Cass. com., 4 juillet 2006, n° 03-13.728
COUR DE CASSATION
Arrêt
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Rapporteur :
M. Sémériva
Avocats :
SCP Waquet, Farge et Hazan, SCP Monod et Colin
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 janvier 2003), que la société High Score a été immatriculée sous cette dénomination au registre du commerce et des sociétés le 5 mars 1990 ; que M. X, associé gérant, qui avait fait choix de cette dénomination et créé un logo associé, a déposé en nom personnel la marque "High Score" assortie de ce logo, le 17 septembre 1992 ; que par contrats du 10 novembre 1999, il a cédé ses parts sociales, et consenti à la société High Score une licence d'exploitation de cette marque ; que la société ayant fait l'objet d'un redressement puis d'une liquidation judiciaires, son liquidateur, M. Y, faisant valoir l'antériorité des droits de cette société sur sa dénomination, a réclamé l'annulation du dépôt de la marque, la résolution du contrat de licence, la suspension des effets des sommations de payer délivrées à la requête de M. X les 14 et 21 décembre 2000, et le paiement de dommages-intérêts ;
Attendu que M. Y, ès qualités, fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté ces demandes, alors, selon le moyen :
1°) que ne peut être adopté comme marque un signe portant atteinte à une dénomination sociale antérieure s'il existe un risque de confusion ; qu'il résulte des énonciations de l'arrêt que l'adoption de la dénomination sociale High Score immatriculée le 5 mars 1990 est antérieure au dépôt, par M. X, de la marque "High Score" le 17 septembre 1992 ; que la seule signature des statuts de la société High Score mentionnant cette dénomination, suivie de son immatriculation, conférait à cette société un droit de propriété incorporelle sur la dénomination sociale et son accessoire, le logo, empêchant le dépôt ultérieur, pour les mêmes produits ou services, des mêmes signes à titre de marque entraînant un risque de confusion évident ; qu'en estimant que M. X a pu valablement déposer la marque "High Score", la cour d'appel violé l'article L. 711-4 du code de la propriété intellectuelle ;
2°) que le nom choisi par l'un des fondateurs d'une société pour servir de dénomination sociale, ainsi que le logo servant à identifier cette société, ne sont pas des oeuvres de l'esprit et ne peuvent bénéficier d'une protection au titre des droits d'auteur ; qu'il s'ensuit que le cofondateur d'une société commerciale, qui a choisi la dénomination sociale et signé les statuts l'adoptant, et qui a conçu le logo servant à l'identification de la société, ne saurait par la suite, au nom d'une antériorité de prétendus droits d'auteur, déposer le même nom et le même signe au titre d'une marque semi figurative ; qu'en considérant que M. X disposait de droits d'auteur antérieurs à la dénomination sociale de la société High Score, pour en déduire qu'il avait pu valablement déposer la marque "High Score", la cour d'appel a violé l'article L. 711-4 du code de la propriété intellectuelle, ainsi que, par fausse application, l'article L. 111-1 du même code ;
3°) qu'il y a incompatibilité entre la protection d'un signe à titre de marque et la protection du même signe à titre de droits d'auteur ;
qu'en estimant que M. X avait pu disposer sur la dénomination et le logo High Score des droits à la fois au titre de la propriété littéraire et artistique et au titre des marques, et qu'il avait ainsi pu, du fait de l'antériorité de ses droits d'auteur par rapport à la dénomination sociale de la société High Score, déposer valablement la marque "High Score", la cour d'appel a violé, par application cumulative, les articles L. 111-1 et suivants et L. 711-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle ;
Mais attendu, en premier lieu, que les dénomination sociales et logos commerciaux ne sont pas exclus par nature du champ de protection des oeuvres de l'esprit ;
Attendu, en deuxième lieu, que la protection d'un signe par le droit d'auteur n'est pas incompatible avec sa protection à titre de marque ;
Et attendu, enfin, que la cour d'appel ayant relevé que les droits d'auteur de M. X sur les signes considérés étaient nés avant la constitution de la société High Score, elle en a déduit à bon droit que cette société ne pouvait opposer un droit sur sa dénomination sociale à la marque déposée par son créateur après cette constitution ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses trois branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.