Livv
Décisions

Cass. com., 7 janvier 2003, n° 99-10.781

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Tricot

Rapporteur :

Mme Lardennois

Avocat général :

M. Jobard

Avocats :

M. Vuitton, SCP Vier et Barthélemy, SCP Bouzidi

Toulouse, du 2 nov. 1998

2 novembre 1998

Attendu, selon l'arrêt déféré (Toulouse, 2 novembre 1998), que la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Toulouse et du Midi toulousain (la Caisse) a consenti à M. X trois prêts pour le remboursement desquels Mme Y s'est portée caution solidaire ; que M. X ayant été mis en redressement et liquidation judiciaires respectivement les 18 avril 1991 et 17 septembre 1992, le juge-commissaire a, sur proposition de M. Z, liquidateur, admis la créance de la Caisse, déclarée le 25 novembre 1992 ; qu'ultérieurement, la Caisse a assigné en exécution de ses engagements Mme Y qui a appelé en garantie M. Z, lui reprochant de n'avoir pas rempli normalement sa mission de vérification des créances ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que M. Z fait grief à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement en ce qu'il a dit qu'il avait engagé sa responsabilité personnelle envers Mme Y et l'a condamné à lui verser la somme de 76 946,92 francs et de l'avoir condamné à garantir cette dernière des intérêts afférents aux sommes qu'elle doit à la Caisse, alors selon le moyen :

1°) que la fraude du débiteur est suffisamment caractérisée par l'absence de mention de la créance de la banque sur la liste qu'il remet au mandataire comme par le défaut d'établissement de cette liste et entraîne comme sanction le refus d'appliquer à l'encontre de la victime la règle que la fraude a permis de faire jouer ; qu'en décidant le contraire, bien qu'aucune manœuvre n'ait à accompagner l'omission de déclaration d'une créance pour constituer une fraude, la cour d'appel a violé l'article 169 de la loi du 25 janvier 1985 ;

2°) que la mission du représentant des créanciers chargé de défendre les intérêts de ceux-ci, implique nécessairement qu'il puisse se prévaloir de la fraude effectuée par le débiteur au détriment d'un créancier ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 46 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Mais attendu que le représentant des créanciers dont les attributions sont ensuite dévolues au liquidateur ne peut légalement agir que dans l'intérêt de tous et non dans l'intérêt personnel d'un créancier ou d'un groupe de créanciers ; qu'ayant relevé qu'en prenant sur lui de proposer au juge-commissaire l'admission de la créance de la Caisse bien que sa déclaration ait été manifestement tardive et que le délai pour agir en relevé de forclusion ait été expiré, M. Z avait manqué aux obligations de sa mission, la cour d'appel, abstraction faite des motifs surabondants dont fait état la première branche, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le second moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que M. Z fait encore le même grief à l'arrêt, alors selon le moyen :

1°) que la proposition d'admission de la créance de la Caisse effectuée par le mandataire liquidateur n'empêchait pas la caution de présenter un recours à l'encontre de la décision du juge-commissaire y ayant fait droit ; qu'en admettant ainsi l'existence d'un lien de causalité entre la faute de M. Z et le principe et le préjudice invoqué par la caution, qui n'avait pu se prévaloir de l'extinction de la créance cautionnée, bien que l'abstention de la caution soit la seule cause de son préjudice, l'arrêt a violé l'article 1382 du Code civil ;

2°) qu'en retenant à l'encontre de M. Z sa proposition fautive d'admission de la créance de la Caisse, sans examiner les lettres du mandataire liquidateur en date des 27 janvier 1993 et 13 avril 1993, régulièrement versées aux débats, qui faisaient apparaître que les débiteurs principaux avaient participé à la vérification des créances sans émettre aucune contestation sur la recevabilité de la déclaration et que, partant, leur abstention était directement à l'origine du préjudice de la caution, l'arrêt a violé ensemble l'article 1353 du Code civil et l'article 5 du nouveau Code de procédure civile ;

3°) qu'une proposition du représentant des créanciers n'emporte en elle-même aucune conséquence, contrairement à la décision du juge-commissaire, et était fondée sur le fait que l'administrateur croyait devoir invoquer une fraude des débiteurs principaux au détriment d'un créancier ; que la décision du juge-commissaire, qui a fait droit à la proposition lui a donné efficacité et a donc considéré que la créance pouvait être admise ; qu'en déclarant tout de même responsable M. Z, bien qu'il ne soit pas l'auteur de la décision qui a causé leur préjudice, la cour d'appel a violé derechef l'article 1382 précité ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'il ne résulte ni des conclusions ni de l'arrêt que M. Z ait soutenu devant la cour d'appel les prétentions qu'il fait valoir au soutien de la deuxième branche du moyen qui est nouveau et mélangé de fait et de droit ;

Attendu, en second lieu, qu'après avoir relevé que la proposition fautive de M. Z a paralysé l'application de l'extinction de la créance qui, s'agissant d'une exception inhérente à la dette, aurait profité à la caution, l'arrêt retient que cette seule proposition est la cause de la difficulté ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a pu statuer comme elle a fait ;

D'où il suit que le moyen est irrecevable en sa deuxième branche et mal fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.