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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 1 septembre 2021, n° 19/00494

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

ASJ Immobilier

Défendeur :

Foncia Groupe (SAS), Foncia Franchise (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Dallery

Conseillers :

M. Gilles, Mme Depelley

T. com. Nanterre, du 18 déc. 2014

18 décembre 2014

Le Groupe Foncia, fondé en 1972 sous l'enseigne Franco-Suisse Gestion, qui le 31 décembre 2006, comprenait 300 agences et 116 cabinets pour 5 500 collaborateurs, a, à cette période, souhaité créer une structure sous franchise dédiée à l'animation d'un réseau d'agence pour améliorer son maillage territorial pour favoriser sa croissance interne. La société Foncia groupe, qui ne disposait que d'un réseau de succursale a donc le 30 août 2006, créé la société Foncia franchise, filiale à 100 % et tête d'un réseau de franchisé.

Près d'une centaine de franchisés ont intégré ce réseau.

En 1997, M. X a créé la SARL ASJ Immobilier dont il détient 35 % des parts sociales et dont il est gérant. Le 28 juillet 2008, un contrat de franchise a été conclu entre la société ASJ Immobilier et la société Foncia Franchise. Ce contrat permettait au franchisé d'exercer les activités de transaction et de location immobilière sous l'enseigne Foncia, à l'exclusion des activités de gestion locative et de syndic.

La société Foncia Franchise a notifié le 13 juin 2013 le non-renouvellement du contrat de franchise dont l'échéance était prévue au 6 septembre 2014.

Estimant que l'exécution de ce contrat avait été fautive, la société ASJ Immobilier et M. X ont assigné en responsabilité la société Foncia Franchise et la société Foncia groupe, société mère de la précédente exploitant un ensemble d'agences en succursale.

Par acte du 21 mars 2014 la société ASJ Immobilier et M. X ont saisi le tribunal de commerce de Nanterre.

C'est dans ces conditions que par jugement du 18 décembre 2014, le tribunal de commerce de Nanterre a :

- Dit la SARL ASJ Immobilier et M. X recevables en leurs demandes dirigées à l'encontre de la SAS Foncia Franchise.

- Dit que la SAS Foncia Franchise n'a pas commis d'abus dans l'exercice de son droit de non-renouvellement du contrat de franchise de la SARL ASJ Immobilier,

- Déclare la clause de non-réaffiliation dépourvue de validité et sans effet à l'égard de la SARL ASJ Immobilier et M. X,

- Condamné la SAS Foncia Franchise à payer à la SARL ASJ Immobilier la somme forfaitaire de 5.000 euros correspondant au montant du droit d'entrée indûment versé sans réelle contrepartie,

- Condamné la SAS Foncia Franchise à payer à la SARL ASJ Immobilier la somme forfaitaire de 12.000 euros correspondant au montant des redevances indûment versées sans réelle contrepartie,

- Débouté la SARL ASJ Immobilier de sa demande relative à l'atteinte à sa réputation commerciale,

- Condamné la SAS Foncia Franchise à payer à la SARL ASJ Immobilier la somme de 30.000 euros à titre de dommages et intérêts pour son préjudice résultant de son manque à gagner au titre de l'absence de synergie réseau pour la vente,

- Débouté la SARL ASJ Immobilier de sa demande de dommages et intérêts « à raison de son manque à gagner lié à l'absence de synergie réseau pour la vente »,

- Condamné la SAS Foncia Franchise à payer à la SARL ASJ Immobilier la somme de 25.000 euros à titre de dommages et interêts pour son préjudice résultant de son manque à gagner au titre de l'absence de synergie réseau pour location,

- Condamné la SAS Foncia Franchise à payer à la SARL ASJ Immobilier la somme de 40.000 euros à titre de dommages et intérêts pour son préjudice résultant du refus de la SAS Foncia Franchise de lui laisser exercer l'activité de gestion locative,

- Condamné la SAS Foncia Franchise à payer à la SARL ASJ immobilier la somme de 25.000 euros à titre de dommages et intérêts pour son préjudice résultant de l'absence de synergie inter-cabinets dans le domaine de la location directe,

- Débouté la SARL ASJ Immobilier de sa demande relative à la perte de chance de conclure le contrat de franchise avec une autre enseigne,

- Débouté M. X de sa demande relative à l'atteinte à sa réputation professionnelle,

- Condamné la société Foncia Franchise à payer à M. X la somme forfaitaire de 8.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral,

- Débouté la SAS Foncia Franchise de sa demande reconventionnelle visant à voir prononcer la résiliation judiciaire du contrat de franchise et des demandes indemnitaires y afférentes;

- Débouté la SAS Foncia Franchise de sa demande reconventionnelle relative au paiement de la somme de 1.315,60 euros,

- ordonné l'exécution provisoire de la décision relative à la clause de non-réaffiliation, mais dit n'y avoir pas lieu à l'ordonner pour ce qui concerne les autres décisions du présent jugement,

- Condamné la SAS fonça Franchise à payer à la SARL ASJ immobilier la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure Civile, déboutant pour le surplus,

- Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- Mis les dépens à la charge de la SAS Foncia Franchise.

Par un arrêt du 27 janvier 2017, la Cour d'appel de Versailles a :

Infirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Statuant de nouveau et y ajoutant :

Debouté la société à responsabilité limitée ASJ immobilier et M. X de l'ensemble de leurs demandes sauf en ce qui a trait au pragraphe suivant de ce dispositif.

Enjoint à la société par actions simplifiée Foncia Franchise de restituer à la société à responsabilité limitée ASJ immobilier, les données personnelles intégrales entrées dans le logiciel totalimmo au cours de l'exécution du contrat, sous une forme et sur un support qui en permette l'exploitation exhaustive immédiate, dans le mois de la signification de cet arrêt.

Debouté la société par actions simplifiée Foncia Franchise de sa demande reconventionnelle de résiliation judiciaire du contrat de franchise aux torts du franchisé et des demandes indemnitaires y afférentes.

Fait masse des dépens de première instance et d'appel qui seront in solidum supportés à hauteur des 2/3 par la société ASJ immobilier et M. X, d'une part et du 1/3 restant par la société Foncia Franchise, d'autre part avec, pour ceux d'appel, faculté de recouvrement direct en faveur des avocats qui peuvent y prétendre conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Vu l'article 700 du code de procédure civile ;

Dit n'y avoir lieu à condamnation pour frais irrépétibles

Deboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Par un arrêt du 4 septembre 2018 la Cour de cassation a cassé partiellement et annulé cet arrêt, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes indemnitaires formées par la société ASJ Immobilier et M. X contre la société Foncia Franchise au titre de l'abus dans l'exercice du droit de non-renouvellement du contrat de franchise.

La cause et les parties ont été ainsi remises dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les a renvoyés devant la Cour d'appel de Paris ; les sociétés Foncia franchise et Foncia groupe ont été condamnées à payer à la société ASJ Immobilier et à M. X la somme globale de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Vu les dernières conclusions signifiées le 25 mars 2021 par la société Foncia, par lesquelles il est demandé à la Cour de:

Vu le jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 18 décembre 2014,

Vu l'arrêt de la Cour d'appel de Versailles du 24 janvier 2017 cassé seulement partiellement, et donc maintenu partiellement

Vu l'arrêt de la Cour de cassation du 4 septembre 2018 (n° 17-16532)

Vu les articles 1134, 1147, 1149, et 1355 du code civil

Vu l'article 564 du code de procédure civile

Vu les pièces produites,

1/ CONFIRMER le jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 18 décembre 2014 en ce qu'il a:

- DIT que la SAS FONCIA FRANCHISE n'a pas commis d'abus dans l'exercice de son droit de non-renouvellement du contrat de franchise de la SARL ASJ IMMOBILIER ;

- DEBOUTE la SARL ASJ IMMOBILIER de sa demande relative à l'atteinte à sa réputation commerciale ;

- DEBOUTE M. X de sa demande relative à l'atteinte à sa réputation professionnelle ;

2/ REFORMER le jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 18 décembre 2014, en ce qu'il a condamné la SAS FONCIA FRANCHISE à payer à M. X la somme forfaitaire globale de 8.000 ' à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice moral ;

STATUANT à nouveau,

DEBOUTER M. X de sa demande relative à son préjudice moral ;

3/ DECLARER IRRECEVABLE comme nouvelle la demande de la SARL ASJ IMMOBILIER de condamnation de la société FONCIA FRANCHISE à lui payer 175.000 euros, au titre de la perte de la revente et de la relocation de 28 lots de gestion ;

EN TOUT ETAT DE CAUSE, DECLARER cette demande mal fondée, et la REJETER;

4/ DIRE ET JUGER que les autres chefs de la décision de la Cour d'appel de Versailles sont définitifs du fait du caractère partiel de la cassation intervenue

EN CONSEQUENCE,

DONNER ACTE de ce que la société ASJ IMMOBILIER et M. X ne formulent plus aucune demande à l'encontre de la société FONCIA GROUPE

EN TOUT ETAT DE CAUSE, DECLARER TOUTE DEMANDE en ce sens IRRECEVABLE

DIRE ET JUGER que la société ASJ IMMOBILIER et M. X admettent qu'ils ne peuvent plus demander la réparation de préjudices dues à une prétendue déloyauté dans l'exécution du contrat ;

DECLARER IRRECEVABLE toute prétention de la société ASJ IMMOBILIER et M. X fondée sur la déloyauté de FONCIA FRANCHISE dans l'exécution du contrat, définitivement rejetée par suite du rejet partiel du pourvoi en cassation par l'arrêt de la cour de cassation du 4 septembre 2018.

DECLARER IRRECEVABLE toute prétention de la société ASJ IMMOBILIER et M. X fondée sur le manquement de FONCIA FRANCHISE à ses obligations essentielles de franchiseur et sur l'abandon progressif et fautif par FONCIA FRANCHISE de son réseau de franchise, qui revient à invoquer une faute dans l'exécution du contrat, définitivement rejetée par suite du rejet partiel du pourvoi en cassation par l'arrêt de la cour de cassation du 4 septembre 2018.

- EN TOUT ETAT DE CAUSE déclarer ces prétentions mal fondées

5/ CONDAMNER in solidum la société ASJ IMMOBILIER et M. X à payer à la société FONCIA FRANCHISE 20.000 euros de dommages et intérêts, pour abus du droit d'ester en justice, consistant à avoir développé des argumentations contraires à l'autorité de chose jugée de l'arrêt de la cour de cassation et de l'arrêt de la Cour d'appel de Versailles mentionnés au visa ;

6/ CONDAMNER solidairement la SARL ASJ IMMOBILIER et M. X à payer à la société FONCIA FRANCHISE, la somme de 20.000 euros au titre de l'article 700 CPC, outre les entiers dépens.

CONDAMNER solidairement la SARL ASJ IMMOBILIER etM. X aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de la SCP G. B. en application de l'article 699 du CPC.

Vu les dernières conclusions signifiées le 26 mai 2020 par ASJ Immobilier et M. X par lesquelles il est demandé à la Cour de:

Vu les articles 1134, 1147 et 1149 du Code civil,

Vu l'article 1240 du Code civil,

Dire et juger la société ASJ Immobilier et M. X recevables en leurs demandes,

Dire que le non-renouvellement du contrat de franchise de la société ASJ Immobilier décidé par la société Foncia Franchise est déloyal et fautif, et de ce fait, abusif.

En conséquence,

Débouter Foncia Franchise de l'ensemble de ses demandes, fins, moyens et conclusions

Condamner la société Foncia Franchise à payer à la société ASJ Immobilier :

- 25.000 euros à titre de dommages et intérêts pour atteinte à sa réputation commerciale, dévalorisation de la société et perte de l'enseigne et l'impossibilité de retrouver une enseigne nationale

- 175.000 euros à titre de dommage et intérêts correspondant au manque à gagner sur la revente et la relocation des 28 lots de gestion apportés au Groupe Foncia

Condamner Foncia Franchise à payer àM. X les sommes de :

- 75.000 euros au titre de l'atteinte à sa réputation professionnelle ;

- 15.000 euros au titre du préjudice moral subi ;

Condamner Foncia Franchise à payer à la société ASJ Immobilier la somme de 18.500 euros au titre des frais irrépétibles

Condamner la société Foncia Franchise aux entiers dépens.

SUR CE

LA COUR

Pour étayer leur demande en dommages-intérêts pour abus dans l'exercice du droit de ne pas renouveler le contrat de franchise les appelants soutiennent que :

- l'inexécution incomplète et de mauvaise foi du contrat alliée à la décision unilatérale du franchiseur de ne pas le reconduire constituent le fondement de la responsabilité de celui-ci;

- l'arrêt de cassation rendu contre un autre franchisé, la société Objectif immobilier, n'interdit pas de compléter par d'autres éléments de preuve le fait de la concomittance de la décision de non-renouvellement avec les décisions similaires prises par le franchiseur contre nombre d'autres franchisés, pour démontrer que la société Foncia Franchise s'est employée à utiliser les capacités financières du franchisé à l'unique fin de développer le maillage du territoire et d'assurer la profitabilité de ses succursales intéressées au détriment des franchisés ;

- l'arrêt de la cour de cassation dans cet autre dossier n'a fait que rejeter le premier moyen qui traitait des demandes d'indemnité afférentes à l'inexécution contractuelle fautive, sans pour autant interdire la possibilité d'éclairer le caractère abusif du non renouvellement par des manquements antérieurs ;

- or, la société Foncia n'a respecté en l'espèce ni ses promesses pré-contractuelles ni ses engagements contractuels, ces multiples manquements démontrant la désaffection du franchiseur pour son réseau, ce qui participe de l'abus ;

- en effet elle a laissé entendre au concluant que leur relation s'inscrirait dans le temps, ce qui l'a implicitement décidé à faire l'apport de sa clientèle pré-existante, dans l'espoir de la développer et de la prérenniser sous la franchise, particulièrement lorsque, sous les conseils du franchiseur, elle a obtenu la carte de gestion, ce dont il s'est prévalu en vain auprès de lui en février 2011 dans le but d'obtenir de celui-ci l'agrément pour la gestion ;

- or, non seulement le franchiseur ne lui a pas permis d'exercer la gestion sous sa bannière, mais encore l'a-t-il obligé à fournir ses meilleurs efforts pour promouvoir sa marque en exécution du contrat, tout en lui annonçant au milieu de l'exécution qu'il ne le reconduirait pas à son terme refusant même de lever la clause de non réaffiliation qui lui interdisait d'exercer son activité sous une autre enseigne, même régionale ;

- selon l'apparence, le refus de renouvellement était motivé par la décision de réaliser une plus value aux frais des franchisés, hypothèse corroborée par les difficultés d'exécution du contrat par défaut de soutien et d'assistance aux franchisés face aux succursales, allant jusqu'à faire perdre au franchisé tout avantage concurrentiel ;

- à Puteaux ou dans le 14e arrondissement de Paris, le groupe Foncia n'a pas même attendu le terme des franchises pour lancer la campagne de création de nouvelles agences intégrées ;

- le tribunal de commerce de Nanterre qui a sanctionné le franchiseur à hauteur de 150 000 euros pour la violation du territoire contractuel d'un autre franchisé dans le 14e arrondissement aurait ainsi vu sanctionner une promesse déloyale et fallacieuse non tenue;

- le franchiseur, qui a sacrifié les franchisés sur l'autel de sa rentabilité - plusieurs d'entre eux ayant été mis en liquidation judiciaire, - ne pouvait ignorer les conséquences catastrophiques découlant pour ceux-ci des décisions de non renouvellement des contrats de franchise, le concluant affirmant qu'il n'a pas retrouvé son chiffre d'affaires antérieur à la franchise ;

- la clause de réaffiliation lui a même interdit de profiter d'un fichier inter-agences ;

- le franchiseur n'a pas assez développé le réseau du fait de sa défaillance et de son désintérêt;

- le franchisé concluant comme les 42 autres qui ont reçu la notification de non-renouvellement, ont subi cette décision dans un contexte, qui les teintes nécessairement de déloyauté, fait de manquements du franchiseur à ses obligations :

* absence de synergie inter-cabinets,

* démarchage agressif des agences intégrées sur le territoire des franchisés,

* exclusion des franchisés de la campagne de publicité, des "flyers" publicitaires et de la rubrique "Vendre" du site Foncia,

* défaut de réponse aux lettres du Groupement des franchisés Foncia quant à la déshérence du réseau,

* défaut de nouvelles Notes de référence depuis janvier 2011,

* disparition de tout coaching,

* absence de développement du réseau ;

- la politique d'instrumentalisation des franchisés voulue par le franchiseur et mise en place dès l'origine a ainsi eu pour but, aux mépris des intérêts des franchisés, de :

* développer le nombre des agences Foncia sur le territoire national,

* développer la notoriété de l'enseigne,

* faire payer des droits d'entrée et des redevances,

* faire régler les deux tiers du budget communication,

* récupérer à moindre frais les territoires rentables des franchisés et leurs portefeuilles clients connu du franchiseur par le logiciel Totalimmo, ainsi que les courants d'affaires ;

- la désaffection du réseau et le non-renouvellement des contrats de tous les franchisés démontre l'abus,

- la position selon laquelle le juge ne peut en aucun cas contrôler les motifs du non-renouvellement d'un contrat de franchise doit être dépassée pour permettre l'évolution de la jurisprudence ;

- dans les deux années suivant le non-renouvellement, le franchisé a dû apporter ses lots de gestion à Foncia Groupe, le contrat interdisant tout autre apport et le 27 juillet 2015 Foncia lui a refusé le bénéfice des relocations et des reventes de ces lots, alors que le prix d'achat avait été fixé en considération de ce privilège de relocation et de revente et que rien dans le contrat de franchise ou dans les notes de référence ne laissait présager la perte de cet avantage à l'issue du contrat ;

- sur ce point l'analyse du contrat par le franchiseur est abusive.

Toutefois, la Cour retient ce qui suit.

S'agissant des pièces invoquées, il est d'abord relevé que :

- les pièces produites, en particulier les pièces A4 et A4 bis ne démontrent nullement que le franchiseur a incité le franchisé à obtenir la carte professionnelle pour la gestion en lui laissant espérer un agrément pour la gestion au titre de la franchise ;

- la circonstance que le tribunal de commerce de Nanterre ait sanctionné le franchiseur à hauteur de 150 000 euros pour la violation durant 19 mois du territoire contractuel d'un autre franchisé dans le 14e arrondissement est sans conséquence en l'espèce, l'agence litigieuse étant dans un quartier radicalement différent ;

- la circonstance qu'une publicité Foncia mentionne la gestion locative au rang des activités pouvant être exercées en franchise ne peut être analysée comme une promesse faite à M. X que cette activité lui serait nécessairement confiée en franchise s'il en remplissait les conditions légales et l'affirmation de cette publicité selon laquelle la franchise Foncia est la seule permettant de constituer "un fonds de commerce récurrent" ne peut non plus être analysée en l'espèce comme une promesse ayant été violée par le franchiseur ;

- la pièce n°47 du franchisé ne démontre pas que pour le prix d'achat des lots apportés en gestion, il a été tenu compte du privilège de relocation et de revente de ces mêmes lots y compris en cas de non-renouvellement.

En outre, l'arrêt partiellement cassé de la cour d'appel de Versailles est définitif en ce qu'il a débouté la société ASJ Immo et M. X de leurs demandes indemnitaires contre la société Foncia franchise au titre de l'inexécution fautive du contrat.

Or, au plan des manquements contractuels, la société ASJ se plaint notamment :

- de la dissimulation des franchisés dans sa communication publicitaire, au bénéfice des succursales ;

- du non-respect de la synergie inter-agences malgré le logiciel Totalimmo ;

- du non-respect de la synergie entre les "Métiers", par refus de permettre au franchisé d'exercer l'activité de gestion locative ;

- du non-respect des notes de référence faisant perdre toute chance de profiter de transactions hors secteur de référence et sur secteur de référence, en particulier pour les biens apportés en gestion, ce au mépris du droit contractuel de priorité ;

- la violation du territoire exclusif du franchisé et le défaut de protection de celui-ci ;

- l'absence de mise à jour du savoir-faire, preuve du désintérêt pour le réseau des franchisés;

- du manquement au devoir d'assistance en faveur du franchisé.

Cependant, la société ASJ Immobilier a été définitivement déboutée en l'espèce de sa demande indemnitaire pour les manquements contractuels prétendus, faute de preuve de ces manquements, que ce soit :

- la mise en cause de la communication publicitaire du franchiseur ayant omis de faire figurer le franchisé dans la rubrique Vendre ;

- le refus de laisser accéder le franchisé au métier de gestion locative ;

- le manquement à l'obligation d'assistance ou de mise à disposition du savoir-faire Foncia eu égard aux insuffisances du logiciel Totalimmo ;

- la discrimination fautive dans l'accès au service Myfoncia.fr ;

- l'obligation de mise à jour du savoir-faire ;

- le devoir d'assistance et de promotion du réseau ;

- la discrimination ou l'insuffisance dans le développement de la synergue inter-agences ;

- l'atteinte à l'exclusivité territoriale ;

- le changement fréquent de dirigeants à la tête du réseau de franchise et la désaffection du réseau.

Si l'arrêt de la cour d'appel de Versailles est définitif en ce qu'aucune perte de rémunération sur les ventes ou la relocation des lots de gestion apportés par le franchisé au réseau du franchiseur n'est imputable au franchiseur au titre de l'exécution fautive du contrat, le moyen pris de la mauvaise foi du franchiseur dans l'exécution du contrat de franchise ne peut être davantage retenu pour indemniser les appelants à raison de la perte par le franchisé de ces mêmes éléments de rémunération contractuels subis à la suite du non-renouvellement du contrat.

En l'absence d'inexécution fautive du contrat, d'exécution de mauvaise foi ou d'attitude déloyale subie en cours de contrat par le franchisé, il appartient en l'espèce à celui-ci d'établir la déloyauté contractuelle du franchiseur à l'occasion de l'exercice de son droit de non-renouvellement à partir des circonstances propres au non-renouvellement.

Or, la Cour relève qu'il n'est établi ni que le franchiseur ait, par son attitude, laissé croire que le contrat serait renouvelé à son échéance, ni exposé la société franchisée ou les associés de celle-ci à effectuer des investissements, à supporter des coûts ou à s'endetter dans des proportions excessives ce qui serait susceptible de permettre de considérer qu'il a commis une faute dans son droit de ne pas renouveler le contrat.

La Cour retient également qu'en souscrivant le contrat de franchise qui est clair quant à l'existence de la faculté de chaque partie de faire obstacle au renouvellement du contrat par tacite reconduction - la société franchisée a pris le risque du non-renouvellement du contrat à son échéance, ce qui la prive, ainsi que M. X, de la possibilité de se plaindre valablement des conséquences nécessaires du non-renouvellement, telles les prétendues atteintes à la réputation commerciale ou professionnelle ou la prétendue perte des fruits de la revente ou de la relocation des lots apportés en gestion.

Dans les circonstances de l'espèce, exclusives de manquement contractuel du franchiseur, rien ne permet de retenir que celui-ci, en mettant fin simultanément à un nombre important de contrats de franchise, a excédé de mauvaise foi ses prérogatives liées à l'organisation du réseau, au préjudice de la société ASJ Immo.

Rien ne démontre non plus que le projet du franchiseur ait été de faire conclure de mauvaise foi au franchisé un contrat dans le seul but de s'approprier le fruit de leurs efforts avant de leur notifier le non-renouvellement du contrat ou que ce franchiseur s'est employé à utiliser les capacités financières du franchisé à l'unique fin de développer le maillage du territoire et d'assurer la profitabilité de ses succursales intéressées au détriment des franchisés.

En définbitive, l'abus du droit de ne pas renouveler le contrat n'est pas établi.

Il résulte de ce qui précède que doit être rejetée la demande en dommages-intérêts visant à faire condamner la société Foncia franchise à payer à la société ASJ Immo la somme de 25 000 euros pour atteinte à la réputation commerciale et impossibilité de retrouver une enseigne commerciale nationale outre la somme de 175 000 euros pour le manque à gagner sur la revente et de la relocation des 28 biens apportés en gestion aux agences intégrées de Foncia groupe.

Doit être également rejetée la demande en dommages-intérêts de M. X à hauteur de 75 000 euros pour atteinte à la réputation professionnelle et 15 000 euros au titre du préjudice moral.

En effet, l'abus du droit de ne pas renouveler le contrat n'étant pas démontré, la perte des sommes prétendûment perdues, n'est que la conséquence des prévisions contractuelles, étant observé que les sociétés intimées soulèvent à bon droit que les pertes alléguées se rattachant à l'exécution du contrat sont irrecevables en l'état de l'arrêt de la cour d'appel de Versailles.

Le jugement entrepris sera donc confirmé dans les limites de la saisine.

Les appelants à titre principal, bien qu'ils se soient trompés sur l'étendue de leurs droits, n'ont pas commis d'abus de droit ; les demandes de dommages-intérêts des sociétés Foncia franchise et Foncia groupe formées sur ce fondement seront donc rejetées.

Chacune des parties succombant partiellement en ses demandes, il y a lieu de faire masse des dépens de première instance et d'appel et de dire qu'ils seront supportés in solidum, à hauteur des 2/3 par la SARL ASJ Immobilier et M. X, d'une part et par la société Foncia Franchise à hauteur du tiers restant d'autre part.

En outre et en équité, il n'y a pas lieu à indemnité de procédure au titre de l'article 700 du code de procédure civile en appel.

PAR CES MOTIFS:

Vu l'arrêt du 4 septembre 2018 de la Cour de cassation,

Statuant dans les limites de la saisine ;

Confirme le jugement entrepris,

Déboute la SARL ASJ Immobilier et M. X de toutes leurs demandes en dommages-intérêts pour abus du droit de ne pas renouveler le contrat de franchise litigieux et de toutes leurs demandes,

Déboute la société Foncia Franchise de sa demande en dommages-intérêts pour abus de droit,

Fait masse des dépens de première instance et d'appel, dit qu'ils seront supportés in solidum, à hauteur des 2/3 par la SARL ASJ Immobilier et M. X, d'une part et par la société Foncia Franchise à hauteur du tiers restant, d'autre part et dit qu'ils pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;

En équité, dit n'y avoir lieu à indemnité de procédure au titre de l'article 700 du code de procédure civile en appel.