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Décisions

CA Poitiers, 2e ch. civ., 18 janvier 2011, n° 09/01143

POITIERS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

V Consultants (SARL)

Défendeur :

Scalae (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Chapron

Conseillers :

M. Du Rostu, M. Ralincourt

Avoués :

SCP Gallet-Allerit, SCP Alirol-Laurent

Avocat :

Me Bez

T. com. La Rochelle, du 19 févr. 2009

19 février 2009

Par ordonnance en date du 19 février 2009, Monsieur le Président du tribunal de Commerce de LA ROCHELLE, statuant en référé dans un litige opposant la société V CONSULTANTS à la société SCALAE, a :

- dit que la société V CONSULTANTS ne justifie pas de sa qualité à agir au sens de l'article L. 123-5-1 du Code de Commerce ;

- dit que les demandes de la société V CONSULTANTS ne remplissent pas les conditions de recevabilité devant le juge des référés.

Par acte en date du 27 mars 2009, la société V CONSULTANTS a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Vu les conclusions de la société V CONSULTANTS signifiées le 26 février 2006 et celles de la société SCALAE signifiées le 4 mai 2010 auxquelles il est renvoyé pour un examen complet et détaillé des moyens et prétentions des parties,

Aux termes de ses conclusions la société V CONSULTANTS demande à la Cour d'enjoindre à la société SCALAE de déposer ses comptes clos le 31 décembre 2007 sous astreinte de 150 € par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir et de la condamner au paiement d'une indemnité de 1 500 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Aux termes de ses conclusions la société SCALAE demande à la Cour de déclarer la société V CONSULTANTS irrecevable en ses demandes et subsidiairement mal fondée, de confirmer l'ordonnance déférée et de condamner la société V CONSULTANTS au paiement d'une indemnité de

3 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 31 mai 2010.

Le 3 juin 2010, la société V CONSULTANTS a signifié de nouvelles conclusions tout en sollicitant le rabat de l'ordonnance de clôture.

Par conclusions signifiées le 4 juin 2010, la société SCALAE demande à la Cour de déclarer les dernières conclusions de la société V CONSULTANTS irrecevables.

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu que s'agissant des conclusions signifiées par les parties postérieurement à l'ordonnance de clôture il y a lieu de retenir que la société SCALAE a fait signifier ses dernières conclusions le 4 mai 2010 et que dans ces conditions la société V CONSULTANTS a disposé d'un temps suffisant avant le 31 mai 2010 pour y répondre étant pas ailleurs observé que la société V CONSULTANTS ne fait état d'aucune cause grave ou légitime l'ayant empêchée de répondre, avant l'ordonnance de clôture, à ces conclusions ;

Attendu qu'il convient en conséquence d'écarter des débats les conclusions signifiées par la société V CONSULTANTS le 3 juin 2010 ;

Attendu qu'il ressort des conclusions signifiées par les parties et des documents versés aux débats :

- que la société V CONSULTANTS exerçant sous l'enseigne « cabinet Serge VALLON » a pour activité la recherche d'informations administratives et financières ;

- que dans le cadre de son activité elle a souhaité consulter les comptes et bilans de la société SCALAE tels qu'ils doivent être déposés au registre du commerce et des sociétés et plus particulièrement les comptes de l'exercice clos au 31 décembre 2007 ;

- que la société SCALAE n'ayant pas déposé ses comptes, la société V CONSULTANTS a saisi Monsieur le Président du Tribunal de Commerce, statuant en référé, pour enjoindre la société SCALAE d'avoir à effectuer ce dépôt sous astreinte ;

Attendu qu'il résulte des dispositions de l'article L. 123-5-1 du code de Commerce, qu'à la demande de tout intéressé ou du ministère public le président du tribunal statuant en référé peut enjoindre sous astreinte aux dirigeants de personnes morales de procéder au dépôt des pièces et actes au registre du commerce et des sociétés auquel celle-ci est tenue par des dispositions législatives ou réglementaires ;

Attendu que pour déclarer la société V CONSULTANTS irrecevable en ses demandes le premier Juge a considéré qu'elle ne justifiait pas de sa qualité à agir et plus particulièrement qu'elle ne justifiait pas d'une mission qui lui aurait été confiée par un client afin d'établir un rapport sur la société SCALAE, argumentation reprise par cette dernière en cause d'appel ;

Attendu que le terme « tout intéressé », de l'article L.123-5-1 du Code de Commerce, se définit comme celui qui manifeste le désir d'accéder aux comptes sociaux sans qu'il lui soit demandé de s'expliquer sur les motifs de cet intérêt et sans que le juge ne puisse faire la part des choses entre l'intérêt légitime et la simple curiosité ; que l'action prévue par cet article du code de Commerce est ouverte à tout intéressé, c'est-à-dire toute personne qui cherche à avoir connaissance de l'information qui aurait dû être publiée, sans restriction ; que toute autre application de ce texte conduirait à ajouter à celui-ci une condition qu'il ne comporte pas et à vider de sa substance l'obligation légale de dépôt des comptes sociaux dont le législateur, en instituant ce référé injonction, par la loi du 15 mai 2001, a voulu renforcer l'effectivité ;

Attendu qu'il convient, en conséquence, par voie d'infirmation de l'ordonnance déférée, de déclarer la société V CONSULTANTS recevable en ses demandes ;

Attendu que, 'sur le fond', il résulte des documents versés aux débats par la société SCALAE que ses comptes 2007, 2008 et 2009 ont fait l'objet d'un dépôt au registre du commerce et des sociétés, conformément aux dispositions légales, et qu'il n'y a donc pas lieu d'en ordonner le dépôt sous astreinte étant par ailleurs observé que cette obligation incombe au gérant de la société à responsabilité limitée SCALAE ;

Attendu qu'il convient, en conséquence, de dire n'y avoir lieu à référé ;

Attendu que l'équité commande de ne pas prononcer de condamnation au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

Attendu que la société V CONSULTANTS succombant en ses demandes supportera seule la charge des dépens de première instance et d'appel ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

- écarte des débats les conclusions signifiées par la société V CONSULTANTS le 3 juin 2010 ;

- infirme l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions à l'exception de celle relative aux dépens ;

et statuant à nouveau,

- déclare la société V CONSULTANTS recevable en ses demandes ;

- dit n'y avoir lieu à référé ;

- déboute la société SCALAE de sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

- condamne la société V CONSULTANT aux dépens d'appel.