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Décisions

TUE, 5e ch., 29 septembre 2021, n° T 447/18

TRIBUNAL DE L'UNION EUROPÉENNE

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

TUIfly GmbH

Défendeur :

Commission européenne

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

D. Spielmann (rapporteur)

Juges :

U. Öberg, O. Spineanu Matei

Avocats :

M. Gayger, L. Giesberts

TUE n° T 447/18

29 septembre 2021

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

Arrêt

 Antécédents du litige

 Mesures en cause

1 La requérante, TUIfly GmbH, est une entreprise fournissant des services de transport aérien qui a été créée en janvier 2007 par la fusion des sociétés Hapag Lloyd Express GmbH et Hapag-Lloyd Flug. Après ladite fusion, la requérante a poursuivi les services de transport aérien antérieurement fournis par Hapag Lloyd Express (ci-après « HLX » ).

2 L’aéroport de Klagenfurt (ci-après « KLU ») se trouve en périphérie de la ville de Klagenfurt (Autriche), capitale du Land autrichien de Carinthie, une région montagneuse située au sud de l’Autriche. KLU a été fondé en 1915 en tant que base militaire et a rapidement été utilisé à des fins tant militaires que civiles. Cette double utilisation a toujours cours à ce jour. La piste de cet aéroport a une longueur de 2 270 mètres et n’a pas subi de modification depuis 2000. Le terminal dudit aéroport a une capacité maximale de 600 000 passagers.

3 L’exploitant de KLU est Kärntner Flughafen Betriebsgesellschaft mbH (ci-après « KFBG »). Il possède une filiale détenue à 100 %, Destinations Management GmbH (ci-après « DMG »), qui fournit différents services à l’aéroport. En particulier, DMG agissait en tant que consultant pour attirer les compagnies aériennes vers l’aéroport et a conclu plusieurs accords au titre desquels les compagnies aériennes recevaient des sommes d’argent considérables en échange de services de commercialisation.

4 En novembre 2002, DMG a lancé un appel d’offres pour une liaison aérienne entre Klagenfurt et une métropole européenne, à l’exception de Londres et de destinations situées à une distance de vol de moins de 500 kilomètres. Aucune offre n’ayant été présentée, l’appel d’offres a été retiré.

5 Par la suite, une procédure négociée a été menée sans publication préalable, au terme de laquelle un accord de coopération a été conclu avec HLX, en vigueur du 30 août 2003 au 31 mars 2008 (ci-après l’« accord de 2003 »). L’accord de 2003 prévoyait l’engagement de HLX à ouvrir et à exploiter les lignes entre Klagenfurt et les aéroports de Cologne-Bonn (Allemagne) et de Hanovre (Allemagne). À compter du 1er mai 2004, deux destinations supplémentaires s’y sont ajoutées, Hambourg (Allemagne) et Berlin (Allemagne). HLX s’engageait, en outre, à fournir un programme de services de commercialisation au profit de KLU, tel qu’un accompagnement publicitaire de l’offre de vols dans les médias locaux, régionaux et nationaux, sur Internet et par affichage publicitaire dans l’espace public. KFBG s’engageait à procéder à un paiement unique pour couvrir les coûts de lancement et à des versements mensuels pour les coûts de commercialisation.

6 En novembre 2003, DMG a lancé une nouvelle procédure d’appel d’offres pour l’ouverture de liaisons aériennes régulières entre Klagenfurt et des métropoles européennes, à l’exception de Londres et de destinations situées à une distance de vol de moins de 500 km. Aucune offre n’ayant été présentée, l’appel d’offres a été retiré.

7 Par la suite, une procédure négociée a été menée sans publication préalable, au terme de laquelle un accord de coopération a été conclu avec HLX. En janvier 2007, à la suite de la fusion de HLX et de la société Hapag-Lloyd Flug pour former la requérante, KFBG a conclu un accord de suivi avec cette dernière, le 10 décembre 2008. Cet accord est entré en vigueur le 1er avril 2008 et est venu à échéance le 31 mars 2013 (ci-après l’« accord de 2008 »).

8 Par l’accord de 2008, la requérante s’engageait à exploiter, durant la période de planification horaire de l’association internationale de transport aérien (IATA) pour l’été 2008, des lignes à destination de Cologne, de Hanovre, de Hambourg et de Berlin, en se fondant sur un volume de passagers escompté d’au moins 50 000 passagers au départ. Durant la période de planification horaire de l’IATA pour l’hiver 2008/2009, l’estimation était de 40 000 passagers au départ pour ces mêmes destinations. La requérante devait également fournir un ensemble de services de commercialisation dans le cadre de ce deuxième accord. En contrepartie de ces services, KFBG devait verser une somme annuelle et s’acquitter aussi d’un montant unique pour l’habillage publicitaire des avions.

 Procédure administrative

9 Le 22 février 2012, à la suite d’une plainte déposée par un concurrent d’une des compagnies aériennes présentes sur le marché européen du transport aérien de passagers et opérant à KLU, alléguant que celle-ci avait bénéficié d’aides d’État illégales, notamment de la part du Land de Carinthie, de la ville de Klagenfurt et de KLU, par l’intermédiaire de KFBG, la Commission européenne a, après avoir transmis ladite plainte à la République d’Autriche en demandant des renseignements supplémentaires, décidé d’ouvrir une procédure d’examen au titre de l’article 108, paragraphe 2, TFUE. Cette procédure a été étendue par une décision de la Commission datée du 23 juillet 2014.

10 La Commission a demandé un complément d’information aux autorités autrichiennes par lettres du 15 décembre 2014, des 13 janvier, 5 février, 19 mars et 25 septembre 2015. Les autorités autrichiennes ont répondu par lettres des 28 janvier, 12 février, 31 mars, 14 avril et 11 novembre 2015.

 Décision attaquée

11 Au terme de la procédure formelle d’examen, la Commission a adopté, le 11 novembre 2016, la décision (UE) 2018/628 concernant l’aide d’État SA.24221 (2011/C) (ex 2011/NN) mise à exécution par l’Autriche en faveur de l’aéroport de Klagenfurt, de Ryanair et d’autres compagnies aériennes utilisant l’aéroport (JO 2018, L 107, p. 1, ci-après la « décision attaquée »).

12 Dans la décision attaquée, la Commission a non seulement examiné l’existence éventuelle d’une aide illégale en faveur de la compagnie aérienne visée par la plainte mentionnée au point 9 ci-dessus, mais également la possible existence d’aides en faveur de KFBG et d’autres compagnies aériennes, parmi lesquelles la requérante.

13 En premier lieu, la Commission a considéré que le financement public de KFBG et de DMG entre 2000 et 2010 sous la forme de contributions financières constituait une aide au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE pour conclure que cette aide était compatible avec le marché intérieur. En particulier, la Commission a considéré que l’aide au fonctionnement consentie à KLU a contribué à la réalisation de l’objectif d’intérêt commun consistant à améliorer la desserte et le développement régional du Land de Carinthie par l’exploitation d’une infrastructure de transport et à répondre aux besoins du Land en matière de transports. Elle a également considéré que, sans l’aide en cause, KFBG et DMG auraient probablement été contraintes de se retirer du marché, ce qui aurait entraîné pour le Land de Carinthie la perte d’une infrastructure qui jouait un rôle important pour son accessibilité et son développement. Par ailleurs, la Commission a constaté l’existence d’un effet d’incitation, dès lors que, sans l’aide à l’exploitation, KLU aurait enregistré des pertes importantes dans la plupart des années concernées. Elle a aussi indiqué que les mesures en cause étaient limitées au minimum nécessaire et que KLU restait ouvert sans restrictions particulières aux compagnies aériennes qui souhaitaient l’utiliser.

14 En second lieu, la Commission a qualifié d’aides incompatibles avec le marché intérieur l’accord de 2003 et l’accord de 2008 (ci-après, pris ensemble, les « accords litigieux »).

15 En particulier, la Commission, en appliquant les lignes directrices sur les aides d’État aux aéroports et aux compagnies aériennes, publiées au Journal officiel le 4 avril 2014 (JO 2014, C 99, p. 3, ci-après les « lignes directrices de 2014 »), a opté pour l’analyse ex ante de la rentabilité supplémentaire (ou marginale) dans le cadre de l’application du critère de l’investisseur privé en économie de marché aux relations entre aéroports et compagnies aériennes.

16 Par ailleurs, dans la mesure où, selon elle, le résultat actualisé attendu pour les accords litigieux était négatif, la Commission est arrivée à la conclusion que KFBG ne s’était pas comportée en investisseur privé en économie de marché lors de la signature de ces accords et qu’elle avait, par sa décision de conclure les accords à ces conditions, octroyé un avantage économique à HLX et à la requérante.

17 Quant à la compatibilité de l’accord de 2003 avec le marché intérieur, la Commission l’a appréciée au regard des principes énoncés ci-dessus, directement sur la base de l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE. Elle a considéré que l’aide n’était pas compatible avec le marché intérieur, dès lors qu’elle ne remplissait pas la condition selon laquelle l’aide devait être limitée dans le temps et concerner une route susceptible de devenir rentable.

18 S’agissant de la compatibilité de l’accord de 2008 avec le marché intérieur, la Commission l’a appréciée au regard des lignes directrices communautaires sur le financement des aéroports et les aides d’État au démarrage pour les compagnies aériennes au départ d’aéroports régionaux (JO 2005, C 312, p. 1, ci-après les « lignes directrices de 2005 »).

19 La Commission a relevé que l’accord de 2008 ne prévoyait aucune connexion entre l’aide octroyée et les coûts éligibles. Elle a donc demandé à la République d’Autriche de lui fournir des informations sur la relation entre l’aide et les coûts éligibles. Selon la décision attaquée, ni la République d’Autriche ni les tiers qui ont présenté des observations sur la décision relative à l’ouverture de la procédure formelle d’examen n’ont fourni ces informations. Dans ce contexte, la Commission a conclu que la condition de compatibilité prévue au paragraphe 79 des lignes directrices de 2005, à savoir que le montant de l’aide octroyée ne dépasse pas, chaque année, 50 % du montant des coûts éligibles de cette année et, sur la durée de l’aide, une moyenne de 30 % des coûts éligibles, n’était pas remplie.

20 La partie pertinente du dispositif de la décision attaquée se lit comme suit :

Article 7

L’aide d’État d’un montant de 9 566 963 EUR que [la République d’Autriche] a accordée illégalement à [HLX], en violation de l’article 108, paragraphe 3, TFUE, est incompatible avec le marché intérieur.

Article 8

L’aide d’État d’un montant de 1 134 091 EUR que [la République d’Autriche] a accordée illégalement à [la requérante], en violation de l’article 108, paragraphe 3, TFUE, est incompatible avec le marché intérieur.

Article 9

1. [La République d’Autriche] est tenue de se faire rembourser les aides visées aux articles 5 à 8 par les bénéficiaires.

2. Les sommes à récupérer produisent des intérêts à partir de la date à laquelle elles ont été mises à la disposition des bénéficiaires, jusqu’à leur récupération effective.

3. Les intérêts sont calculés sur une base composée conformément au chapitre V du règlement (CE) no 794/2004, modifié en dernier lieu par le règlement (CE) no 271/2008 de la Commission.

4. [La République d’Autriche] annule tous les paiements en suspens des aides visées aux articles 1er à 4, à compter de la date d’adoption de la présente décision.

Article 10

1. La récupération des aides visées aux articles 5 à 8 est immédiate et effective.

2. [La République d’Autriche] veille à ce que la présente décision soit mise en œuvre dans les quatre mois suivant la date de sa notification.

Article 11

1. Dans un délai de deux mois à compter du jour où la présente décision a été communiquée, communique les renseignements suivants à la Commission :

a) le montant total (principal et intérêts) à récupérer auprès des bénéficiaires ;

b) une description détaillée des mesures déjà prises et prévues pour se conformer à la présente décision ;

c) les documents démontrant que les bénéficiaires ont été mis en demeure de rembourser l’aide.

2. [La République d’Autriche] tient la Commission informée de l’avancement des mesures nationales prises pour mettre en œuvre la présente décision jusqu’à la récupération complète de l’aide visée aux articles 5 à 8. Elle communique sans délai, sur simple demande de la Commission, toute information concernant les mesures prises et envisagées pour se conformer aux exigences de la présente décision. Elle fournit aussi des informations détaillées concernant les montants de l’aide et des intérêts déjà récupérés auprès des bénéficiaires. »

 Demande d’accès aux documents

21 Par lettre du 2 mai 2018, la requérante a demandé, sur le fondement du règlement (CE) no 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO 2001, L 145, p. 43), l’accès aux documents inclus au dossier afférent à la procédure ayant abouti à l’adoption de la décision attaquée.

22 Par décision du 28 mai 2018, la Commission a refusé l’accès à ce dossier. En particulier, elle a communiqué à la requérante la référence de publication de la décision attaquée au Journal officiel de l’Union européenne et l’a également informée que le délai pour saisir le Tribunal n’avait pas encore expiré. Par ailleurs, elle a refusé l’accès aux autres documents contenus dans le dossier de l’affaire, en se fondant, d’une part, sur les exceptions relatives à la protection des intérêts commerciaux et des objectifs des activités d’inspection, d’enquête et d’audit prévues à l’article 4, paragraphe 2, premier et troisième tirets, du règlement no 1049/2001 et, d’autre part, sur le risque d’atteinte grave au processus décisionnel d’une institution, visé à l’article 4, paragraphe 3, du même règlement.

23 Par courrier électronique du 18 juin 2018, la requérante a présenté une demande confirmative d’accès au dossier au sens de l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001.

24 Par la décision C(2018) 5432 final, du 3 août 2018, la Commission a rejeté la demande confirmative d’accès au dossier de la requérante, en se fondant sur l’article 4, paragraphe 2, premier et troisième tirets, et sur l’article 4, paragraphe 3, du règlement no 1049/2001.

25 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 15 octobre 2018, la requérante a formé un recours enregistré sous le numéro d’affaire T 619/18 et tendant à l’annulation de la décision C(2018) 5432 final.

 Procédure et conclusions des parties

26 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 18 juillet 2018, la requérante a introduit le présent recours.

27 La Commission a déposé le mémoire en défense le 28 septembre 2018.

28 La requérante et la Commission ont déposé respectivement une réplique et une duplique le 12 décembre 2018 et le 22 février 2019.

29 Par décision du président de la cinquième chambre du Tribunal du 9 décembre 2019, les affaires T 619/18 et T 447/18 ont été jointes aux fins de la phase orale de la procédure, conformément à l’article 68 du règlement de procédure du Tribunal.

30 Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89 du règlement de procédure, a invité les parties à répondre à certaines questions. Les parties ont répondu dans les délais impartis.

31 Un membre de la chambre étant empêché de siéger, le président de la cinquième chambre a désigné, en application de l’article 17, paragraphe 2, du règlement de procédure, un autre juge pour compléter la formation de jugement.

32 Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 29 septembre 2020.

33 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

– annuler les articles 7 et 8 de la décision attaquée, ainsi que les articles 9, 10 et 11 de cette décision dans la mesure où ils se réfèrent aux articles 7 et 8 de ladite décision ;

– condamner la Commission aux dépens.

34 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

– rejeter le recours ;

– condamner la requérante aux dépens.

 En droit

35 À l’appui de son recours, la requérante invoque, en substance, sept moyens. Le premier est tiré de la violation du principe de bonne administration consacré par l’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») et des droits de la défense. Le deuxième moyen est tiré de la violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE du fait que la Commission n’a pas établi que la requérante a été favorisée de manière sélective. Par le troisième moyen, la requérante invoque une violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE du fait que la Commission a outrepassé sa marge d’appréciation dans l’application du critère de l’investisseur privé en économie de marché. Le quatrième moyen est tiré de la violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE du fait que la Commission n’a pas suffisamment instruit les faits dans le cadre de l’application du critère de l’investisseur privé en économie de marché. Par le cinquième moyen, la requérante évoque une violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, du fait que la Commission n’a pas suffisamment instruit les faits lors de l’analyse de rentabilité dans le cadre de l’application du critère de l’investisseur privé en économie de marché. Les sixième et septième moyens sont, respectivement, tirés de la violation de l’article 107, paragraphe 3, TFUE, du fait que la Commission a appliqué un critère disproportionnellement sévère lors de l’examen de la justification avancée et du fait qu’elle n’a pas suffisamment instruit les faits quant à la compatibilité des aides en cause avec le marché intérieur.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation du principe de bonne administration consacré par l’article 41 de la Charte et des droits de la défense

36 La requérante soutient que, en vertu de l’article 2, paragraphe 1, du règlement no 1049/2001 et de l’article 41, paragraphe 1, et paragraphe 2, sous b), de la Charte, elle avait le droit d’accès au dossier de l’affaire ayant abouti à la décision attaquée. Elle relève que, bien que la République d’Autriche soit le destinataire de la décision attaquée, cette dernière est également dirigée, au moins dans les faits, contre le bénéficiaire de l’aide. Elle soutient que le règlement (UE) 2015/1589 du Conseil, du 13 juillet 2015, portant modalités d’application de l’article 108 TFUE (JO 2015, L 248, p. 9), doit être interprété de manière conforme aux droits fondamentaux, tout en ajoutant que le droit d’accès au dossier ne compromet pas l’enquête menée par la Commission.

37 La requérante fait également valoir que rien ne justifie, d’une part, qu’on lui reconnaisse d’être directement et individuellement concernée par la décision attaquée et, d’autre part, qu’on lui refuse de faire valoir ses droits procéduraux fondamentaux, dont le droit d’accès au dossier, en la considérant simplement comme une source d’informations.

38 Elle ajoute qu’aucun intérêt commercial de personnes physiques ou morales tierces ne s’oppose à ce qu’il soit fait droit à sa demande d’accès au dossier. Elle soutient que les actes visés par sa demande d’accès contiennent uniquement des informations historiques relatives aux entreprises et aux autorités publiques impliquées et datent d’au moins neuf ans. Enfin, la requérante allègue que la Commission a violé le principe de proportionnalité en raison de son refus total d’accès au dossier. Elle estime que la Commission était tenue, avant de refuser tout accès au dossier, d’envisager tout autre moyen moins contraignant susceptible de mieux protéger sa situation juridique.

39 La Commission conteste les arguments avancés par la requérante.

40 En premier lieu, il convient de relever que l’article 41 de la Charte prévoit le droit à une bonne administration. Aux termes du paragraphe 1 de cet article, toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions de l’Union européenne.

41 En second lieu, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la procédure de contrôle des aides d’État prévue à l’article 108 TFUE est une procédure ouverte uniquement à l’encontre de l’État membre responsable de l’octroi de l’aide. Seul l’État membre concerné, en tant que destinataire de la future décision de la Commission, peut donc se prévaloir de véritables droits de la défense. En revanche, les entreprises bénéficiaires des aides et leurs concurrents sont uniquement considérés comme étant des intéressés dans la procédure, au sens de l’article 108, paragraphe 2, TFUE. Aucune disposition ne réserve, parmi les intéressés, un rôle particulier aux bénéficiaires de l’aide. Ces derniers ne peuvent se prévaloir de droits aussi étendus que les droits de la défense en tant que tels et ne sauraient valablement prétendre à un débat contradictoire avec la Commission (voir arrêt du 13 décembre 2018, Ryanair et Airport Marketing Services/Commission, T 111/15, non publié, EU:T:2018:954, point 46 et jurisprudence citée).

42 Ainsi, les intéressés, contrairement à l’État membre responsable de l’octroi de l’aide, ne disposent pas, dans le cadre de la procédure de contrôle des aides d’État, du droit de consulter les documents du dossier administratif de la Commission (arrêt du 29 juin 2010, Commission/Technische Glaswerke Ilmenau, C 139/07 P, EU:C:2010:376, point 58).

43 Les intéressés ont essentiellement le rôle de sources d’information pour la Commission dans la procédure de contrôle des aides d’État. Il s’ensuit que, loin de pouvoir se prévaloir des droits de la défense reconnus aux personnes à l’encontre desquelles une procédure est ouverte, les intéressés disposent du seul droit d’être associés à la procédure dans une mesure adéquate tenant compte des circonstances du cas d’espèce (voir arrêt du 12 mai 2011, Région Nord-Pas-de-Calais et Communauté d’agglomération du Douaisis/Commission, T 267/08 et T 279/08, EU:T:2011:209, point 74 et jurisprudence citée).

44 C’est à la lumière de ces principes qu’il convient d’examiner le présent moyen.

45 À cet égard, il n’est pas contesté que la requérante est une partie intéressée au sens de l’article 108, paragraphe 2, TFUE, de sorte qu’elle a le droit de voir l’enquête de la Commission relative à ses accords avec KFBG et DMG menée de manière impartiale et équitable au sens de l’article 41, paragraphe 1, de la Charte, et ce d’autant plus que la qualification d’aide d’État de ses accords commerciaux avec KFBG et DMG a entraîné pour elle des conséquences financières en termes de recouvrement des montants reçus.

46 Toutefois, le raisonnement de la requérante ne peut être suivi, lorsqu’elle considère que l’article 2, paragraphe 1, du règlement no 1049/2001 et l’article 41, paragraphes 1 et 2, sous b), de la Charte lui accordent le droit d’accès au dossier administratif de la Commission en matière d’aides d’État.

47 D’une part, les arguments de la requérante avancés au soutien de l’annulation de la décision attaquée et tirés de la prétendue violation du règlement no 1049/2001 doivent être écartés comme inopérants. En particulier, le droit de consulter le dossier administratif dans le cadre d’une procédure de contrôle ouverte conformément à l’article 108 TFUE et le droit d’accès aux documents, en vertu du règlement no 1049/2001, se distinguent juridiquement, ils s’exercent dans le cadre de deux procédures bien distinctes à l’issue desquelles sont adoptées des décisions indépendantes avec des voies de recours différentes.

48 En l’espèce, la décision attaquée a été prise sur la base des articles 107 et 108 TFUE et non sur le fondement du règlement no 1049/2001. En effet, ainsi qu’il ressort des points 21 à 25 ci-dessus, la demande de la requérante du 2 mai 2018, sur le fondement du règlement no 1049/2001, de se voir accorder l’accès aux documents inclus au dossier afférent à la procédure ayant abouti à l’adoption de la décision attaquée a été rejetée en vertu de la décision C(2018) 5432 final et, par la suite, la requérante a formé un recours distinct du présent recours, enregistré sous le numéro d’affaire T 619/18, tendant à l’annulation de cette décision.

49 Par conséquent, dès lors que les arguments de la requérante tirés de la prétendue violation du règlement no 1049/2001 trouvent leurs fondements dans un règlement n’ayant pas servi de base juridique à la décision attaquée, il y a lieu de les rejeter comme inopérants.

50 En ce qui concerne le reste des arguments de la requérante, il y a lieu de noter que, si le droit à une bonne administration, prévu à l’article 41, paragraphe 1, de la Charte, reflète l’obligation d’examiner avec soin et impartialité tous les éléments de l’affaire, l’article 41, paragraphe 2, de la Charte énumère, quant à lui, un ensemble de droits à respecter par l’administration de l’Union, y compris les droits de la défense, qui comportent le droit d’être entendu et le droit d’accès au dossier.

51 Or, dans la procédure de contrôle des aides d’État, la requérante, en tant que bénéficiaire de l’aide, ne peut se prévaloir de véritables droits de la défense.

52 Il a déjà été jugé que la Charte n’avait pas pour objet de modifier la nature du contrôle des aides d’État mis en place par le traité FUE ou de conférer à des tiers un droit de regard que l’article 108 TFUE ne prévoyait pas (arrêt du 13 décembre 2018, Ryanair et Airport Marketing Services/Commission, T 111/15, non publié, EU:T:2018:954, point 54 ; voir également, en ce sens, arrêt du 6 juillet 2017, SNCM/Commission, T 1/15, non publié, EU:T:2017:470, point 86).

53 À cet égard, la Cour a jugé que, si les intéressés dans une procédure de contrôle des aides d’État étaient en mesure d’obtenir l’accès aux documents du dossier administratif de la Commission, le régime de contrôle des aides d’État serait mis en cause. En effet, indépendamment de la base juridique sur laquelle il est accordé, l’accès au dossier permet aux intéressés d’obtenir l’ensemble des observations et des documents présentés à la Commission et, le cas échéant, de prendre position sur ces éléments dans leurs propres observations, ce qui est susceptible de modifier la nature de ladite procédure (voir arrêt du 13 décembre 2018, Ryanair et Airport Marketing Services/Commission, T 111/15, non publié, EU:T:2018:954, point 55 et jurisprudence citée).

54 De même, l’obligation pour la Commission de communiquer préalablement à la requérante les éléments sur lesquels elle entend fonder sa décision définitive reviendrait à établir un débat contradictoire tel que celui ouvert au profit de l’État membre responsable de l’octroi de l’aide, alors que la requérante n’a, en tant que bénéficiaire, pour l’essentiel, qu’un rôle de source d’information dans la procédure (arrêt du 15 novembre 2011, Commission et Espagne/Government of Gibraltar et Royaume-Uni, C 106/09 P et C 107/09 P, EU:C:2011:732, points 180 et 181).

55 Il s’ensuit que la Commission, en adoptant la décision attaquée sans avoir accordé l’accès au dossier, n’a méconnu ni le principe de bonne administration prévu à l’article 41, paragraphes 1 et 2, de la Charte, ni les droits de la défense de la requérante, sans préjudice, toutefois, du respect de ses droits procéduraux en tant que partie intéressée garantis par l’article 108, paragraphe 2, TFUE.

56 Quant aux autres arguments soulevés par la requérante, ils ne sauraient être retenus pour les raisons qui suivent.

57 En premier lieu, s’agissant de l’argument de la requérante tiré de l’absence d’intérêts commerciaux de tiers qui s’opposeraient à son accès au dossier de l’affaire, il convient de relever que celui-ci est en substance tiré de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001. Or, au regard des considérations exposées aux points 47 à 49 ci-dessus, cet argument doit être rejeté comme inopérant.

58 En second lieu, quant au grief de la requérante pris de ce que le principe de proportionnalité aurait été méconnu en ce que lui a été refusé la possibilité d’un accès partiel au dossier, il y a lieu de rappeler que, compte tenu de l’analyse précédente, la divulgation des documents constituant le dossier concerné échappe à toute obligation de divulgation de leur contenu, que cela ait trait au nombre des documents concernés ou au nombre des personnes habilitées à les consulter (voir, en ce sens, arrêt du 12 février 2019, Hércules Club de Fútbol/Commission, T 134/17, non publié, EU:T:2019:80, point 67). En effet et en tout état de cause, l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001 fait référence à « l’accès à un document » de façon générale sans procéder à aucune distinction entre le nombre des personnes auxquelles ledit droit serait accordé.

59 Par conséquent, outre le fait que ce grief de la requérante est principalement dirigé contre la décision C(2018) 5432 qui n’est pas visée par le présent recours, le refus d’accès partiel au dossier de l’affaire n’enfreint pas le principe de proportionnalité.

60 Il y a donc lieu de rejeter le premier moyen comme non fondé.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation du critère de sélectivité prévu à l’article 107, paragraphe 1, TFUE

61 La requérante soutient que la Commission a enfreint l’article 107, paragraphe 1, TFUE en n’établissant pas que l’avantage qu’elle aurait obtenu était sélectif. Elle estime que la sélectivité matérielle des mesures en cause fait manifestement défaut, puisque des appels d’offres ouverts avaient eu lieu avant que les contrats de commercialisation litigieux n’aient été conclus entre, d’une part, KFBG et DMG et, d’autre part, HLX et elle-même. Toutes les compagnies aériennes intéressées auraient donc eu les mêmes chances de présenter une offre pour les lignes en question et la requérante n’aurait pas bénéficié d’un avantage spécifique. La requérante ajoute qu’il ne peut y avoir d’avantage sélectif en faveur d’un utilisateur spécifique de l’aéroport lorsque l’infrastructure est accessible à tous les utilisateurs potentiels. Elle relève également l’existence d’un lien direct entre l’accord de 2003 et l’appel d’offres précédent qui, faute d’offres suffisantes, a été retiré. Elle ajoute à cet égard qu’il découle de la nature même des procédures d’appel d’offres que l’entité publique ne conclut, en définitive, le contrat qu’avec un seul partenaire commercial. En outre, elle relève qu’il n’y avait que des différences minimes entre les conditions énoncées dans l’appel d’offres et celles prévues par les accords litigieux.

62 La Commission conteste les arguments avancés par la requérante.

63 Il convient de rappeler que l’article 107, paragraphe 1, TFUE interdit les aides « favorisant certaines entreprises ou certaines productions », c’est-à-dire les aides sélectives (arrêt du 14 janvier 2015, Eventech, C 518/13, EU:C:2015:9, point 54).

64 Il importe de rappeler également que, selon la jurisprudence, l’exigence de sélectivité découlant de l’article 107, paragraphe 1, TFUE doit être clairement distinguée de la détection concomitante d’un avantage économique en ce que, lorsque la Commission a décelé la présence d’un avantage, pris au sens large, découlant directement ou indirectement d’une mesure donnée, elle était tenue d’établir, en outre, que cet avantage profitait spécifiquement à une ou à plusieurs entreprises. Il lui incombe, pour ce faire, de démontrer, en particulier, que la mesure en cause introduit des différenciations entre les entreprises se trouvant, au regard de l’objectif poursuivi, dans une situation comparable. Il faut donc que l’avantage soit octroyé de façon sélective et qu’il soit susceptible de placer certaines entreprises dans une situation plus favorable que d’autres (arrêts du 4 juin 2015, Commission/MOL, C 15/14 P, EU:C:2015:362, point 59, et du 30 juin 2016, Belgique/Commission, C 270/15 P, EU:C:2016:489, point 48).

65 Selon la jurisprudence, il convient de distinguer selon que la mesure en cause est envisagée comme un régime général d’aide ou comme une aide individuelle. Dans ce dernier cas, l’identification de l’avantage économique permet, en principe, de présumer de sa sélectivité (voir, en ce sens, arrêts du 4 juin 2015, Commission/MOL, C 15/14 P, EU:C:2015:362, point 60 ; du 30 juin 2016, Belgique/Commission, C 270/15 P, EU:C:2016:489, point 49, et du 13 décembre 2018, Ryanair et Airport Marketing Services/Commission, T 165/15, EU:T:2018:953, point 400).

66 En l’espèce, il ressort de la décision attaquée que la Commission a considéré que les accords litigieux comportaient des aides individuelles.

67 En premier lieu, s’agissant de l’accord de 2003, la Commission a constaté, au considérant 440 de la décision attaquée, que « l’avantage économique a été octroyé de manière sélective puisqu’une seule compagnie aérienne, à savoir HLX, en a profité ». Elle a constaté, en outre, que ledit accord « s’écart[ait] aussi bien du barème des redevances que des accords conclus avec d’autres compagnies aériennes ».

68 En second lieu, s’agissant de l’accord de 2008, la Commission a relevé, au considérant 461 de la décision attaquée, que « l’avantage économique a été octroyé de manière sélective puisqu’une seule compagnie aérienne, à savoir la requérante, en a profité », en ajoutant, à cet égard, que « l[edit] accord […] s’écart[ait] aussi bien du barème des redevances que des accords conclus avec d’autres compagnies aériennes ».

69 Il y a lieu d’approuver cette analyse. En effet, les accords litigieux comportent des termes individuellement convenus entre les parties. Ainsi qu’il ressort des considérants 67 à 68 et 74 à 75 de la décision attaquée, les deux accords précisent ou déterminent, d’une part, les liaisons aériennes devant être assurées par HLX et par la requérante ainsi que le programme de services de commercialisation au profit de KLU qu’elles devaient fournir. D’autre part, en ce qui concerne l’accord de 2003, selon le considérant 69 de la décision attaquée, KFBG était tenue de procéder à un paiement unique pour les coûts de lancement des nouvelles lignes et au paiement d’un montant mensuel pour les services de commercialisation. En ce qui concerne l’accord de 2008, il ressort du considérant 76 de la décision attaquée, que KFBG était tenue de s’acquitter d’une somme annuelle pour ces services de commercialisation ainsi que d’un montant unique pour l’habillage publicitaire des avions.

70 Par ailleurs, il y a lieu d’écarter l’allégation de la requérante selon laquelle la sélectivité matérielle des mesures fait défaut dès lors que, avant la conclusion des accords litigieux, des appels d’offres ouverts ont eu lieu et toutes les compagnies aériennes intéressées ont eu les mêmes chances de présenter une offre pour les lignes en question. En effet, ainsi qu’il ressort clairement de la décision attaquée et sans que cela soit contredit par la requérante, les appels d’offres lancés par DMG en novembre 2002 et en novembre 2003 ont été retirés faute de participation et d’offres. Il s’ensuit que les accords litigieux, qui comportent des conditions spécifiquement consenties entre, d’une part, KFBG et DMG et, d’autre part, HLX et la requérante et qui induisent un avantage en faveur de ces dernières, ont, de ce fait, un caractère sélectif.

71 À cet égard, l’argument de la requérante tiré de la ressemblance entre les conditions négociées dans les accords litigieux et celles indiquées dans les appels d’offres n’est pas de nature à invalider cette conclusion. En effet, ainsi qu’il est admis par la requérante elle-même, les conditions prévues dans les appels d’offres étaient similaires, mais non identiques, à celles convenues entre, d’une part, HLX et elle et, d’autre part, KFBG et DMG.

72 De même, s’agissant de l’arrêt du 9 septembre 2014, Hansestadt Lübeck/Commission (T 461/12, EU:T:2014:758), invoqué par la requérante, il y a lieu de relever qu’il n’est pas pertinent en l’espèce, étant donné qu’il visait une mesure s’appliquant à un ensemble d’opérateurs économiques. Dans un tel cas, l’examen de la sélectivité doit être effectué dans le cadre du régime juridique déterminé afin d’apprécier si cette mesure constitue un avantage pour certaines entreprises par rapport à d’autres se trouvant, au regard de l’objectif poursuivi par ce régime, dans une situation factuelle et juridique comparable (arrêt du 21 décembre 2016, Commission/Hansestadt Lübeck, C 524/14 P, EU:C:2016:971, points 53 et 54). Or, tel n’est pas le cas en l’espèce, au regard notamment de la rémunération pour les services de commercialisation spécifiquement convenue entre, d’une part, KFBG et DMG et, d’autre part, HLX et la requérante.

73 Compte tenu de ce qui précède, il convient de rejeter le deuxième moyen comme non fondé.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE du fait que la Commission aurait outrepassé sa marge d’appréciation dans l’application du critère de l’investisseur privé en économie de marché

74 La requérante allègue que la Commission a violé l’article 107, paragraphe 1, TFUE lors de l’application du critère de l’investisseur privé en économie de marché. Elle estime que celle-ci a illégalement outrepassé sa marge d’appréciation, telle qu’elle lui est reconnue par la jurisprudence, en commettant une série d’erreurs. Elle soutient que, en procédant à une analyse de rentabilité ex ante, focalisée sur les seuls coûts incrémentaux de certaines liaisons aériennes, la Commission a appliqué, sans fournir d’explications détaillées, les critères sévères énoncés dans les lignes directrices de 2014, alors même que les accords litigieux avaient été conclus en 2003 et en 2008. À cet égard, l’application de ces critères serait la source des erreurs d’appréciation subséquentes que la Commission aurait commises lors de l’application du critère de l’investisseur privé en économie de marché. La requérante ajoute que, en appliquant les principes énoncés dans les lignes directrices de 2014, la Commission a ignoré les particularités économiques du secteur des transports aériens qui était en pleine croissance dans les années 1990 et 2000. De son avis, en raison de l’application des principes émanant des lignes directrices de 2014, la Commission n’a aucunement tenu compte de l’importance du marketing stratégique pour KLU dans le but de consolider sa notoriété au niveau transrégional.

75 La Commission conteste les arguments avancés par la requérante.

76 Il convient de relever d’emblée que, par ce moyen, la requérante conteste, en substance, le critère mis en œuvre par la Commission lors de l’application du critère de l’investisseur privé en économie de marché en alléguant, en particulier, que la Commission a commis une erreur de procédure en raison de l’application en l’espèce des lignes directrices de 2014, qui seraient « sévères ».

77 Selon une jurisprudence constante de la Cour, la notion d’aide d’État, telle qu’elle est définie dans le traité FUE, présente un caractère juridique et doit être interprétée sur la base d’éléments objectifs. Pour cette raison, le juge de l’Union doit, en principe et compte tenu tant des éléments concrets du litige qui lui est soumis que du caractère technique ou complexe des appréciations portées par la Commission, exercer un entier contrôle en ce qui concerne la question de savoir si une mesure entre dans le champ d’application de l’article 107, paragraphe 1, TFUE (voir arrêt du 21 juin 2012, BNP Paribas et BNL/Commission, C 452/10 P, EU:C:2012:366, point 100 et jurisprudence citée).

78 Il ressort de la jurisprudence que les conditions que doit remplir une mesure pour relever de la notion d’aide au sens de l’article 107 TFUE ne sont pas satisfaites si l’entreprise bénéficiaire pouvait obtenir le même avantage que celui qui a été mis à sa disposition au moyen de ressources d’État dans des circonstances qui correspondent aux conditions normales du marché (voir arrêt du 5 juin 2012, Commission/EDF, C 124/10 P, EU:C:2012:318, point 78 et jurisprudence citée ; arrêt du 24 janvier 2013, Frucona Košice/Commission, C 73/11 P, EU:C:2013:32, point 70). Cette appréciation s’effectue en principe par l’application du critère de l’opérateur en économie de marché (arrêt du 13 décembre 2018, Ryanair et Airport Marketing Services/Commission, T 165/15, EU:T:2018:953, point 139).

79 En vue de déterminer si une mesure étatique constitue une aide, il y a lieu d’apprécier si, dans des circonstances similaires, un opérateur en économie de marché, d’une taille qui puisse être comparée à celle des organismes gérant le secteur public, aurait pu être amené à conclure les accords concernés (arrêt du 13 décembre 2018, Ryanair et Airport Marketing Services/Commission, T 165/15, EU:T:2018:953, point 140 ; voir également, en ce sens, arrêts du 21 mars 1990, Belgique/Commission, C 142/87, EU:C:1990:125, point 29).

80 Par ailleurs, le choix de l’instrument approprié appartient à la Commission dans le cadre de son obligation de faire une analyse complète de tous les éléments pertinents de l’opération litigieuse et de son contexte, y compris de la situation de l’entreprise bénéficiaire et du marché concerné, pour vérifier si l’entreprise bénéficiaire a perçu un avantage économique qu’elle n’aurait pas obtenu dans des conditions normales de marché (arrêt du 13 décembre 2018, Ryanair et Airport Marketing Services/Commission, T 165/15, EU:T:2018:953, point 142).

81 En l’espèce, l’argument de la requérante selon lequel la Commission a erronément appliqué les lignes directrices de 2014, qui, par ailleurs, définiraient des critères « sévères », est inopérant et, en tout état de cause, non fondé.

82 En particulier, compte tenu de la jurisprudence citée aux points78 à 80 ci-dessus, la question qui se pose dans le cadre du présent moyen n’est pas celle de savoir si la Commission a correctement opté pour les lignes directrices de 2014 au lieu d’appliquer d’autres lignes directrices qui seraient prétendument « moins sévères ». Plus précisément, le choix d’une méthode appropriée à l’aune de laquelle l’application du critère de l’investisseur privé en économie du marché doit être appréciée est indépendant de la question de l’applicabilité des lignes directrices de 2014 ou des lignes directrices précédentes adoptées par la Commission. En effet, la seule question qui se pose en l’espèce est celle de savoir si la méthodologie choisie par la Commission lors de l’application du critère de l’investisseur privé en économie de marché était appropriée au regard de l’article 107, paragraphe 1, TFUE.

83 En tout état de cause, il convient de relever que le grief tiré de l’erreur de procédure prétendument commise par la Commission est vague, dès lors que la requérante ne précise pas suffisamment les critères par rapport auxquels ceux énoncés dans les lignes directrices de 2014 seraient « sévères », ni en quoi consisterait ce caractère sévère desdites lignes directrices.

84 De surcroît, il ressort des considérants 264 à 275 de la décision attaquée que la référence de la Commission aux lignes directrices de 2014 ne constitue pas une décision procédurale privilégiant l’application d’une méthode d’appréciation du critère de l’investisseur privé en économie de marché au détriment d’une méthode qui serait énoncée dans des lignes directrices précédemment adoptées. En revanche, la Commission se réfère au point 3.5 des lignes directrices de 2014 afin de relater les raisons pour lesquelles l’analyse ex ante de la rentabilité incrémentale constitue le critère le plus pertinent dans la présente affaire aux fins de l’application du critère de l’investisseur privé en économie de marché.

85 Partant, il convient de rejeter le grief de la requérante tiré d’une erreur de procédure en raison de l’application des lignes directrices de 2014.

86 En outre, quant à l’application de la méthode d’examen de la rentabilité ex ante, il y a lieu de noter que c’est sans commettre d’erreur et conformément à son devoir de motivation que la Commission a exposé, aux considérants 261 à 275 de la décision attaquée, auxquels renvoient les considérants 428 et 450 de la même décision, les raisons pour lesquelles elle a opté en l’espèce pour l’application de cette méthode.

87 Ainsi, doutant qu’il soit actuellement possible de définir un point de référence approprié aux fins de la fixation d’un prix de marché fidèle pour les services aéroportuaires et tenant compte notamment, premièrement, des considérations liées à la divergence des coûts et des recettes entre aéroports, deuxièmement, du fait que les pratiques commerciales entre aéroports et compagnies aériennes ne reposent pas toujours sur un barème de redevances publié et, troisièmement, de la circonstance que, au cours de la procédure devant elle, ni la République d’Autriche ni aucun tiers intéressé n’ont proposé un échantillon d’aéroports qui soient suffisamment comparables à KLU, la Commission a opté pour l’analyse de rentabilité incrémentale et s’est écartée de l’analyse comparative.

88 Certes, la requérante reproche à la Commission le fait que, en raison de l’application de l’analyse ex ante, prévue par les lignes directrices de 2014, elle aurait méconnu les particularités du secteur aérien du début des années 2000, ce qui l’aurait amenée à faire une application restrictive du critère de l’investisseur privé en économie de marché aux accords litigieux. Plus précisément, la Commission aurait négligé le fait que, sur un marché émergent en pleine croissance, les dépenses et les coûts de commercialisation auraient, pour un investisseur privé, une tout autre importance que sur un marché stable. Dans un tel contexte, la requérante estime que la Commission aurait dû tenir compte d’éléments tels que la consolidation de la notoriété au niveau transrégional de KLU en tant que destination de voyage, l’ouverture de liaisons servant de « points d’ancrage » vers différentes métropoles européennes, le renforcement de l’image de marque de KLU et la création d’externalités de réseau positives découlant de l’ouverture, au profit de KLU, de nouvelles lignes sur d’autres lignes.

89 Bien que ce grief ne concerne pas le choix en tant que tel de la méthode appropriée lors de l’application du critère de l’investisseur privé en économie de marché et la marge d’appréciation accordée à la Commission à cet égard, mais l’application faite par la Commission de ladite méthode dans les circonstances de l’espèce, il sera examiné dans le cadre du présent moyen afin de suivre l’ordre de présentation des arguments de la requérante.

90 Quant au bien-fondé du grief en question, celui-ci ne saurait prospérer. Il convient, tout d’abord, de noter que, par celui-ci, la requérante avance en substance que la Commission aurait dû prendre en compte lors de l’appréciation de la rentabilité des accords litigieux des éléments afférents aux avantages des accords de commercialisation qui allaient au-delà des durées respectives des liaisons aériennes convenues et qui renforceraient la visibilité et la fréquentation de KLU.

91 En premier lieu, et ainsi qu’il ressort du dossier, la requérante n’a pas présenté au cours de la procédure administrative d’éléments de preuve démontrant, de manière chiffrée, la façon dont la consolidation de la notoriété de KLU en tant que destination de voyage et le renforcement de son image généreraient des recettes futures. Or, selon la jurisprudence, il ne saurait être reproché à la Commission de ne pas avoir tenu compte d’éventuels éléments de fait ou de droit qui auraient pu lui être présentés pendant la procédure administrative, mais qui ne l’ont pas été, la Commission n’étant pas dans l’obligation d’examiner d’office et par supputation les éléments qui auraient pu lui être soumis (arrêt du 14 janvier 2004, Fleuren Compost/Commission, T 109/01, EU:T:2004:4, point 49 ; voir également, en ce sens, arrêt du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C 367/95 P, EU:C:1998:154, point 60). Il convient de relever à cet égard que, selon la jurisprudence, la légalité d’une décision en matière d’aides d’État doit être appréciée par le juge de l’Union en fonction des éléments d’information dont la Commission pouvait disposer au moment où elle l’a arrêtée (arrêt du 28 mars 2012, Ryanair/Commission, T 123/09, EU:T:2012:164, point 103).

92 En second lieu, et en tout état de cause, dans la mesure où la requérante soutient, par le présent grief, que la Commission aurait dû prendre en compte dans son analyse de rentabilité ex ante des éléments qui dépassaient le cadre temporel des accords en question, il y a lieu de noter que la Commission a choisi comme horizon temporel de son évaluation la durée des accords litigieux. Il convient donc d’examiner si la Commission a pu considérer, sans commettre d’erreur de droit ou de fait, qu’un investisseur privé en économie de marché, agissant à la place de KFBG et de DMG, aurait évalué l’intérêt de conclure chacun des contrats examinés en retenant un horizon temporel limité à la durée des accords litigieux en cause. Dans le cas où il devrait être conclu que c’était à tort que la Commission a retenu comme horizon temporel de son examen celui de la durée des contrats, la requérante serait, le cas échéant, fondée à soutenir que la Commission devait prendre en compte dans cet exercice des éléments qui ne s’inscrivaient pas dans le strict cadre de la durée des accords litigieux.

93 À cet égard, la Commission a relevé au considérant 369 de la décision attaquée, auquel renvoient les considérants 429 et 451 de cette dernière, ce qui suit :

« Il n’apparaît pas justifié de retenir une période plus étendue. En effet, aux dates de la conclusion des accords, un investisseur en économie de marché avisé n’aurait pas compté sur une reconduction des accords à l’issue de leur exécution, dans les mêmes termes ou en des termes distincts. De plus, un opérateur généralement avisé serait conscient que des compagnies à bas prix telles que Ryanair sont et ont toujours été connues pour gérer les ouvertures et fermetures des lignes et l’augmentation et diminution du nombre de vols de façon très dynamique en fonction des conditions de marché. »

94 Il y a lieu de noter à cet égard que, selon la jurisprudence, le comportement d’un investisseur privé en économie de marché est guidé par des perspectives de rentabilité à long terme (voir, en ce sens, arrêt du 21 mars 1991, Italie/Commission, C 305/89, EU:C:1991:142, point 20). Un tel opérateur souhaitant maximiser ses bénéfices est prêt à courir des risques calculés dans la détermination de la rémunération appropriée à escompter pour son investissement.

95 Par ailleurs, il est constant que les accords litigieux ont été conclus pour des périodes déterminées. Il est également avéré, comme il ressort des considérants 432, 433, 453 et 454 de la décision attaquée que, au moment où chacun des deux contrats en cause a été conclu, les autorités autrichiennes n’avaient pas élaboré un aperçu des coûts et recettes marginaux qui pouvaient être attendus. Dans ce contexte, la Commission pouvait, sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation, considérer qu’un investisseur privé en économie de marché avisé aurait évalué la rentabilité de ces contrats eu égard aux coûts et recettes escomptés pour leur durée d’application.

96 Il est vrai que, ainsi qu’il a été relevé au point 94 ci-dessus, un investisseur privé en économie de marché normalement prudent et diligent peut être disposé à prendre un risque commercial en concluant un accord qui est déficitaire pendant toute la durée prévue, dans la perspective réelle de reconduire l’accord et, partant, de bénéfices futurs compensant ces pertes. Ce comportement visant la rentabilité à long terme peut répondre à une rationalité économique. Toutefois, il ressort de ce qui précède que c’est sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation que la Commission pouvait considérer qu’un tel investisseur n’aurait, dans le cas d’espèce, pas tablé sur le renouvellement de chaque accord en tant que tel à son terme. Ainsi qu’il est relevé, à juste titre, par la Commission au considérant 369 de la décision attaquée, un tel investisseur serait conscient qu’il est de la nature même des compagnies à bas coûts, à l’instar de la requérante, d’opter pour un mode de gestion très dynamique des ouvertures et des fermetures de lignes en fonction des conditions de marché.

97 À cet égard, il y a lieu de constater que l’accord de 2008 ne constituait pas une simple reconduction des termes de celui de 2003. En particulier, par cet accord, les parties ont revu les conditions de leur collaboration en termes d’engagements d’exploitation de vols. En particulier, ainsi qu’il ressort du point 74 de la décision attaquée, la requérante était tenue d’exploiter, durant la période de planification horaire de l’IATA pour l’été 2008, la ligne Klagenfurt/Cologne sept fois par semaine, la ligne Klagenfurt/Hanovre deux fois par semaine, la ligne Klagenfurt/Berlin trois fois par semaine et la ligne Klagenfurt/Hambourg deux fois par semaine, tandis que l’accord de 2003 prévoyait l’engagement de la requérante à ouvrir et à exploiter la ligne Klagenfurt/Cologne-Bonn, avec six vols de ligne par semaine et la ligne Klagenfurt/Hanovre avec trois vols de ligne par semaine.

98 De plus, à la différence de l’accord 2003 où, selon la décision attaquée, il n’y avait pas de référence à un volume minimal de passagers, l’accord de 2008 prévoyait pour l’été 2008 un volume minimal de 50 000 passagers au départ de l’exploitation des vols mentionnés ci-dessus. Par ailleurs, s’agissant de la période de planification horaire de l’IATA pour l’hiver 2008/2009, la requérante devait assurer les vols Klagenfurt/Cologne sept fois par semaine, les vols Klagenfurt/Hanovre quatre fois par semaine, les vols Klagenfurt/Berlin quatre fois par semaine et les vols Klagenfurt/Hambourg quatre fois par semaine ; un volume minimal de 40 000 passagers au départ était attendu de l’exploitation de ces vols.

99 De surcroît, des différences existent entre les deux accords en ce qui concerne les services de commercialisation. Ainsi, tandis que l’accord de 2003 prévoyait que la requérante garantirait notamment l’accompagnement publicitaire de l’offre de vols dans les médias locaux, régionaux et nationaux, sur Internet et par affichage publicitaire dans l’espace public, ainsi que la présentation avantageuse de KLU sur son site Internet, aux termes de l’accord de 2008 la requérante était tenue de fournir « un programme complet de services de commercialisation » pour KLU et la Carinthie. En particulier, ce programme incluait une présentation de Klagenfurt en tant que destination de vacances dans deux lettres d’information mensuelles, sur la page d’accueil du site de la requérante, sur la page consacrée à la destination KLU, sur les cartes d’embarquement, dans les journaux de bord, dans l’horaire d’été ou d’hiver de la requérante, dans un spot télévisé diffusé à bord des avions ainsi que par l’habillage publicitaire des avions et lors de différents événements de presse.

100 Il découle de ce qui précède que, contrairement à ce qui est allégué par la requérante, la Commission a, à juste titre, limité son examen à l’horizon temporel de la durée des accords litigieux sans prendre en considération des éléments qui dépassaient leur cadre temporel, tels que le renforcement de l’image de KLU et la consolidation de sa notoriété au niveau transrégional. Cela est d’autant plus vrai que les bénéfices éventuels à plus long terme invoqués par la requérante seraient trop incertains en raison de leur caractère non quantifié.

101 Cette conclusion n’est pas infirmée par l’argument de la requérante pris de ce que la position de la Commission méconnaîtrait les considérations retenues dans la décision (UE) 2018/10 de la Commission, du 20 février 2014, concernant l’affaire SA.18855 (C 5/08) (ex NN 58/07) – Danemark – Accord de 1999 conclu entre la société aéroportuaire d’Aarhus et Ryanair (JO 2018, L 3, p. 9), ainsi que dans la décision (UE) 2016/789 de la Commission, du 1er octobre 2014, relative à l’aide d’État SA.21121 (C 29/2008) (ex NN 54/07) mise à exécution par l’Allemagne concernant le financement de l’aéroport de Francfort-Hahn et les relations financières entre l’aéroport et Ryanair (JO 2016, L 134, p. 46).

102 Tout d’abord, il convient de souligner que, selon la jurisprudence, la qualification d’une mesure d’aide d’État ne saurait dépendre d’une appréciation subjective de la Commission et doit être déterminée indépendamment de toute pratique administrative antérieure de cette institution, à la supposer établie (arrêts du 3 juillet 2014, Espagne e.a./Commission, T 319/12 et T 321/12, non publié, EU:T:2014:604, point 46, et du 13 décembre 2018, Ryanair et Airport Marketing Services/Commission, T 165/15, EU:T:2018:953, point 284). Partant, la requérante ne saurait se prévaloir d’une supposée pratique décisionnelle antérieure de la Commission pour mettre en cause la légalité de la décision attaquée.

103 En tout état de cause, les références faites par la requérante à certains passages des décisions précitées, qui sont incomplètes et qui, sorties de leur contexte, sont de nature à induire en erreur, ne parviennent pas à étayer la position défendue par elle dans la présente affaire.

104 En particulier, s’agissant de la décision 2018/10, le renvoi opéré par la requérante à ses considérants 105 et 107 en vue de démontrer que KLU devait prendre en compte une stratégie globale visant sa rentabilité, omet d’indiquer que ce n’est qu’après avoir constaté, dans un premier temps, la rentabilité incrémentale de l’accord en cause que la Commission a vérifié, dans un second temps, que ledit accord s’inscrivait à long terme sur une stratégie de rentabilité. Par conséquent, il n’y a aucune contradiction entre la décision 2018/10 et la décision attaquée, dès lors que, dans cette dernière, l’examen de la rentabilité incrémentale des accords avait donné lieu à un résultat négatif.

105 Quant à la décision 2016/789, il y a lieu de relever que la référence faite par la requérante dans la réplique au considérant 427 de ladite décision est également sortie de son contexte. Plus précisément, dans la dernière phrase dudit considérant, la Commission reconnaît la difficulté à laquelle l’État membre et les opérateurs concernés peuvent faire face pour fournir des preuves complètes en ce qui concerne des accords conclus de nombreuses années auparavant. Par conséquent, il est clair que, placée dans son contexte, la référence par la Commission à la contribution progressive, d’un point de vue ex ante, des arrangements conclus entre les compagnies aériennes et un aéroport à la rentabilité de l’aéroport vise plutôt à soutenir la conclusion selon laquelle il peut se révéler difficile de produire des éléments de preuve relatifs à des accords qui datent de plusieurs années.

106 La conclusion selon laquelle la référence au considérant 427 de la décision 2016/789 est sortie de son contexte est confirmée par le considérant 432 de la même décision par lequel la Commission indique que l’analyse de rentabilité ex ante doit être considérée comme la méthode pertinente lors de l’application du critère de l’investisseur privé en économie de marché.

107 Il s’ensuit que l’argumentation de la requérante selon laquelle la Commission a outrepassé sa marge d’appréciation dans l’application du critère de l’investisseur avisé en économie de marché doit être rejetée.

108 Partant, il convient de rejeter le troisième moyen comme non fondé.

 Sur le quatrième moyen, tiré de la violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE du fait que la Commission n’aurait pas suffisamment instruit les faits dans le cadre de l’application du critère de l’investisseur privé en économie de marché

109 La requérante soutient que la Commission n’a pas correctement instruit les faits relatifs à la stratégie de rentabilité à long terme de KLU. Elle estime que la Commission a illégalement déduit de l’absence de plan d’affaires complet relatif aux accords litigieux que KLU n’avait pas de stratégie de rentabilité. Lors de l’audience, la requérante a relevé que l’absence de plan d’affaires ne signifiait pas qu’il n’y avait pas d’analyse stratégique de la part de KLU. Par ailleurs, la requérante estime qu’il y a des contradictions dans l’exposé des faits relatifs à la stratégie de rentabilité à long terme de KLU figurant dans la décision attaquée.

110 La requérante allègue que la Commission a violé les principes de protection de la confiance légitime et de non-rétroactivité, dès lors que ni la jurisprudence ni sa pratique décisionnelle n’exigeaient l’élaboration de plans d’affaires complets avant l’adoption des mesures litigieuses. Elle relève que l’examen fondé sur le critère de l’investisseur privé en économie de marché doit tenir compte de la date à laquelle la mesure examinée a été adoptée. Elle ajoute que les accords litigieux remontent à une époque où la Commission venait de mener ses premières enquêtes en matière d’aides d’État dans le secteur de l’aviation. Par conséquent, les principes de protection de la confiance légitime et de non-rétroactivité imposaient d’interdire l’utilisation de preuves relatives à l’absence de plans d’affaires complets.

111 S’agissant de l’appréciation de la stratégie globale de KLU, la requérante soutient que la Commission s’est fondée, de manière contradictoire et sans offrir une motivation suffisante, uniquement et ponctuellement sur la rentabilité des mesures individuelles, en appliquant les lignes directrices de 2014, et non sur une rentabilité globale, et ce malgré le fait qu’elle a bien présumé l’existence d’une stratégie de rentabilité globale pour certaines années. La Commission aurait ainsi, de manière erronée, omis de prendre en compte en tant que recettes marginales les subventions qui ont été versées à KFBG ainsi que la valeur de marché des prestations fournies par la requérante. En outre, la Commission aurait omis de tenir compte de l’importance des accords litigieux pour la stratégie commerciale de KLU.

112 La Commission conteste les arguments avancés par la requérante.

113 Il y a lieu de constater que le présent moyen se divise, en substance, en deux branches. En premier lieu, la requérante allègue que la Commission a déduit de manière illégale de l’absence de plan d’affaires complet, lors de la conclusion des accords litigieux, une prétendue absence de stratégie de rentabilité. En second lieu, elle reproche à la Commission d’avoir procédé à des constatations de fait manifestement contradictoires sur la stratégie de rentabilité à long terme de KLU.

114 S’agissant de la première branche du présent moyen, contrairement à ce qui est allégué par la requérante, la Commission ne s’est pas uniquement fondée sur l’absence de plan d’affaires et de calcul de rentabilité pour conclure que KFBG ne s’était pas comportée en l’espèce comme un investisseur privé en économie de marché avisé. En effet, ainsi qu’il ressort de la décision attaquée, sans que cela soit contesté par la requérante, la Commission a demandé à la République d’Autriche d’effectuer, dans le cadre de la procédure administrative, une reconstitution de l’analyse de rentabilité qu’un investisseur privé en économie de marché aurait menée avant la signature des accords litigieux. Ainsi qu’il ressort de la décision attaquée, la République d’Autriche a élaboré un aperçu des coûts et des recettes marginaux qui pouvaient être attendus au moment de la conclusion des accords concernés en concluant à un résultat actualisé positif. Or, la Commission est parvenue à une autre conclusion que la République d’Autriche en aboutissant à un résultat actualisé négatif dans l’analyse coûts-bénéfices.

115 Pour arriver à cette conclusion, la Commission a estimé, tout d’abord, que, contrairement à ce qui avait été retenu par la République d’Autriche, un investisseur privé en économie de marché avisé aurait dû prendre comme référence les recettes non aéronautiques moyennes de la période précédant immédiatement l’entrée en vigueur des accords. Par ailleurs, la Commission n’a pas qualifié de recette incrémentale l’aide au fonctionnement que KFBG recevait annuellement du Land de Carinthie. Enfin, elle a corrigé les montants des versements pour les services de commercialisation afin de les faire correspondre aux valeurs exactes mentionnées dans les accords.

116 Il ressort clairement de ce qui précède que, contrairement à ce qui est soutenu par la requérante, la Commission, pour parvenir à la conclusion selon laquelle le critère de l’investisseur privé en économie de marché avisé n’avait pas été respecté en l’espèce, ne s’est pas uniquement fondée sur l’absence de plan d’affaires ou d’analyse de rentabilité au moment de l’adoption des accords litigieux. En effet, pour conclure que les mesures en cause conféraient un avantage à la requérante, elle a analysé et corrigé les informations qui avaient été mises à sa disposition par la République d’Autriche.

117 Partant, il y a lieu d’écarter l’argumentation de la requérante à cet égard ainsi que ses allégations de violation des principes de protection de la confiance légitime et de non-rétroactivité.

118 S’agissant de la seconde branche du présent moyen, l’argumentation de la requérante selon laquelle la Commission aurait commis une erreur d’appréciation en omettant, sans motivation suffisante, de se fonder sur une stratégie de rentabilité globale de l’aéroport ne saurait être accueillie.

119 Ainsi qu’il a été considéré au point 100 ci-dessus, lors de l’examen du troisième moyen, la Commission s’est, à bon droit, limitée à examiner la rentabilité escomptée des accords litigieux dans le cadre temporel de leur durée, sans prendre en compte des objectifs afférents à la rentabilité à long terme invoqués par la requérante, tels que la consolidation de la notoriété de KLU en tant que destination de voyage, le renforcement de l’image de KLU et la création d’externalités de réseau positives découlant de l’ouverture de nouvelles lignes. En effet, il est raisonnable de considérer qu’un investisseur privé en économie de marché normalement prudent et diligent ne se serait pas fondé sur des bénéfices incertains et non quantifiés allant au-delà de la durée des accords litigieux dès lors que l’analyse sur la rentabilité incrémentale des contrats concernés avait abouti à un résultat négatif.

120 Quant au grief pris d’un défaut de motivation sur cet aspect, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la motivation exigée par l’article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires ou d’autres personnes concernées directement et individuellement par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C 367/95 P, EU:C:1998:154, point 63 et jurisprudence citée).

121 Or, en l’espèce, ainsi qu’il ressort du point 93 ci-dessus, la Commission a suffisamment indiqué les raisons pour lesquelles il n’était pas opportun de retenir une période qui allait au-delà de la durée des accords litigieux et, en conséquence, il ne saurait être conclu que la décision attaquée est entachée d’un défaut de motivation à cet égard.

122 En outre, et s’agissant de l’argument de la requérante sur la non-applicabilité des lignes directrices de 2014, il convient de renvoyer aux points 82 à 87 ci dessus.

123 Quant à la référence de la requérante à l’arrêt du 21 mars 1991, Italie/Commission (C 305/89, EU:C:1991:142), celle-ci n’est pas pertinente et ne saurait infirmer la conclusion précitée. Ainsi qu’il est relevé à juste titre par la Commission, l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt avait pour objet des mesures de restructuration d’un constructeur automobile en déficit chronique. Il en découle que le critère de comparaison retenu, à savoir le comportement d’un holding privé ou d’un groupe d’entreprises guidé par des perspectives de rentabilité à long terme, ne saurait être applicable par analogie au cas d’espèce.

124 Enfin, la requérante reproche à la Commission d’avoir commis une erreur d’appréciation en considérant que les accords litigieux n’étaient pas rentables, même s’agissant de l’examen de la rentabilité ex ante des accords dans le cadre de leur horizon temporel. En particulier, elle relève que l’omission de la Commission de prendre en compte, en tant que recettes de KFBG, les subventions qui ont été versées par le Land de Carinthie ainsi que la valeur de marché des prestations fournies par la requérante, était constitutive d’une erreur manifeste d’appréciation.

125 Il convient de noter que le grief afférent aux subventions versées par le Land de Carinthie et à la prise en compte de la valeur de marché des prestations fournies par la requérante est repris en détail dans le cadre du cinquième moyen qui concerne les erreurs manifestes d’appréciation que la Commission a prétendument commises lors de la mise en œuvre de l’analyse de rentabilité ex ante. Pour cette raison, il sera examiné lors de l’analyse du cinquième moyen.

126 Compte tenu de ce qui précède, il convient, sous réserve de l’examen dans le cadre du cinquième moyen du grief de la requérante visant l’appréciation par la Commission des subventions versées par le Land de Carinthie et à la prise en compte de la valeur de marché des prestations fournies par la requérante, de rejeter le quatrième moyen comme non fondé.

 Sur le cinquième moyen, tiré de la violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE du fait que la Commission n’aurait pas suffisamment instruit les faits lors de l’analyse de rentabilité dans le cadre de l’application du critère de l’investisseurprivé en économie de marché

127 La requérante allègue que la Commission n’a pas suffisamment instruit les faits dans le cadre de l’analyse de rentabilité lors de l’application du critère de l’investisseur privé en économie de marché.

128 Le présent moyen se divise en substance, en trois branches. Par la première branche, la requérante estime que la Commission a commis une erreur d’appréciation en ne prenant pas en compte, en tant que recettes de l’aéroport, la subvention versée à KLU par la Carinthie en vue de l’achat de services de commercialisation. Par la deuxième branche, la Commission n’aurait pas suffisamment tenu compte de la valeur de marché des prestations fournies par la requérante et l’aurait ignorée dans la décision attaquée, commettant ainsi une erreur de droit. Par la troisième branche, la Commission aurait commis une erreur de droit en méconnaissant que KFBG avait payé un prix objectif du marché pour les prestations fournies par la requérante.

129 En particulier, la requérante estime, premièrement, que l’appréciation par la Commission des montants versés par le Land de Carinthie à KFBG, lors de l’application du critère de l’investisseur privé en économie de marché, était contradictoire. Elle soutient que les aides financières versées à KFBG devaient lui permettre d’acheter des services de commercialisation et allègue que le fait que la Commission n’ait pas pris en compte l’aide au fonctionnement octroyée par le Land de Carinthie à KFBG était erroné en droit. Elle affirme que les subventions accordées à KFBG visaient à accroître le trafic aérien au départ de KLU au moyen des accords de commercialisation, tout en ajoutant qu’un investisseur privé rationnel aurait obligatoirement pris en compte lesdites subventions dans les postes de recettes pertinents de ses comptes internes. Elle ajoute à cet égard que l’existence d’un avantage doit faire l’objet d’une appréciation qui couvre de manière globale la réalité économique, sans se focaliser artificiellement sur une partie de celle-ci.

130 La requérante soutient également que les paragraphes 63 à 65 des lignes directrices de 2014 n’excluent pas la possibilité de prendre en compte une aide publique en tant que recette marginale d’un aéroport. Elle ajoute que la finalité même de ces paragraphes des lignes directrices de 2014 permet cette constatation, dès lors que l’aide publique versée à l’exploitant de l’infrastructure intervient pour que les utilisateurs de l’infrastructure puissent fournir les services demandés à leurs clients. En se référant à l’exemple concret d’un aéroport, la requérante estime que l’aide en faveur de l’exploitant aéroportuaire a comme objectif de créer les conditions adéquates pour permettre aux compagnies aériennes de fournir des services de transport de passagers et de fret à l’endroit en question. Tout en relevant que les aides au fonctionnement de KFBG ont été versées par le Land de Carinthie aux fins de l’achat de services de commercialisation, elle relève également que toute entreprise privée qui reçoit une aide légale en vue d’un projet, à l’instar de KFBG en l’espèce, comptabilisera cette subvention comme une recette et l’affectera à ce projet. La requérante ajoute que KFBG n’a jamais subi de pertes à la suite des accords conclus avec elle et que c’est précisément la subvention du Land de Carinthie qui lui a permis de ne pas enregistrer de solde négatif.

131 Deuxièmement, la requérante affirme que la Commission a omis d’établir les faits de manière correcte et exhaustive en ce qui concerne la valeur de marché des services de commercialisation qu’elle fournit. Elle prétend que, si la Commission avait établi les faits correctement, elle aurait constaté que la requérante avait fourni de nombreux services de commercialisation en contrepartie de son obligation contractuelle à l’égard de KFBG. De l’avis de la requérante, la Commission aurait dû en tenir compte dans ses analyses de la rentabilité ex ante des accords litigieux. Elle ajoute que la Commission a totalement omis de prendre en compte dans la décision attaquée les actions de commercialisation menées par elle en tant que contrepartie en faveur de KFBG. À cet égard, la requérante soutient qu’elle serait mise en difficulté évidente si on lui imposait de fournir des éléments de preuve concernant des accords remontant à de nombreuses années, et ce d’autant plus que la Commission lui a illégalement refusé l’accès aux pièces pertinentes du dossier.

132 Troisièmement, la requérante soutient que la Commission a commis une autre erreur manifeste d’appréciation en omettant, dans l’appréciation des contrats de commercialisation en cause, de tenir compte de la valeur objective (valeur de marché) des services qu’elle a fournis. Elle qualifie les accords litigieux de contrats synallagmatiques prévoyant des droits et des obligations pour les deux parties et soutient que, pour cette raison, la Commission aurait dû prendre en compte la valeur objective effective de marché des services de commercialisation qu’elle a fournis. À cet égard, la requérante rappelle que l’approche d’un investisseur privé hypothétique doit toujours se déduire du point de vue qui aurait été le sien à la date d’adoption de la mesure en cause et non d’une appréciation de nature rétroactive.

133 La requérante affirme que la décision de la Commission d’exclure toute contre-valeur objective découlant des services de commercialisation des compagnies aériennes est en contradiction avec la jurisprudence de la Cour. Elle ajoute que, selon le paragraphe 53, sous a), et les paragraphes 54 et 55 des lignes directrices de 2014, le paiement d’un prix de marché exclut l’existence d’une aide d’État, ce qui serait également conforme à la conception juridico-politique du droit des aides d’État.

134 Enfin, la requérante estime que le paiement d’un prix de marché adéquat par une autorité d’un État membre peut constituer un avantage relevant du droit des aides d’État pour son bénéficiaire uniquement dans des circonstances exceptionnelles, qui ne seraient pas en cause en l’espèce. En particulier, elle allègue que KFBG avait un besoin objectif d’acheter les services de commercialisation en cause dans le cadre d’un marketing stratégique visant à consolider sa notoriété au niveau transrégional auprès des voyageurs se rendant en Carinthie et à accroître l’attrait de l’aéroport dans son ensemble.

135 La Commission conteste les arguments avancés par la requérante.

 Sur la première branche

136 La requérante soutient, en particulier, que, dès lors que la subvention accordée par le Land de Carinthie à KFBG visait à couvrir les coûts liés aux accords de commercialisation conclus par cette dernière avec les compagnies aériennes qui utilisaient KLU, ladite subvention aurait dû être prise en compte en tant que recette lors de l’application de l’analyse de rentabilité ex ante.

137 Cet argument ne saurait prospérer.

138 En effet, selon la jurisprudence, sont considérées comme des aides les interventions qui, sous quelque forme que ce soit, sont susceptibles de favoriser directement ou indirectement des entreprises ou qui doivent être considérées comme un avantage économique que l’entreprise bénéficiaire n’aurait pas obtenu dans des conditions normales de marché (voir arrêt du 8 mai 2013, Libert e.a., C 197/11 et C 203/11, EU:C:2013:288, point 83 et jurisprudence citée).

139 Partant, les conditions que doit remplir une mesure pour relever de la notion d’aide au sens de l’article 107 TFUE ne sont pas satisfaites si l’entreprise bénéficiaire pouvait obtenir le même avantage que celui qui a été mis à sa disposition au moyen de ressources d’État dans des circonstances qui correspondent aux conditions normales du marché (voir arrêt du 24 janvier 2013, Frucona Košice/Commission, C 73/11 P, EU:C:2013:32, point 70 et jurisprudence citée).

140 La notion de conditions normales du marché au sens de cette jurisprudence constante est à interpréter comme visant les conditions régissant l’économie d’un État membre lorsque celui-ci n’intervient pas en faveur de l’entreprise bénéficiaire (voir ordonnance du 5 février 2015, Grèce/Commission, C 296/14 P, non publiée, EU:C:2015:72, point 34 et jurisprudence citée).

141 En l’espèce, contrairement à ce que soutient la requérante, la subvention accordée par le Land de Carinthie à KFBG était distincte des accords de commercialisation qu’elle et HLX avaient conclus avec KFBG et DMG. Il y a lieu de rappeler qu’une entité publique peut être bénéficiaire d’une aide d’État, dès lors qu’il s’agit d’une entreprise active sur un marché. Toutefois, rien n’exclut que l’établissement public, ayant été investi de missions d’intérêt général et exerçant, dans ce cadre, une activité économique sous la tutelle de l’État, faisant partie de l’administration publique, à l’instar de KFBG, ainsi que cela ressort des considérants 18 et 24 à 26 de la décision attaquée, puisse également, dans le contexte d’une mesure distincte, accorder une aide à une entreprise, telle que la requérante (arrêt du 13 décembre 2018, Ryanair et Airport Marketing Services/Commission, T 111/15, non publié, EU:T:2018:954, point 133).

142 En effet, si, ainsi que le relève la requérante, les deux séries de mesures d’aides en cause, à savoir celle accordée par le Land de Carinthie à KFBG et celles accordées par KFBG et DMG à HLX et à la requérante, présentent un certain lien de connexité sur les plans conceptuel et contextuel, dès lors qu’elles s’inscrivent dans le cadre de mesures relatives au fonctionnement de KLU et de sa relation commerciale avec différentes compagnies aériennes utilisatrices de cet aéroport, elles se distinguent clairement sur le plan économique aux fins de l’appréciation de la rentabilité ex ante des accords litigieux.

143 À cet égard, il est vrai que, ainsi qu’il est relevé par la Commission dans la décision attaquée, « les contributions financières ont été en partie accordées pour couvrir des pertes causées par les coûts que KFBG [et] DMG [ont] dû supporter en raison de [leurs] accords de commercialisation avec différentes compagnies aériennes » et qu’elles étaient dictées « par la volonté de renforcer la région du point de vue économique ».

144 Or, le fait que les contributions financières octroyées par le Land de Carinthie en faveur de KFBG visaient à couvrir les pertes d’exploitation annuelles de KFBG et de DMG découlant des coûts liés aux accords de commercialisation conclus par celles-ci avec différentes compagnies aériennes, permettant in fine à KLU de rester en activité, ne signifie pas que, de manière concomitante, ces contributions devaient également être prises en compte comme recettes incrémentales lors de l’application de l’analyse de la rentabilité ex ante des accords litigieux.

145 En effet, l’application du critère de l’investisseur privé en économie de marché vise à permettre à la Commission de répondre à la question de savoir si la requérante pouvait, en l’espèce, obtenir le même avantage que celui qui a été mis à sa disposition au moyen des accords litigieux dans des circonstances qui correspondent aux conditions normales du marché. Il est donc raisonnable que, lors de l’application de l’analyse de rentabilité ex ante, la Commission prenne en compte uniquement les recettes et les coûts incrémentaux résultant de chaque accord de commercialisation et de la présence de l’activité de la compagnie aérienne concernée à KLU.

146 Ainsi qu’il est à juste titre relevé à cet égard par la Commission au considérant 381, sous b), de la décision attaquée, en renvoyant au paragraphe 63 des lignes directrices de 2014 :

« [L’aéroport] doit démontrer que […] il est à même de supporter la totalité des coûts générés par l’accord […] Si un soutien supplémentaire est nécessaire, l’examen selon le principe de l’investisseur en économie de marché n’est pas de mise. Ceci montre que tout soutien public ne saurait être considéré comme une recette marginale ; la disposition n’aurait sinon aucun sens. »

147 Cette constatation de la Commission n’est pas entachée d’une erreur manifeste d’appréciation. En effet, considérer qu’une aide accordée au gestionnaire d’un aéroport en vue de financer partiellement des accords de commercialisation que cet aéroport conclut avec une compagnie aérienne est constitutive d’une recette marginale résultant de cet accord irait à l’encontre de l’objectif poursuivi par le recours au critère de l’investisseur privé en économie de marché avisé. S’il en était autrement, afin de conclure à une analyse de rentabilité ex ante positive d’un accord passé entre le gestionnaire d’un aéroport et une compagnie aérienne, une autorité publique pourrait accorder des subventions au premier à raison des pertes d’exploitation que l’accord générerait à son égard. En d’autres termes, si l’aide au fonctionnement accordée, en l’espèce, à KFBG était prise en compte en tant que recette incrémentale, il en résulterait une diminution artificielle des coûts incrémentaux de chaque accord litigieux.

148 Quant aux arguments de la requérante tirés de son interprétation des paragraphes 63 à 65 des lignes directrices de 2014, il y a lieu de relever, tout d’abord, que la lecture des paragraphes 63 et 64 desdites lignes ne fait ressortir aucun élément allant dans le sens de la position qu’elle défend. Par ailleurs, le paragraphe 65 desdites lignes directrices ne fait qu’énumérer certaines conditions dont le respect aurait pour conséquence que l’avantage découlant d’une aide au fonctionnement compatible avec le marché intérieur serait considéré comme n’étant pas répercuté sur une compagnie aérienne spécifique. Partant, ce paragraphe n’est pas pertinent en l’espèce, dès lors que cette considération de la Commission a trait à la compatibilité des aides d’État accordées à des compagnies aériennes et non pas à l’existence ou non d’une aide.

149 Dans ces conditions, aucune contradiction ni aucune erreur quelconque ne ressort de l’appréciation effectuée par la Commission de l’aide versée par le Land de Carinthie à KFBG et de l’absence de prise en compte de cette aide en tant que recette marginale lors de l’application du critère de l’investisseur privé en économie de marché avisé aux accords litigieux.

 Sur la deuxième branche

150 Par la deuxième branche du présent moyen, la requérante critique l’omission de la Commission de prendre en compte dans l’analyse de rentabilité ex ante la plus-value des prestations fournies à KFBG et à KLU.

151 L’argumentation avancée par la requérante dans ce contexte se confond, en substance, avec celle, déjà examinée, selon laquelle la Commission aurait ignoré les effets commerciaux positifs plus généraux sur l’aéroport de Klagenfurt qui auraient été générés par les accords litigieux.

152 Or, ainsi qu’il a déjà été constaté au point 91 ci-dessus, la requérante n’apporte aucun élément concret de nature à démontrer que sa présence à KLU et les services de commercialisation fournis au titre des accords litigieux étaient susceptibles, compte tenu notamment de la pleine transformation du marché des transports aériens dans les années 2000, d’avoir « [d’]autres effets commerciaux positifs […] sur l’aéroport de Klagenfurt ». À supposer même que ces effets commerciaux positifs de long terme aient pu être pris en compte lors de l’analyse de rentabilité ex ante, aucun élément de preuve n’a été apporté par la requérante susceptible d’établir une plus-value des prestations fournies par elle-même et par HLX, à savoir, à titre d’exemple, la possibilité d’attirer d’autres compagnies aériennes ou de créer des nouvelles liaisons aériennes, ce qui aurait conduit à une augmentation du nombre de passagers utilisant KLU.

153 En l’absence d’une quelconque indication de tels effets, il peut être conclu qu’un investisseur privé en économie de marché avisé se trouvant dans la situation de KLU ne compterait pas sur la présence de la requérante pour espérer une augmentation future du nombre de passagers utilisant l’aéroport et, partant, une croissance de ses recettes.

154 Compte tenu de ce qui précède, la Commission a suffisamment pris en compte la valeur des prestations fournies par HLX et la requérante et elle n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation à cet égard.

155 La référence faite par la requérante au considérant 427 de la décision 2016/789 et à la prétendue difficulté de fournir des preuves décisives relatives à des contrats remontant à plusieurs années ne saurait infirmer cette conclusion.

156 Certes, dans ce considérant, la Commission a, ainsi que la requérante l’a relevé, indiqué « qu’il p[ouvait] être difficile, pour l’État membre concerné et pour les opérateurs concernés, de fournir des éléments de preuve contemporains complets en ce qui concerne des arrangements conclus de nombreuses années auparavant et [qu’elle] en tiendra[it] compte lors de l’application du critère en cause dans le cas d’espèce ». Or, cette phrase ne saurait être lue isolément et doit être appréhendée à la lumière de la phrase précédente, par laquelle la Commission lie la difficulté de fournir des éléments de preuve contemporains complets au fait que le critère de la rentabilité progressive, d’un point de vue ex ante, d’un aéroport « n’[a] été explicité que récemment et [concernait] des arrangements individuels plutôt que des activités générales, comme c’est plus souvent le cas lors de l’application du critère de l’[investisseur privé en économie de marché avisé] ».

157 En tout état de cause, aucune incohérence ne ressort du considérant cité par la requérante dans la décision 2016/789 et du choix méthodologique de la Commission quant à l’appréciation de la rentabilité des accords litigieux, dès lors que, dans cette décision, la Commission a indiqué que, de manière générale, il était raisonnable de tenir compte de la difficulté de recueillir « des éléments de preuve contemporains complets ». Or, dans la présente affaire, de telles preuves n’existaient pas, dès lors qu’aucun élément concret n’avait été fourni par la requérante dans le cadre de la procédure administrative sur la prétendue plus-value des prestations qu’elle fournirait à KLU.

158 Enfin, l’argument de la requérante tiré de l’impossibilité pour elle d’avoir accès au dossier administratif de l’affaire et, concomitamment, à des éléments de preuve en vue d’appuyer ses allégations doit être rejeté compte tenu des considérations formulées dans le cadre du premier moyen.

159 Compte tenu de ce qui précède, il convient de rejeter la deuxième branche du présent moyen comme non fondée.

 Sur la troisième branche

160 Par cette branche du cinquième moyen, la requérante reproche, en premier lieu, à la Commission d’avoir commis des erreurs d’appréciation en omettant de prendre en compte certaines données pertinentes lors de l’analyse de rentabilité ex ante, surtout des contre-valeurs, en tant que recettes de KFBG, pour les services de commercialisation qu’elle fournit. En second lieu, la requérante reproche à la Commission d’avoir, lors de l’analyse de la rentabilité ex ante, perdu de vue le fait que KFBG avait payé « le prix du marché » pour lesdits services de commercialisation.

161 S’agissant du premier grief, la requérante énumère des prestations que la Commission n’aurait pas inclues lors de son analyse de la rentabilité des accords litigieux, telles que les coûts de lancement pour l’ouverture de l’exploitation des vols, l’accompagnement publicitaire à long terme de l’offre de vols, la présentation avantageuse de KLU sur le site Internet de la requérante, la mise en œuvre d’actions publicitaires et promotionnelles à bord des avions de la requérante, l’insertion d’articles rédactionnels relatifs à KLU ainsi qu’au Land de Carinthie dans ses publications, la publicité en ligne de KLU et l’habillage publicitaire des avions.

162 Il y a lieu de relever que la requérante méconnaît les modalités d’application de l’analyse de rentabilité ex ante retenue. En effet, la Commission a appliqué, en l’espèce, cette méthode afin de déterminer si les accords litigieux étaient conformes au critère de l’investisseur privé en économie de marché avisé. Pour ce faire, la Commission s’est fondée sur l’aperçu de coûts et recettes marginaux qui pouvaient être attendus au moment de la conclusion desdits accords. En particulier, elle a tenu compte tant des recettes aéronautiques et non aéronautiques marginales attendues liées à l’activité de HLX et de la requérante que des coûts marginaux escomptés supportés par KLU liés à l’activité de HLX et de la requérante.

163 Il convient de relever, à cet égard, que, ainsi qu’il est à juste titre affirmé par la Commission dans la décision attaquée, les services de commercialisation « sont de nature à stimuler la fréquentation des lignes aériennes visées par les accords sur les services de commercialisation et les accords sur les services aéroportuaires correspondants, puisqu’ils sont conçus pour faire la promotion de ces lignes ». En d’autres termes, dans le cas de HLX et de la requérante, l’augmentation du nombre de passagers utilisant les liaisons inaugurées par celles-ci était l’objectif des accords de commercialisation, dans la mesure où la hausse du transport de passagers était susceptible de se traduire, pour KLU, par une augmentation des recettes provenant de certaines redevances aéroportuaires ainsi que des recettes non aéronautiques.

164 Or, ainsi qu’il ressort des tableaux 13 et 15 de la décision attaquée, l’impact escompté des accords de commercialisation sur le volume de passagers a été intégralement pris en considération dans le calcul des recettes incrémentales. En d’autres termes, la Commission a, sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation, pris en compte les prestations fournies par HLX et par la requérante en termes des recettes et coûts incrémentaux qui seraient générés par l’exécution des accords litigieux et en fonction de leur impact sur le volume de passagers qui utiliseraient les vols offerts par HLX et par la requérante.

165 À cet égard, la requérante semble confondre les « prestations » qu’elle et HLX devaient fournir à KFBG sur la base des obligations découlant des accords de commercialisation en cause avec les « avantages » que KFBG tirerait de l’exécution desdits contrats. Il est à cet égard caractéristique que, au point 115 de la requête, elle se réfère aux « avantages » conférés à KFBG comme contrepartie de sa part, pour énumérer à ce titre au point  116 les « prestations » qu’elle et HLX étaient censées fournir à KFBG selon les termes des accords litigieux.

166 Dans la mesure où la requérante reprocherait à la Commission de ne pas avoir suffisamment tenu compte des effets des accords litigieux au-delà de l’augmentation du nombre de passagers et excédant l’horizon temporel de ces accords, il conviendrait, compte tenu des considérations exposées au point 100 ci-dessus, de rejeter cet argument comme non fondé.

167 S’agissant du second grief, la requérante reproche à la Commission d’avoir omis, lors de l’appréciation de la rentabilité des accords litigieux, de prendre en compte la valeur du marché des services qu’elle et HLX ont fournis.

168 Or, force est de constater que la notion de « prix du marché » implique la comparaison par la Commission de différents prix facturés par d’autres aéroports se trouvant dans une situation similaire à celle de KLU à des compagnies aériennes. En effet, c’est en retenant un nombre suffisant d’aéroports comparables qui fournissent des services de même nature que ceux fournis par KLU à des conditions de marché normales qu’il est possible de déterminer un élément de comparaison approprié.

169 Or, le cadre d’analyse choisi en l’espèce par la Commission, qui tend à évaluer les perspectives de rentabilité ex ante compte tenu des données propres à l’opération en cause, exclut par définition la méthodologie préconisée par la requérante fondée sur la comparabilité des prix facturés par d’autres aéroports similaires à KLU. Ainsi qu’il a déjà été relevé au point 86 ci-dessus, la Commission a, moyennant une motivation suffisante et sans commettre d’erreur de droit ou d’appréciation, considéré, dans la décision attaquée, que l’approche préconisée en général dans les lignes directrices de 2014 sur l’aviation pour l’application du critère de l’investisseur privé en économie de marché aux relations entre aéroports et compagnies aériennes, à savoir l’analyse ex ante de la rentabilité supplémentaire, devait être appliquée à la présente affaire.

170 Par ailleurs, il y a lieu de rappeler que la Commission a explicitement constaté au point 269 de la décision attaquée que, au cours de la procédure administrative, ni la République d’Autriche, ni aucun tiers intéressé ne lui ont proposé un échantillon d’aéroports de référence qui étaient suffisamment comparables à KLU en matière de volume de trafic, de type de trafic, de type et de niveau de services aéroportuaires, de présence d’une grande ville à proximité de l’aéroport, de nombre d’habitants dans la zone d’attraction, de prospérité dans la zone avoisinante et d’existence d’autres zones géographiques susceptibles d’attirer des passagers. Partant, et à supposer que la méthode comparative fondée sur un prix de marché ait été considérée comme appropriée par la Commission en l’espèce, compte tenu de ce qui précède, celle-ci n’aurait à sa disposition aucun échantillon d’aéroports comparables à l’aune des critères indiqués ci-dessus pour définir ce prix de marché. Il ressort donc de ce qui précède que la Commission a pleinement justifié son choix de ne pas recourir à la méthode comparative.

171 Le renvoi opéré par la requérante au paragraphe 53, sous a), ainsi qu’aux paragraphes 54 et 55 des lignes directrices de 2014 [en vue d’appuyer son argument sur l’obligation de la Commission de se fonder sur le prix du marché des prestations fournies est sorti de son contexte et peut ainsi induire en erreur.

172 En effet, lesdits points sont inclus dans le point 3.5.1 des lignes directrices de 2014, intitulé « Comparaison avec le prix du marché ». Au paragraphe 59, la Commission indique qu’elle « doute sérieusement qu’il soit actuellement possible de définir un élément de comparaison approprié aux fins de la fixation d’un prix de marché fidèle pour les services fournis par les aéroports » et que « [c]ette situation peut changer ou évoluer, en particulier une fois que les règles en matière d’aides d’État s’appliqueront pleinement au financement public des aéroports ». Par conséquent, la référence aux paragraphes mentionnés ci-dessus ne confirme, en tout état de cause, pas la thèse de la requérante sur le caractère approprié de la méthode comparative et doit être écartée.

173 Quant à l’argument de la requérante selon lequel le paiement d’un prix de marché pour les prestations qu’elle a fournies ne constituait pas un avantage aux termes de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, dès lors que KFBG avait un besoin objectif d’acquérir des services de commercialisation pour renforcer l’image de marque de KLU en tant que destination touristique accessible par les airs, il convient également de l’écarter.

174 En effet, cet argument est inopérant, dans la mesure où, ainsi qu’il a déjà été relevé, la Commission a, sans commettre d’erreur, appliqué en l’espèce l’analyse de rentabilité ex ante. En effet, la question qu’elle s’est posée en ce qui concerne cette méthode était celle de savoir si le résultat de la comparaison entre recettes marginales et coûts incrémentaux était positif et non celle de savoir si KFBG avait un « besoin objectif » d’acquérir les prestations fournies par la requérante. En tout état de cause, pour autant que la requérante se réfère, une fois de plus, par le biais de cet argument, à des objectifs à atteindre, non quantifiés et dépassant l’horizon temporel des accords litigieux, il a déjà été considéré que c’est sans commettre d’erreur que la Commission ne les a pas pris en compte, dès lors que les accords litigieux n’étaient, en eux-mêmes, pas rentables.

175 Par ailleurs, contrairement à ce qui est allégué par la requérante, il ressort clairement de la décision attaquée que l’aperçu des coûts et recettes marginaux que la République d’Autriche a élaboré à la suite de l’invitation de la Commission ne concernait que ceux qui étaient attendus « au moment de la conclusion » des accords concernés. La Commission relève, à juste titre, que le fait que le résultat négatif de l’examen de rentabilité ex ante ait pu être confirmé a posteriori également par l’évolution économique de KLU ne modifie en rien la circonstance que l’analyse du critère de l’investisseur privé en économie de marché avisé a été appliquée depuis une perspective ex ante.

176 Enfin, la requérante ne parvient pas, par la référence faite au considérant 500 de la décision attaquée et aux « prévisions solides du volume des passagers » à KLU, à infirmer la conclusion selon laquelle la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en l’espèce. Là encore, cette référence est sortie de son contexte. En effet, d’une part, il s’agit d’une appréciation de la Commission sur la compatibilité de l’aide au fonctionnement accordée à KFBG avec le marché intérieur. D’autre part, il n’y a pas de lien direct dans le considérant précité entre les prévisions solides quant au nombre de passagers de KLU et les accords litigieux.

177 Pour ces raisons, il convient de rejeter la troisième branche du cinquième moyen, ainsi que ce dernier dans son ensemble, comme étant non fondé.

 Sur le sixième moyen, tiré de la violation de l’article 107, paragraphe 3, TFUE du fait que la Commission aurait appliqué un critère disproportionnellement sévère lors de l’examen de la justification avancée

178 La requérante estime que la Commission a commis une erreur de droit en appliquant un critère disproportionnellement sévère lors de son examen de la justification avancée. Elle est d’avis que la Commission aurait dû examiner la compatibilité de l’aide litigieuse selon les mêmes critères que ceux appliqués dans l’examen de la compatibilité de l’aide en faveur de KFBG.

179 Elle soutient que la Commission a appliqué, sans fournir une motivation adéquate, des critères d’évaluation obscurs, méconnaissant ainsi la règle selon laquelle l’examen de la compatibilité des mesures d’aides sur le fondement de l’article 107, paragraphe 3, TFUE devait être conforme aux dispositions en vigueur au moment de leur adoption. La requérante affirme que la Commission s’est bornée à invoquer le manque de rentabilité des lignes aériennes ouvertes par elle-même et par HLX. À cet égard, la requérante soutient que la rentabilité à moyen terme des mesures en cause, retenue par la Commission comme critère d’évaluation, ne trouve appui ni sur l’article 107, paragraphe 3, TFUE ni sur la jurisprudence. En outre, la requérante reproche à la Commission d’avoir commis une erreur de droit en considérant comme inappropriée la durée de l’accord de 2003, limitée à quatre ans.

180 La requérante estime que, à supposer que la Commission se soit inspirée de l’approche suivie dans sa décision 2004/393/CE, du 12 février 2004, concernant les avantages consentis par la Région wallonne et Brussels South Charleroi Airport à la compagnie aérienne Ryanair lors de son installation à Charleroi (JO 2004, L 137, p. 1), lors de l’évaluation de l’accord de 2003, cette approche serait erronée tout d’abord parce que cette décision est postérieure à la date à laquelle HLX a conclu le premier accord de commercialisation avec KFBG. Par ailleurs, la décision mentionnée ci-dessus aurait été annulée par le Tribunal et la Commission aurait par la suite adopté une nouvelle décision en 2014, dans laquelle elle n’aurait plus considéré les mesures accordées à Ryanair lors de son installation à l’aéroport de Charleroi comme étant des aides d’État. En outre, la requérante estime que la décision attaquée contredit la décision 2004/393 sur la question de la durée appropriée de l’accord en question, tout en ajoutant que les exigences en matière de documentation imposées à la République d’Autriche par la Commission afin de démontrer les perspectives de rentabilité à long terme des nouvelles lignes sont plus strictes que celles imposées à l’époque par le droit des aides d’État dans le secteur de l’aviation.

181 De l’avis de la requérante, le seul point de référence possible pour la Commission était sa décision NN 109/98, du 14 juin 1999, relative à l’aéroport de Manchester (Royaume-Uni), par laquelle elle aurait admis une conception large de la compatibilité des mesures prises par un aéroport en faveur de compagnies aériennes. En particulier, la Commission y aurait seulement exigé que les mesures visant la promotion de nouvelles routes soient octroyées de manière non discriminatoire et limitées dans le temps.

182 La Commission conteste les arguments avancés par la requérante.

183 Il est de jurisprudence constante que le principe général posé par l’article 107, paragraphe 1, TFUE est celui de l’interdiction des aides d’État et que les dérogations à ce principe sont d’interprétation stricte (arrêts du 29 avril 2004, Allemagne/Commission, C 277/00, EU:C:2004:238, point 20, et du 23 février 2006, Atzeni e.a., C 346/03 et C 529/03, EU:C:2006:130, point 79).

184 En outre, pour l’application de l’article 107, paragraphe 3, TFUE, la Commission bénéficie d’un large pouvoir d’appréciation dont l’exercice implique des évaluations complexes d’ordre économique et social, qui doivent être effectuées dans le contexte de l’Union. Dans ce cadre, le contrôle juridictionnel appliqué à l’exercice de ce pouvoir d’appréciation se limite à la vérification du respect des règles de procédure et de motivation ainsi qu’au contrôle de l’exactitude matérielle des faits retenus et de l’absence d’erreur de droit, d’erreur manifeste dans l’appréciation des faits ou de détournement de pouvoir (voir, en ce sens, arrêt du 11 septembre 2008, Allemagne e.a./Kronofrance, C 75/05 P et C 80/05 P, EU:C:2008:482, point 59 et jurisprudence citée). En particulier, il n’appartient pas au juge de l’Union de substituer son appréciation économique à celle de la Commission (arrêt du 15 juin 2005, Corsica Ferries France/Commission, T 349/03, EU:T:2005:221, point 138).

185 Cependant, cela n’implique pas que le juge de l’Union doive s’abstenir de contrôler l’interprétation que la Commission effectue de données de nature économique. En effet, selon la jurisprudence de la Cour, celui-ci doit notamment vérifier non seulement l’exactitude matérielle des éléments de preuve invoqués, leur fiabilité et leur cohérence, mais également si ces éléments constituent l’ensemble des données pertinentes devant être prises en considération pour apprécier une situation complexe et s’ils sont de nature à étayer les conclusions qui en sont tirées (arrêt du 2 septembre 2010, Commission/Scott, C 290/07 P, EU:C:2010:480, points 64 et 65).

186 Par ailleurs, il ressort de la jurisprudence que la Commission ne peut déclarer une aide compatible avec le marché intérieur au sens de l’article 107, paragraphe 3, TFUE que si elle peut constater que cette aide contribue à la réalisation de l’un des objectifs cités à cette disposition, objectifs que l’entreprise bénéficiaire ne pourrait atteindre par ses propres moyens dans des conditions normales de marché. En d’autres termes, afin qu’une aide puisse bénéficier d’une des dérogations prévues à l’article 107, paragraphe 3, TFUE, l’aide doit non seulement être conforme à l’un des objectifs visés par l’article 107, paragraphe 3, sous a), b), c) ou d), TFUE, mais elle doit également être nécessaire pour atteindre ces objectifs (arrêts du 17 septembre 1980, Philip Morris/Commission, 730/79, EU:C:1980:209, point 17 ; du 7 juin 2001, Agrana Zucker und Stärke/Commission, T 187/99, EU:T:2001:149, point 74, et du 13 septembre 2013, Fri-El Acerra/Commission, T 551/10, non publié, EU:T:2013:430, point 49). Cette aide doit, en effet, inciter le bénéficiaire à adopter un comportement de nature à contribuer à la réalisation desdits objectifs (arrêt du 14 mai 2002, Graphischer Maschinenbau/Commission, T 126/99, EU:T:2002:116, point 34).

187 En revanche, une aide qui apporte une amélioration de la situation financière de l’entreprise bénéficiaire sans être nécessaire pour atteindre les buts prévus à l’article 107, paragraphe 3, TFUE ne saurait être considérée comme compatible avec le marché intérieur (arrêts du 15 avril 2008, Nuova Agricast, C 390/06, EU:C:2008:224, point 68 ; du 14 janvier 2009, Kronoply/Commission, T 162/06, EU:T:2009:2, point 65, et du 8 juillet 2010, Freistaat Sachsen et Land Sachsen-Anhalt/Commission, T 396/08, EU:T:2010:297, point 47).

188 Il résulte des éléments qui précèdent que, dans le contexte de l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE, l’aide projetée doit, pour être compatible avec le marché intérieur, revêtir un effet d’incitation et être ainsi nécessaire pour « faciliter le développement de certaines activités ou de certaines régions économiques ». À cette fin, il doit être démontré que, en l’absence de l’aide projetée, l’investissement destiné à faciliter le développement de l’activité ou de la région économique concernées ne serait pas effectué. En revanche, s’il devait apparaître que cet investissement serait opéré même en l’absence de l’aide projetée, il faudrait conclure que cette dernière aurait pour seul effet d’améliorer la situation financière des entreprises bénéficiaires, sans pour autant répondre à la condition posée par l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE, à savoir d’être nécessaire au développement de certaines activités ou de certaines régions économiques (voir, en ce sens, arrêts du 13 juin 2013, HGA e.a./Commission, C 630/11 P à C 633/11 P, EU:C:2013:387, point 105, et du 13 septembre 2013, Fri-El Acerra/Commission, T 551/10, non publié, EU:T:2013:430, point 50).

189 En l’espèce, il est constant que l’objectif associé à l’aide accordée à HLX et à la requérante était le développement de KLU par une nette augmentation du volume des passagers sur les nouvelles routes qui seraient opérées par celles-ci. Partant, selon la jurisprudence citée aux points 184 à 186 ci-dessus, il revenait à la Commission d’examiner en l’espèce si l’aide en cause avait pour effet d’inciter HLX et la requérante à adopter un comportement destiné à atteindre un objectif d’augmentation des passagers de KLU qui était lui-même nécessaire à la réalisation des objectifs visés par l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE.

190 Il y a lieu de constater à cet égard que, ainsi qu’il ressort du considérant 522 de la décision attaquée, en dépit de l’invitation qui lui a été faite par la Commission de fournir des informations afin d’établir si la compatibilité au regard du droit des aides d’État pouvait être démontrée sur la base des lignes directrices de 2005 ou directement sur la base du traité FUE, la République d’Autriche n’a pas établi que les conditions applicables pour déclarer compatibles les aides au démarrage étaient remplies sur les fondements précités. De plus, les parties intéressées qui ont présenté des observations n’ont pas davantage apporté d’arguments démontrant la compatibilité des aides en cause avec le marché intérieur.

191 Plus précisément, s’agissant de l’accord de 2003, la Commission, se référant à l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE, s’est focalisée sur la rentabilité des nouvelles lignes qui seraient opérées par HLX sur la base de cet accord pour conclure que la République d’Autriche ne lui avait transmis aucune étude sur la rentabilité future de celles-ci. De surcroît, elle a constaté que la durée de quatre ans de l’accord n’était pas nécessaire ou appropriée par rapport aux coûts de l’ouverture d’une nouvelle liaison aérienne.

192 Quant à l’accord de 2008, la Commission, en application des lignes directrices de 2005, a constaté que celui-ci ne prévoyait aucune connexion entre l’aide octroyée et les coûts éligibles. Elle a également relevé à ce titre que ni la République d’Autriche ni les tiers intéressés, qui avaient pourtant été invités à le faire et qui ont présenté des observations à la suite de la décision d’ouverture de la procédure formelle d’examen, n’ont fourni d’informations et d’explications à cet égard. En application du paragraphe 79, sous f), des lignes directrices de 2005, qui établit, entre autres paramètres, que, pour que l’aide soit considérée comme compatible, son montant ne doit pas dépasser, chaque année, 50 % du montant des coûts éligibles de cette année et, sur la durée de l’aide, une moyenne de 30 % des coûts éligibles, elle a conclu que l’aide au démarrage ne pouvait pas être considérée comme compatible avec le marché intérieur.

193 Il y a lieu de relever que la Commission a expliqué, avec une motivation suffisante et, compte tenu de sa marge d’appréciation, sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation, les raisons pour lesquelles les deux aides ne pouvaient pas être considérées comme étant compatibles avec le marché intérieur.

194 En effet, contrairement à ce que soutient la requérante, aucune « obscurité » quant aux critères d’évaluation des aides concernées ne ressort de la décision attaquée. En particulier, les critères appliqués par la Commission sont pleinement conformes à l’exigence découlant de la jurisprudence en ce que, pour être compatible avec le marché intérieur, l’aide doit avoir un effet d’incitation en vue du développement d’une activité tout en étant nécessaire en vue d’atteindre l’objectif poursuivi.

195 S’agissant de l’accord de 2003, l’absence de pronostics de rentabilité des liaisons opérées par HLX ne peut que confirmer que les mesures d’aide en cause n’étaient pas strictement nécessaires au développement du Land de Carinthie par l’augmentation du nombre des passagers fréquentant KLU. Au regard de cette constatation, il peut être conclu que c’est sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation que la Commission a considéré, à titre complémentaire, que la durée de quatre ans de l’accord de 2003 n’était ni nécessaire ni appropriée par rapport aux coûts d’ouverture d’une nouvelle liaison aérienne.

196 Quant à l’accord de 2008, l’invocation du paragraphe 79, sous f), des lignes directrices de 2005 s’inscrit dans la même logique de recherche de la présence d’un effet d’incitation pour le développement du Land de Carinthie. Dès lors que l’accord de 2008 ne prévoyait aucune connexion entre l’aide octroyée et les coûts éligibles, la Commission pouvait, sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation, conclure à l’absence de compatibilité de l’aide concernée avec le marché intérieur.

197 Les références de la requérante à la pratique antérieure de la Commission ne sauraient infirmer cette conclusion.

198 Premièrement, il importe de rappeler que la qualification d’une aide de compatible avec le marché intérieur doit être déterminée indépendamment de toute pratique administrative antérieure de cette institution, à la supposer établie (voir, par analogie, arrêt du 3 juillet 2014, Espagne e.a./Commission, T 319/12 et T 321/12, non publié, EU:T:2014:604, point 46 et jurisprudence citée).

199 Deuxièmement, la lecture des considérants 526 et 527 de la décision attaquée fait ressortir que la Commission s’est référée à ses décisions sur l’aéroport de Manchester et sur l’aéroport de Charleroi à des fins plutôt illustratives quant à la compatibilité des aides avec le marché intérieur.

200 Troisièmement, et en tout de cause, les considérations retenues dans les deux décisions précitées ne sont pas transposables au cas d’espèce et il ne saurait, dès lors, être soutenu qu’il existe en l’occurrence une pratique décisionnelle bien établie. En particulier, la requérante fait valoir que la Commission aurait, dans sa décision sur l’aéroport de Charleroi, considéré une durée des accords allant jusqu’à cinq ans comme étant compatible avec le marché antérieur et, dans la décision sur l’aéroport de Manchester, conclu que les seuls critères de compatibilité étaient l’absence de discrimination et la limitation temporelle de la mesure.

201 Or, en l’espèce, la Commission a relevé principalement, s’agissant de l’accord de 2003, l’absence de rentabilité des routes opérées par HLX et, s’agissant de l’accord de 2008, l’absence de connexion entre l’aide octroyée et les coûts éligibles. Partant, le fait que, dans la décision sur l’aéroport de Charleroi, la Commission avait admis comme raisonnable une période allant jusqu’à cinq ans pour dégager une première rentabilité ainsi que la référence à l’absence de discrimination dans la décision relative à l’aéroport de Manchester ne sont pas pertinents en l’espèce, dès lors que la Commission a conclu qu’à aucun moment les routes opérées par HLX et par la requérante n’étaient rentables, même après la période de quatre ans.

202 Quant à la référence au considérant 427 de la décision 2016/789 et à la difficulté prétendue de la requérante à démontrer des perspectives de rentabilité à long terme, elle est dénuée de pertinence, dès lors que ledit considérant n’est relatif qu’à l’application du critère de l’investisseur privé en économie de marché et à la difficulté éventuelle pour l’État membre concerné ou des opérateurs concernés de fournir des éléments de preuve contemporains complets.

203 Compte tenu de ce qui précède, il convient de rejeter le sixième moyen comme non fondé.

 Sur le septième moyen, tiré d’une violation de l’article 107, paragraphe 3, TFUE du fait que la Commission n’a pas suffisamment instruit les faits quant à la compatibilité des aides en cause avec le marché intérieur

204 La requérante affirme que la Commission a insuffisamment établi les faits relatifs à l’examen, en vertu de l’article 107, paragraphe 3, TFUE, de la compatibilité de l’aide qu’elle a reçue. Elle allègue en particulier que la Commission n’a pas tenu compte, en s’enlisant dans un raisonnement contradictoire, de l’aide reçue par l’exploitant aéroportuaire et d’avoir négligé l’importance des accords de commercialisation au regard de la politique régionale et de la desserte de la Carinthie ainsi que des effets positifs sur l’économie régionale qui en découlaient. À ce titre, elle affirme que, selon les estimations effectuées en 2006, la valeur ajoutée annuelle nette obtenue par la Carinthie sur la base des accords litigieux s’élevait à 25 millions d’euros, ce qui témoignerait d’un effet positif important pour l’économie régionale.

205 La Commission conteste les arguments avancés par la requérante.

206 Ainsi qu’il a déjà été relevé dans le cadre de l’analyse du sixième moyen, il ne saurait être reproché à la Commission une quelconque erreur dans l’instruction des faits pertinents aux fins de l’appréciation de la compatibilité des aides au sens de l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE.

207 En particulier, il n’y a aucune contradiction entre les appréciations de la Commission portant sur la compatibilité de l’aide au fonctionnement accordée à KFBG et à DMG et celles afférentes aux aides au démarrage destinées à HLX et à la requérante.

208 S’agissant de l’aide au fonctionnement accordée à KFBG et à DMG, la Commission a indiqué qu’elle appliquait les lignes directrices de 2014, dès lors que, conformément au paragraphe 172 de celles-ci, les principes qui y étaient énoncés étaient applicables dans toutes les affaires portant sur des aides au fonctionnement (notifications pendantes et aides illégales non notifiées) accordées à des aéroports, même si l’aide avait été octroyée avant le 4 avril 2014 et le début de la période transitoire.

209 Par la suite, la Commission a conclu à la compatibilité de cette aide avec le marché intérieur en tenant compte, notamment, de la contribution de l’aide à un objectif d’intérêt commun bien défini, de la nécessité et de la proportionnalité des mesures en cause au regard de cet objectif ainsi que de l’existence d’un effet d’incitation.

210 Plus précisément, la Commission a considéré que l’aide au fonctionnement en faveur de KLU avait apporté une contribution à la desserte et au développement de la Carinthie. D’après les informations présentées par la République d’Autriche dans les rapports annuels de KFBG, le développement de KLU reposait également sur des prévisions solides du volume de passagers. En l’absence de l’aide en cause, KFBG et DMG auraient probablement été contraintes de se retirer du marché, ce qui aurait entraîné pour la Carinthie la perte d’une infrastructure qui joue un rôle important pour son accessibilité et son développement touristique. En ce qui concerne « l’effet d’incitation », la Commission a estimé que, en l’absence de l’aide à l’exploitation, KFBG aurait dû limiter le volume de trafic pour réduire les coûts et pertes, à défaut de quoi elle aurait probablement été en état de faillite, ce qui aurait pu conduire à un arrêt des activités. Sans l’aide au fonctionnement, KLU n’aurait pas pu maintenir son volume de trafic et aurait dû réduire son activité économique. Par ailleurs, en ce qui concerne la nécessité de l’aide, la Commission a considéré que les mesures en cause étaient limitées au montant minimal nécessaire pour compenser les pertes et pour mettre KFBG et DMG en situation de satisfaire aux exigences en matière de capitalisation et maintenir une gestion rentable.

211 Cette approche de la Commission ne pouvait pas être transposable en tant que telle dans le cadre de l’examen de la compatibilité avec le marché intérieur des aides au démarrage accordées à HLX et à la requérante. Certes, il est vrai que l’intérêt commun ultime dont il est ici question pourrait être perçu comme étant, en définitive, le même s’agissant de l’aide au fonctionnement et des aides au démarrage, à savoir le développement économique de la Carinthie. Toutefois, la manière dont cet intérêt commun est servi n’était pas identique dans les deux cas, dès lors que le gestionnaire de l’aéroport, KFBG, exerçait une activité commerciale différente de celle exercée par la requérante en sa qualité de compagnie aérienne. Ainsi, l’aide au fonctionnement accordée à KFBG et à DMG était destinée directement à renforcer la viabilité de l’infrastructure, à savoir l’aéroport en tant que tel, en permettant à KLU de maintenir un niveau d’exploitation approprié.

212 Dans le cas des compagnies aériennes, à l’instar de HLX et de la requérante, l’aide au démarrage ne contribuait pas directement au développement de l’infrastructure. Elle visait au lancement de nouvelles lignes dont l’exploitation pouvait avoir comme résultat l’augmentation du nombre de passagers faisant usage de l’infrastructure de l’aéroport. Partant, c’est sans commettre d’erreur que la Commission a considéré que la compatibilité des aides au démarrage passait par la viabilité des routes opérées par HLX et par la requérante. Néanmoins, compte tenu de ce qui a été relevé dans le cadre de l’examen du sixième moyen, cette viabilité des routes opérées n’était pas avérée, faute pour la République d’Autriche d’avoir transmis une étude de rentabilité des nouvelles routes, en ce qui concerne l’accord de 2003, et des informations sur la relation entre l’aide et les coûts éligibles, en ce qui concerne l’accord de 2008.

213 Quant à l’argument de la requérante selon lequel la Commission a omis de prendre suffisamment en compte d’autres éléments qui pourraient justifier la compatibilité des aides au démarrage, tels que les objectifs d’intérêt public visés par celles-ci ou la valeur ajoutée nette annuelle obtenue par la Carinthie sur la base des accords litigieux, selon des estimations effectuées en 2006, il y a lieu de constater que l’appréciation négative de la Commission sur le respect des critères de compatibilité constitués par les perspectives de rentabilité et la limitation temporelle des mesures a rendu, au regard, en particulier, des exigences d’économie de la procédure, non nécessaire l’examen des autres éléments avancés par la requérante.

214 Compte tenu de ce qui précède, il convient de rejeter le septième moyen comme non fondé ainsi que, par conséquent, le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

215 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

Déclare et arrête :

1) Le recours est rejeté.

2) TUIfly GmbH est condamnée à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission européenne.