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Décisions

CA Paris, 16e ch., A, 28 juin 2006, n° 04/16850

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

CBS Export (SA)

Défendeur :

Union de gestion immobilière de participation (SAS), Union de gestion et d'investissement (SAS), Union de gestion et d'investissement fonciers (SAS), Immorente (Sté), Efimmo 1 (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Duclaud

Conseillers :

Mme Imbaud-Content, M. Zavaro

Avocats :

SCP Monin et d'Auriac de Bron, ME Pereira-Ossouf, SCP Duboscq et Pellerin, Me Raynaud de Lage

TGI Créteil, du 8 juin 2004

8 juin 2004

Contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile

Signé par Madame IMBAUD-CONTENT, Conseiller, par suite d'un empêchement du Président, et par Madame BASTIN, Greffier, à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

La Cour statue sur l'appel interjeté par la société CBS EXPORT à l'encontre du jugement rendu le 8/6/2004 par le tribunal de grande instance de CRÉTEIL qui a :

- donné acte à la société UGIF de son intervention volontaire à l'instance,

- mis hors de cause la société UGIPAR,

- débouté la société CBS EXPORT de sa demande d'application du statut des baux commerciaux,

- déclaré nul le congé délivré par UGIPAR et valable mais à effet du 14/8/2004 celui délivré le 7/11/2003 par la société UGIF à la société CBS EXPORT, date de l'échéance annuelle prévue au bail,

- ordonné l'expulsion des lieux de la société CBS EXPORT avec, en tant que de besoin, séquestration du mobilier trouvé sur place dans tel garde- meubles au choix du bailleur et aux frais, risques et périls de la société CBS EXPORT,

- fixé l'indemnité d'occupation due à compter du 15/8/2004 et jusqu'à la libération des lieux à un montant égal au loyer, charges et taxes en sus,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- condamné la société CBS EXPORT aux dépens et au paiement d'une indemnité de 1200 ' au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Les faits et la procédure peuvent être résumés ainsi qu'il suit :

La société CBS EXPORT est locataire, selon bail commercial du 15/1/1986 à elle consenti par la société civile RASCAU et depuis renouvelé, de locaux sis à [...] et [...] où elle exerce l'activité de prêt à porter ;

Par acte du 26/7/1988, la société CBS EXPORT a pris à bail une aire de stationnement dans un immeuble voisin appartenant à UGIPAR et situés [...] ;

Ce dernier bail stipulé porté sur 16 emplacements de parking a été conclu pour une durée de trois ans à compter du 15/8/1988 renouvelable par période annuelle par tacite reconduction sauf résiliation par l'une ou l'autre des parties par lettre recommandée avec accusé de réception adressée trois mois avant la date d'échéance ;

Il y était prévu un certain nombre de travaux dont la prise en charge incombait pour partie au constructeur de l'immeuble, la société SAMACIM et pour partie au preneur, le constructeur ayant ainsi la charge de la réalisation de murs parpaings et d'une porte coupe-

feu, l'installation d'une gaine de ventilation du parking et du mur et des portes du sas et le preneur ayant, pour sa part, la charge, de l'édification d'un mur parpaing au droit du joint de dilatation central, l'installation d'une porte coupe-feu et son asservissement à la détection d'incendie, l'installation d'une porte levante et de l'électricité, ces travaux devant rester à son départ et sans indemnité la propriété du bailleur ;

La société UGIPAR a vendu l'immeuble à la société UGIF en Novembre 1989 ;

Par acte extrajudiciaire du 21/11/2002 délivré par la société UGIPAR, la société CBS EXPORT a reçu congé des lieux pour le 14/8/2003 ;

Par acte extrajudiciaire du 10/7/2003 prétendant bénéficier de la propriété commerciale au motif que les locaux litigieux utilisés à usage de stockage seraient des locaux accessoires indispensables à l'exploitation de son fonds de commerce, la société CBS EXPORT a protesté à l'encontre de ce congé puis a, en date du 20/8/2003,fait assigner la société UGIPAR devant le tribunal de grande instance de CRÉTEIL aux fins de voir, pour ce motif, dire et juger que le congé en cause était nul ;

Par acte extrajudiciaire du 7/11/2003, la société UGIF, propriétaire comme susdit du bien depuis Novembre 1989, a signifié congé à la société CBS EXPORT pour le 31/3/2004 et est intervenue volontairement à l'instance ;

La société UGIF reconnaissant que le congé du 21/11/2002 ne pouvait avoir effet comme ayant été délivré par la société UGIPAR qui n'avait plus qualité, a contesté l'application du statut des baux commerciaux au bail dont s'agit et formant, demande reconventionnelle, a demandé à voir valider le congé par elle délivré le 7/11/2003, voir, partant, ordonner l'expulsion des lieux de la société CBS EXPORT et voir celle-ci condamnée au paiement d'une indemnité d'occupation ;

C'est dans ces conditions que le jugement déféré a été rendu ;

Au cours de l'instance d'appel, l'immeuble en cause a été vendu par la société UGIF aux sociétés IMMORENTE et EFIMMO 1 lesquelles sont intervenues volontairement à l'instance ;

La société CBS EXPORT, appelante, demande à la Cour :

- de constater que les sociétés IMMORENTE et EFIMMO 1 ne produisaient pas leur titre de propriété et ne justifiaient pas bénéficier d'une clause de subrogation dans les droits de la société UGIF,

- de dire la société UGIF, la société UGIPAR et les sociétés IMMORENTE et EFIMMO 1 irrecevables et subsidiairement mal fondées en leurs demandes,

- d'infirmer le jugement déféré et de dire que le bail litigieux est un bail commercial soumis au statut des baux commerciaux, dire en conséquence, que le congé du 21/11/2002 est nul et de nul effet,

- en tant que de besoin, d'ordonner expertise pour vérifier les conditions d'exploitation du fonds de commerce,

- de condamner la société UGIPAR au paiement d'une somme de 3000 ' au titre de l'article 700 du NCPC et aux entiers dépens de première instance et d'appel ;

La société UGIF, la société UGIPAR et les sociétés IMMORENTE et EFIMMO 1, intimées et intervenantes, demandent à la Cour :

- de donner acte aux sociétés IMMORENTE et EFIMMO 1 de leur substitution à la société UGIF aux droits de laquelle elles sont subrogées dans la présente procédure,

- de dire l'appel mal fondé,

- de prononcer la mise hors de cause de la société UGIPAR et de la société UGIF,

- de dire recevable l'intervention volontaire des sociétés IMMORENTE et EFIMMO 1,

- de débouter la société CBS EXPORT de ses demandes, et, confirmant le jugement déféré, de valider le congé délivré le 7/11/2003 pour le 15/8/2004, de dire la société CBS EXPORT occupante sans droit ni titre des lieux depuis cette date et d'ordonner son expulsion avec ,en tant que de besoin, séquestration du mobilier trouvé sur place dans tel garde- meubles au choix de et aux frais, risques et périls de la société CBS EXPORT, de condamner celle-ci au paiement d'une indemnité d'occupation de 4000 ' par mois,

- de la condamner au paiement d'une somme de 3000 ' au titre de l'article 700 du NCPC et aux entiers dépens ;

CECI ETANT EXPOSÉ,

LA COUR,

Considérant que la société CBS EXPORT , pour conclure à l'irrecevabilité des demandes des intimées, fait valoir que les sociétés IMMORENTE et EFIMMO 1 ne justifient pas être subrogées aux droits et actions de la société UGIF et que cette dernière et la société UGIPAR n'ont plus d'intérêt à agir puisqu'elles ne formulent aucunes demandes et sollicitent leur mise hors de cause ;

Mais considérant que les sociétés IMMORENTE et EFIMMO 1 ont régulièrement communiqué l'acte de vente du 30/9/2005 par lequel la société UGIF leur a vendu l'immeuble et que cet acte subroge expressément ces dernières dans toutes les procédures existantes dont elles déclaraient faire leur affaire personnelle ;

Considérant, par ailleurs, que la société UGIPAR et la société UGIF conservent intérêt à agir dés lors qu'elles sont l'auteur des deux congés litigieux et que la qualité à agir des sociétés IMMORENTE et EFIMMO 1 est contestée par l'appelante ;

Considérant, ceci étant et vu la clause de subrogation susvisée contenue à l'acte de vente du 30/9/2005 et le caractère non fondé de la contestation de l'appelante sur la qualité à agir des sociétés IMMORENTE et EFIMMO 1, que les sociétés UGIPAR et UGIF doivent être mises hors de cause ;

AU FOND,

Considérant que la société CBS EXPORT reprenant l'argumentation par elle développée en première instance, expose, au soutien de son appel, que l'exploitation de son fonds de commerce de prêt à porter est organisée dans les deux locaux voisins, ceux, objet de son bail commercial et ceux, objet du bail litigieux et portant sur l'aire de stationnement qui lui sert d'aire de stockage et dont la privation compromettrait l'exploitation de son fonds et que le bailleur connaissait cette utilisation jointe qui se déduisait, selon elle, de la proximité des locaux, des travaux convenus et réalisés dés avant la signature du bail et ayant permis d'aménager l'aire en la cloisonnant en vue d'un usage de stockage, des courriers concomitants à la signature du bail dont la lettre du 11/8/1988 adressée au bailleur et où elle faisait état de l'usage envisagé de stockage, des plans annexés au bail et datés de juillet 1988 faisant apparaître un cloisonnement spécifique du local loué et du fait que l'utilisation à usage de stockage n'ait jamais été contestée, le mandataire du bailleur y faisant allusion dans un courrier où celui-ci visait 'des locaux de stockage', le tout établissant, selon elle, la réunion des conditions requises de l'article L. 145-1 du code de commerce pour qu'elle bénéficie du statut des baux commerciaux ;

Considérant que bien que le bail litigieux stipule que les lieux devaient être utilisés à usage d'aire de stationnement, il se déduit tant de la lettre adressée par la société CBS EXPORT le 11/8/1988 au constructeur avant l'entrée en vigueur du bail où celle-ci s'étonne du changement intervenu dans les travaux par rapport au plan initial en rappelant qu'elle devait utiliser ce local pour du stockage (et qui est significative de la volonté des parties lors de la conclusion du bail dés lors que des travaux étaient expressément mis à charge de ce constructeur dans le bail), que des plans annexés au contrat de bail où, au contraire des autres emplacements de parking, l'aire de stationnement est cloisonnée et de la lettre adressée le 13/11/2002, en cours de bail, par la société SAGGEL, mandataire de la société UGIPAR, alors propriétaire de l'immeuble, et qui demande à la locataire de prendre les dispositions nécessaires pour laisser accès ' à ses locaux de stockage', que la bailleresse connaissait l'usage de stockage envisagé par la locataire et que cet usage avait été convenu entre les parties lors de la conclusion du bail ;

Considérant, eu égard à la proximité des locaux où était exercée l'activité principale de prêt à porter de la société CBS EXPORT, que la bailleresse ne pouvait ignorer que l'usage de stockage susvisé l'était pour les besoins de l'exploitation de l'activité principale ;

Considérant toutefois que la société CBS EXPORT ne produit aucun élément de nature à établir que la privation de l'aire litigieuse serait de nature à compromettre l'exploitation du fonds principal qu'elle avait pu pendant deux ans , avant la conclusion de ce bail, normalement exploiter, son affirmation, en l'absence de tout élément comptable, du caractère indispensable des locaux à l'activité exercée ne pouvant être confortée par le seul constat d' huissier de justice du 10/12/2003 qui se contente de mentionner que les lieux litigieux servent effectivement à usage de stockage ;

Considérant qu'en l'absence de cette démonstration, la société CBS EXPORT ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 145-1 du code de commerce et du bénéfice de la propriété commerciale ;

Considérant, dés lors, que le jugement déféré sera confirmé ;

SUR LA DEMANDE DES PARTIES AU TITRE DE l' ARTICLE 700 DU NOUVEAU CODE DE PROCÉDURE CIVILE,

Considérant que la société CBS EXPORT qui devra supporter la charge des dépens, ne saurait solliciter indemnité au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Considérant, concernant la demande du même chef des sociétés IMMORENTE et EFIMMO qu'il serait inéquitable de laisser à sa charge les frais par elle exposés dans l'instance, une somme de 1200 ' lui étant allouée à cet égard ;

PAR CES MOTIFS,

La Cour statuant publiquement et contradictoirement,

Donne acte aux sociétés IMMORENTE et EFIMMO 1 de leur intervention volontaire à l'instance comme ayant acquis l'immeuble en cause le 30/9/2005,

Dit cette intervention recevable,

Dit la société UGIPAR, la société UGIF et les sociétés IMMORENTE et EFIMMO 1 recevables à agir,

Met hors de cause la société UGIPAR et la société UGIF, celles-ci n'étant plus propriétaires de l'immeuble,

AU FOND,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Condamne la société CBS EXPORT à payer aux sociétés IMMORENTE et EFIMMO 1 la somme de 1200 ' au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Déboute la société CBS EXPORT de sa demande du même chef à l'encontre de la société UGIPAR,

Condamne la société CBS EXPORT aux dépens de première instance et d'appel dont distraction, pour les dépens d'appel, au profit de la SCP DUBOSCQ & PELLERIN.