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Décisions

CA Colmar, 3e ch. civ. A, 27 septembre 2021, n° 19/04535

COLMAR

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Franfinance (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Martino

Conseillers :

Mme Fabreguettes, Monsieur Frey

TI Guebwiller, du 20 août 2019

20 août 2019

A la suite d'un démarchage à domicile, M. C. a le 6 février 2017, passé commande à la Sarl Force Energie d'une installation photovoltaïque comprenant notamment douze panneaux monocristallins à haut rendement de marque Thomson « ou équivalent » d'une puissance de 3 000 Wc pour un prix de

24 500 euros, intégralement financé par un crédit affecté souscrit le même jour auprès de la Sa Franfinance et remboursable par 132 échéances au taux TEG de 5,9 % l'an. Le contrat prévoyait en outre une isolation des combles et une réfection de la toiture.

Une attestation de livraison valant demande de financement a été signée par M. C. le 22 février 2017.

Par acte d'huissier du 20 août 2018, M. C. a saisi le tribunal d'instance de Guebwiller d'une action dirigée contre la Selarl De B.-H., ès qualité de liquidateur de la société Force Energie et la Sa Franfinance afin d'obtenir :

- à titre principal, l'annulation du bon de commande conclu avec la société Force Energie le 6 février 2017 et en conséquence l'annulation de plein droit du contrat de crédit affecté conclu entre M. C. et la Sa Franfinance le 6 février 2017,

- à titre subsidiaire, le prononcé de la résolution judiciaire du bon de commande conclu avec la société Force Energie le 6 février 2017 et en conséquence la résolution de plein droit du contrat de crédit affecté conclu entre M. C. et la Sa Franfinance le 6 février 2017,

- en tout état de cause, qu'il soit dit et jugé que la Sa Franfinance a commis une faute qui la prive de son droit à restitution du capital et des intérêts prêtés et qui l'oblige à restituer l'ensemble des sommes qu'il a versées,

- qu'il soit dit et jugé qu'il n'est plus débiteur d'aucune somme envers la Sa Franfinance,

- la condamnation de la Sa Franfinance, outre aux entiers frais et dépens, à lui payer la somme de 2 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La Sa Franfinance a conclu au rejet des prétentions de

M. C. et subsidiairement a formé un appel en garantie à l'encontre du liquidateur de la société Force Energie ainsi qu'une demande indemnitaire.

Par jugement du 20 août 2019, le tribunal d'instance de Guebwiller a, avec exécution provisoire :

- prononcé la nullité du contrat portant sur l'achat de douze panneaux photovoltaïques conclu le 6 février 2017,

- prononcé en conséquence la nullité du contrat de crédit affecté conclu le même jour,

- dit que la Sa Franfinance est tenue de restituer l'ensemble des sommes versées par M. C.,

- dit que la Sa Franfinance ne peut exiger la restitution du capital et des intérêts restants dus,

- rejeté la demande reconventionnelle de la Sa Franfinance,

- condamné la Sa Franfinance, outre aux frais et dépens, à verser à M. C. la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour statuer ainsi, le premier juge a relevé que le bon de commande était nul comme ne répondant pas aux prescriptions de l'article L. 221-5 du code de la consommation, nullité qui ne pouvait être considérée comme couverte.

Il a estimé qu'en ne s'assurant pas de la régularité de ce bon de commande avant de débloquer les fonds, la Sa Franfinance avait commis une faute qui la privait de l'intégralité de sa créance de restitution.

Par déclaration au greffe en date du 10 octobre 2019, la

Sa Franfinance a interjeté appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions en date du 3 mars 2021, auxquelles il est expressément référé pour l'exposé de l'intégralité de ses moyens et prétentions, la Sa Franfinance entend voir infirmer le jugement entrepris et demande à la cour, statuant à nouveau :

- à titre principal, de débouter M. C. de sa demande de condamnation dirigée à l'encontre de la Sa Franfinance,

- Subsidiairement de condamner la Selarl De B.H., Me Alexandre H. ès-qualités de liquidateur de la Sarl Force Energie à la garantir de toutes les sommes dont elle pourrait être condamnée au titre du remboursement du crédit,

- de condamner la Selarl De B.H., Me H. ès-qualités de liquidateur de la Sarl Force Energie à lui payer la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- en tout état de cause de condamner M. C., à lui payer la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Elle soutient que le bon de commande contenait les caractéristiques essentielles du bien ou du service, son prix et l'ensemble des mentions légales obligatoires, la loi n'imposant pas la précision de l'ensemble des caractéristiques techniques de l'installation que M. C. a confirmé avoir réceptionnée sans réserve en signant l'attestation de livraison puis en confirmant par courrier cet état de fait. Elle souligne que le contrat mentionnait que la prestation faisait l'objet d'un financement et ne prévoyait aucun délai d'exécution dans la mesure où des démarches administratives préalables devaient être réalisées, ce dont le consommateur était pleinement avisé, la commande étant stipulée nulle et caduque en cas de refus du dossier administratif.

Elle maintient que les caractères utilisés pour les conditions générales du contrat sont bien imprimés en « corps 8 » et que les mentions relatives au crédit sont précises s'agissant du coût total du crédit et des mensualités de remboursement, ce que M. C. a nécessairement bien compris, alors qu'il a sollicité une modification du contrat de crédit pour ne plus adhérer à l'assurance qui l'accompagnait.

Elle reconnaît qu'elle avait conclu en son temps, une convention de distribution de crédits avec la société Force Energie et entend faire valoir que l'ensemble des dispositions en matière de crédit à la consommation ont été respectées et que le déblocage des fonds, effectué à la demande de l'emprunteur et au terme de l'attestation qu'il a signée, ne souffre d'aucune irrégularité.

Elle affirme que M. C. qui a laissé le contrat se poursuivre, en laissant l'accès à son domicile pour l'exécution des travaux qu'il a acceptés sans réserve, a ainsi entendu persévérer dans son projet et confirmer l'acte prétendument nul.

En tout état de cause, elle relève que M. C. ne justifiant d'aucun désordre relatif à l'installation, la résolution judiciaire du contrat ne saurait être prononcée.

Réfutant être responsable des éventuelles irrégularités commises par le vendeur lors de la rédaction du bon de commande et pour sa part toute faute commise, elle estime que son appel en garantie est fondé.

Dans ses dernières conclusions en date du 12 mars 2021, auxquelles il est expressément référé pour l'exposé de l'intégralité de ses moyens et prétentions, M. C. entend voir confirmer le jugement entrepris et se voir donner acte de ce qu'il tient à la disposition du liquidateur de la société Force Energie l'ensemble des matériels vendus au titre du bon de commande annulé, précisant qu'il supportera seul les frais de démontage de ces matériels, de remise en état de son habitation, et de transport au siège dudit liquidateur, sur simple demande de celui-ci ainsi que tous les autres frais qui pourraient être exposés dans le cadre de cette mise à disposition.

Subsidiairement, il demande à la cour de :

- prononcer la résolution judiciaire du contrat conclu le 6 février 2017 et celle, de plein droit du contrat de crédit affecté conclu le même jour,

- lui donner acte de ce qu'il tient à la disposition du liquidateur de la société Force Energie l'ensemble des matériels vendus au titre du bon de commande annulé, dans les mêmes conditions que précitées,

- confirmer la décision entreprise s'agissant de la faute commise par la Sa Franfinance et la privation de sa créance de restitution, en tout état de cause, condamner la Sa Franfinance, outre aux entiers frais et dépens des deux instances, à lui payer la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il soutient que le bon de commande est affecté de multiples causes de nullité au regard des exigences légales imposées aux contrats conclus hors établissement entre un professionnel et un consommateur, alors notamment que font défaut tant la marque des panneaux ; que l'équivalence envisagée ne correspond à aucune description claire ; que leur modèle, leurs certification, dimensions, poids, origine, couleur et leurs modalités d'intégration à la toiture, mais également la puissance de l'onduleur, sa marque et son modèle, ainsi que le descriptif des démarches administratives qui seront prises en charge comme la mention des frais de raccordement ne sont nullement indiqués. Il souligne encore que la consistance et les caractéristiques de l'isolation des combles perdus ou vides de même que les modalités techniques de sa mise en œuvre ou l'étendue de la rénovation de la toiture ne sont nullement détaillés.

Il maintient en outre que l'identité du démarcheur n'était pas renseignée et qu'aucun délai de livraison n'était stipulé ni encore le prix unitaire des biens et prestations fournies, éléments qui lui auraient permis d'effectuer une comparaison utile avec d'autres offres.

Il prétend que la simple reproduction, de surcroit imparfait, des articles du code de la consommation au verso d'un bon de commande ne peut suffire à considérer que le consommateur avait eu connaissance des vices affectant le contrat, a fortiori lorsqu'ils étaient noyés dans les conditions générales illisibles. De même il réfute avoir entendu confirmer le contrat irrégulier en ayant laissé le contrat principal et le contrat de crédit affecté s'exécuter.

Il prétend que si l'installation a ensuite été raccordée, la société Force Energie n'a pas fourni d'attestation sur l'honneur de la conformité de l'installation, permettant la conclusion d'un contrat de rachat d'électricité, alors qu'elle s'engageait à effectuer les démarches nécessaires à l'obtention d'un tel contrat avec Edf pendant vingt ans. Il affirme dès lors que la société installatrice lui a vendu une installation solaire inutile, ne permettant ni de vendre sa production électrique, ni a fortiori d'amortir le « prix exorbitant » de la commande.

Il souligne que les fonds ont été débloqués par l'appelante au vu d'une attestation délivrée seulement seize jours après la commande et qui ne mentionnait qu'un accomplissement partiel des obligations du vendeur, les travaux n'étant en rien achevés. Il affirme que malgré le courriel mentionné par la Sa Franfinance, il n'a nullement compris la portée de ses déclarations et que la banque ne pouvait, sans faute de sa part, débloquer les fonds.

En outre il soutient que la banque devait s'assurer de la régularité du bon de commande financé.

Subsidiairement il entend faire valoir que l'inexécution contractuelle de la société Force Energie est suffisamment grave pour justifier la résolution judiciaire du contrat, revenant sur l'absence d'attestation sur l'honneur qui aurait permis la revente de l'électricité produite à Erdf.

Rappelant que l'annulation comme la résolution du contrat principal emporte celle du contrat de crédit affecté, il fait valoir que la Sa Franfinance, fautive, ne peut qu'être privée de sa créance de restitution ou en tout état de cause condamnée au paiement de dommages et intérêts indemnisant son préjudice sur la base du montant de cette créance et que, pour sa part, il tient l'installation à disposition du liquidateur de la société Force Energie et en assumera les frais y afférents.

La déclaration d'appel ainsi que les conclusions d'appel ont été signifiées à la société Force Energie en liquidation judiciaire, représentée par Me Alexandre H. son liquidateur, par acte d'huissier signifié à personne morale le 27 janvier 2020. Les conclusions de M. C. ont été signifiées de la même manière par acte du 11 mars 2020.

Me Alexandre H., ès-qualités, n'a pas constitué avocat.

L'instruction de l'affaire a été close par ordonnance du 29 mars 2021.

MOTIFS

Conformément aux articles 6 et 9 du code de procédure civile, les parties ont la charge d'alléguer et de prouver les faits nécessaires au succès de leurs prétentions. L'article 1353 du code civil fait peser la charge de la preuve d'une obligation sur celui qui s'en prévaut. Réciproquement celui qui se prétend libéré de cette obligation doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de cette obligation.

Sur l'annulation du contrat conclu avec la société Force Energie

Il n'est pas discuté que le contrat principal est soumis aux dispositions du code de la consommation relatives aux contrats conclus hors établissement.

Les dispositions de l'article L. 221-9 du code de la consommation, prévues à peine de nullité du contrat en application de l'article L242 du même code, énoncent que le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l'accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l'engagement exprès des parties.

Ce contrat comprend toutes les informations prévues à l'article L. 221-5.

(...) Le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l'article L. 221-5.

Aux termes des dispositions de l'article L. 221-5 du code de la consommation, préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, notamment les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2.

L'article L. 111-1 du même code dispose qu'avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1. Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;

2. Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 112-1 à L. 112-4 ;

3. En l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;

4. Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte ;

5. S'il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l'existence et aux modalités de mise en œuvre des garanties et aux autres conditions contractuelles ;

6. La possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI.

La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés à l'article R. 111-1 du même code.

En l'espèce, le bon de commande en litige porte sur une installation photovoltaïque complète, soit douze panneaux de marque Thomson ou équivalent d'une puissance unitaire de 250 Wc, soit une puissance de 3000 Wc, comprenant « Kit d'intégration GSE, onduleur, coffret de protection parafoudre, disjoncteur, accessoires et fournitures ».

Était également commandée l'isolation des combles perdus, sous rampant.

Ainsi que le soulignait le premier juge, ce bon de commande est particulièrement laconique. Il est de surcroit largement lacunaire, notamment alors qu'il :

- ne prévoit aucun délai de livraison,

- ne décrit pas les caractéristiques des panneaux photovoltaïques, permettant de vérifier leur éventuelle équivalence avec les panneaux de marque « Thomson » proposés,

- ne mentionne aucune caractéristique de l'onduleur, notamment ses marque et puissance,

- ne précise aucunement les modalités de l'intégration des panneaux au bâti, alors qu'il s'agit de travaux notoirement susceptibles d'engager la responsabilité décennale de l'entreprise,

- ne précise pas les modalités de l'isolation des combles, ni même leur surface ou encore les performances atteintes au terme des travaux.

Or de telles indications sont essentielles afin de permettre au consommateur, durant le délai de rétractation qui lui est octroyé, de se renseigner sur d'autres produits et de comparer la commande avec des offres concurrentes éventuelles.

Il ressort de ces énonciations que le bon de commande encourt la nullité en application des articles L. 221-5 et L. 111-1 précités.

Il est de règle que la nullité qui découle de l'irrégularité formelle du contrat au regard des dispositions régissant la vente hors établissement et dont la finalité est la protection du consommateur, est une nullité relative.

L'article 1182 du code civil, énonce que la confirmation est l'acte par lequel celui qui pourrait se prévaloir de la nullité y renonce. Cet acte mentionne l'objet de l'obligation et le vice affectant le contrat.

La confirmation ne peut intervenir qu'après la conclusion du contrat.

L'exécution volontaire du contrat, en connaissance de la cause de nullité, vaut confirmation. En cas de violence, la confirmation ne peut intervenir qu'après que la violence a cessé.

La confirmation emporte renonciation aux moyens et exceptions qui pouvaient être opposés, sans préjudice néanmoins des droits des tiers.

Il s'en déduit que la confirmation d'un acte nul impose d'une part la connaissance du vice l'ayant affecté et d'autre part l'intention de le réparer.

Or en l'espèce, le bon de commande ne fait aucune référence aux dispositions relatives aux mentions devant figurer à peine de nullité dans le contrat de vente hors établissement.

Ainsi il ne peut être affirmé que M. C. avait connaissance des vices affectant le bon de commande. Partant, aucun de ses agissements postérieurs ne saurait s'analyser comme une confirmation même tacite de l'acte nul, quand bien même il a pris possession de l'installation et signé une attestation de livraison, alors que de surcroit, il affirme que l'installation n'a jamais été productive faute de délivrance des documents administratifs nécessaires.

Ainsi le premier juge a, à juste titre, retenu que le contrat nul n'était pas confirmé et a prononcé son annulation.

Sur la nullité du contrat de crédit affecté et ses conséquences

Aux termes des dispositions de l'article L. 311-21 du code de la consommation, dans sa version applicable au contrat en litige, en cas de contestation sur l'exécution du contrat principal, le tribunal pourra, jusqu'à la solution du litige, suspendre l'exécution du contrat de crédit. Celui-ci est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.

Contrairement à ce qu'a affirmé le premier juge, l'annulation du contrat de crédit en conséquence de celle du contrat de vente et de prestations de services, emporte obligation pour l'emprunteur, sauf le cas de faute du prêteur dans le déblocage des fonds, de rembourser à ce dernier le capital prêté.

Toutefois les obligations de l'emprunteur ne prennent effet qu'à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation de service qui doit être complète et il appartient à l'organisme de crédit de s'assurer de l'exécution complète de la prestation.

En outre il est de règle que le prêteur qui commet une faute dans la délivrance des fonds se voit privé de la possibilité de se prévaloir à l'égard de l'emprunteur des effets de l'annulation du contrat de prêt à proportion du préjudice causé à l'emprunteur par cette faute.

En l'espèce et en premier lieu, l'organisme de crédit a assurément commis une faute en ne s'assurant pas de la régularité formelle du bon de commande qu'il finançait, au regard des dispositions protectrices du consommateur, faisant ainsi perdre à M. C., une chance de contracter un contrat valide.

Il est, de jurisprudence établie, que l'emprunteur qui détermine l'établissement de crédit à verser les fonds au vendeur au vu de la signature par lui d'un certificat de livraison du bien ou de l'exécution de la prestation, conforme au bon de commande et sans réserve, n'est pas recevable ensuite à soutenir au détriment du prêteur que le bien ne lui a pas été délivré ou que la prestation accessoire n'a pas été exécutée.

En l'espèce il est constant que M. C. a signé une attestation de livraison le 22 février 2017, soit seize jours seulement après avoir passé commande d'une installation photovoltaïque complète comprenant notamment toutes « démarches administratives et mairie », mais également les démarches pour obtenir le contrat d'obligation d'achat de l'électricité produite par ERDF et celles pour obtenir le certificat de conformité du consuel.

L'établissement de crédit, qui reconnaît son partenariat avec la société Force Energie et partant l'habitude de ce type de contrat, n'ignorait pas que ces démarches ne pouvaient être abouties au jour où l'emprunteur a signé l'attestation précitée, en raison du peu de temps qui s'était écoulé depuis la commande.

L'échange de courriels entre les parties en mars 2017, au terme duquel M. C. répond que la demande « d'accord » formulée par la Sa Franfinance n'est pas « très claire », précisant « accord de quoi » et ce quand bien même il y répondra positivement, ne peut valoir confirmation de l'achèvement de la totalité des prestations commandées.

De plus, M. C. précise à ce jour que l'installation a bien été installée et mise en service mais que le contrat de rachat de l'énergie produite n'a jamais pu être effectif faute de délivrance par la société Force Energie des documents administratifs nécessaires à sa finalisation, notamment l'attestation pour le Consuel pourtant expressément mentionnée dans le bon de commande.

Or ce dernier prévoyait expressément la revente de toute la production à Edf, en excluant toute autoconsommation, de sorte que la Sa Franfinance ne pouvait, sans commettre de faute, débloquer l'intégralité des fonds au vu de l'attestation précitée dont les termes ne lui permettaient pas de vérifier la bonne exécution de l'intégralité des prestations contractuellement convenues.

Si les fautes commises par l'établissement de crédit qui a délivré l'intégralité des fonds empruntés en vertu d'un contrat nul et sans s'assurer de l'exécution complète des prestations financées sont à même de la priver de tout ou partie de sa créance de restitution du capital prêté, il appartient à M. C. de justifier de ses préjudices ayant directement résulté des fautes commises.

Ainsi que déjà relevé, l'installation financée n'a jamais été achevée et son but initial, à savoir la revente de l'intégralité de l'énergie produite, n'a jamais pu être atteint. M. C. se trouve en conséquence en possession d'un appareillage inutile comme improductif dont il doit assumer les charges et ce du fait des fautes commises par la Sa Franfinance. Ainsi et compte tenu de l'importance du préjudice subi par l'emprunteur, cette société doit être privée de sa créance de restitution.

En revanche et conformément à son engagement, M. C. se doit à restitution de l'installation en litige, sur demande qui lui sera adressée par le liquidateur et selon les modalités que lui-même a proposées. Sa demande de se voir donner acte de l'engagement susvisée n'étant pas une prétention de sa part, en ce qu'elle ne lui confère pas de droit, il n'y a pas lieu de statuer par une mention expresse du dispositif sur ce point.

Sur l'appel en garantie par la Sa Franfinance de la société Force Energie en liquidation

Aux termes de l'article L. 312-56 du code de la consommation, si la résolution judiciaire ou l'annulation du contrat principal survient du fait du vendeur, celui-ci peut, à la demande du prêteur, être condamné à garantir l'emprunteur du remboursement du prêt, sans préjudice de dommages et intérêts vis-à-vis du prêteur et de l'emprunteur.

Compte tenu de l'annulation du contrat principal et des obligations réciproques de restitution qui en découlent, la société Force Energie supporte de plein droit celle de restituer les fonds qu'elle a perçus de la Sa Franfinance.

Toutefois l'appel en garantie précité, s'agissant d'une créance postérieure au jugement d'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire de la société Force Energie qui n'est née ni pour les besoins du déroulement de la procédure ni en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période, ainsi que l'énonce l'article L. 622-17 du code de commerce, est soumis à une déclaration de créance par le créancier dans les conditions fixées par l'article L. 622-24 du même code.

Or en l'espèce la Sa Franfinance ne justifie pas d'une déclaration régulière de sa créance, celle produite ne comporte aucune date ni preuve de son expédition ni encore timbre de réception et la cour qui ne peut prononcer la condamnation réclamée, n'a pas davantage à fixer, a fortiori alors que cela ne lui est pas demandé, une créance au passif de la liquidation de la société Force Energie.

Ce chef de demande ainsi que la demande indemnitaire formulée à l'encontre du liquidateur seront ainsi rejetés.

Sur les demandes accessoires

Les dispositions du jugement déféré s'agissant des dépens et de l'article 700 du code de procédure civile seront confirmées.

La Sa Franfinance sera condamnée aux dépens conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile et déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du même code.

En revanche, il sera fait droit à la demande de M. C. au titre de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur de la somme de 1 500 euros.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et par arrêt réputé contradictoire,

CONFIRME le jugement du tribunal d'instance de Guebwiller du 20 août 2019 en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

REJETTE la demande d'appel en garantie dirigée par la Sa Franfinance à l'encontre de la Sarl Force Energies,

REJETTE la demande indemnitaire dirigée à l'encontre du liquidateur de la Sarl Force Energie,

CONDAMNE la Sa Franfinance à verser à M. Patrick C. la somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

REJETTE la demande de la Sa Franfinance en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la Sa Franfinance aux frais et dépens d'appel.