Cass. com., 22 mai 2007, n° 04-20.801
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 5 octobre 2004), que la société Regiamer (la société), dont l'objet social était la promotion immobilière, a été mise en redressement judiciaire par jugement du 7 novembre 1996, M. X... étant désigné administrateur judiciaire avec une mission d'assistance ; que par un acte daté du 11 février 1997, M. Y... a signé un contrat de réservation d'appartements avec la société, représentée par son gérant, M. Z..., la société donnant le même jour à M. Y... quittance du paiement d'une somme de 1 601 334 francs, représentant l'intégralité du prix convenu "à l'exception d'une somme de 26 000 000 de lires qui sera versée au moment de l'acte authentique" ; que par jugement du 27 mars 1997, M. X... s'est vu confier la mission d'administrer seul la société, celle-ci étant mise en liquidation judiciaire par jugement du 20 mai 1999 et M. A... étant nommé liquidateur ; que par arrêt du 17 mai 2001, M. Z... a été condamné, sur le fondement des dispositions du code de la construction et de l'habitation, pour avoir exigé ou accepté de M. Y... un versement avant que la créance ne soit exigible et pour avoir détourné la somme reçue ; qu'au titre des dispositions civiles, cette décision a condamné M. Z... à payer à M. Y... la somme de 1 811 000 francs tandis que la constitution de partie civile du liquidateur a été déclarée irrecevable ; que M. Y..., qui n'a pas pu acquérir les appartements réservés, avait par ailleurs assigné la société en paiement de la somme versée à titre d'acompte
sur le fondement de l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985 ; que la cour d'appel a condamné le liquidateur, ès qualités, à payer à M. Y... la somme principale de 276 542, 52 euros ainsi que celle de 1 200 euros au titre des frais non recouvrables ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le liquidateur fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, en violation du principe de l'autorité de la chose jugée au pénal sur l'action portée devant la juridiction civile ;
Mais attendu que ce moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Et sur les deuxième et troisième moyens, réunis :
Attendu que le liquidateur fait le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen :
1 / qu'aux termes de l'article L. 621-32 du code de commerce, les créances nées après le jugement d'ouverture ne sont payées par priorité que si elles sont nées régulièrement ; qu'en l'espèce, il ressortait des constatations de la juridiction pénale que la créance de M. Y... était née d'un paiement encaissé par M. Z... hors de la comptabilité de la société ; que dès lors, la créance de M. Y... n'était pas née régulièrement et qu'il ne pouvait pas se prévaloir des dispositions de l'article L. 621-32 du code de commerce ; qu'en condamnant néanmoins le liquidateur à payer la créance de M. Y... sur le fondement de l'article L. 621-32 du code de commerce, alors même que cette créance était née irrégulièrement, la cour d'appel a violé ce texte par fausse application ;
2 / que les actes sous seing privé n'ont de date contre les tiers que du jour où ils ont été enregistrés, du jour de la mort de celui ou de l'un de ceux qui les ont souscrits, ou du jour où leur substance est constatée dans les actes dressés par les officiers publics, tels que procès-verbaux de scellés ou d'inventaire ; qu'en l'espèce, il faisait valoir que le contrat préliminaire prétendument signé le 11 février 1007, n'ayant pas été enregistré, n'avait pas de date certaine contre lui ; que pour écarter ce moyen, la cour d'appel a dit qu'il appartenait au liquidateur de rapporter la preuve de la fausseté de la date apparente portée sur le contrat, ce qu'il ne faisait pas ; que cette motivation était particulièrement inopérante à faire échec aux dispositions de l'article 1328 du code civile, dont il demandait l'application ; que dès lors, la cour d'appel a violé ce texte par refus d'application ;
Mais attendu, d'une part, qu'après avoir relevé que la signature du contrat de réservation dans un immeuble, dont la société était promoteur, intervenue avant le jugement du 27 mars 1997 ayant privé M. Z... de ses pouvoirs de gestion et d'administration, constituait un acte de gestion courante que le dirigeant social pouvait valablement accomplir seul, la cour d'appel, qui n'était saisie que de la régularité du contrat et qui a retenu que la preuve du versement par M. Y... des sommes litigieuses était établie, a écarté à bon droit le moyen tiré de l'inopposabilité du contrat à la procédure collective ;
Attendu, d'autre part, que tous les actes sous seing privé, faits par le débiteur mis en redressement ou liquidation judiciaires, font foi de leur date par eux-mêmes ; que l'arrêt retient qu'il appartient au liquidateur de rapporter la preuve de la fausseté de la date apparente figurant sur le contrat de réservation litigieux, ce qu'il ne fait pas ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.