dommages et intérêts pratiquement impossible ou excessivement difficile. A cet égard, l'indisponibilité de certaines données relative pour les premières années de l'entente, à savoir l'évolution des prix de la chaux et du carbonate de calcium est sans incidence dès lors que l'expert indique que ce coût n'a pas d'impact visible sur les prix des PAA.
Dès lors, la demande d'indemnisation de ce chef est rejetée.
En troisième lieu, sur la perte de chance de négocier des meilleurs prix, la Cour retient que les appelantes n'établissent pas ainsi qu'il leur incombe qu'une fois répercuté le coût des intrants utilisés pour produire les PAA, et principalement l'acide phosphorique, Timab aurait eu la possibilité de consentir une remise au cours de la période 1993-2000, en l'absence d'entente. La seule circonstance que Doux ait obtenu une baisse de prix en 1992-1993 est à cet égard insuffisante en l'absence de justification tenant à la structure du prix et à l'évolution du marché permettant de considérer que sans l'entente, le fournisseur aurait eu la possibilité de vendre moins cher. Il n'est ainsi pas démontré la disparition certaine d'une éventualité favorable ou, à tout le moins, d'une faible chance de succès, les intimées se bornant à faire état d'une espérance purement éventuelle.
Ainsi, au cours de cette période, aucun préjudice n'est établi et la demande de condamnation des sociétés Timab et CFPR à hauteur de la somme de 67 413 euros est rejetée.
S'agissant de la période 2000-2003
La société Doux affirme que l'entente a provoqué une hausse artificielle des prix et s'appuie sur la décision de la Commission qui a retenu que l'entente sur les phosphates avait notamment eu pour objet de coordonner à la hausse les prix de vente des produits en cause et avait donc eu des effets directs sur le marché des PAA et que les sociétés Timab et CFPR ont pris une part active à cette pratique, « au moins » du 16 septembre 1993 au 10 février 2004.
En outre, la société Doux fait valoir que les pièces obtenues à la suite de l'incident de communication de pièces et de l'ordonnance du 5 juin 2018 du conseiller de la mise en état qui a fait droit à sa demande, confirment l'existence d'une hausse des prix, ajoutant que ces pièces ont été citées par la Commission dans sa décision, qui faisait référence à quatre notes de bas de page (une par année) contenant une « description des preuves » et que ces pièces consistent en des discussions relatives aux augmentations de prix menées en 1999, 2000, 2001 et 2003, témoignant d'une hausse des prix chaque année d'environ 10 % et d'échanges d'informations entre les membres de l'entente sur les prix.
Les appelantes soutiennent ainsi s'être vu imposer par Timab une hausse de plus de 10 % sur une seule année, en 2001.
Les intimées ne contestent pas le calcul du niveau de marge brut et le constat selon lequel celui-ci a été plus élevé durant la deuxième période mais contestent les conclusions de l'expert en ce qu'il aurait indiqué que :
L’entente aurait nécessairement eu un effet s'agissant des prix de vente des PAA de Timab à Doux,
s'il n'est pas possible d'établir un tel effet, ce serait parce que l'appréciation sur l'ensemble des 10 années et demie de participation de Timab à l'entente serait inappropriée,
s'il est possible d'écarter les résultats démontrant l'absence d'effet de l'entente, ce serait parce que celle-ci a nécessairement eu un effet durant ne serait-ce qu'une partie de ces 10 années et demie,
dès lors qu'un niveau de marge brut plus important est constaté à un moment donné de l'entente, celle-ci serait seule responsable de cette augmentation,
l'augmentation de 15 % de la demande de PAA en Europe durant la crise de la vache folle n'aurait eu aucun effet sur leur prix de vente,
le fait qu'un choc similaire à la crise de vache folle ait également conduit à une hausse des prix en 2013-2014 ne permettrait pas de remettre en cause la thèse de l'indifférence de l'évolution de la demande sur le prix des PAA,
la vraisemblance d'une impossible répercussion d'un surprix suffirait à exclure toute répercussion, sans qu'il soit besoin d'analyser les éléments comptables de Doux.
Les sociétés intimées estiment qu'il revient à la société Doux de prouver l'étendue du préjudice qu'elle aurait subi, ce qu'elle ne fait pas.
Elles font valoir que sur la période 2000 à 2003, l'expert a refusé de tenir compte du choc de demande, sans justification, alors qu'il a lui-même rappelé que de nombreux facteurs exogènes à l'entente peuvent avoir influencé le prix durant celle-ci et qu'il a, de ce fait, écarté la variable du rapport entre l'offre et la demande permettant de déterminer le prix. Ainsi, selon elles, l'expert a, à tort retenu un effet majorant des effets de l'entente, alors que le cabinet Analysis Group, a démontré que l'entente n'a pas eu d'effet sur les prix de vente de Timab à Doux. De plus, s'appuyant sur la décision de la Commission ayant sanctionné l'entente, elles rappellent que la Commission a insisté sur la continuité des pratiques pendant toute la durée de l'entente : de ce fait, entériner les conclusions du rapport d'expertise qui reposent sur une distinction de trois périodes reviendrait à méconnaître les termes de la décision. À ce titre, les sociétés intimées soutiennent que ne peut être consacrée l'existence d'une période particulière durant la crise de la vache folle qui serait caractérisée par des effets soudains et significatifs de l'entente. Elles estiment que doivent être reprises les conclusions initiales de l'expert, selon lesquelles l'entente n'a eu aucun effet, s'agissant des prix de vente de Timab à Doux sur la période 1993-2004, avant qu'il ne soit procédé à un découpage artificiel en trois périodes injustifiable et injustifié.
Sur ce, l'expert retient un effet significatif de l'entente sur les prix des PAA entre novembre 2000 et janvier 2003, conduisant à un surcoût de 7,7 % en ne retenant que l'impact de l'entente, sans l'effet de choc de demande lié à la crise de la vache folle.
L'expert prend en compte la crise de la vache folle dont il observe que la période novembre 2000 - janvier 2003 débute de façon cocommittante avec celle-ci. Il écarte cependant le « choc de demande en 2001 et 2002 lié à la crise de la vache folle » comme unique cause de la hausse des prix facturés par Timab à Doux sur cette période.
Cette affirmation est justifiée par l'analyse économétrique à laquelle a procédé l'expert dont il résulte que le choc de demande causé par la crise de la vache folle n'explique que très partiellement la hausse de prix mise en évidence. L'expert ajoute qu'au cours de cette période, Timab/CFPR disposait encore de capacités de production disponibles et que son taux d'utilisation des capacités n'était pas plus élevé au cours de cette période que celui observé en 2004 et 2005.
Ainsi, les intimées ne peuvent être suivies lorsqu'elles soutiennent que l'expert a refusé de tenir compte du choc de demande, sans justification.
A cet égard, l'expert, prenant en compte la baisse de la capacité disponible que reflète le choc de la demande causé par la crise de la vache folle, a démontré que le surprix évalué passait 8,8 % à 7,7 %.
De même, il ne peut être dit que la distinction de trois périodes retenues par l'expert reviendrait à méconnaître les termes de la décision de la Commission alors que l'expert a mis en évidence que ces trois périodes reflètent des situations différentes du marché des PAA et que la continuité des pratiques pendant toute la durée de l'entente ne conduit pour autant à rechercher l'existence d'un effet sans pouvoir distinguer selon des périodes distinctes.
Retenant qu'entre novembre 2000 et janvier 2003, Doux a acheté des PAA à Timab/CFPR pour un montant de 1 069 943 euros, l'expert applique le montant du surcoût dû à l'entente de 7,7 % et obtient un surcoût de 81 937 euros.
Puis, recherchant dans quelle mesure Doux aurait répercuté à ses clients tout ou partie du surcoût occasionné par l'entente commise par Timab/CFPR de novembre 2000 à janvier 2003, il conclut par la négative.
Ces éléments n'étant pas utilement contestés, il convient de retenir l'existence d'un surcoût de 7,7 % au cours de cette période, soit la somme de 81 937 euros. L'expert a actualisé ce montant au mois d'octobre 2019, par application du taux d'intérêt légal, faute d'éléments communiqués par Doux sur ses emprunts et dettes et sur l'usage que celle-ci aurait fait des sommes dont elle a été privée.
Il retient ainsi « un préjudice de trésorerie » d'un montant de 27 239 euros. Il conclut que le préjudice subi par Doux s'établit à 109 176 euros. Il convient donc de condamner solidairement les sociétés Timab et CFPR à payer aux liquidateurs ès qualités de la société Doux Aliments la somme de 109 176 euros sollicitée au titre de la période novembre 2000 à janvier 2003,
Sur le préjudice moral
Timab/CFPR soutiennent en premier lieu que la demande en réparation du préjudice moral de la société Doux est irrecevable sur le fondement des dispositions de l'article 910-4 du code de procédure civile, celle-ci ayant formulé cette demande pour la première fois devant dans ses conclusions du 28 janvier 2020 alors que selon l'article 55-1, le décret du 11 décembre 2019 entré en vigueur le 1er janvier 2020, est applicable aux instances en cours.
Mais ainsi que le font valoir les appelantes, les dispositions de l'article 910-4 du code de procédure civile aux termes desquelles : « A peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures » ont été introduites par le décret n° 2017-891 du 6 mai 2017.
Or, les dispositions de l'article 22 de ce décret créant l'article 910-4 s'appliquent aux appels formés à compter du 1er septembre 2017, sous réserve des instances consécutives à un renvoi après cassation, en vertu de l'article 53-II bis de ce décret.
En conséquence, Timab/CFPR ne sont pas fondées à se prévaloir de l'irrecevabilité de la demande formée au titre du préjudice moral sur le fondement des dispositions de l'article 910-4 du code de procédure civile à un appel formé avant le 1er septembre 2017.
Timab/CFPR soutiennent en second lieu que la demande en réparation du préjudice moral de la société Doux, en ce qu'elle constitue une demande autonome de réparation d'un préjudice totalement distinct, est irrecevable sur le fondement des dispositions de l'article 566 du code de procédure civile aux termes duquel « les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire » issu de l'article 11 du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017.
Mais les dispositions de l'article 11 du décret précité s'appliquent aux appels formés à compter du 1er septembre 2017, sous réserve des instances consécutives à un renvoi après cassation. En conséquence, l'article 566 du code de procédure civile modifié par le décret du 6 mai 2017 n'est pas applicable au présent appel formé avant le 1er septembre 2017.
Par ailleurs, l'article 566 dans sa version antérieure au 1er septembre 2017 applicable, dispose :
Les parties peuvent aussi expliciter les prétentions qui étaient virtuellement comprises dans les demandes et défenses soumises au premier juge et ajouter à celles-ci toutes les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément.
La demande au titre du préjudice moral, qui est le complément des autres demandes de dommages-intérêts est recevable.
La société DOUX soutient qu'un préjudice moral est causé par le fait de négocier pendant des années avec des fournisseurs qui font semblant de négocier puisqu'ils ont convenu des hausses tarifaires avec leurs concurrents et que cette violation de la bonne foi lui cause un préjudice certain.
Les sociétés CFPR et Timab soutiennent que la société Doux confond faute et préjudice en retenant que le fait de commettre une faute pendant près d'une décennie est constitutif d'un préjudice moral « évalué à 30 000 euros » et qu'elle ne justifie pas la nature et l'étendue de ce préjudice moral.
Sur ce, la Cour retient que l'entente dont se sont rendues coupables les sociétés Timab et CFPR au moins du 16 septembre 1993 au 10 février 2004, exclusive de la bonne foi contractuelle, a causé un préjudice moral à la société Doux qui sera justement réparé par l'allocation d'une somme de 30 000 euros à titre de dommages-intérêts.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
Les sociétés Timab et CFPR, parties perdantes, sont condamnées solidairement aux dépens de première instance et d'appel, comprenant le coût de la mesure d'expertise ordonnée, avec droit de recouvrement direct dans les termes de l'article 699 du code de procédure civile.
Elles sont déboutées de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamnées sur ce fondement à payer solidairement la somme globale de 40 000 euros à la SAS David-Goic représentée par Maître Isabelle Goic en qualité de mandataire liquidateur de la société Doux Aliments et la SELARL EP & Associés représentée par Maître Jordy Pagani, en qualité de mandataire liquidateur de la société Doux Aliments.
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Vu son arrêt du 6 février 2019, Condamne solidairement les sociétés Timab et CFPR, à payer à la SAS David-Goic représentée par Maître Isabelle Goic en qualité de mandataire liquidateur de la société Doux Aliments et la SELARL EP & Associés représentée par Maître Jordy Pagani, en qualité de mandataire liquidateur de la société Doux Aliments :
la somme de 109 176 euros en réparation du préjudice subi par la société Doux Aliments au cours de la période de novembre 2000 à janvier 2003,
la somme de 30 000 euros en réparation du préjudice moral subi par la société Doux Aliments, demande recevable et fondée,
Déboute la SAS David-Goic représentée par Maître Isabelle Goic en qualité de mandataire- liquidateur de la société Doux Aliments et la SELARL EP & Associés représentée par Maître Jordy Pagani, en qualité de mandataire liquidateur de la société Doux Aliments de leur demande au titre de la surfacturation de 1993 à 2000,
Déboute les sociétés Timab et CFPR de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne solidairement les sociétés Timab et CFPR aux dépens de première instance et d'appel avec droit de recouvrement direct dans les termes de l'article 699 du code de procédure civile ainsi qu'à payer solidairement la somme globale de 40 000 euros à la SAS David-Goic représentée par Maître Isabelle Goic en qualité de mandataire liquidateur de la société Doux Aliments et la SELARL EP & Associés représentée par Maître Jordy Pagani, en qualité de mandataire liquidateur de la société Doux Aliments sur le fondement de l'article l'article 700 du code de procédure civile du code de procédure civile,
Rejette toute autre demande.