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Décisions

Cass. com., 28 mars 1995

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

M. Grimaldi

Avocat général :

M. Raynaud

Avocats :

M. Delvolvé, SCP Ancel et Couturier-Heller

Toulouse, du 19 janv. 1993

19 janvier 1993

Statuant sur les pourvois tant principal formé par la société Case Poclain qu'incident formé par MM. Roger, Pierre et René X :

Attendu, selon l'arrêt déféré (Toulouse, 19 janvier 1993), que, par une convention du 1er septembre 1977, la société Case Poclain (société Poclain) a confié la vente de certains matériels agricoles à la société des établissements X (société X) ; que, le 12 mai 1981, MM. Roger, Pierre et René X (consorts X) se sont portés cautions solidaires, envers la société Poclain et à concurrence de 1 500 000 francs, des engagements de la société X contractés dans le cadre de la convention du 1er septembre 1977 ; que la société Poclain a vainement mis en demeure, le 19 mai 1989, la société X de lui régler la somme de 1 083 100,60 francs et, le 6 juillet suivant, les consorts X de lui régler la somme de 1 154 404,90 francs ; que, le 7 juillet 1989, la société X a été mise en redressement judiciaire ; que la société Poclain a assigné les cautions en exécution de leurs engagements ; que, de leur côté, la société X, l'administrateur de son redressement judiciaire et le représentant des créanciers ont poursuivi la société Poclain en déclaration de responsabilité et en paiement de dommages-intérêts, lui reprochant d'avoir brusquement résilié la convention du 1er septembre 1977, et d'avoir ainsi provoqué sa mise en redressement judiciaire ; que le Tribunal a joint les deux instances ; que la cour d'appel, ayant retenu qu'à la date du 19 mai 1989, la société X bénéficiait d'une autorisation de crédit de 1 200 000 francs de la part de la société Poclain de telle sorte que cette dernière avait abusivement rompu la convention du 1er septembre 1977 pour défaut de paiement d'une somme d'un montant inférieur à celui autorisé, a condamné la société Poclain à payer au représentant des créanciers la somme de 2 168 538,11 francs à titre de dommages-intérêts ; qu'elle a en outre condamné les cautions envers la société Poclain ;

Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches, du pourvoi principal : (sans intérêt) ;

Et sur le moyen unique du pourvoi incident :

Attendu que, de leur côté, les consorts X reprochent à l'arrêt, qui a retenu la responsabilité de la société Poclain et l'a condamnée à ce titre à payer au représentant des créanciers la somme de 2 168 538,11 francs, de les avoir condamnés solidairement, en leur qualité de cautions de la société X, à payer à la société Poclain le reliquat de sa créance sur cette société, après distribution de la somme susmentionnée aux créanciers, dont elle fait partie, avec intérêts au taux conventionnel de 1,30 % par mois à compter du 6 juillet 1989, dans la limite globale de 1 500 000 francs, alors, selon le pourvoi, que la caution peut opposer au créancier toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur principal et qui sont inhérentes à la dette, au nombre desquelles figure la compensation de ce que le créancier doit au débiteur principal ; d'où il résulte que la cour d'appel, qui retenait que la société Poclain avait commis une faute en résiliant brusquement le contrat conclu avec la société X, débiteur principal, et la condamnait à ce titre au paiement d'une somme de 2 168 538,11 francs, ne pouvait accueillir son action contre les cautions pour avoir paiement d'une créance née du même contrat, sans violer les articles 1294, alinéa 1er, et 2036 du Code civil ;

Mais attendu qu'il résulte de l'article 46 de la loi du 25 janvier 1985 que le représentant des créanciers agit dans l'intérêt collectif de ceux-ci ; que les sommes recouvrées à la suite des actions qu'il engage entrent dans le patrimoine du débiteur pour être affectées, en cas de continuation de l'entreprise, selon les modalités prévues pour l'apurement du passif et pour être réparties en cas de cession de l'entreprise ou de liquidation, entre tous les créanciers, au marc le franc ; que ces règles faisant obstacle à ce que la compensation ait lieu entre la dette mise à la charge de la société Poclain à la suite de l'action engagée par le représentant des créanciers de la société X et la dette de cette dernière envers la société Poclain, c'est à bon droit que la cour d'appel s'est prononcée comme elle a fait du chef critiqué ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois tant principal qu'incident.