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Décisions

CA Aix-en-Provence, 3e ch., 4 juillet 2019, n° 18/16518

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Association Cultuelle Orthodoxe Russe Saint Michel Archange

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Messias

Conseillers :

Mme Durand, Mme Chalbos

TGI Grasse, du 8 oct. 2018

8 octobre 2018

L'Association Cultuelle Orthodoxe Russe Saint Michel Archange à Cannes, dite en abrégé ACOR, est une association soumise à la loi de 1905.

Elle a pour but l'exercice du culte orthodoxe, l'entretien de l'église sise à [...], ainsi que de son clergé, la gérance du capital et des biens meubles et immeubles propriété de l'association.

Le procureur de la République de Grasse, au vu des informations reçues de Me H., administrateur provisoire de l'ACOR, a saisi le TGI de Grasse d'une demande d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de cette association.

Il faisait valoir que la trésorerie de l'association était exsangue, que les charges ne pouvaient être réglées ni les demandes de provision de l'avocat constitué aux intérêts de cette personne morale, ajoutant que la comptabilité antérieurement à la désignation de Me H. n'était pas tenue par un expert-comptable et que l'association était en état de cessation des paiements.

Par jugement contradictoire du 18 mai 2017,rectifié le 19 juin 2017, publié au Bodacc les 3 et 4 juillet 2017, le TGI de Grasse a ouvert une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de l'Association Cultuelle Orthodoxe Russe, fixé provisoirement la date de cessation des paiements au 17 avril 2017, date de la saisine par le procureur de la République, désigné Me H. en qualité d'administrateur judiciaire avec mission d'assurer seul la représentation et l'administration de l'association, et Me Anne D. de mandataire judiciaire.

Une période d'observation de 6 mois a été ouverte, le dossier devant être rappelé à l'audience du 27 juillet 2017 pour vérifier si l'association dispose des capacités de financement suffisantes pour poursuivre son activité et à défaut, en vue de la conversion de la procédure en liquidation judiciaire.

Par ordonnance du 18 mai 2017 le 1er vice-président du TGI de Grasse a mis fin au mandat de Me H., ès qualité d'administrateur provisoire de l'ACOR et a désigné Me Marie Sophie P. en qualité de mandataire ad hoc pour l'exercice des droits propres de l'ACOR dans le cadre de la procédure collective.

Le 9 juin 2017, Monsieur Vladimir J. a formé tierce opposition au jugement du 18 mai 2017.

Il a soutenu avoir qualité pour former tierce opposition en tant que créancier de l'association, mais également de débiteur de celle-ci et de staroste de l'Eglise ayant un rôle administratif et cultuel et devant veiller au respect des statuts de l'association ainsi que de l'obédience religieuse.

Il a contesté la date de cessation des paiements, non motivée, la désignation de Me H. en tant qu'administrateur judiciaire alors qu'il était précédemment l'administrateur provisoire de l'association faisant valoir qu'il n'avait pas rendu compte de ce mandat et affirmant qu'il était responsable de l'aggravation du passif.

Il a demandé au tribunal de constater les tentatives de récupération de l'Eglise orthodoxe Russe par une autre obédience.

Par jugement du 8 octobre 2018 le TGI de Grasse a :

Déclaré Vladimir J. formellement recevable en la tierce opposition formée contre le jugement ayant ouvert la procédure de redressement judiciaire de l'Association Cultuelle Orthodoxe Russe,

L'en a débouté,

Condamné Vladimir J. aux dépens.

Les premiers juges l'ont dit recevable en tant qu'ancien président de l'association et staroste se prétendant créancier et débiteur de l'association, n'ayant été ni partie et/ou représenté à l'audience ayant conduit au jugement.

Ils ont maintenu la date de cessation des paiements fixée provisoirement au 17 avril 2017 résultant du rapport établi par l'administrateur provisoire de l'association remis au procureur de la République, disant que l'état de cessation des paiements et sa date d'intervention étaient motivés dans le jugement dont la rétractation était demandée.

Ils ont précisé qu'il n'existait aucune incompatibilité entre les fonctions d'administrateur provisoire exercées par Me H. avant l'ouverture de la procédure collective et celle d'administrateur judiciaire, ajoutant que les dispositions de l'article L. 621-4 alinéa 5 du code de commerce ne pouvaient proscrire sa désignation en qualité d'administrateur judiciaire investi d'une mission plénière.

Ils ont rappelé que Me H. a été l'administrateur provisoire de l'association dans le cadre d'un mandat de droit commun, or toute procédure de traitement des difficultés des entreprises, - suite à une ordonnance sur requête du 20 juin 2012, confirmée le 6 juin 2013, à l'issue duquel le compte de l'association était créditeur de 300.000 €,

- suite à une ordonnance sur requête du 23 décembre 2015, confirmée par une ordonnance de référé du 22 juin 2016, ayant élargi le périmètre de sa mission suite à sa désignation en qualité d'administrateur provisoire et non plus seulement de mandataire ad hoc,

et que Monsieur J. dont la gestion avait été stigmatisée et dénoncée au Procureur de la République s'était toujours opposé à cette administration provisoire.

Par acte du 17 octobre 2018 Monsieur Vladimir J. a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions n°2 'régularisées suite à la mise en liquidation judiciaire de l'ACOR', déposées et signifiées le 21 février 2019, tenues pour intégralement reprises, Monsieur Vladimir J. demande à la Cour de :

    Vu l'article L 661-2 du code de commerce :

    Vu l'article L 621-4 du code de commerce,

    Vu l'article L 811-10 du même code,

    Vu le jugement d'ouverture du redressement judiciaire du 18 mai 2017,

    Vu l'article 9 de la CEDH sur le respect de la liberté du culte,

    Réformer le jugement attaqué,

    Constater l'absence de motivation de la date de cessation des paiements,

    Constater que les motifs avancés par Me H. pour obtenir l'ouverture d'un redressement judiciaire sont de fausses allégations,

    Constater que le débiteur, représenté par le staroste ou le conseil d'administration n'a pas été consulté sur la demande d'ouverture de procédure de redressement judiciaire,

    Constater que l'église est fermée et qu'il n'est plus possible de recevoir des dons des fidèles et que les biens immobiliers ont été transférés à la Fédération de Russie,

    Constater les tentatives de récupération de l'Eglise orthodoxe russe par une autre obédience qui a proposé de la financer auprès de Me H. et la violation du principe de liberté de culte,

    Constater qu'en sa qualité d'administrateur provisoire puis d'administrateur judiciaire, Me H. a mis en cessation des paiements l'ACOR sous son mandat précédent, qu'il ne peut être de surcroît désigné comme administrateur judiciaire car son mandat d'administrateur provisoire a été ouvert dans les 18 mois précédents la mise en redressement judiciaire de l'ACOR et qu'il est redevable de sa gestion,

    Annuler le jugement susvisé et/ou désigner tel autre administrateur judiciaire que Me H. pour éviter tout conflit d'intérêts et qui veillera à la conformité des financements avec l'obédience de l'ACOR,

    Condamner solidairement, Me H., Me P. en paiement d'une somme de 25.000 € pour avoir trompé le procureur de la République et le tribunal par de fausses affirmations sur Monsieur J. pour obtenir le jugement du redressement judiciaire,

    Condamner solidairement Me H. et Me P. ainsi que l'ACOR au paiement d'une somme de 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Par conclusions déposées et notifiées le 28 février 2019, tenues pour intégralement reprises, Me D., ès qualités de liquidateur judiciaire de l'ACOR, désignée à ces fonctions le 20 décembre 2018, et Me Marie-Sophie P. ès qualités de mandataire ad hoc de l'ACOR, demandent à la Cour de :

    Constater la conversion de la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire par jugement du TGI de Grasse du 20 décembre 2018,

    Constater l'achèvement de la mission de Me H. ès qualités d'administrateur judiciaire de l'Association Cultuelle Orthodoxe Russe,

    Vu les articles L. 631-1 et suivants du code de commerce,

    Constater que l'Association Cultuelle Orthodoxe Russe, au jour de l'ouverture du redressement judiciaire, ne disposait d'aucune trésorerie, était dans l'incapacité de régler les factures exigibles, qu'elle était en état de cessation des paiements,

    Ecarter toute discussion relative à la représentation cultuelle de l'Association Cultuelle Orthodoxe Russe Saint Michel à Cannes,

    Dire régulière la désignation de Me H. ès qualités d'administrateur judiciaire de l'Association Cultuelle Orthodoxe Russe,

    Confirmer le jugement du 8 octobre 2018 en toutes ses dispositions,

    Déclarer Monsieur Vladimir J. irrecevable et, pour autant que de besoin, infondé en ses demandes nouvelles formées contre Me H. et Me P. à titre personnel,

    Dire le recours intenté par Monsieur J. abusif et dilatoire,

    Condamner Monsieur J. à verser à Me D. une somme de 25.000 € en application de l'article 1240 du code civil,

    Condamner Monsieur J. à verser à Me D., ès qualités, une somme de 5.000 e en vertu de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Par conclusions communiquées le 21 mai 2019 le PG a déclaré s'en rapporter à la décision de la Cour au vu des éléments susceptibles d'être produits par les parties et, à défaut, conclut à la confirmation de la décision entreprise.

MOTIFS

Attendu que la recevabilité de la tierce opposition formée par Monsieur Vladimir J., constatée par le jugement attaqué n'est pas contestée ;

Sur l'ouverture du redressement judiciaire :

Attendu qu'en vertu de l'article L. 631-1 du code de commerce : « Il est institué une procédure de redressement judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné aux articles L. 631-2 ou L. 631-3 qui, dans l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, est en cessation des paiements. Le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible n'est pas en cessation des paiements... »;

Attendu que Monsieur J. soutient que la reconnaissance de l'état d'une cessation des paiements et la décision d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire à l'égard de l'ACOR ne sont pas motivées ;

Attendu cependant que le jugement querellé a :

- dit que l'Association Cultuelle Orthodoxe Russe, personne morale de droit privé relevait des dispositions précitées,

- précisé qu'il ressortait de la requête présentée par le procureur de la République et de la correspondance de l'administrateur provisoire à ce dernier, de la synthèse des instances en cours remise par le conseil de l'ACOR, que la trésorerie de l'association était exsangue, que le compte ouvert à la caisse des dépôts et consignation étant à zéro, qu'une information judiciaire était ouverte sans que Me H. ait pu se constituer partie civile faute de fonds suffisants, que des demandes de paiement ne pouvaient être satisfaites, que des détournements de fonds étaient suspectés au regard des éléments communiqués à Me H.,

- exposé que le tribunal ne pouvait, dans ces circonstances, que constater l'état de cessation des paiements de l'ACOR ;

Attendu que les premiers juges ont suffisamment motivé et caractérisé l'état de cessation des paiements de l'ACOR et la date de cessation des paiements qu'ils ont fixé provisoirement au 17 avril 2017, date de leur saisine par requête du ministère public, au vu des éléments y figurant ;

Attendu qu'ils n'avaient pas à réclamer la présentation d'un 'véritable' rapport comptable ou financier disposant d'éléments suffisants pour apprécier la situation de l'association

Attendu que Monsieur J. reconnaît dans ses écritures l'état désastreux des finances de l'association relevé par l'administrateur, précisant que depuis la fermeture de l'église le 4 août 2015 plus aucune rentrée d'argent n'était possible et que depuis octobre 2014 la parcelle CI119 sur laquelle l'église et des bâtiments sont érigés, était la propriété de la Fédération de Russie et non plus de l'ACOR ;

Attendu que s'il conteste en appel les créances déclarées au passif de l'ACOR, dont la sienne au titre remboursement de frais d'un montant de 68.050,71 €, faisant valoir qu'elle se compense avec sa dette de 100.000 € à l'égard l'association au titre d'un prêt, il conclut cependant que « Me H. avait comme obligation de saisir le tribunal dès le mois de juin 2016, date de sa désignation en qualité d'administrateur provisoire, pour dénoncer l'état de solvabilité de l'ACOR » ce qui laisse entendre que l'ACOR était alors déjà en état de cessation des paiements ;

Attendu que ses allégations selon lesquelles l'administrateur provisoire aurait retardé la date de déclaration de la cessation des paiements aux fins de l'assigner ainsi que l'ASCM, association culturelle dont il est le président, et de se faire régler ses honoraires, et qu'il a ainsi mis l'ACOR en état de cessation des paiements sous son mandat précédent, est sans emport dans la présente instance sans lien avec l'action en responsabilité initiée par Monsieur J. à l'égard de Me H. ;

Attendu que le tribunal n'avait pas, pour décider de l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de l'ACOR, à scinder le passif issu de l'activité "normale" de l'ACOR et celui né sous le mandat de Me H. comme le demande Monsieur J., devant seulement apprécier si, au jour où il statuait, l'association était dans l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, lequel était inexistant comme le rappelle avec force Monsieur J. ;

Attendu que par ailleurs, les premiers juges, prenant acte de la proposition formulée par Metropolitan Hilarion, représentant du synode de Bishops, organe exécutif de l'Eglise Orthodoxe Russe organisant la vie ecclésiale orthodoxe russe en dehors des frontières de la Russie depuis 1920, de verser à l'administrateur désigné en cours de procédure de redressement judiciaire la somme de 25.000 € pour financer la période d'observation, ont considéré qu'il existait des perspectives de redressement ;

Attendu que le tribunal a ainsi parfaitement motivé sa décision d'ouvrir une procédure de redressement judiciaire avec période d'observation de 6 mois ;

Attendu que si Monsieur J. fait valoir que Me H. a demandé et obtenu l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire par de 'fausses déclarations', il sera relevé, en premier lieu, que le tribunal a été saisi par requête du procureur de la République, et, en second lieu, que le conseil de l'ACOR a informé le tribunal que la propriété de [...], savoir l'église orthodoxe ne serait plus celle de l'ACOR mais de l'Etat Fédération de Russie et qu'une procédure était en cours ; que le tribunal a arrêté sa décision en l'état de cet élément porté à sa connaissance ;

Attendu enfin que Me H. ayant été désigné administrateur provisoire de l'ACOR par l'ordonnance de référé de la Première vice-présidente du TGI de Grasse en date du 22 juin 2016, exécutoire de droit par provision, avec mission de représenter l'association dans toutes les instances pendantes devant les juridictions du premier degré et/ou la Cour d'appel, Monsieur J. qui n'était plus le représentant de l'ACOR n'avait pas à être convoqué à l'audience du 15 mai 2017 lors de laquelle a été examinée la requête du Procureur de la République en ouverture de redressement judiciaire à l'égard de l'ACOR ;

Attendu qu'il s'ensuit que l'appelant sera débouté de sa demande, d'une part, de nullité du jugement pour défaut de motivation suffisante et, d'autre part, de réformation sur l'état de la cessation des paiements et l'ouverture d'un redressement judiciaire à l'égard de l'ACOR ;

Sur la désignation de Me H. en qualité d'administrateur judiciaire :

En ce qui concerne la désignation d'un administrateur judiciaire :

Attendu qu'en vertu de l'article L. 621-4 du code de commerce applicable en matière de redressement judiciaire : 'Dans le jugement d'ouverture.... le tribunal désigne deux mandataires de justice qui sont le mandataire judiciaire et l'administrateur judiciaire, dont les fonctions sont respectivement définies à l'article L. 622-20 et à l'article L. 622-1....Toutefois, le tribunal n'est pas tenu de désigner un administrateur judiciaire lorsque la procédure est ouverte au bénéfice d'un débiteur dont le nombre de salariés et le chiffre d'affaires hors taxes sont inférieurs à des seuils fixés par décret en Conseil d'Etat. Dans ce cas, les dispositions du chapitre VII du présent titre sont applicables. Jusqu'au jugement arrêtant le plan, le tribunal peut, à la demande du débiteur, du mandataire judiciaire ou du ministère public, décider de nommer un administrateur judiciaire.' ;

Attendu que si, comme le fait valoir Monsieur J., le tribunal n'était pas tenu de désigner un administrateur provisoire dans cette procédure ouverte à l'égard de l'Association Cultuelle Orthodoxe Russe n'ayant pas de salarié, le procureur de la République a expressément demandé que soit désigné un administrateur judiciaire doté des pouvoirs les plus étendus et dit ne pas s'opposer à la désignation de Me H. en cette qualité ;

Attendu que le conseil de l'ACOR s'est associé à la demande du procureur de la République et a préconisé la désignation d'un administrateur judiciaire avec la mission la plus étendue ;

Attendu que le débiteur a donc fait connaître son avis au tribunal lors de l'audience du 15 mai 2017 sur la désignation d'un administrateur judiciaire ;

Attendu que le tribunal a considéré que la désignation d'un administrateur judiciaire s'imposait, étant rappelé que déjà l'administration de l'ACOR était confiée à un mandataire de justice depuis 2016 ;

Attendu dès lors que l'ACOR réunissait les conditions posées à l'article L 631-1 du code de commerce à l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire il incombait au tribunal de désigner les organes de la procédure, mandataire judiciaire et administrateur judiciaire ;

Attendu que Monsieur J. soutient que l'administrateur judiciaire, mandataire judiciaire laïc n'a pas qualité pour représenter l'association dans le domaine cultuel, - ce qui n'est pas contesté -, et Me H., en qualité d'administrateur judiciaire à la procédure de redressement judiciaire de l'ACOR, n'a d'ailleurs pas reçu une telle mission et elle ne pouvait lui être donnée, étant étrangère au périmètre de la procédure collective ;

Attendu que la Cour statuant en manière de procédure collective n'a pas à 'constater' les tentatives de récupération de l'Eglise orthodoxe russe par une autre obédience ne relevant pas du patriarcat de Constantinople ;

Attendu que la querelle entre différentes obédiences religieuses est sans emport dans la présente procédure ;

Attendu enfin que l'ouverture d'une procédure collective à l'égard d'une association, fût-elle cultuelle, dès lors que les conditions en sont réunies, ne porte par elle-même aucune atteinte au principe de liberté de culte ;

Attendu qu'il résulte de ce qui précède que la désignation d'un administrateur judiciaire à la procédure de redressement judiciaire de l'ACOR n'est pas valablement contestée par Monsieur J. ;

En ce qui concerne la désignation de Me H. en qualité d'administrateur judiciaire à la procédure de redressement judiciaire de l'ACOR :

Attendu que Monsieur J. soutient que Me H., administrateur provisoire de l'ACOR ne pouvait être désigné en qualité d'administrateur judiciaire à la procédure collective, en raison d'incompatibilités du fait de l'exercice de mandats d'administrateur provisoire et ad hoc les 18 mois précédents l'ouverture de la procédure collective ;

Attendu qu'en vertu de l'article L. 621-4 alinéa 5 du code de commerce ' Le ministère public peut soumettre à la désignation du tribunal le nom d'un ou de plusieurs administrateurs et mandataires judiciaires, sur lequel le tribunal sollicite les observations du débiteur. Le rejet de la proposition du ministère public est spécialement motivé. Le débiteur peut proposer le nom d'un ou plusieurs administrateurs. Lorsque la procédure est ouverte à l'égard d'un débiteur qui bénéficie ou a bénéficié d'un mandat ad hoc ou d'une procédure de conciliation dans les dix-huit mois qui précèdent, le ministère public peut en outre s'opposer à ce que le mandataire ad hoc ou le conciliateur soit désigné en qualité d'administrateur ou de mandataire judiciaire. Lorsque la procédure est ouverte à l'égard d'un débiteur dont le nombre de salariés est au moins égal à un seuil fixé par décret en Conseil d'Etat, le tribunal sollicite les observations des institutions mentionnées à l'article L. 3253-14 du code du travail sur la désignation du mandataire judiciaire et de l'administrateur judiciaire.' ;

Attendu que l'ACOR n'a pas bénéficié de mandat ad hoc ni de procédure de conciliation instaurés dans le cadre de la prévention des difficultés d'entreprise avant l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire ;

Attendu que Me H., comme parfaitement relevé par les premiers juges, n'a été titulaire que d'un mandat judiciaire d'administrateur provisoire, mandat de droit commun ;

Attendu qu'il sera en outre noté que dans l'hypothèse de l'article L. 621-4 alinéa 5, le ministère public n'a pas l'obligation mais seulement la faculté de s'opposer à ce qu'un mandataire ad hoc ou conciliateur soit désigné administrateur judiciaire, et rappelé que le procureur de la République à l'audience du 15 mai 2017 a dit ne pas s'opposer à sa désignation ;

Attendu que ce moyen est dès lors inopérant ;

Attendu que Monsieur J. se prévaut encore des dispositions de l'article L. 811-10 modifié par la loi 18 novembre 2016 du code de commerce selon lesquelles : 'La qualité d'administrateur judiciaire inscrit sur la liste est incompatible avec l'exercice de toute autre profession, à l'exception de celle d'avocat.

Elle est, par ailleurs, incompatible avec :

1°) Toutes les activités à caractère commercial, qu'elles soient exercées directement ou par personne interposée ;

2°) La qualité d'associé dans une société en nom collectif, d'associé commandité dans une société en commandite simple ou par actions, de gérant d'une société à responsabilité limitée, de président du conseil d'administration, membre du directoire, directeur général ou directeur général délégué d'une société anonyme, de président ou de dirigeant d'une société par actions simplifiée, de membre du conseil de surveillance ou d'administrateur d'une société commerciale, de gérant d'une société civile, à moins que ces sociétés n'aient pour objet l'exercice de la profession d'administrateur judiciaire ou d'une profession prévue au titre IV bis de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 précitée ou l'acquisition de locaux pour cet exercice. Un administrateur judiciaire peut en outre exercer les fonctions de gérant d'une société civile dont l'objet exclusif est la gestion d'intérêts à caractère familial.

La qualité d'administrateur judiciaire inscrit sur la liste ne fait pas obstacle à l'exercice d'une activité de consultation dans les matières relevant de la qualification de l'intéressé, ni à des activités rémunérées d'enseignement, ni à l'accomplissement des mandats de mandataire ad hoc, de conciliateur et de mandataire à l'exécution de l'accord prévus aux articles L. 611-3, L. 611-6 et L. 611-8 du présent code et par l'article L. 351-4 du code rural et de la pêche maritime, de commissaire à l'exécution du plan, d'administrateur ou de liquidateur amiable, d'expert judiciaire, de séquestre amiable ou judiciaire et d'administrateur en application des articles L. 612-34, L. 612-34-1 ou L. 613-51-1 du code monétaire et financier. Elle ne fait pas non plus obstacle à l'accomplissement de mandats de mandataire ad hoc et d'administrateur provisoire désignés en application de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis ou de mandataire de justice nommé en application de l'article 131-46 du code pénal, ni à l'exercice de missions pour le compte de l'Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués. Sans préjudice de l'article L. 663-2 du présent code, les mandats d'administrateur ou de liquidateur amiable, d'expert judiciaire et de séquestre amiable ou judiciaire ne peuvent être acceptés concomitamment ou subséquemment à une mesure de prévention, à une procédure collective ou à une mesure de mandat ad hoc ou d'administration provisoire prononcée sur le fondement de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précitée dans laquelle l'administrateur judiciaire a été désigné. Ces activités et ces mandats, à l'exception des mandats de mandataire ad hoc, de conciliateur, de mandataire à l'exécution de l'accord, de commissaire à l'exécution du plan et d'administrateur nommé en application des articles L. 612-34, L. 612-34-1 ou L. 613-51-1 du code monétaire et financier, ainsi que des mandats de mandataire ad hoc et d'administrateur provisoire désignés en application de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précitée ne peuvent être exercés qu'à titre accessoire.' ;

Attendu toutefois que les désignations de Me H. en qualité d'administrateur provisoire le 20 juin 2012, de mandataire ad hoc le 23 décembre 2015 et d'administrateur provisoire le 22 juin 2016 n'ont pas été prononcées sur le fondement de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 ;

Attendu que sa désignation en qualité d'administrateur judiciaire à la procédure de redressement judiciaire pour les raisons rappelées par les premiers juges dans le jugement attaqué, n'est ainsi frappée d'aucune incompatibilité avec l'exercice des mandats précités en 2012, 2015 et 2016 ;

Attendu qu'il sera précisé que suite à la conversion de la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire par décision du 20 décembre 2018, le TGI de Grasse a mis fin au mandat d'administrateur judiciaire de Me H. ;

Sur les autres demandes présentées par Monsieur J. :

Attendu que Monsieur J. élève de nombreuses récriminations à l'encontre de Me H. au titre de sa gestion en qualité d'administrateur provisoire de l'ACOR et précise avoir engagé à son encontre une instance en responsabilité ;

Attendu qu'en appel il élève des prétentions à l'encontre de Me H. et de Me P. recherchés à titre personnel ;

Attendu qu'il demande ainsi la condamnation solidaire de Me H. et de Me P. en paiement d'une somme de 25.000 € 'pour avoir trompé le procureur de la République et le tribunal par de fausses affirmations sur Monsieur J. pour obtenir le jugement du redressement judiciaire' ;

Attendu que cette demande dirigée à titre personnel contre l'administrateur judiciaire à la procédure de redressement judiciaire de l'ACOR et le mandataire ad hoc de l'association, non attraits personnellement à la procédure, qui ne relève pas de la compétence du tribunal de la faillite, et qui est nouvelle en cause d'appel, sera rejetée comme étant irrecevable ;

Attendu que Monsieur J. sera par ailleurs débouté de sa demande tendant à la condamnation solidaire de Me H. et Me P., mandataire ad hoc, ainsi que de l'ACOR au paiement d'une somme de 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Attendu que le recours en tierce opposition de Monsieur J. et l'appel interjeté du jugement l'ayant débouté de ses demandes, n'ont pas dégénéré en abus du droit d'ester en justice ;

Attendu que Monsieur Vladimir J. sera condamné à verser une indemnité de frais irrépétibles d'appel de 4.000 € à Me D., ès qualités de liquidateur judiciaire de l'ACOR,

Attendu que, partie succombante, il sera condamné aux entiers dépens ;

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement et par mise à disposition,

Vu le jugement du TGI de Grasse en date du 20 décembre 2018 ayant converti la procédure de redressement judiciaire de l'ACOR en liquidation judiciaire et ayant mis fin au mandat d'administrateur judiciaire de Me H.,

Confirme le jugement attaqué en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déclare irrecevable la demande nouvelle présentée par Monsieur J. contre Me H. et Me P., mandataire ad hoc de l'association, à titre personnel, de condamnation solidaire au paiement d'une somme de 25.000 € « pour avoir trompé le procureur de la République et le tribunal par de fausses affirmations sur Monsieur J. pour obtenir le jugement du redressement judiciaire »,

Dit qu'il n'appartient pas à la Cour statuant en matière d'ouverture de procédure de redressement judiciaire de :

- Constater les tentatives de récupération de l'Eglise orthodoxe russe par une autre obédience qui a proposé de la financer auprès de Me H. et la violation du principe de liberté de culte,

- Constater qu'en sa qualité d'administrateur provisoire puis d'administrateur judiciaire, Me H. a mis en cessation des paiements l'ACOR sous son mandat précédent,' ;

Déboute Monsieur J. du surplus de ses demandes, fins et conclusions,

Déboute Me Anne D., ès qualités, de sa demande de dommages et intérêts,

Condamne Monsieur Vladimir J. à verser à Me D., ès qualités, une indemnité de 4.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile en compensation des frais irrépétibles d'appel,

Condamne Monsieur Vladimir J. aux entiers dépens, ceux d'appel étant recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.