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Décisions

CA Paris, 16e ch. B, 15 juin 1990, n° 88/4604

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Ruiz

Défendeur :

Meunier (Consorts)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Decheix

Conseillers :

Mme Bergeras, M. de Villers

TGI Auxerre, 1e ch., du 18 janv. 1988

18 janvier 1988

La Cour statue sur l’appel interjeté par M. RUIZ à l’encontre du jugement rendu par la 1ere chambre du tribunal de grande instance d'AUXERRE le 18 janvier 1988 qui a :

-   débouté M. RUIZ de sa demande d'indemnité d'éviction ;

-   validé le congé que lui ont fait délivrer les con­sorts MEUNIER par acte du 25 novembre 1985 ;

-   lui a imparti un délai de trois mois pour vider et restituer les lieux à compter du jour ou le jugement sera devenu définitif ;

-   passé ce délai, prononcé centre lui une astreinte provisoire de 300 F par jour de retard ;

-   dit n'y avoir lieu à indemnité accessoire au titre des frais non compris dans les dépens ;

-   condamne M. RUIZ aux dépens comprenant le cout dudit congé.

La Cour se réfère à la décision qui lui est soumise pour l’exposé des faits de la cause et de la procédure.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES EN APPEL :

M. RUIZ expose à I ‘appui de son appel :

-    qu'il a apporté la preuve que la privation des locaux objet du bail sera de nature à compromettre l’exploitation de son fonds de commerce d'entreprise générale de maçonnerie qu'il assure aussi bien dans les locaux loués avenue du 11 novembre à AVALLON qui constituent l’endroit où les ouvriers prennent leur travail et reçoivent les ordres de l’employeur qu'au siège social et administratif de l’entreprise 34 rue de Lormes également à AVALLON ;

-    que le bail renouvelé aux époux AYRAL du 22 juillet 1975 prévoit "que les preneurs pourront également sans autorisation céder leur droit au bail a quelque personne que ce soit en vue de tous commerces" 5 une telle clause autorisait donc M. RUIZ, cessionnaire du bail,

à changer la destination, sans effectuer une novation et de plus sans intervention expresse du bailleur a la cession, ce que n'exige pas le décret de 1953.

L’utilisation de l’immeuble, dans ces conditions, pendant près de huit années avant tout congé suffit à démontrer l’acceptation tacite des propriétaires qui habitent dans la même ville.

Leur refus de renouveler le bail est injustifié.

M, RUIZ réclame en conséquence une somme de 200.000 F comme indemnité d'éviction ainsi qu'une somme de 10.000 F au titre de L’article 700 du nouveau code de procédure civile.

2°) Assignés en reprise d'instance comme suite au jugement du tribunal de commerce d'AUXERRE en date du 5 décembre 1988 qui a déclaré ouverte à l’égard de M. RUIZ une procédure simplifiée de redressement judiciaire, Me VERPLAETSE, représentant des créanciers ainsi que Mes SAUVAN et GOULLETQUER es-qualités d'administrateurs judiciaires, s'associent aux écritures de M. RUIZ et soulignent que les locaux situes 7 avenue du 11 novembre constituent le lieu principal de l’activité de M. RUIZ et ajoutent que ces locaux sent indispensables à l’exploitation du fonds de commerce et qu'ils ont été loues au vu et au su des bailleurs qui adressent souvent leurs réclamations à cette adresse.

3°) Les consorts MEUNIER demandent la confirmation de la décision déférée ainsi qu'une somme de 5.000 F pour frais irrépétibles.

Considérant qu'il ressort des pièces versées aux débats :

1°) que M. RUIZ n'a pas fait la preuve qui lui incombe du caractère indispensable à l’exercice de son commerce dont le siège social et administratif est fixe 34 rue des Lormes a AVALLON des locaux loues dans la mime ville, avenue du 11 novembre ni que la perte de ces lieux serait de nature à compromettre l’exploitation de son fonds de commerce ; qu'en effet ces locaux ne servant qu'à entreposer du matériel, qu'aucune activité administrative ou commerciale n'y est poursuivie, non plus que la réception de clients ;

2°) que M. RUIZ ne démontre pas également, comme l’exige l’article ler-10 du décret de 1953 en cas de pluralité de propriétaires, que les locaux loués prétendument accessoires aient été loues au vu et au su des bailleurs en vue de l’utilisation jointe ; qu'il convient de remarquer en l’espèce d'une part que les droits et obligations du bail cédé par les époux AYRAL a M. RUIZ précisaient l’affectation com­merciale des lieux loues à titre principal en vue du commerce de bois et charbons et assimiles, ce qui ne permettait pas une affectation commerciale accessoire des lieux que leur a donnée M. RUIZ de par sa seule volonté ; qu'en outre la possibilité accordée aux preneurs par le bail initial de céder leur droit au bail à toute personne en vue de tout commerce n'emportait pas non plus la faculté de modifier cette destina­tion d'origine ; qu'au contraire, pour satisfaire aux exigences de la loi il eut fallu soit que les consorts MEUNIER interviennent a l’acte de cession lui-même soit qu'ait été recueilli leur consentement exprès et contemporain de la cession, preuve qui ne résulte pas du fait de leur résidence dans la même ville ou de leur absence de protestations ;

Qu’il découle de ce qui précède que les motifs ainsi que les dispositions du jugement déféré relatives à la validation du congé avec refus de renouvellement délivré le 25 novembre 1985 ainsi qu’à l’expulsion de M. RUIZ méritent d'être approuvés sauf en ce qui concerne le paiement d'une astreinte provisoire qui ne s'impose pas en l’espèce ;

Considérant qu'il n'est pas inéquitable de laisser aux consorts MEUNIER les frais irrépétibles qu'ils ont dû engager en appel ;

PAR CES MOTIFS

Joint les instances suivies sous les numéros 88/4604 et 89/12195 du répertoire général ;

Confirme le jugement entrepris ;

L'émendant et y ajoutant :

Dit que l’expulsion de M. RUIZ interviendra après un délai de trois mois à compter de la signifi­cation du présent arrêt, ce sans astreinte provisoire par jour de retard ;

Donne acte à Mes SAUVAN et GOULLETQUER ainsi qu'à Me VERPLAESTE de leurs interventions en qualités respectives d'administrateurs judiciaire et de représentant des créanciers ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Dit que les dépens de première instance et d'appel seront liquides conformément aux dispositions concernant la procédure de règlement judiciaire et admet les avoués de la cause, dans la limite de leurs droits, au bénéfice de l’article 699 du nouveau code de procédure civile.