Cass. com., 16 mai 1984, n° 82-14.190
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Aubouin
Rapporteur :
M. Le Tallec
Avocat général :
M. Galand
Avocat :
SCP Lyon-Caen Fabiani Liard
Attendu que l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 30 avril 1982) a déclaré que M. Roger Y, la société d'exploitation de produits cosmétologiques LPC (société LPC) et Mme Catherine X ont commis des actes d'usage illicite des marques "Chanel", "n° 5" et "n° 19" dont la société Chanel est titulaire et que la société LPC a commis un acte de contrefaçon de la marque "n° 5" ;
Attendu qu'il est fait grief à la Cour d'appel d'avoir déclaré valables les marques "n° 5" et "n° 19" de la société Chanel et d'avoir jugé que la société LPC avait commis un acte de contrefaçon de la marque "n° 5", alors que, selon le pourvoi, d'une part, un signe n'est distinctif qu'à la condition de présenter premièrement un caractère d'originalité et de fantaisie suffisant et deuxièmement de n'avoir pas déjà été adopté pour désigner des produits similaires, qu'en déduisant le caractère distinctif des n° 5 et 19 du seul fait que l'emploi des numéros pour désigner des produits de parfumerie n'était pas usuel, c'est-à-dire ne constituait pas une désignation nécessaire de tels produits, sans aucunement rechercher si l'emploi de simples numéros de graphisme classique présentait un caractère de fantaisie et d'originalité et si des numéros n'avaient pas déjà été employés pour désigner de tels produits, ce que n'excluait pas le fait qu'un tel emploi n'ait pas été habituel, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa déclaration au regard de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1964, et alors que, d'autre part, la mention portée par la société LPC étant en réalité "n° 5", disposé verticalement, il n'y avait déjà pas de ressemblance avec la marque "n° 5", disposé verticalement, il n'y avait déjà pas de ressemblance avec la marque "n° 5" de la société Chanel, et que, de plus, le grief de contrefaçon n'est pas constitué lorsque, même reproduite intégralement, la marque se fond dans un ensemble au point de perdre son individualité, qu'en ne recherchant pas, ainsi qu'elle le devait et que l'y invitaient de plus expressément M. Roger Y et la société LPC dans leurs conclusions totalement délaissées, si les mentions portées sur l'étiquette et l'emballage des atomiseurs de la société LPC ne constituaient pas un tout indivisible dans lequel le numéro 5 perdait son individualité, et si un danger de confusion pouvait exister dans l'esprit de la clientèle entre ces mentions et la marque n° 5 de la société Chanel dont le nom prestigieux était toujours joint, et en caractère plus gros, au numéro, la Cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile et privé de base légale sa décision au regard des articles 1er et 27 de la loi du 31 décembre 1964.
Mais attendu, d'une part, que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain que, déterminant le caractère distinctif des signes "n° 5" et "n° 19" par rapport aux produits visés par les dépôts des marques, la Cour d'appel, sans avoir à procéder à la recherche visée au moyen dès lors qu'aucune antériorité n'était invoquée, a retenu pour désigner des parfums, l'emploi de ces signes était "à la date considérée insolite et de nature à conférer aux marques déposées le caractère distinctif requis par la loi" ;
Attendu, d'autre part, que les juges du fond qui ont constaté que les flacons de la société LPC portaient une étiquette avec la mention "parfum de toilette n° 5" et que la même mention figurait sur leur emballage et qui n'avaient pas à examiner si le nom Chanel était toujours joint à la marque "n° 5", ont apprécié souverainement l'existence d'une contrefaçon de la marque "n° 5" de la société Chanel ; D'où il suit qu'effectuent dans la mesure nécessaire la recherche demandée, ils n'ont pas méconnu les exigences des textes susvisés ; Que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 30 avril 1982 par la Cour d'appel de Paris.