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Décisions

Cass. com., 9 mai 2007, n° 06-12.111

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Tricot

Rapporteur :

Mme Vaissette

Avocats :

Me Copper-Royer, SCP Bouzidi et Bouhanna

Amiens, du 26 mai 2005

26 mai 2005

 

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt déféré (Amiens,26 mai 2005), que le 21 mai 1993, la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de l'Oise (la banque) a consenti à M. et Mme A un prêt garanti par le nantissement de leur fonds de commerce et par le cautionnement solidaire de M.X et de Mme Y; qu'un avenant du 31 janvier 1995 a prévu la réduction du taux d'intérêt contractuel sur les sommes encore dues au taux de 8 % pendant deux ans puis au taux de 9 % pour les dix ans suivants ; que M. A ayant été mis en redressement judiciaire le 2 avril 1996, la banque a déclaré sa créance au titre du prêt précité ; que le plan de continuation de M. A a été arrêté par jugement du 7 janvier 1997 qui, concernant la créance de la banque a prévu, sur proposition du débiteur, acceptée par la banque dans la phase d'élaboration du plan, que la créance liquidée à la somme de 3 687 754,84 francs serait réduite à la somme de 3 080 000 francs qui serait réglée à concurrence de 2 200 000 francs par M. A en dix ans moyennant un intérêt de 8 % l'an, soit 19 800 francs mensuellement, et par les cautions à concurrence de 880 000 francs au moyen d'un versement immédiat de 200 000 francs puis de mensualités de 5 000 francs, sans intérêt ; que par jugement du 28 janvier 2003, le tribunal a prononcé la résolution du plan et la liquidation judiciaire de M. A ; que la banque a déclaré sa créance en établissant un décompte, à partir de sa déclaration de créance du 23 avril 1996 pour 435 178,12 euros en capital, majoré des intérêts au taux contractuel initial échus depuis le 2 avril 1996, sous déduction des sommes versées tant par le débiteur que par les cautions durant la phase d'exécution du plan pour aboutir à une créance privilégiée de 660 668,78 euros, contestée par le liquidateur ; que la cour d'appel a confirmé l'ordonnance du juge-commissaire en ce qu'elle a fixé à 18 094,04 euros la créance chirographaire et sur la fixation de la clause pénale, mais avant dire droit, concernant le solde du passif privilégié, a enjoint à la banque d'effectuer le calcul de la créance lui restant due en tenant compte d'un intérêt dû par M. A de 9 % et en imputant les remboursements perçus de M. A, partie sur le capital, partie sur les intérêts, suivant le tableau d'amortissement, et en imputant les sommes payées par les cautions d'abord sur les intérêts et les accessoires de la dette de M. A et ensuite seulement sur le capital ;

Attendu que le liquidateur fait grief à l'arrêt d'avoir enjoint à la banque d'effectuer le calcul de la créance précédemment indiqué, alors, selon le moyen :

1°) que lorsque le créancier, pendant l'exécution du plan de continuation, accepte expressément d'imputer une remise sur les dividendes à percevoir dans le cadre du plan et qu'il n'est pas prévu que les imputations de remises ne seraient effectuées qu'à la fin dudit plan, le montant de cette remise peut être retranché du montant de la créance déclarée dans la seconde procédure ouverte à la suite de la résolution du plan de continuation ; qu'il ressort des propres constatations de la cour d'appel que, dans le cadre du plan de M. A, il avait été prévu que la créance arrêtée à 3 687 754,84 francs était réduite à 3 080 000 francs et qu'il était convenu que pour cette créance l'intérêt initialement de 9 % serait réduit à 8 % pour M. et Mme A ; qu'en considérant dès lors que la résolution du plan de continuation de M. A avait pour effet d'anéantir rétroactivement les délais et remises consenties lors de l'adoption du plan sans avoir égard au fait que ces remises avaient fait l'objet de négociations spécifiques entre les parties, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l'article L. 621-82 du code de commerce ;

2°) que lorsque le créancier, pendant l'exécution du plan de continuation accepte expressément d'imputer une remise sur les dividendes à percevoir dans le cadre du plan et qu'il n'est pas prévu que les imputations de remises ne seraient effectuées qu'à la fin dudit plan, le montant de cette remise peut être retranché du montant de la créance déclarée dans la seconde procédure ouverte à la suite de la résolution du plan de continuation ; qu'en considérant dès lors que la résolution du plan de continuation de M. A avait pour effet d'anéantir rétroactivement les délais et remises consenties lors de l'adoption du plan, sans rechercher si ces remises n'avaient été consenties qu'en cas de règlement de la totalité des échéances convenues entre les parties, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 621-82 du code de commerce ;

3°) que les réductions de créance consenties par les créanciers participent de la nature judiciaire des dispositions du plan de continuation, et que le débiteur est en droit de se prévaloir de l'imputation par priorité des sommes réglées selon les modalités qui lui ont été consenties dans le cadre dudit plan ; que M. Z faisait valoir, dans ses conclusions récapitulatives d'appel, que la créance de la banque aux passifs privilégié et chirographaire de M. A ne peut être fixée que conformément à la convention conclue par les parties lors de l'élaboration du plan de redressement par continuation, tant en ce qui concerne les capitaux à prendre en considération que les taux d'intérêts et l'imputation des paiements sur le capital ; qu'en considérant cependant que la banque indique par ailleurs sans être contredite sur ce point par M. Z, ès qualités, que les paiements doivent être imputés pour partie sur le capital et pour partie sur les intérêts, la cour d'appel a purement et simplement dénaturé les conclusions des parties en violation des dispositions des articles 4 et 5 du nouveau code de procédure civile ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'après avoir relevé que la réduction du quantum de la créance et du taux d'intérêt avaient été consentis par la banque dans le cadre de la consultation des créanciers préalable à l'arrêt du plan de continuation par le tribunal, l'arrêt énonce qu'aux termes de l'article L. 621-82 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2006 de sauvegarde des entreprises, en cas de résolution du plan, les créanciers qui lui étaient soumis déclarent l'intégralité de leurs créances et sûretés, déduction faite des sommes perçues ; qu'il retient en conséquence exactement que la résolution du plan a pour effet d'anéantir rétroactivement les délais et remises acceptés lors de son adoption, de sorte que de telles remises, accordées au débiteur en dehors de toute négociation contractuelle étrangère au plan, ne sont définitivement acquises au débiteur qu'après versement, au terme fixé de la dernière échéance prévue par le plan ;

Attendu, en second lieu, qu'abstraction faite de la mention surabondante arguée de dénaturation, relative à l'absence de contradiction du liquidateur sur l'imputation des versements effectués pendant l'exécution du plan, la cour d'appel, en décidant que ces versements seraient imputés partie sur le capital, partie sur les intérêts, suivant le tableau d'amortissement, n'a fait que se référer aux prévisions stipulées initialement entre les parties, remises en vigueur après la résolution du plan, et a légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen, non fondé en ses première et deuxième branches, ne peut être accueilli en sa troisième branche ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.