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Décisions

CA Riom, 3e ch. civ. et com., 15 septembre 2021, n° 19/01566

RIOM

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Défendeur :

Cap Immo 63 (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Chalbos

Conseiller :

Mme Theuil-Dif

Avocats :

SCP Arsac, Selas Alliés Avocats

T. com. Clermont-Ferrand, du 11 juill. 2…

11 juillet 2019

Faits et procédure - Demandes et moyens des parties :

La SARL CAPIMMO 63, exerçant l'activité d'agent immobilier, a conclu le 23 septembre 2016 avec Mme X un contrat d'agent commercial à durée indéterminée, sur le secteur géographique de Saint-Eloy-les-Mines et des environs. La rémunération de Mme X était fixée à un pourcentage des honoraires perçus par l'agence. Il était convenu que chacune des parties pourrait mettre fin au mandat, moyennant un préavis d'une durée d'un mois lors de la première année, de deux mois lors de la deuxième année, et de trois mois à partir de la troisième année.

Le 21 septembre 2017, Mme X a envoyé au gérant de la société mandante, M. Y, un courriel pour lui déclarer : «Suite à ta proposition d'hier, je t'envoie les deux factures des com restantes afin de faire une cessation d'activité auprès de la chambre de commerce. En effet à compter d'octobre mon taux RSI sera à nouveau plein, l'ACCRE [aide à la création ou à la reprise d'entreprise] arrivant à nouveau à son terme. En te remerciant ».

Le 31 octobre 2017, Mme X a expédié à la société CAPIMMO 63 une lettre recommandée, faisant état du fait que M. Y lui avait notifié oralement la cessation du contrat, demandé la restitution des clés de l'agence et retiré l'accès au logiciel professionnel ; Mme X ajoutait qu'elle s'estimait dans l'impossibilité de continuer à travailler, qu'elle ne ne se considérait plus comme liée par le mandat, et que sa lettre avait pour but de clarifier la situation. Le 12 avril 2018, Mme X a fait assigner la société CAPIMMO 63 devant le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand, aux fins d'obtenir le paiement de diverses sommes, parmi lesquelles 40 480 euros de dommages et intérêts pour rupture du contrat, 13 126 euros de rappel de commissions, et 10 000 euros de commissions de droit de suite.

Le tribunal de commerce, suivant jugement contradictoire du 11 juillet 2019, a débouté Mme X de l'ensemble de ses demandes, a débouté la société CAPIMMO 63 d'une demande reconventionnelle qu'elle avait présentée, a condamné Mme X à payer à cette société une somme de 2 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens, et a prononcé l'exécution provisoire.

Dans les motifs du jugement, le tribunal a notamment énoncé, sur la rupture du mandat, qu'aucun élément ne démontrait que celle-ci soit intervenue à l'initiative de la société CAPIMMO 63.

Mme X, par une déclaration reçue au greffe de la cour le 26 juillet 2019, a interjeté appel de ce jugement.

Elle demande à la cour de réformer le jugement, de dire que la rupture est consécutive à une décision de la société mandante, et de condamner celle-ci à lui payer les sommes suivantes : 20 706,88 euros de dommages et intérêts suite à la rupture, outre 4 000 euros pour « rupture brutale » ; 1 751,04 euros au titre du préavis ; 3 239,44 euros de rappel de commissions, et 114,58 euros de « commissions de droit de suite » sur des mandats locatifs.

Elle fait valoir que le gérant de la société CAPIMMO 63 lui a notifié oralement, le 7 septembre 2017, sa décision de mettre fin au mandat, notification qui concordait avec le retour de congé d'une négociatrice salariée, Mme Z, et que le message que Mme X a ensuite envoyé le 21 septembre 2017 avait pour but de tenter de trouver une solution amiable entre les parties, à la suite de l'annonce de la rupture. Elle souligne que la société mandante a laissé sans réponse sa lettre recommandée du 31 octobre 2017, qui rappelait les circonstances de la rupture, et que cette société, dans une réponse à une seconde lettre envoyée le 3 février 2018, a reconnu « à demi-mot » qu'elle voulait mettre fin au contrat. Mme X produit deux attestations aux fins d'établir que c'est le gérant de la société adverse qui lui a fait part le 7 septembre 2017 de sa décision de mettre un terme à leur mandat commun. Elle demande paiement d'une indemnité compensatrice telle que prévue à l'article L. 134-13 du code de commerce, qu'elle a calculée sur la base de deux années de commissions, et d'une indemnité de préavis.

Mme X expose d'autre part, au soutien de sa demande de rappel de commissions, que cette demande porte sur trois ventes, qui ont été conclues à la suite de ses propres diligences, et qu'elle a réalisées « au nom de Mme Z », alors en congé. Sur le droit de suite : elle invoque l'article L. 134-7 du code de commerce, qui ouvre droit à commission pour l'agent commercial sur toute opération commerciale conclue après la cessation du contrat, lorsque l'opération est principalement due à son activité au cours du contrat, et qu'elle a été conclue dans un délai raisonnable à compter de la cessation du contrat.

La société CAPIMMO 63 demande à la cour de confirmer le jugement, sauf en ce qu'il a rejeté sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts. Elle expose que c'est Mme X elle-même qui a mis un terme au mandat, ainsi qu'elle a en manifesté l'intention dans son message du 21 septembre 2017, et qu'elle a d'ailleurs déposé les clés de l'agence ; qu'elle est ensuite allée travailler pour une entreprise concurrente, de sorte qu'elle ne peut prétendre ni à une indemnité compensatrice de la rupture, ni à une somme au titre du préavis.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 29 avril2021.

Il est renvoyé, pour l'exposé complet des demandes et observations des parties, à leurs dernières conclusions déposées en cause d'appel, le 29 octobre 2020 et le 06 avril 2021

Motifs de la décision :

Sur la rupture :

Selon l'article L. 134-4 du code de commerce, les contrats intervenus entre les agents commerciaux et leurs mandants sont conclus dans l'intérêt commun des parties. Les rapports entre l'agent commercial et le mandant sont régis par une obligation de loyauté et un devoir réciproque d'information. L'agent commercial doit exécuter son mandat en bon professionnel ; et le mandant doit mettre l'agent commercial en mesure de remplir ses obligations.

L'article L. 134-12 du même code dispose qu'en cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi ; cependant aux termes de l'article L. 134-13, le mandataire n'a pas droit à l'indemnité compensatrice de la rupture, entre autres lorsque la cessation du mandat résulte de l'initiative de l'agent, à moins que cette cessation ne soit justifiée par des circonstances imputables au mandant, ou dues à l'âge, l'infirmité ou la maladie de l'agent commercial, par suite desquels la poursuite de son activité ne peut plus être raisonnablement exigée.

Le contenu du message que Mme X a envoyé le 21 septembre 2017, au gérant de la société mandante, tend à établir que c'est Mme X elle-même qui a pris la décision de mettre fin à son activité : elle seule, en sa qualité de travailleur indépendant, avait la faculté de déclarer sa cessation d'activité. Comme l'a encore relevé le tribunal, la tonalité même de message, envoyé deux semaines après la rupture prétendue du 7 septembre 2017, apparaît courtoise et cordiale (usage du tutoiement, remerciements exprimés par Mme X), et ne paraît pas compatible avec la rupture brutale et unilatérale dont s'est plainte ensuite la mandataire : ce message énonce sans équivoque une décision de fin d'activité prise par la mandataire, après qu'elle ait examiné ses droits, donc à l'issue d'un examen personnel, en fonction de ses intérêts propres ; il ne mentionne aucune décision prise par le gérant de la société mandataire, mais seulement une « proposition », dont l'objet n'est pas précisé explicitement.

Mme X en revanche, dans sa lettre du 31 octobre 2017, a fait état d'une rupture décidée par le gérant de la société mandante : « Le vendredi 8 septembre 2017, vous m'avez signifié oralement la cessation du contrat sans préavis à effectuer, vous m'avez également demandé la restitution des clés de votre agence. J'ai donc remis les clés [...] le 14 septembre 2017 au matin. Et l'accès à votre logiciel professionnel m'a été retiré ».

Le silence gardé par la SARL CAPIMMO, à la réception de cette lettre recommandée du 31 octobre 2017, ne suffit pas, à lui seul, à prouver que la rupture a été décidée par la société mandante. Et les attestations de deux amies de Mme X, Mmes A et B, n'établissent nullement une telle rupture décidée par cette société : ces deux attestations, rédigées et signées tardivement (le 14 novembre 2018), rapportent que Mme X aurait déclaré aux deux témoins, le matin du 7 septembre 2018 (sic dans l'attestation B, l'autre attestation ne comportant pas de mention de l'année), que « le patron de l'agence Elysée Avenue lui avait dit de ne plus venir » travailler, alors que la rupture qu'allègue Mme X lui aurait été notifiée le 8 septembre 2017 d'après sa lettre du 31 octobre 2017, soit un an plus tôt. Ces attestations n'ont dès lors aucune force probante.

M. Y a d'ailleurs précisé, dans une missive du 12 avril 2018 répondant à une seconde lettre envoyée par Mme X le 3 février 2018, qu'il avait certes exposé, lors d'un entretien avec celle-ci, qu'il « envisageait de mettre un terme à [leurs] relations, et non pas qu'[il] y mettait un terme » : cette formulation confirme que, comme énoncé dans le message du 21 septembre 2017, le gérant de la société mandante avait évoqué lors d'un précédent entretien la simple possibilité d'une rupture de son fait, et non pas une décision prise en ce sens. M. Y, dans cette lettre du 12 avril 2018, a encore précisé qu'après qu'il ait annoncé à Mme X qu'il envisageait de rompre le mandat, la mandataire lui a demandé oralement si elle pouvait travailler pour la concurrence, ce à quoi il a répondu qu'il ne le souhaitait pas, « tant que [Mme X] était liée par [...] contrat avec » la SARL CAPIMMO 63. M. Y a ensuite indiqué qu'il avait appris « par sa collaboratrice » que Mme X avait rapporté les clés à l'agence, et qu'il considérait, après la lettre envoyée le 31 octobre 2017 par Mme X, que celle-ci « mett[ait] un terme définitif » au contrat qui les liait (pièce n° 3 bis produite par Mme X).

Les termes de cette lettre ne sont pas réfutés de manière précise par Mme X, et ils concordent avec son message du 21 septembre 2017, pour établir que, si le gérant de la société mandante a en effet évoqué le premier, lors d'un entretien au cours du mois de septembre 2017 avec Mme X, l'éventualité d'une rupture du mandat qui les unissait, il ne lui a en revanche pas notifié une décision de rupture, l'entretien s'étant poursuivi par la question de Mme X sur sa possibilité de travailler pour des concurrents ; il apparaît donc que les parties se sont limitées à une simple discussion lors de cet entretien, et que c'est la restitution des clés de locaux de l'agence par Mme X, faite par celle-ci le 14 septembre 2017 selon ses déclarations, qui a marqué son intention de mettre fin au mandat : il n'est pas vraisemblable que, si cette restitution avait été brutalement exigée par M. Y comme le prétend Mme X, celle-ci lui ait envoyé, quelques jours plus tard le 21 septembre 2017, le message susdit par lequel elle lui exprimait entre autres ses remerciements. Il en résulte que c'est Mme X qui, en restituant les clés à la société mandante, puis en confirmant son intention par son message du 21 septembre 2017, a décidé de la rupture, laquelle ne lui avait pas été notifiée par le gérant de la société mandante.

C'est donc à bon droit que le tribunal de commerce a considéré que la rupture du mandat procédait de l'initiative de Mme X, et qu'il a rejeté ses demandes faites au titre du préavis, de l'indemnité de rupture, et de dommages et intérêts pour rupture brutale du contrat. Le jugement sera confirmé de ces chefs.

Sur les autres chefs de litige :

Mme X demande l'allocation de 3 239,44 euros au titre de rappel de commissions, pour trois mandats de vente n° 518 (mandat A...), n° 849, et n° 117 devenu le n° 851 (mandats ADAPEI), et pour un mandat de location X....

Selon l'article 9 du contrat conclu entre les parties le 23 septembre 2016, les commissions dues à l'agent commercial sont calculées sur le montant des honoraires hors taxe perçus par l'agence, soit pour l'entrée du mandat de vente concerné (vendeur), soit pour la sortie du dit mandat (acquéreur).

Mme X précise qu'elle a obtenu les trois mandats de vente susdits, mais au nom de Mme Z, négociatrice salariée de la SARL CAPIMMO 63 alors en congé maternité ; que Mme Z avait initialement obtenu un mandat de l'ADAPEI le 5 août 2013, mais que ce mandat de vente a pris fin en novembre 2014, et que le mandat que Mme X a reçu en 2017 sur le même bien constitue un nouveau mandat, et non un renouvellement de celui reçu par Mme Z, même si le nom de celle-ci a été porté sur l'acte écrit, sur ordre de M. Y. Mme X ajoute qu'elle a bien reçu elle-même en 2017 le mandat de la succession W, bien qu'il ne soit pas mentionné sur le registre des mandats, et qu'elle a aussi reçu mandat pour la location d'un bien appartenant à Mme D.

La SARL CAPIMMO 63 conteste ces demandes, affirme que Mme X, « d'une rare mauvaise foi », a été régulièrement commissionnée pour la sortie du bien faisant l'objet du mandat n° 117 devenu le n° 851 (donné par l'ADAPEI 63), dès lors qu'il n'est pas contesté qu'elle a obtenu la vente de ce bien, mais qu'elle n'a pas droit à commission pour l'entrée de ce même bien, qui a été réalisée par Mme Z le 5 août 2013, ainsi qu'elle l'atteste ; qu'il en est de même pour le mandat n° 849, donné lui aussi par l'ADAPEI sur un autre bien, et encore pour le mandat n° 518 donné par la succession A... ; que le mandat de location X... n'a pas été obtenu par Mme X.

Mme X produit aux débats trois mandats de vente établis par l'ADAPEI 63 : le n° 117, portant sur un bien situé 12 et 14 avenue Aristide Briand à Saint-Eloy-les-Mines, en date du 3 août 2013 ; le mandat n° 851 donné le 9 février 2017 sur le même bien, pour un prix inférieur (30 000 euros au lieu de 77 000 euros dans le mandat de mars 2013) ; et le mandat n° 849 donné le 9 février 2017 sur un bien situé rue des Bayons à Saint-Eloy-les-Mines.

Les deux mandats de 2017, pour lesquels Mme X demande une commission, portent la signature de Mme X, mais indiquent l'un et l'autre en revanche que la SARL CAPIMMO 63 est représentée par Mme Z ; celle-ci, dans une attestation produite par la société intimée, confirme d'ailleurs qu'elle a rédigé en 2013 le mandat n° 117, et que celui-ci a été « refait le 09-02-17 » sous le numéro 851.

Il ressort des mandats de vente ci-dessus indiqués que celui qu'a donné l'ADAPEI le 9 février 2017 n'est que la continuation de celui qu'elle avait établi sur le même bien le 3 août 2013 : la circonstance que ce premier mandat ait pris fin quinze mois après sa conclusion n'empêche que, dès lors que l'ADAPEI et la SARL CAPIMMO 63 étaient entrées en relation sur ce bien par l'intermédiaire de Mme Z, et que le bien n'a pas été vendu pendant la durée de ce premier mandat, il doit être considéré que le second mandat portant sur le même bien a été obtenu par la négociatrice initiale Mme Z, et non par Mme X, qui n'établit pas qu'elle ait «entré » ce mandat par sa propre activité pendant l'année 2017. Sa demande de commission n'est pas fondée de ce chef.

Il n'apparaît pas en revanche que le mandat donné par l'ADAPEI le 9 février 2017 sur le bien situé rue des Bayons ait été précédé d'un premier mandat donné sur le même bien : Mme Z n'en fait pas état dans son attestation, la SARL CAPIMMO 63 ne produit pas ce premier mandat, et la seule circonstance que l'acte de mandat du 9 février 2017 porte le nom de Mme Z, ne suffit pas à démontrer qu'il ait été acquis par celle-ci, alors que Mme X l'a signé seule au nom de la société mandataire, et que d'ailleurs Mme Z ne reprenait son activité « qu'en septembre » (2017 ') selon la SARL CAPIMMO 63. Mme X a droit à commission pour ce mandat, et ce pour la somme de 1 042 euros, montant non contesté par la SARL CAPIMMO 63.

Sur le mandat donné par la succession W (n° 518) : Mme Z atteste qu'elle a établi elle-même, le 12 septembre 2015, le mandat donné sous ce numéro par les membres de la succession A...-Stanislawa sur un bien situé 17 rue du Puits Saint-Nicolas à Saint-Eloy-les-Mines ; la SARL CAPIMMO 63 produit ce mandat, rédigé au nom de Mme Z et revêtu de sa signature ; l'un des héritiers, M. W, atteste qu'il a bien donné mandat de vente à la SARL CAPIMMO 63 le 12 septembre 2015 sous le numéro 518, et qu'il a eu pour seuls interlocuteurs lors de la signature du mandat Mme Z et M. Y ; enfin Mme E, autre agent commercial, atteste qu'elle a vendu le bien en cause, dont le mandat avait été « entré par Mme Z ». Au vu de ces éléments, Mme X ne rapporte nullement la preuve de son intervention de ce chef, sa demande sera rejetée.

Sur le mandat de location D : Mme X affirme qu'elle a obtenu ce mandat au cours de l'année 2017, et se prévaut du fait que le grand livre de la SARL CAPIMMO 63 comporte un reliquat en sa faveur de 113,44 euros, qui correspond exactement à la commission qu'elle a facturée pour ce mandat ; cependant la société intimée produit le mandat que lui a donné le 9 septembre 2019 Mme D., mandat qui porte le nom et la signature de Mme Z, ainsi qu'une attestation de Mme D qui affirme que la location en cause a bien été traitée « en totalité » par Mme Z, et qu'une attestation informelle du locataire M. F qui confirme la seule intervention de Mme Z, tous éléments qui ne permettent pas de considérer que Mme X rapporte la preuve de son entremise pour cette location.

Sur le droit de suite : Mme X invoque l'article L. 134-7 du code de commerce, selon lequel le mandataire a droit à rémunération pour toute opération conclue après la cessation de son mandat, entre autres lorsque l'opération est principalement due à son activité au cours du contrat d'agence, et qu'elle a été conclue dans un délai raisonnable à compter de la cessation de ce contrat. Elle demande à la cour de prendre acte du paiement par la SARL CAPIMMO 63, en cours de procédure, d'une somme de 154,68 euros au titre des mandats de location n° 920 et 921, et de condamner cette société à lui payer la somme de 114,58 euros pour un mandat de location n° 836, qu'elle déclare avoir obtenu grâce à son activité et peu de temps après la cessation du contrat, bien que l'acte de mandat ait été rédigé par Mme Z ou par M. Y. La SARL CAPIMMO 63 conteste devoir la commission en cause, au motif que, s'il est vrai que « Mme X est à l'origine du mandat », le bien concerné n'a pas été donné à bail, « car il n'était pas louable en l'état ».

Aucune des parties ne produit aux débats de document spécifique sur le mandat n° 836 en cause, et Mme X n'apporte aucune précision sur le bien concerné, sur l'identité du bailleur et du preneur, sur la date du mandat et sur celle du contrat de location. Faute de tout élément de preuve au soutien de sa demande en paiement, celle-ci n'apparaît pas fondée et sera rejetée, sans qu'il soit d'ailleurs utile de prendre acte du paiement qu'elle reconnaît avoir reçu pour d'autres mandats de location.

La SARL CAPIMMO 63 demande la condamnation de Mme X à lui verser 50 000 euros de dommages et intérêts, notamment pour concurrence déloyale ; elle lui reproche d'avoir rompu le mandat commun non pas pour cesser son activité comme elle l'avait annoncé, mais pour la reprendre dans le cadre d'une structure concurrente. Cependant Mme X était libre, après avoir mis fin au mandat d'intérêt commun, de reprendre une activité, y compris une activité concurrente, que l'acte de mandat lui permettrait a contrario, en stipulant qu'elle s'interdisait tout acte de concurrence « pendant la durée » du mandat : elle était dès lors en droit, après la rupture intervenue en septembre 2017, d'exercer une activité concurrente, à la seule condition que cette activité ne soit pas déloyale. La SARL CAPIMMO 63 affirme que certains biens qu'elle proposaient à la vente se retrouvent désormais dans le portefeuille de Mme X ; cette société ne précise cependant pas les biens ou les clients qui auraient été détournés, et ne rapporte aucune preuve que Mme X ait obtenu mandat sur ces biens au moyen de manœuvres déloyales, telles que des démarches qu'elle aurait faites pour convaincre des clients de révoquer le mandat qu'ils avaient donné à la SARL CAPIMMO 63, et de lui confier à elle-même un nouveau mandat sur les mêmes biens.

La SARL CAPIMMO 63 fait état par ailleurs, au soutien de sa demande dommages et intérêts, d'un préjudice commercial, résultant de ce qu'elle a dû demander des attestations à certains de ses clients pour se défendre face aux demandes de Mme X, et d'autre part du mécontentement d'autres clients, provoqué par des fautes de l'agent commercial. La nécessité de demander des témoignages écrits à des clients, en nombre limité, n'a pas causé de préjudice à la société intimée. Sur le second grief : la SARL CAPIMMO 63 produit d'une part la copie d'un message envoyé le 24 avril 2018 à Mme Z par M. G, client de cette société, et qui se plaint de diverses fautes de celle-ci, mais qu'il ne reproche pas uniquement à Mme X ; M. W... conclut d'ailleurs son message en proposant à la SARL CAPIMMO 63 de lui « donner une chance de se rattraper », de sorte que les fautes ou négligences qu'il relate n'apparaissent pas avoir causé à cette société de préjudice certain, tel que la perte de ce client.

La SARL CAPIMMO 63 produit aussi, d'autre part, la copie d'une lettre recommandée que lui ont envoyée en date du 19 janvier 2018 deux autres clients, M. H et Mme H? résidant au Moulin Parrot à Saint-Eloy-les-Mines, et qui exposent les motifs de révocation du mandat de vente qu'ils avaient donné sur leur résidence principale : le manque de visites, « mais surtout et avant tout » le comportement de la « vendeuse », qui les a « mal reçus » au téléphone, et qui a annulé sans les prévenir une visite qu'elle leur avait annoncée. M. et Mme H précisent qu’ils trouvaient ce comportement méprisant et inadmissible, alors qu'ils n'avaient eu jusqu'alors aucun problème avec la SARL CAPIMMO 63.

Mme X conteste ce grief, et fait valoir que pendant son mandat, la société mandante en la personne de son gérant ne lui a jamais fait d'observation sur son comportement à l'égard des clients.

La lettre de M. et Mme H, qui ne précise pas l'identité de la négociatrice concernée, et qui n'a du reste pas la même valeur probante qu'une attestation, ne permet pas, en l'absence de reconnaissance des faits par l'intéressée, ou au moins d'un avertissement ou d'une remarque qui lui aurait été donnée à la période des faits par le gérant de la SARL CAPIMMO 63, de tenir pour établies les fautes relatées dans cette lettre. La demande de dommages et intérêts formée par cette société n'est pas non plus fondée sur ce dernier point, le tribunal l'a rejetée à bon droit.

Le jugement étant confirmé pour la plupart de ses dispositions, les frais d'appel seront mis à la charge de Mme X. Il n'est pas contraire à l'équité de rejeter les demandes réciproques formées devant la cour au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

Statuant après en avoir délibéré, publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, mis à disposition des parties au greffe de la juridiction ;

Infirme le jugement déféré, en ce qu'il a dit Mme X mal fondée en ses demandes, et l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes ;

Condamne la SARL CAPIMMO 63 à payer à Mme X une somme de 1 042 euros au titre de rappel de commission ;

Rejette le surplus des demandes de Mme X ;

Confirme le jugement déféré en toutes ses autres dispositions ;

Condamne Mme X aux dépens d'appel ;

Rejette toutes autres demandes.