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Décisions

Cass. com., 8 septembre 2021, n° 20-11.767

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Matrex (SAS)

Défendeur :

Hamon (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

Mme Kass-Danno

Avocats :

SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Richard

T. com. Sens, du 13 juin 2017

13 juin 2017

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 10 octobre 2019), la société Matrex ayant rompu pour faute grave le contrat d'agence commerciale qui la liait à la société Hamon, celle-ci, contestant avoir commis une telle faute, l'a assignée en paiement d'une indemnité de cessation de contrat.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

2. La société Matrex fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société Hamon diverses sommes correspondant à l'indemnité compensatrice de rupture et l'indemnité de préavis, alors :

« 1°) que les rapports entre l'agent commercial et le mandant sont régis par une obligation de loyauté et un devoir réciproque d'information ; constitue une faute grave le manquement de l'agent commercial à son devoir de loyauté ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté, d'une part, dans l'affaire Novoferm, que la société Hamon a fait signer un bon de commande en son nom propre par un client de Matrex, alors qu'elle n'en avait pas le pouvoir ainsi que le prévoit l'article 6 du contrat aux termes duquel la commande est faite par le client directement à Matrex et la facturation est effectuée directement au client par Matrex et, d'autre part, dans l'affaire Toyota, que la société Hamon a transgressé l'interdiction faite à l'agent commercial de prendre directement des commandes auprès de clients de son mandant en dissimulant cette transaction à ce dernier ; qu'en excluant néanmoins toute faute grave de la société Hamon, après avoir pourtant constaté que la société Hamon a fait signer des bons de commande directement auprès de divers clients de la société Matrex, en totale contradiction avec les stipulations du contrat de mandat et avait effectué des transactions qui ont été dissimulées à son mandant, ce dont il résultait des manquements de l'agent commercial à son devoir de loyauté et d'information, la cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 134-4, L. 134-12 et L. 134-13 du code de commerce ;

2°) que les rapports entre l'agent commercial et le mandant sont régis par une obligation de loyauté et un devoir réciproque d'information ; constitue une faute grave le manquement de l'agent commercial à son devoir de loyauté  ;  qu'en  excluant  toute  faute  grave  de  la  société  Hamon sans rechercher, comme elle y était invitée, si les opérations dissimulées effectuées par la société Hamon directement auprès des clients de la société Matrex n'avaient pas permis à la société Hamon de réaliser des marges de revente au détriment de Matrex, circonstance de nature à établir sa déloyauté, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 134-4, L. 134-12 et L. 134-13 du code de commerce ;

3°) que tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; qu'en retenant, pour exclure toute faute grave de la société Hamon, que dans l'affaire Toyota, la vente réalisée à l'insu de la société Matrex ne s'est toutefois pas inscrite dans une opération portant sur des produits concurrents de ceux de la société Matrex s'agissant précisément de matériels fabriqués par cette dernière, sans procéder à aucune analyse, même sommaire, des pièces ainsi retenues au soutien de cette affirmation et notamment de la facture du 31 août 2014 adressée à la société Toyota, la cour d'appel, qui a statué par voie de simple affirmation, n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

3. Après avoir relevé que l'article 6 du contrat stipulait que la commande était « faite par le client directement à Matrex » et la facturation « effectuée directement au client par Matrex », l'arrêt relève, d'abord, que, si la société Hamon, qui a pris une commande directe auprès de la société Novoferm, cliente de la société Matrex, pour des transporteurs à rouleaux, d'autres pièces et une prestation de montage, en vue d'une installation devant être réalisée par la société Perochaud, acquéreur et revendeur de matériel Matrex, a ainsi fait signer un bon de commande par un client de la société Matrex alors qu'elle n'en avait pas le pouvoir, cette circonstance ne caractérise pas un manquement grave aux obligations de l'agent commercial dès lors que les commandes ont bien été passées à la société Matrex, que celle-ci a été réglée de ces achats et qu'elle n'a subi aucun préjudice au titre des actes incriminés, enfin, que, ce faisant, la société Hamon n'a représenté aucune entreprise concurrente de la société Matrex.

4. Il relève, ensuite, que, si la société Hamon a, sans en informer la société Matrex, acheté à la société Perochaud des matériels Matrex, pour le prix de 2 104,80 euros TTC, qu'elle a revendus au même prix à la société Toyota Industrial Equipement, cette opération, concernant deux clients de la société Matrex, n'a pas porté sur des produits concurrents de ceux de Matrex - s'agissant précisément de matériels fabriqués par cette dernière - et ne lui a causé aucun préjudice, s'agissant de matériels d'occasion. Il en déduit que la dissimulation de cette transaction à son mandant ne constitue pas, eu égard à son montant réduit, un manquement caractérisé au devoir de loyauté de l'agent commercial, caractérisant une faute grave exclusive de toute indemnité.

5. En l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui a effectué la recherche invoquée par la deuxième branche, a pu écarter toute faute grave de la part de la société Hamon.

6. Le moyen qui, en sa troisième branche, ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des éléments de preuve versés aux débats, n'est donc fondé en aucune de ses branches.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

7. La société Matrex fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société Hamon une certaine somme au titre de l'indemnité compensatrice de rupture, alors « que les juges sont tenus de répondre aux conclusions des parties ; qu'en calculant le préjudice de la société Hamon à partir de sa rémunération perçue sur les années 2012 à 2014, sans répondre aux conclusions de la société Matrex qui faisait valoir que malgré la rupture du contrat intervenue en décembre 2014, les parties avaient poursuivi leurs relations commerciales entre 2015 et 2018, circonstance dont il devait être tenu compte dans l'évaluation du préjudice de l'agent commercial, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

8. La société Matrex ayant soutenu, dans ses conclusions, que postérieurement à la rupture du contrat d'agence commerciale, elle avait poursuivi ses relations commerciales avec la société Hamon, laquelle avait continué à acheter du matériel Matrex dans son intérêt propre entre les années 2015 et 2018, la cour d'appel, qui n'avait pas à tenir compte de cette circonstance, étrangère au contrat d'agence commerciale, n'était pas tenue de répondre à ce moyen inopérant.

9. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.