CA Versailles, 13e chambrre, 20 janvier 1994, n° 12089/93
VERSAILLES
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Elegant House (SA)
Défendeur :
Michel, Dumoulin, Fraigneau, JR Stock Diffusion (SARL), Orphée Club (SA), Ogui Expansion (SA), Castro, Judasko, Abergel (Epoux)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Monteils
Conseillers :
M. Besse, Mme Bardy
Avoués :
SCP Keime-Guttin, Me Jupin, SCP Fievet-Rochette-Lafon, SCP Jullien-Lecharny-Rol, Me Lambert, Me Dublineau, SCP Keime & Guttin
Avocats :
Me Bussy, Me Roquette, SCP Hadengue, Me Gadea, Me Azoulay
La société anonyme ELEGANT HOUSE a créée en 1945 par Monsieur René GRIBE. Elle a pour activité la vente de chaussures et maroquinerie. Elle possède à VERSAILLES deux boutiques bien situées dans le centre commerçant de la Ville.
Monsieur Rend GRIBE est Président du Conseil d’Administration, et Monsieur Alain GRIBE, son fils est dirigeant.
La société possédait aussi à PARIS une boutique Rue du Havre qui a été cédée le 19 novembre 1992 pour 3.900.000 Francs.
Le 1er décembre 1992, le Tribunal de Commerce de VERSAILLES a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la société ELEGANT HOUSE, après s’être saisi d’office au vu de plusieurs inscriptions de privilèges.
La période d’observation a été prolongée à plusieurs reprises par jugements du 5 Janvier 1993, 27 avril 1993, 29 juin 1993, 27 juillet 1993, 7 septembre 1993 et 8 novembre 1993.
Dans la perspective d’élaboration d’un plan de redressement, la date limite de dépôt des propositions a été fixée au 6 septembre 1993 puis prolongée au 30 septembre 1993.
Trois candidats ont formalisé des offres de reprise dans les délais : la société JR STOCK DIFFUSION, la Société ORPHEE CLUB, la société OGUI EXPANSION.
Une quatrième offre de reprise a été déposée le 28 octobre 1993 par Monsieur CASTRO, époux de la sœur du dirigeant actuel de social ELEGANT HOUSE.
Le 29 octobre 1993, le dirigeant Monsieur GRIBE a lui-même remis à l’administrateur un projet de reprise interne, prévoyant le rachat par Monsieur et Madame ABERGEL, beaux-parents de Monsieur Alain GRIBE, de 66 % des parts sociales, l’extinction de la créance de I’URSSAF et l’apurement du passif restant par autofinancement et par réalisation d’actifs de la société.
Tous ces projets ont été examines par l’administrateur judiciaire, Maitre MICHEL, dans son rapport établi conformément aux dispositions de l'article 143 de la loi du 25 janvier 1985 et remis au Tribunal de Commerce le 8 novembre 1993.
Par jugement du 6 décembre 1993, le Tribunal de Commerce de VERSAILLES :
- a déclaré irréalisables les propositions de plan de continuation par voie de reprise interne propose par Monsieur et Madame ABERGEL, actionnaires potentiels,
- a dispensé Maitre DUMOULIN, représentant des créanciers, de consulter les créanciers à son sujet,
- a arrêté, conformément aux dispositions de la loi, le plan de cession de l’entreprise de vente de chaussures et d’articles de maroquinerie, sise à VERSAILLES (78000) 1 à 3, Rue Georges Clémenceau avec établissement secondaire même ville, 23, Rue du Marechal Foch, dépendant de l'actif de la société ELEGANT HOUSE, Société Anonyme, inscrite au Registre du Commerce et des société sous le n° SIREN B 559.801.378 (55 B 137),
- a ordonné la cession des actifs décrits dans le corps du jugement au profit de la société OGUI EXPANSION dont le siège social est à MELUN (77000) 2, Place Saint Jean dans les conditions précisées dans son offre jointe au rapport de l’administrateur judiciaire,
- a fixé l’entrée en jouissance au 10 décembre 1993,
- a maintenu Maitre MICHEL de la SCP SCHMITT & MICHEL en qualité d’administrateur judiciaire,
- l’a autorisé d’ores et déjà à procéder aux licenciements nécessaires à la mise en œuvre du plan et ce, en respectant l’article 63 de la loi à passer les actes nécessaires à la cession conformément à l’article 87§1 de la loi,
- a fixé la durée du plan au temps nécessaire à la réalisation des actifs pour l’apurement du passif,
- a désigné Monsieur SMITS Philippe comme tenu de l’exécution du plan pour rejeter le plan.
Pour rejeter le plan propose par Monsieur Alain GRIBE et les époux ABERGEL, le Tribunal a estimé que ce projet pourrait s'analyser comme un plan de cession, qu’il supposait pour être réalisé la progression du chiffre d’affaires en 1994 de 75 %, ce qui était illusoire, que ce projet n’était ni réalisable, ni crédible.
II a analysé les autres projets, et a rejeté la proposition d’EUROSHOES, société en formation, bien que plus intéressante financièrement, au motif qu’elle était faite par le groupe familial comprenant les époux CASTRO et les époux JUDASKO, ce qui ne permettait pas de garantir l’indépendance des repreneurs et il a retenu l’offre d’OGUI EXPANSION, au motif que le prix offert était supérieur aux autres, qu’elle reprenait davantage de salariés, et que ses prévisions d’exploitation étaient cohérentes et réalisables.
La société ELEGANT HOUSE fait appel.
Elle a demandé l’arrêt de l’exécution provisoire par application de l’article 155 du décret du 27 décembre 1985. Cette demande a été rejetée par ordonnance du 16 décembre 1993.
Elle demande de dire que le jugement dont appel a rejeté un plan de continuation et demande de déclarer son appel recevable,
- de dire que le jugement est nul, faute de consultation des créanciers sur le plan rejeté, faute de consultation du représentant des salariés sur le plan accepté et qui comporte des licenciements, faute d’information à destination de la partie débitrice quant au contenu réel des propositions de reprise et subsidiairement faute d’un rapport de saisine du Tribunal, établi dans le respect de la loi et de l’esprit de la loi.
Subsidiairement au cas où la Cour ne prononcerait pas la nullité du jugement avec toutes conséquences de droit,
- de reformer le jugement,
- de dire que le plan de continuation préserve les emplois, accroit la commercialité des sites, préserve les créanciers en leur garantissant dans tous les cas un règlement égal à celui à provenir de l’exécution du plan de rachat des fonds arrêté à tort par le Tribunal, d’arrêter dès lors le plan de continuation de préférence au plan de vente des fonds de commerce, selon telles modalités annexes complémentaires ou de garantie qu’il lui plaira d’y intégrer.
La société OGUI EXPANSION demande de déclarer l’appel irrecevable, en tout cas mal fondé et de confirmer le jugement.
Elle rappelle qu’elle a repris la gestion des magasins de la société OGUI SA, qui sont au nombre de 12 et qu’elle n’a pas de liens de filiale à la société mère avec la société OGUI, qu’elle a dégagé dès la première année un profit de 657.000 Francs pour un chiffre d’affaires de 30 Millions de Francs ; qu’elle a fourni la caution bancaire de la B.N.P. pour 2 Millions de Francs et a versé un acompte de 190.000 Francs, et qu’elle reprend cinq salariés.
La société JR STOCK DIFFUSION demande d’infirmer le jugement du 6 décembre 1993, de lui donner acte qu’elle a communique ses comptes portant sur les années 1992 et 1993, qu’elle a fourni - mieux qu’une caution - un accord de prêt, que son plan de reprise est plus favorable à un redressement et à un développement de la société ELEGANT HOUSE.
En conséquence, elle demande d’homologuer la reprise des fonds de commerce de la société ELEGANT HOUSE par la société STOCK DIFFUSION dans les conditions fixées par le plan amende communique au Tribunal de Commerce le 9 novembre 1993.
Subsidiairement, de constater la faute de Maitre MICHEL, administrateur judiciaire, à n’avoir pas permis une prise en compte loyale par le Tribunal de Commerce de VERSAILLES de l’offre de reprise présentée par elle, la perte de chance qu’elle a subie du fait d’avoir été écartée indûment de concourir normalement dans la procédure de reprise.
Le préjudice résultant de cette perte de chance qui ne saurait être estime h moins de 10 % du montant de son offre, de condamner Maitre MICHEL, es-qualités, à lui payer 170.000 Francs à litre de dommages-intérêts et 30.000 Francs au titre de l’article 700 du NCPC.
Maître MICHEL, es-qualités, demande de constater que pas un des moyens invoqués pour obtenir la nullité du jugement n’est fondé ni sérieux, de constater que rappel aux fins d’infirmation est irrecevable de la part du débiteur dès lors que le Tribunal n’a pas eu à statuer sur un véritable plan de continuation, de débouter la société ELEGANT HOUSE de ses demandes et de confirmer le jugement.
Maitre DUMOULIN, représentant des créanciers, demande acte de ce qu’il s’en rapporte aux écritures de Maitre MICHEL, de déclarer irrecevable l’appel incident formé par JR STOCK DIFFUSION ou par les autres repreneurs évincés, à tout le moins de déclarer irrecevables les prétentions formées devant la Cour par la société JR STOCK DIFFUSION ou par les différents repreneurs évincés.
Monsieur Michel JUDASKO, Monsieur Albert CASTRO forment un appel incident, demandent d’infirmer le jugement, et statuant à nouveau, d’arrêter, conformément aux dispositions de la loi, le plan de cession de l’entreprise à leur profit, constituant entre eux et à cet effet la société EUROSHOES.
Monsieur ABERGEL et la société ELEGANT HOUSE demandent d’infirmer le jugement, de prendre acte de ce qu’ils font leurs les écritures de la société ELEGANT HOUSE.
Monsieur ABERGEL demande de déclarer fondé son appel incident, de dire que le plan de continuation est conforme aux dispositions de la loi du 25 janvier 1985, notamment à l’article 62.
En conséquence, de renvoyer la cause à une date ultérieure pour permettre, conformément à l’article 24, la consultation des créanciers.
Subsidiairement, d’homologuer le plan de cession présenté par la société EUROSHOES.
Maitre MICHEL, es-qualités demande en réplique de déclarer irrecevables les appels incidents de Messieurs ABERGEL, JUDASKO et CASTRO, subsidiairement au fond, vu le rapport d’expertise et la situation arrêtée au 30 novembre 1993, de dire ces appels non fondés et ajoutant au jugement, de condamner la société JR STOCK DIFFUSION à payer à Maitre MICHEL, es-qualités, une somme de 20.000 Francs k litre de dommages-intérêts compensatoires, de condamner solidairement les repreneurs évincés à lui payer 20.000 Francs au titre de l'article 700 du NCPC.
Madame FRAIGNEAU, représentant des salariés, entendue en ses observations verbales, déclare qu’elle n’a rencontré Maitre MICHEL qu’une seule fois, et n’a pas été consultée sur l’avenir de la société, et sur les salariés qui pourraient être licenciés.
Le Ministère Public estime que rappel de la débitrice est recevable ; que les moyens de nullité ne sont pas fondés, la consultation des créanciers n’étant pas nécessaire en cas de rejet; et au fond, que le Tribunal a justement dit que le plan de continuation n’était pas réaliste. II conclut à la confirmation du jugement.
DISCUSSION
Sur la recevabilité de rappel de la société ELEGANT HOUSE :
Considérant que seuls les jugements statuant sur l’arrêt ou le rejet d’un plan de continuation sont susceptibles d’un appel de la part du débiteur ; que ce dernier ne peut pas faire appel des jugements statuant sur l’arrêt ou le rejet d’un plan de cession ;
Considérant qu’en l’espèce et quelles que soient les observations tout à fait pertinentes du Tribunal sur la nature exacte d’un plan qui se définit comme un plan de continuation, mais qui comporte une cession majoritaire de parts sociales à un tiers, il apparait que le plan de reprise interne proposé par Monsieur Alain GRIBE et Monsieur ABERGEL comporte les éléments principaux d’un plan de continuation, c’est-à-dire la poursuite de l’activité, le maintien de l’emploi et le règlement du passif (ou du moins de celui qui est pris en compte) par échéances successives ;
Considérant que le Tribunal a d’ailleurs bien précisé qu’il estimait les propositions de plan de continuation irréalisables, et qu’il dispensait le représentant des créanciers de consulter les créanciers, ce qui constitue un rejet sans ambigüité du plan de continuation "par voie de reprise interne" ;
Considérant que le jugement du 6 décembre 1993 est donc susceptible d’un appel à fin d’infirmation de la part du débiteur sans même qu’il soit nécessaire de recourir à la pratique de l’appel à fin d’annulation sur la recevabilité des appels incidents des repreneurs évincés ;
Considérant que l’appel de Monsieur ABERGEL et de la société ELEGANT HOUSE, qu’ils qualifient d’incident en ce qu’il tend à demander d’adopter le plan de cession présenté par la société EUROSHOES, outre qu’il démontre les liens particuliers entre ces repreneurs et l’opportune concordance de leurs dépôts d’offres des 28 et 29 octobre 1993, n’est pas recevable, les appelants incidents n’étant pas recevables à formuler une demande dans l’intérêt d’un tiers, en l'espfece EUROSHOES ;
Considérant que les sociétés JR STOCK DIFFUSION, Messieurs JUDASKO et CASTRO (société en formation EUROSHOES), repreneurs évincés ne peuvent interjeter appel d’un jugement arrêtant le plan de cession et/ou rejetant ou adoptant un plan de continuation, les articles 171 et 173 de la loi du 25 Janvier 1985 ne leur accordant pas la possibilité de faire appel ;
Sur la nullité du jugement :
Considérant que la société ELEGANT HOUSE fait valoir qu’elle a proposé plusieurs projets de plan de continuation qui ont été soumis à l’administrateur, au juge commissaire et au représentant du Ministère Public, ainsi qu’au Tribunal de Commerce lots des audiences de prolongation de la période d’observation, qu’un plan de redressement par continuation a été soumis à l’administrateur le 28 octobre 1993 qu’il incombait dès lors à ce dernier de procéder conformément aux dispositions légales, de transmettre le projet au représentant des créanciers pour consultation de ceux-ci, de consulter le représentant des salariés sur les mesures envisages et d’informer la société ELEGANT HOUSE ;
Considérant qu’il est exact que la société ELEGANT HOUSE a manifesté l’intention pendant la longue période d’observation, de présenter un projet de plan de continuation, que cependant, ce projet n’a été remis à l’administrateur que le 29 octobre 1993, peu avant la fin de la période d’observation, fixée au 7 novembre 1993 puis au 15 décembre 1993 et bien après l’écoulement du délai fixé pour dépôt des propositions de plans de cession ;
Considérant qu’il résulte des dispositions combinées des articles 143, 24 et 25 de la loi de 1985 que le débiteur ou l’administrateur communique au représentant des créanciers et au juge commissaire les propositions de règlement du passif et procède aux informations et consultations; que le représentant des créanciers recueille l'accord des créanciers, qu’en cas de consultation par écrit, le défaut de réponse dans le délai de 30 jours à compter de la réception de la lettre vaut acceptation ;
Considérant que l’article D 43 dispose que lorsque le représentant des créanciers décide de consulter collectivement les créanciers, ceux-ci se réunissent entre le 15e et le 21e jour de l’envoi de la lettre de convocation, et que si la consultation est faite par décrit, le défaut de réponse dans le délai de 30 jours vaut acceptation ; qu’il s’ensuit que dans le cas le plus favorable le rapport du représentant des créanciers ne peut être établi que plus de 15 jours après qu’il a lui-même reçu les propositions relatives au paiement des dettes et convoque les créanciers ;
Considérant que la pratique qui consisterait pour un débiteur à retarder volontairement le dépôt d’un plan de continuation pour effectuer ses propositions de règlement juste avant l'expiration de la période d’observation ne saurait être admise, d’autant que le Tribunal peut d’office, à tout moment prononcer la liquidation judiciaire ou ordonner la cessation totale d’activité sans attendre la fin de la période d’observation ;
Considérant surtout que la consultation des créanciers n’est indispensable que lorsque l’adoption du plan de continuation est envisagée par le Tribunal, qu’elle s’avère inutile lorsque le plan de continuation est écarté d’emblée par le Tribunal ; que celui-ci a disposé du choix de la solution sans être lié par le projet de l’administrateur et du débiteur, que c’est aux juges qu’il appartient d’apprécier la fiabilité et les possibilités de bonne fin de la proposition et de prolonger s’ils l’estiment nécessaire la période d’observation pour que la consultation des créanciers puisse avoir lieu ; qu’en l’espèce, cette option a été proposée aux premiers juges par l’administrateur judiciaire ; qu’ayant été écartée, il n’y avait pas lieu à consultation des créanciers ;
Considérant que la société débitrice soutient que le jugement est nul faute de consultation du représentant des salariés alors que cette consultation est rendue obligatoire par les dispositions de l’article L 20 et de l’article L 143 ; que contrairement à ce qu’elle prétend, appuyé en cela par la représentante des salariés, celle-ci, Madame FRAIGNEAU, a reçu le 10 Novembre 1993 le rapport de l’administrateur accompagné d’une lettre qui lui demandait de faire ses observations éventuelles, qu’elle n’a pas usé de cette possibilité ;
Considérant que l’article L 20 au surplus n’oblige pas l’administrateur à consulter le représentant des salariés, qu’il prévoit seulement une information du comité d’entreprise ou à défaut des délégués du personnel, ce que Madame FRAIGNEAU ne prétend pas être ; que l’article L 25 dispose que le rapport est communiqué au comité d’entreprise ou à défaut aux délégués du personnel qui sont informés et consultés ; que cette disposition a été parfaitement respecté par la communication du 10 novembre 1993 mentionné plus haut;
Considérant que contrairement à ce que prétend la société ELEGANT HOUSE elle a été continuellement informée et consultée sur les projets envisagés ; qu’elle reconnait elle-même avoir élaboré plusieurs projets de continuation pendant la période d' observation avec l’aide efficace (sic) de l’expert-comptable choisi par l’administrateur, avoir participé à des réunions de mise au point et notamment à une réunion organisé par son avocat le 7 juillet 1993 ; qu’il lui appartenait, si elle le souhaitait de faire connaitre à l’administrateur ses observations, ce qu’elle n’a pas fait dans le délai de 8 jours que lui impartit l’article D 116 bien que le représentant des créanciers Maitre DUMOULIN l'ait également engagée à lui fournir diverses précisions et informations par une lettre du 9 novembre 1993 ;
Considérant que la société débitrice critique sévèrement le rapport de l’administrateur et l’estime inexistant en raison d’erreurs d’analyse et de chiffres, d’imperfections de forme ; qu’elle ne précise pas cependant les inexactitudes qu’elle prétend avoir relevées dans le rapport de Maitre MICHEL, si ce n’est le fait que l’administrateur a dit qu’il n’avait pas reçu de plan de continuation avant le 29 octobre 1993 ;
Considérant que le rapport de (’administrateur rappelle que le dirigeant voulait présenter un plan de continuation, mats qu’il n’a pas communiqué ses propositions dans les meilleurs délais, que cette observation est exacte puisque les premières débauches de projets de plan de continuation étaient incomplètes et non définitives ; qu’en tout état de cause, le rapport contient une analyse détaillée et non critiquée de tous les projets de plan, reprise interne et cession ;
Considérant qu’aucun des moyens de nullité proposés par le débiteur ne peut donc être retenu ;
Considérant que la société ELEGANT HOUSE demande de réformer le jugement au motif que le plan de continuation est le seul qui permette de maintenir l’emploi, de régler les créanciers, et que le repreneur choisi, la société OGUI, n’a pas une situation financière saine puisque ses dettes consolidées sont de 6.159.936 pour SA OGUI et OGUI EXPANSION, que la caution bancaire fournie par OGUI est de 2 Millions de Francs alors que la cession a été faite pour le prix de 1.700.000 Francs ce qui constitue un rabais inadmissible au profit de cette société ;
Considérant, sur ce dernier point, que la cession est arrêtée au prix de 1.770.000 Francs plus le stock au prix de 300.000 Francs à parfaire selon inventaire, que le prix est donc supérieur à 2 Millions de Francs ; que l’extrait du Registre du Commerce et des sociétés de la société OGUI SA démontre qu’il n’existe aucune inscription de privilège au 13 décembre 1993, contrairement à ce que prétend la société ELEGANT HOUSE ; que rien ne permet en l’état de douter du bon état financier de la société repreneuse, OGUJ EXPANSION ;
Considérant que par des motifs que la Cour fait siens, le Tribunal a souligné à juste litre que le plan de la société ELEGANT HOUSE-ABERGEL, ne pouvait être considéré comme réalisable, car il ne tient pas compte de la totalité du passif, et se fonde sur un chiffre d’affaires utopique puisqu’il devrait progresser en 1994 de 75 % ;
Considérant que les comptes d’exploitation de la société ELEGANT HOUSE sont déficitaires depuis plusieurs années, que le Tribunal a souligné dans son jugement ouvrant la procédure de redressement judiciaire que l’état de cessation des paiements était ancien et que la société n’avait pu se soustraire à la procédure qu’en réglant les créanciers qui l’assignaient et en cédant des actifs ;
Considérant que le rapport de l’expert-comptable mandate par Maitre MICHEL sur la situation de la société au 30 novembre 1993 démontre que le déficit est de 7.348 KF k cette date, que ce n’est que par l’incorporation des produits provenant de la cession du magasin de PARIS qu’on obtient un résultat moins défavorable ; qu’il est donc tout à fait irréaliste de proposer un plan prévoyant une augmentation tant du chiffre d’affaires que des bénéfices ;
Considérant que la société ELEGANT HOUSE soutient également, avec Monsieur ABERGEL, qu’elle n’est pas tenue de reconstituer les capitaux propres, dans la mesure ou le capital social n’est pas modifié ; que cette argumentation est en l’état inopérante, le plan de continuation n’étant pas envisageable ;
Considérant qu’outre son appel incident du jugement adoptant le plan, la société JR STOCK DIFFUSION a formulé à l’encontre de Maitre MICHEL une demande en dommages-intérêts pour faute, au motif que son offre n’a pas été suffisamment prise en compte ;
Considérant qu’il est faux de prétendre que l’offre de reprise de STOCK DIFFUSION n’a pas été examinée, qu’en effet le rapport examine cette offre dans les mêmes conditions que les offres des autres repreneurs, que l’offre modificative a été intégrée dans le rapport, que la demande de dommages-intérêts est donc non seulement infondée, mais particulièrement osée dès lors que la société STOCK a pu concourir avec les autres repreneurs dans des conditions d’égalité et de transparence complète ; que la demande de dommages-intérêts formulée par Maitre MICHEL est donc fondée ; que la Cour estime devoir fixer les dommages-intérêts compensatoires à la charge de la société JR STOCK DIFFUSION à la somme symbolique de 1 Franc;
Considérant qu’il serait inéquitable de laisser à la charge de Maitre MICHEL es-qualités la totalité des frais irrépétibles qu’il a pu exposer ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,
Dit recevable l’appel de la société ELEGANT HOUSE,
Dit irrecevables les appels incidents de Messieurs ABERGEL, JUDASKO et CASTRO,
Confirme le jugement du 6 décembre 1993,
Condamne la société JR STOCK DIFFUSION à payer h Maitre MICHEL es-qualités d’administrateur légal de la société ELEGANT HOUSE la somme de 1 Franc & titre de dommages-intérêts,
Condamne la société ELEGANT HOUSE, Monsieur ABERGEL, la société STOCK DIFFUSION, Monsieur JUDASKO, Monsieur CASTRO à payer chacun à Maitre MICHEL la somme de TROIS MILLE FRANCS (3.000 Francs) sur le fondement de l’article 700 du NCPC,
Déboute les parties de toutes autres demandes.
Condamne la société ELEGANT HOUSE aux entiers dépens y compris ceux du référé, lesquels seront comptés en frais privilégiés de procédure collective et accorde & Maitre JUPIN, la SCP FIEVET- ROCHETTE-LAFON et & Maitre LAMBERT, Avoués, le droit de recouvrement conforme aux dispositions de l’article 699 du NCPC.