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Décisions

ADLC, 10 septembre 2021, n° 21-DCC-161

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

Décision

relative à la prise de contrôle exclusif de certaines activités du groupe Bio c' Bon par la société Carrefour France

ADLC n° 21-DCC-161

10 septembre 2021

L’Autorité de la concurrence,

Vu le dossier de notification adressé au service des concentrations le 21 septembre 2020 et déclaré complet le 29 janvier 2021, relatif à la prise de contrôle exclusif de certaines activités du groupe Bio c’ Bon par la société Carrefour France, filiale de la société Carrefour SA, formalisée par les offres de reprise du 15 septembre 2020 et par les jugements du tribunal de commerce de Paris du 2 novembre 2020 ;

Vu le livre IV du code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ;

Vu les engagements déposés le 2 août 2021 par la partie notifiante ;

Vu les éléments complémentaires transmis par la partie notifiante au cours de l’instruction ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Adopte la décision suivante :  

Résumé1

Aux termes de la décision ci-après, l’Autorité a procédé à l’examen de la prise de contrôle exclusif de 100 magasins sous enseigne Bio c’ Bon par le groupe Carrefour.

Carrefour et Bio c’ Bon sont deux enseignes de distribution au détail de produits à dominante alimentaire actives sur l’ensemble du territoire national. Elles distribuent toutes deux des produits à dominante alimentaire issus de l’agriculture biologique à travers, notamment, leurs réseaux de magasins spécialisés.

Pour les besoins de l’opération, l’Autorité a été amenée, pour la première fois, à délimiter un marché de la distribution de produits à dominante alimentaire issus de l’agriculture biologique2 (« ci-après produits biologiques ») et à se prononcer sur la structure concurrentielle de ce marché.

Sur les marchés amont de l’approvisionnement en produits à dominante alimentaire, l’Autorité a identifié un marché spécifique de l’approvisionnement en produits biologiques en raison, notamment, de l’existence de filières d’approvisionnements dédiées et de modes de production spécifiques ou de l’existence de certifications et de cahiers des charges pour les produits biologiques. Elle a cependant écarté tout risque d’atteinte à la concurrence, l’opération soumise à son examen n’étant pas de nature à renforcer de façon significative la puissance d’achat de Carrefour ou à générer une situation de dépendance économique des fournisseurs de nature à porter atteinte à la concurrence sur le marché amont de l’approvisionnement.

S’agissant du marché aval de la distribution de produits à dominante alimentaire, les résultats des tests de marché et du sondage réalisés, ainsi que les différents éléments rassemblés au cours de l’instruction, ont confirmé que les grandes surfaces spécialisées dans la distribution de produits biologiques (ou « GSS ») devaient être distinguées des enseignes de grandes surfaces alimentaires « conventionnelles » (telles que les hypermarchés, les supermarchés, les supérettes ou encore les magasins de maxi-discompte). Après avoir relevé certaines spécificités propres aux enseignes spécialisées dans les produits biologiques, s’agissant notamment de la profondeur et de la largeur de leurs gammes et, également, de la différence de prix avec les enseignes traditionnelles, l’Autorité a, au cas d’espèce, adapté la méthodologie d’analyse concurrentielle usuellement retenue en matière de distribution.

Ainsi, lorsque, dans une zone de chevauchement d’activités entre les parties, les parts de marché cumulées de celles-ci sont inférieures à 25 %, tout risque d’atteinte à la concurrence peut être écarté. S’agissant des zones dans lesquelles les parts de marché cumulées des parties se situent entre 25 % et 50 %, l’Autorité a considéré, en l’espèce et pour écarter tout doute sérieux d’atteinte à la concurrence sur des marchés délimités pour la première fois, que les zones dans lesquelles i) le nombre de groupes concurrents est inférieur à trois ou dans lesquelles ii) l’indice de Herfindahl Hirschman (ci-après « IHH »)3 associé à l’opération est supérieur à 2000, combiné à un delta d’IHH supérieur à 500, devaient faire l’objet d’un examen approfondi de la structure concurrentielle locale. Enfin, au-delà de 50 % de parts de marché cumulées, une analyse locale circonstanciée est menée, afin de déterminer si, après l’opération, subsisteront dans la zone des alternatives crédibles et suffisantes à la nouvelle entité.

À l’issue de l’analyse présentée ci-dessus, l’Autorité a identifié des risques d’atteinte à la concurrence dans dix zones : Paris Bourgogne, Paris Cléry, Paris Lecourbe, Paris Poteau, Levallois-Perret, Nancy, Puteaux, Toulouse Frères Lion, Toulouse Paul Vidal et Toulouse Rémusat.

Pour résoudre les problèmes identifiés, Carrefour a souscrit des engagements structurels consistant en huit cessions de magasins situés dans les zones concernées. Ces cessions permettront de supprimer tout chevauchement d’activités entre les parties ou de ramener les parts de marché de la nouvelle entité à un niveau raisonnable, en tout état de cause inférieur à 50 %, tout en donnant la possibilité aux enseignes concurrentes de renforcer leur présence ou de s’implanter dans les zones concernées et, ainsi, d’exercer une concurrence plus efficace sur la nouvelle entité.

En conséquence, l’Autorité a autorisé l’opération, sous réserve des engagements annexés à la présente décision.  

I. Les entreprises concernées et l’opération

1. La société Carrefour France, filiale à 100 % de la société Carrefour SA (ci-après « Carrefour ») est active dans le secteur de la distribution au détail à dominante alimentaire en France au travers notamment de l’exploitation d’hypermarchés, de supermarchés (Carrefour Market) et de magasins de proximité (enseignes Carrefour City, Carrefour Contact et Carrefour Express), ainsi que des services de vente en ligne.

2. Le groupe Carrefour exploite également plusieurs magasins à dominante alimentaire spécialisés dans les produits à dominante alimentaire issus de l’agriculture biologique4 (ci-après « produits biologiques ») sous les enseignes So’bio et Carrefour Bio. Carrefour possède également le site de vente en ligne « Greenweez » spécialisé dans la distribution de produits biologiques et écologiques.

3. Le groupe Bio c' Bon (ci-après « Bio c’ Bon ») est spécialisé dans la distribution au détail de produits biologiques sous enseigne « Bio c’ Bon ». Il est présent dans plusieurs pays5 et exploite 150 magasins, dont 120 en France.

4. Par jugements en date du 2 septembre 2020, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de plusieurs sociétés composant le groupe Bio c’ Bon.

5. Le 13 octobre 2020, en application du deuxième alinéa de l’article L. 430-4 du code de commerce6, l’Autorité de la concurrence a accordé à Carrefour une dérogation à l’effet suspensif du contrôle des concentrations afin qu’il puisse procéder à la réalisation effective de l’acquisition des sociétés cibles, dans l’hypothèse où son offre de reprise serait retenue par le tribunal de commerce. L’Autorité de la concurrence a considéré que les conditions d’application du deuxième alinéa de l’article L. 430-4 précité étaient remplies en l’espèce.

6. Le tribunal de commerce de Paris a, par jugements en date du 2 novembre 2020, accepté l’offre finale de la société Carrefour, portant sur un périmètre de 100 points de vente exploités sous enseigne Bio c’ Bon (ci-après « les cibles »). En outre, le jugement a autorisé Carrefour, pour un maximum de 15 % du total des magasins repris sur l’ensemble du territoire, à adjoindre aux activités de distribution de produits biologiques de ces magasins, celles de commerce d’alimentation générale de proximité. Dans sa notification, Carrefour a indiqué que, parmi les points de vente repris, quinze d’entre eux ont été – ou seront prochainement –transformés en magasins de distribution de produits à dominante alimentaire classiques sous enseigne Carrefour.

7. L’opération consiste donc en la prise de contrôle exclusif par Carrefour de 100 points de vente précédemment exploités sous enseigne Bio c’ Bon. 85 de ces magasins continueront à avoir une activité spécialisée de distribution de produits biologiques, les 15 autres ayant vocation à proposer non seulement des produits biologiques mais également des produits conventionnels (non-biologiques) dans le cadre d’une activité de distribution de produits à dominante alimentaire classique sous enseigne Carrefour.

8. Les entreprises concernées réalisent ensemble un chiffre d’affaires total sur le plan mondial de plus de 75 millions d’euros (Carrefour : [≥ 75 millions] d’euros pour l’exercice clos le 31 décembre 2019 ; cibles : [≥ 75 millions] d’euros pour l’exercice clos le 31 décembre 2019). Chacune de ces entreprises réalise, en France, un chiffre d’affaires supérieur à 15 millions d’euros dans le secteur du commerce de détail (Carrefour : [≥ 15 millions] d’euros pour l’exercice clos le 31 décembre 2019 ; cibles : [≥ 15 millions] d’euros pour l’exercice clos le 31 décembre 2019). Compte tenu de ces chiffres d’affaires, l’opération ne revêt pas une dimension européenne. En revanche, les seuils de contrôle relatifs au commerce de détail mentionnés au II de l’article L. 430-2 du code de commerce sont franchis. La présente opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du code de commerce, relatives à la concentration économique.

II. Délimitation des marchés pertinents

9. Les parties sont simultanément présentes sur les marchés de l’approvisionnement et de la distribution au détail de produits à dominante alimentaire issus de l’agriculture biologique.

A. LES MARCHÉS AMONT DE L’APPROVISIONNEMENT

1. MARCHÉS DE PRODUITS

10. Selon une pratique décisionnelle constante, les entreprises du secteur de la distribution alimentaire sont présentes, en tant qu’acheteurs, sur les marchés amont de l’approvisionnement, qui comprennent la vente de biens de consommation par les producteurs à des clients tels que les grossistes, les détaillants ou d’autres entreprises (par exemple les cafés/hôtels/restaurants)7.

11. Les autorités de concurrence distinguent habituellement autant de marchés qu’il existe de familles ou groupes de produits8. Les catégories suivantes ont ainsi été distinguées :  produits de grande consommation : (1) liquides, (2) droguerie, (3) parfumerie et hygiène, (4) épicerie sèche, (5) parapharmacie, (6) produits périssables en libre-service ;  frais traditionnel : (7) charcuterie, (8) poissonnerie, (9) fruits et légumes, (10) pain et pâtisserie fraîche, (11) boucherie ;  bazar : (12) bricolage, (13) maison, (14) culture, (15) jouets, loisir et détente, (16) jardin, (17) automobile ;  électroménager, photo, cinéma et son : (18) gros électroménager, (19) petit électroménager, (20) photo et ciné, (21) hi-fi et son, (22) TV et vidéo ; et  textile : (23) textile et chaussures.

12. La Commission européenne a également envisagé une segmentation en fonction des canaux de distribution9. Dans sa décision du 25 janvier 2000, Carrefour/Promodès, elle relève qu’il « existe des indices sérieux permettant de penser que certains marchés de l’approvisionnement peuvent également être définis en fonction des canaux de distribution, de telle sorte que l’approvisionnement du secteur du commerce de détail à dominante alimentaire pourrait constituer un marché autonome ». L’Autorité de la concurrence a également identifié un marché distinct de l’approvisionnement en produits alimentaires destinés aux grandes surfaces alimentaires (hypermarchés, supermarchés, supérettes, magasins de libre-service, magasins de maxi-discompte, pris ensemble les « GSA »)10.

13. Par ailleurs, au sein de ce canal, l’Autorité a envisagé une sous-segmentation en fonction du positionnement commercial du produit (marque de fournisseur « MDF » ou marque de distributeur « MDD »)11.

14. En l’espèce, la partie notifiante considère qu’il convient de distinguer, au sein de chaque famille et catégorie de produits, entre l’approvisionnement en produits biologiques et l’approvisionnement en produits dits conventionnels. Pour justifier sa position, la partie notifiante met en avant le fait qu’en cas d’augmentation des prix au détail des produits biologiques, les consommateurs ne se reporteraient pas entièrement sur les produits conventionnels. Pour proposer une offre de nature à satisfaire la demande des consommateurs, un distributeur spécialisé devrait nécessairement s’approvisionner en produits biologiques et ne pourrait pas « arbitrer » ses achats avec des produits conventionnels. Du côté de l’offre, il n’existerait pas de substituabilité entre les produits biologiques et les produits conventionnels en raison, notamment, des cahiers des charges particuliers et des contraintes réglementaires spécifiques pesant sur l’agriculture biologique.

15. Cette absence de substituabilité de l’offre est confirmée par les réponses au test de marché réalisé auprès des principaux fournisseurs de produits biologiques des parties (spécialisés ou non dans la production de produits biologiques). Ces derniers soulignent la spécificité de l’approvisionnement en produits biologiques du côté des fournisseurs, avec notamment l’existence de filières d’approvisionnements dédiées et de modes de production spécifiques, ou encore l’existence de certifications et de cahiers des charges pour les produits biologiques. En outre, les fournisseurs répondants relèvent que le choix de conversion d’un producteur de produits conventionnels aux produits biologiques est rendu plus complexe par ces différents aspects, ce qui peut contribuer à allonger les temps de conversion12 et en augmenter les coûts. Ces différents éléments tendent à indiquer qu’il existe un marché distinct de l’approvisionnement en produits biologiques.

16. L’Autorité a également examiné s’il était pertinent d’envisager une segmentation du marché de l’approvisionnement en produits biologiques par canal de distribution, en particulier entre l’approvisionnement des GSA et celui des grandes surfaces spécialisées (ci-après, « GSS »)13.

17. L’Autorité a consulté sur ce point les principaux concurrents des parties sur le marché aval de la distribution, ainsi que les principaux fournisseurs de produits biologiques des parties. Il a notamment été demandé aux fournisseurs s’ils étaient exclusivement en relation avec des acteurs GSA ou avec des GSS. Si certains fournisseurs indiquent qu’ils ne sont, historiquement, en relation qu’avec des acteurs GSS et qu’ils restent attachés à ce canal de distribution, d’autres relèvent que des aspects stratégiques et de développement commercial peuvent les conduire à contracter avec des acteurs GSA. Néanmoins, dans ce second cas, concurrents et fournisseurs s’entendent pour souligner les différences des produits biologiques vendus à l’un et l’autre des canaux, notamment du point de vue des marques ou des présentations des produits. La quasi- totalité des fournisseurs interrogés considère également que les produits biologiques vendus aux GSS ne pourraient pas être vendus à l’identique aux GSA, et inversement.

18. L’Autorité examinera donc l’impact de l’opération sur un marché amont de l’approvisionnement en produits biologiques. La question de la segmentation de ce marché par canal de distribution peut toutefois rester ouverte, dans la mesure où les conclusions de l’analyse concurrentielle demeurent inchangées, quelles que soient les segmentations envisagées.

19. Au cas d’espèce, les parties sont simultanément présentes sur le marché amont global de l’approvisionnement en produits biologiques. Leurs activités se chevauchent également dès lors qu’un marché amont de l’approvisionnement en produits biologiques à destination des GSS est envisagé.

2. MARCHÉS GÉOGRAPHIQUES

20. La pratique décisionnelle14 considère que les marchés amont de l’approvisionnement en produits alimentaires sont de dimension nationale. Elle a ainsi constaté que les préférences, les goûts et les habitudes alimentaires des consommateurs, les différences de prix, les variations des parts de marché détenues par les principaux opérateurs selon les États membres et la présence de marques de fabricants ou de distributeurs commercialisées uniquement au plan national ne permettent pas de retenir une dimension plus large du marché.

21. Il n’y a pas lieu de remettre en cause cette délimitation au cas d’espèce s’agissant des marchés amont de l’approvisionnement en produits biologiques.

B. LES MARCHÉS AVAL DE LA DISTRIBUTION AU DÉTAIL DE PRODUITS BIOLOGIQUES

1. MARCHÉS DE SERVICES

22. En ce qui concerne la distribution au détail de produits à dominante alimentaire, la pratique décisionnelle de l’Autorité distingue six catégories de commerce, en retenant plusieurs critères, notamment la taille des magasins, leurs techniques de vente, leur accessibilité, la nature du service rendu et l’ampleur des gammes de produits proposés : (i) les hypermarchés (d’une surface de vente supérieure à 2 500 m²), (ii) les supermarchés (magasins à dominante alimentaire d’une surface de vente inférieure à 2 500 m² et supérieure à 400 m²), (iii) le commerce spécialisé, (iv) le petit commerce de détail (moins de 400 m²), (v) les magasins de maxi-discompte et (vi) la vente par correspondance15.

23. S’agissant plus particulièrement des produits biologiques, il convient de relever que l’alimentation constitue la principale catégorie de produits biologiques, ces derniers se déclinant traditionnellement en plusieurs autres catégories, telles que les cosmétiques, les compléments alimentaires, les produits détergents et d’entretien ou le textile16.

24. À la demande de l’Autorité, et en collaboration avec cette dernière, la partie notifiante a procédé à la réalisation d’un sondage auprès des consommateurs de produits biologiques17. Il ressort notamment de l’analyse des réponses au sondage, qu’en cas d’augmentation des prix de l’ensemble des produits biologiques de 10 %, une très grande majorité des consommateurs continuerait à consommer des produits biologiques. Il ressort donc du sondage que la substituabilité, aux yeux des consommateurs, entre produits biologiques et produits conventionnels est limitée.

25. En réponse à des tests de marché effectués auprès des groupes concurrents des parties18, ces derniers ont souligné, tout en rappelant qu’un produit issu de l’agriculture biologique et un produit conventionnel remplissent une même fonction – en priorité le besoin d’alimentation – l’existence de plusieurs spécificités des produits biologiques par rapport aux produits conventionnels, notamment en termes de qualité (certifications, présentations, gammes et assortiments différents) ou de valeurs mises en avant par le produit (écologie, protection des animaux, etc.).

26. L’Autorité relève par ailleurs qu’il existe des différences de prix importantes et persistantes entre les produits biologiques et les produits conventionnels19. Il en résulte par exemple qu’une large partie de consommateurs ne se tourne pas vers les produits biologiques en raison de leur surcoût20.

27. Les résultats du sondage, couplés aux éléments recueillis au cours de l’instruction, mettent ainsi en évidence l’existence d’un marché spécifique de la distribution au détail de produits biologiques.

28. La distribution des produits biologiques est assurée principalement par cinq circuits : les magasins généralistes (hypermarchés, supermarchés, supérettes, magasins de libre-service, magasins de maxi-discompte, pris ensemble « les GSA »), les magasins spécialisés dans la distribution de produits biologiques (« les GSS »), la vente directe (ventes à la ferme, marchés, associations pour le maintien d’une agriculture protégée, vente collective), les artisans- commerçants et la restauration commerciale21. Les circuits GSA et GSS représentent 83 %22 des ventes de produits biologiques en France et sont à ce titre les deux canaux de distribution privilégiés par les consommateurs.

29. La vente en ligne constitue également un canal de distribution de produits biologiques. Elle est assurée par certains des distributeurs précités, via leurs sites internet, mais également par des acteurs spécialisés tels que l’opérateur Greenweez, contrôlé depuis 2016 par Carrefour. Les ventes en ligne de produits biologiques restent toutefois marginales à ce jour23.

30. La partie notifiante considère en l’espèce qu’il est nécessaire de distinguer la distribution de produits biologiques par les GSA de la distribution par les GSS, compte tenu de l’existence (i) d’une segmentation forte des marques de produits par canaux de distribution, les marques de produits biologiques vendues dans les magasins spécialisés n’étant généralement pas disponibles dans les GSA et inversement ; (ii) d’une clientèle distincte selon les canaux de distribution, la clientèle des GSS étant moins sensible au prix et attirée par un mode de consommation responsable ; (iii) d’une offre spécifique propre aux GSS, assortie de services particuliers notamment de conseil.

31. La substituabilité imparfaite entre les GSS et les GSA a pu justifier par le passé que le Conseil de la concurrence24, puis l’Autorité25, retiennent l’existence de marchés distincts, selon les circuits de distribution. Au cas d’espèce, le sondage des consommateurs de GSS réalisé par la partie notifiante en collaboration avec l’Autorité26 ainsi que les tests de marché effectués auprès des concurrents des parties ont permis de collecter les informations pertinentes ci-dessous.

32. Par le biais du sondage, les consommateurs de GSS ont été interrogés sur leurs éventuels reports en cas d’augmentation des prix de 10 % dans l’ensemble des GSS. Les résultats font apparaître qu’une très faible part de consommateurs – moins de 10 % – choisirait de se reporter vers d’autres canaux de distribution à la suite de cette augmentation des prix de l’ensemble des GSS. Les différents tests de robustesse effectués montrent par ailleurs que ce constat est valable même si l’on envisage des segmentations particulières27. En conséquence, les résultats du test SSNIP28 indiquent qu’une hausse de prix de 10 % de l’ensemble des GSS serait profitable et qu’il existerait donc un marché pertinent limité à la distribution par le biais des GSS. S’agissant des lieux de report principaux envisagés, les hypermarchés arrivent en première position, devant les supermarchés et les marchés.

33. Le fait que les hypermarchés et, plus marginalement, les supermarchés, soient privilégiés par les consommateurs en cas de report vers d’autres canaux de distribution de produits biologiques que les GSS est cohérent – dans une certaine mesure – avec les réponses aux tests de marché recueillies par les services d’instruction, comme il est détaillé ci-dessous.

34. En particulier, toutes les GSS interrogées ont estimé qu’une pression concurrentielle est exercée par les GSA sur les GSS en matière de produits biologiques. Les principaux facteurs avancés sont l’accroissement de l’offre en produits biologiques en GSA, et l’existence de tarifs compétitifs pour ces produits en GSA, en raison des forts volumes d’achats de ces dernières.

35. Ces réponses aux tests de marché – de la part des GSS notamment – doivent néanmoins être accueillies avec précaution. La très grande majorité des GSS interrogées estiment ainsi que la pression concurrentielle des GSA sur les GSS en matière de produits biologiques existe quel que soit le format de la GSA considérée, ce qui inclut notamment les commerces de proximité, le maxi-discompte et les supérettes. Ce résultat est particulièrement surprenant au regard du caractère limité de l’offre de produits biologiques disponible au sein des petites surfaces de GSA, lesquelles commercialisent uniquement certains types de produits et proposent un faible nombre de références biologiques, au total et pour chaque type de produit, en comparaison avec les GSS.

36. Il peut être relevé que le nombre de références biologiques moyen au sein d’une enseigne GSS est d’approximativement 4 000 références pour les magasins d’une surface comprise entre 120 et 400 m², et de plus de 7 000 références pour les magasins dont la surface est supérieure à 400 m². Ces niveaux sont sans commune mesure avec ceux observés au sein des GSA : un total de références en produits biologiques inférieur à 500 pour la quasi-totalité29 des enseignes GSA interrogées s’agissant des magasins de moins de 400 m² ; d’environ 1 350 références de produits biologiques, en moyenne, au sein des magasins dont la surface est comprise entre 400 et 2 500 m² (supermarchés) ; d’approximativement 3 000 références, en moyenne, au sein des magasins de plus de 2 500 m² (hypermarchés). Quant aux magasins de maxi-discompte, leur nombre de références en produits biologiques demeure, encore aujourd’hui, très marginal. En moyenne, une GSA offre donc, quelle que soit sa surface et son format, une offre en produits biologiques significativement moins riche qu’une GSS.

37. De manière générale, plusieurs GSA interrogées ont mentionné dans leurs réponses l’existence d’une différence d’offre structurelle entre leurs rayons et ceux des GSS. Ces différences se manifestent, comme vu ci-dessus, par le nombre de références disponibles et donc la profondeur de gamme, mais également par les caractéristiques des produits, leur diversité et leur qualité. Plusieurs fournisseurs interrogés ont par ailleurs indiqué proposer des marques dédiées uniquement à la vente en GSS, et refuser leur commercialisation en GSA. Dans l’ensemble, les réponses apportées par les GSA et les fournisseurs tendent donc à illustrer que la pression concurrentielle que peuvent exercer les GSA sur les GSS en matière de produits biologiques reste limitée. Elles contrebalancent donc les réponses apportées par les GSS sur ce sujet et corroborent les conclusions du sondage exposées au point 32, qui a mis en lumière un faible report des consommateurs de produits biologiques en GSS vers les GSA en cas d’augmentation des prix au sein des GSS.

38. S’agissant de la clientèle, plusieurs répondants aux tests de marché, tant GSS que GSA, ont insisté sur l’existence d’une clientèle spécifique au sein des GSS, pour laquelle l’achat de produits biologiques en GSS relève de convictions personnelles, voire même d’une démarche d’opposition aux GSA. Ceci explique d’ailleurs que, pour de nombreux répondants au test de marché30, un client de GSS qui voit son magasin GSS de prédilection fermer sera amené à se reporter sur la GSS la plus proche. Cette conclusion ressort également des éléments recueillis via le sondage.

39. S’agissant par ailleurs de la politique commerciale, la très grande majorité des GSA interrogées a indiqué ne pas adapter son positionnement au regard de celui des GSS, ni effectuer de veille concurrentielle spécifique, de type relevés de prix, au sein des GSS31. Deux enseignes de GSA interrogées justifient notamment leurs réponses par les différences de produits distribués au sein de ces canaux et l’absence de « table de chaînage »32 pour comparer les gammes distribuées en GSS avec celles distribuées en GSA. Les réponses des GSS sont plus contrastées : si certaines enseignes indiquent ne pas adapter leur politique commerciale en fonction des produits biologiques vendus en GSA, d’autres indiquent en tenir compte dans leur positionnement tarifaire.

40. Enfin, plusieurs études semblent également attester de différences de prix significatives entre les GSS et les GSA s’agissant des produits biologiques. En 2017, une étude menée dans trois villes françaises, à savoir Paris, Angers et Rennes (réalisée par le magasine « Linéaires »), estime que les GSS bio sont 17-20 % plus chères que les GSA autour d’elles33. Cette différence de prix semble avoir perduré dans le temps. Une étude menée en septembre 2019 par l’« UFC Que Choisir »34 indique, à cet égard, que les GSS sont en moyenne 27 % plus chères que les supermarchés (panier moyen à 169 euros en GSS contre 133 euros en GSA35).

41. En conclusion, au vu de ce qui précède et, en particulier, des résultats du sondage effectué auprès des consommateurs de GSS, l’Autorité conclut à l’existence d’un marché distinct de la distribution au détail de produits à dominante alimentaire biologiques, celui-ci étant restreint aux GSS.

42. Au cas d’espèce, les activités des parties se chevauchent sur ce marché, Carrefour étant notamment actif par le biais de ses enseignes Carrefour Bio et So’ Bio.

2. MARCHÉS GÉOGRAPHIQUES

43. Si l’Autorité de la concurrence dispose d’une pratique décisionnelle établie quant à la délimitation des zones de chalandises des GSA36 en matière de distribution de produits à dominante alimentaire, elle n’a jusqu’à présent jamais eu à délimiter précisément celles des GSS spécialisées dans la distribution de produits biologiques.

44. Pour rappel, en ce qui concerne le secteur de la distribution au détail alimentaire, la pratique décisionnelle a défini des marchés géographiques distincts selon que les zones concernées sont situées à i) Paris intra-muros, ii) en petite couronne, iii) en grande couronne, iv) en grande ville de province, v) en province. Les éléments au dossier tendent à confirmer la pertinence de cette distinction s’agissant des GSS spécialisées dans la distribution de produits biologiques.

45. À cet égard, l’Autorité a interrogé les distributeurs GSA et concurrents GSS, par le biais des tests de marché, sur les temps et les distances que leurs consommateurs étaient, selon eux, prêts à parcourir pour acheter des produits biologiques. Les répondants ont, dans leur très grande majorité, indiqué que les consommateurs étaient prêts à parcourir une distance plus importante pour acheter de tels produits que des produits non issus de l’agriculture biologique.

46. En revanche, les indications de distance fournies tant par les répondants GSA que GSS sont imprécises ou contradictoires et ne permettent pas de converger vers une zone géographique déterminée pour chaque grande zone considérée.

47. Les consommateurs ont également été interrogés dans le cadre du sondage sur les distances qu’ils parcouraient actuellement et qu’ils seraient prêts à parcourir pour se rendre en GSS afin d’effectuer leurs achats de produits biologiques. Les résultats du sondage aboutissent à des distances que les consommateurs seraient prêts à parcourir pour se rendre en GSS relativement élevées par rapport aux distances habituellement retenues dans la pratique décisionnelle de l’Autorité pour des GSA de surfaces équivalentes, et ce quelle que soit la zone considérée : de l’ordre de 20 minutes à pied ou en voiture à Paris et en petite couronne, et de 20 minutes en province. Ces résultats confirment, à tout le moins, la tendance issue des résultats du test de marché, selon laquelle les consommateurs sont prêts à parcourir une distance plus importante pour se rendre dans une GSS que dans une GSA de surface équivalente aux magasins cibles37.

48. Néanmoins, ces données doivent être appréciées avec précaution, pour au moins deux raisons.

49. Premièrement, les temps de trajets sont appréhendés par le biais d’intervalles, et non de temps de parcours absolus. L’appréciation de l’isochrone qui découle des résultats du sondage est, par conséquent, moins précise et peut être potentiellement surestimée. L’intervalle le plus fréquemment cité est ainsi l’intervalle [10-20] minutes, mais il n’est pas possible d’évaluer la distribution des répondants au sein de cet intervalle.

50. Deuxièmement, les consommateurs interrogés ne peuvent pas être géolocalisés avec précision. La maille géographique la plus fine pouvant être obtenue pour chaque consommateur est celle du code postal de son lieu de résidence. De plus, le sondage ne permet pas de connaître, pour chaque consommateur, le magasin fréquenté, sa localisation précise et ses caractéristiques. Il n’est donc pas possible de différencier les temps de trajet en fonction de la surface des magasins GSS fréquentés, comme c’est le cas avec la pratique décisionnelle en matière de distribution alimentaire classique.

51. Au cas d’espèce, la partie notifiante a fourni des données d’empreintes réelles relatives aux magasins cibles, qui reflètent les temps de parcours réels des consommateurs.

52. Il convient de relever que certaines des empreintes réelles obtenues conduisent à des zones de chalandise particulièrement grandes, notamment à Paris, par comparaison avec les autres empreintes réelles fournies par la partie notifiante, pour d’autres magasins cibles de taille équivalente et situées dans les mêmes grandes zones (ci-après « empreintes réelles aberrantes »). L’existence de tels écarts pourrait s’expliquer par le fait que certains consommateurs des magasins cibles déclarent leur code postal de résidence mais fréquentent un magasin situé, par exemple, à proximité de leur lieu de travail, lequel peut être éloigné du lieu de résidence.

53. Les parties ayant communiqué les empreintes réelles des magasins cibles, la question de la délimitation géographique exacte des marchés de la distribution de produits biologiques peut demeurer ouverte.

54. Dans le cadre de la présente opération, l’analyse a donc été réalisée en tenant compte des empreintes réelles des magasins cibles. Néanmoins, et afin de tenir compte des limites identifiées au point 52, s’agissant des magasins cibles dont l’empreinte réelle est considérée comme aberrante38, l’Autorité a eu recours à une analyse au niveau de l’empreinte réelle moyenne observée au niveau de chaque grande zone39. III. Analyse concurrentielle

55. L’opération conduit à des chevauchements d’activités entre Carrefour et la cible sur les marchés amont de l’approvisionnement (A) et sur le marché aval de la distribution au détail de produits à dominante alimentaire issus de l’agriculture biologique (B). Par ailleurs, l’Autorité a envisagé la possibilité que l’opération emporte également des effets congloméraux entre les marchés aval de la distribution de produits à dominante alimentaire et les marchés aval de la distribution de produits biologiques (C).

A. EFFETS DE L’OPÉRATION SUR LES MARCHÉS AMONT DE L’APPROVISIONNEMENT EN PRODUITS BIOLOGIQUES

56. Sur les marchés de l’approvisionnement en produits biologiques, la partie notifiante a indiqué ne pas pouvoir déterminer avec précision la part de la nouvelle entité sur les marchés amont, en raison de l’indisponibilité des données relatives à la taille des marchés amont concernés.

57. Néanmoins, au regard des chiffres d’affaires des parties en matière de ventes de produits biologiques, et du chiffre d’affaires total généré en France par la distribution de produits biologiques, la part à l’achat combinée des parties est estimée comme étant inférieure à 25 % sur les marchés amont de l’approvisionnement en produits biologiques, quelle que soit la segmentation envisagée. Au surplus, l’incrément associé à l’opération est relativement faible et inférieur à deux points, compte tenu du faible chiffre d’affaires de la cible rapporté au chiffre d’affaires total généré par la vente de produits biologiques.

58. La nouvelle entité restera par ailleurs confrontée à la concurrence d'opérateurs de dimension importante, tels que le groupe E. Leclerc, Intermarché, Système U ou Casino, mais également de groupes d’envergure nationale spécialisés dans la vente au détail de produits biologiques, au premier rang desquels Biocoop ou La Vie Claire.

59. L’opération n’est donc pas de nature à renforcer significativement la puissance d’achat de la nouvelle entité en matière de produits biologiques.

60. Néanmoins, ce renforcement, même limité, de la puissance d’achat de la nouvelle entité, issu de l’addition des parts à l’achat de la cible, intervient sur des marchés où le secteur de l’offre est beaucoup moins concentré que celui de la demande. Il y a donc lieu d’apprécier dans quelle mesure l’opération engendre un risque de renforcement de la dépendance économique au détriment des fournisseurs.

61. Selon la pratique décisionnelle des autorités de concurrence, le risque de dépendance économique s’apprécie notamment au regard de la part que représente un débouché dans l’ensemble des ventes du fournisseur. Les autorités de concurrence considèrent qu’il existe un « seuil de menace »40 au-delà duquel la survie du fabricant peut être remise en cause, la disparition de ce débouché plaçant, à plus ou moins brève échéance, le fournisseur dans une situation financière difficile, pouvant parfois conduire à une faillite. Le niveau de ce seuil n’est toutefois pas fixe et dépend d’un grand nombre de paramètres spécifiques selon les secteurs concernés, la structure financière des entreprises, l’existence et le coût d’éventuelles solutions alternatives.

62. Lors de l’examen d’une opération de concentration dans le secteur de la distribution de détail à dominante alimentaire, la Commission européenne a estimé à 22 %41 le seuil au-delà duquel un producteur ne peut remplacer la perte d’un client sans subir de pertes financières considérables, sachant que le passage à d’autres canaux de distribution (GSS, par exemple) peut s’avérer coûteux, difficile, voire impossible. En l’espèce, ce seuil de 22 % a été retenu pour les besoins de la présente instruction42.

63. En tout état de cause, comme le précisent les lignes directrices de l’Autorité relatives au contrôle des concentrations, « [e]n soi, la dépendance économique ne constitue cependant une atteinte à la concurrence que si elle a un effet sur la concurrence sur un marché et, finalement, sur le surplus du consommateur, et non simplement sur un fournisseur, dans la mesure où l’objectif des autorités de concurrence n’est pas de protéger une entreprise en tant que telle, qu’elle soit concurrente, cliente ou fournisseur ». Il en résulte qu’une opération de concentration n’est de nature à porter atteinte à la concurrence qu’à la condition que la création ou le renforcement d’un état de dépendance économique des fournisseurs des parties à l’opération risque d’affecter la structure ou le fonctionnement de la concurrence sur les marchés concernés.

64. En l’espèce, le test de marché mené auprès des fournisseurs n’a pas conduit à identifier de situations dans lesquelles l’opération créerait ou renforcerait un état de dépendance économique affectant la concurrence. La proportion de fournisseurs communs entre les parties est très faible et la plupart de ces fournisseurs communs n’approvisionnent pas nécessairement les parties pour les mêmes catégories de produits.

65. Compte tenu de ces éléments et de la position des parties sur les marchés concernés, l’opération n’a donc pas pour effet de renforcer de façon significative la puissance d’achat de la nouvelle entité ou de générer une situation de dépendance économique des fournisseurs de nature à porter atteinte à la concurrence sur les marchés amont de l’approvisionnement, quelle que soit la segmentation retenue.

B. EFFETS DE L’OPÉRATION SUR LES MARCHÉS AVAL DE LA DISTRIBUTION AU DÉTAIL DE PRODUITS BIOLOGIQUES

1. MÉTHODOLOGIE

a) Remarques préliminaires sur l’analyse concurrentielle relative aux 15 magasins ayant vocation à être transformés en GSA par l’acquéreur

66. Comme indiqué au point 6 de la présente décision, l’opération porte sur la reprise de 100 magasins précédemment exploités sous format GSS par Bio c’ Bon. 85 de ces magasins resteront exploités sous format GSS par Carrefour. Les 15 autres magasins ont été – ou seront prochainement – transformés par Carrefour en GSA et n’auront donc plus vocation à être spécialisés dans la distribution de produits biologiques.

67. Le passage sous format GSA de ces 15 magasins cibles peut être analysé comme, d’une part, une augmentation de l’offre disponible sur les marchés locaux de la distribution au détail de produits à dominante alimentaire, et, d’autre part, une disparition de l’offre en produits biologiques sur les marchés locaux concernés de la distribution au détail de produits biologiques.

68. Afin de vérifier, les effets de l’augmentation de l’offre en produits à dominante alimentaire, une analyse des marchés locaux de la distribution au détail de produits à dominante alimentaire a été réalisée sur les 15 zones de chalandise des points de vente cible, définies selon la pratique décisionnelle usuelle de l’Autorité en la matière43. Cette analyse a conclu à l’absence de problème de concurrence sur les marchés locaux de la distribution de produits à dominante alimentaire concernés.

69. S’agissant par ailleurs des effets de la diminution d’offre en produits biologiques dans ces 15 zones, l’Autorité considère qu’il convient également de procéder à une analyse des marchés de la distribution au détail de produits biologiques tels que définis aux points 22 et suivants. Cette analyse vise notamment à s’assurer qu’un éventuel retour en arrière de l’acquéreur, consistant à finalement adjoindre à ces magasins une activité exclusivement centrée sur la distribution de produits biologiques suite au contrôle réalisé par l’Autorité, ne serait pas de nature à affecter la concurrence sur les marchés concernés. L’opération ne peut en effet être autorisée sans que cette analyse soit menée et, le cas échéant, que les éventuels problèmes de concurrence soient identifiés et corrigés.

70. En conséquence, pour les 100 points de vente susmentionnés, l’Autorité a procédé à une analyse des marchés aval de la distribution au détail de produits biologiques. b) La méthode retenue pour l’analyse des marchés locaux de la distribution au détail de produits biologiques

71. À titre liminaire, rappelons que l’Autorité est amenée pour la première fois, à l’occasion de cette opération, à délimiter un marché de la distribution de produits biologiques et à se prononcer sur la structure concurrentielle de ce marché. 72. Afin d’apprécier si une concentration entre deux distributeurs est susceptible de réduire significativement la concurrence sur un marché local, l’Autorité de la concurrence a généralement recours à une méthode qui repose sur des principes généraux énoncés dans ses lignes directrices.

73. L’Autorité examine ainsi en priorité deux critères : (i) les parts de marché de la nouvelle entité et (ii) le degré de concentration du marché.

74. Dans les zones où les activités des parties se chevauchent, du fait de la présence concomitante de la cible et de l’acquéreur, par le biais de ses enseignes Carrefour Bio et So.Bio, les parts de marché cumulées de la nouvelle entité, évaluées en surface de vente, ont été calculées.

75. En l’espèce, l’opération aboutit à des chevauchements d’activités de distribution de produits biologiques dans 32 zones sur les 100 zones analysées.

76. La pratique décisionnelle en matière de distribution44 retient généralement, conformément aux lignes directrices de l’Autorité45, un seuil de 25 % de parts de marché cumulées en deçà duquel l’absence de problème de concurrence peut être présumée. Lorsque la part de marché est comprise entre 25 % et 50 %, l’Autorité de la concurrence procède à une analyse de la structure concurrentielle locale. Au-delà de 50 % de parts de marché cumulées, l’Autorité46 présume l’existence d’un pouvoir de marché et n’exclut un problème de concurrence qu’en cas de présence dans la zone concernée d’alternatives crédibles et suffisantes à la nouvelle entité.

77. Compte tenu de ces éléments, l’Autorité a, en l’espèce, identifié les situations locales susceptibles de poser des problèmes concurrentiels de la manière suivante.

78. Lorsque la part de marché de la nouvelle entité est inférieure à 25 %, tout risque d’atteinte à la concurrence a été écarté, sans qu’une analyse concurrentielle plus détaillée ait été menée, aucune circonstance particulière ne la rendant nécessaire. Parmi les 32 zones de chevauchement identifiées au point 75, 9 zones ont ainsi été considérées comme n’étant pas susceptibles de poser un problème de concurrence à l’issue de l’opération, puisque la part de marché de la nouvelle entité y sera inférieure à 25 %.

79. Dans 15 zones, la part de marché de la nouvelle entité est comprise entre 25 % et 50 % à l’issue de l’opération. Dans ces zones, l’Autorité a procédé à une étude de la structure de l’offre locale et du degré de concentration du marché. L’Autorité a considéré, en l’espèce et pour écarter tout doute sérieux d’atteinte à la concurrence sur des marchés délimités pour la première fois, que les zones dans lesquelles i) le nombre de groupes concurrents est inférieur à trois47 ou dans lesquelles ii) l’indice de Herfindahl-Hirschman (ci-après « IHH »)48 à l’issue de l’opération est supérieur à 2 000, combiné à un delta d’IHH supérieur à 500, devaient faire l’objet d’un examen approfondi de la structure concurrentielle locale. 80. L’application de ces critères aux 15 zones dans lesquelles la part de marché de la nouvelle entité est comprise entre 25 % et 50 % conduit à restreindre l’examen approfondi de la structure concurrentielle locale à 10 de ces zones.

81. Enfin, dans 8 zones, la part de marché de la nouvelle entité est supérieure à 50 %, faisant présumer l’existence potentielle d’un pouvoir de marché important à l’issue de l’opération. Un examen approfondi de la structure concurrentielle locale a également été mené dans ces zones.

82. Il convient par ailleurs de préciser que l’Autorité de la concurrence a également tenu compte, lorsque les circonstances le justifiaient, des caractéristiques des magasins implantés dans et à proximité de la zone de chalandise de chaque magasin. L’Autorité a ainsi pu retenir, de manière qualitative au stade de l’analyse concurrentielle, l’existence d’une pression concurrentielle exercée par certains points de vente indépendants ou appartenant à des groupes infranationaux de taille modeste. La crédibilité de la pression concurrentielle exercée par ces magasins a été appréciée au regard, notamment, de la surface de vente desdits points de vente, et de la similarité de leur assortiment avec celui des magasins des parties et des principaux groupes nationaux du secteur.

2. ANALYSE DES ZONES LOCALES

a) Analyse des 10 zones dans lesquelles la part de marché de la nouvelle entité est comprise entre 25 % et 50 % et devant faire l’objet d’une analyse concurrentielle approfondie

83. Parmi les 15 zones dans lesquelles la part de marché de la nouvelle entité sera comprise entre 25 % et 50 %, l’absence d’au moins 3 groupes concurrents et/ou le fort degré de concentration du marché à l’issue de l’opération49 justifient une analyse concurrentielle approfondie dans 10 d’entre elles.

Zone de Paris Cléry

84. Dans la zone située autour du magasin de Paris Cléry, étudiée en ayant recours à l’empreinte réelle moyenne observée à Paris (1,2 km) compte tenu du caractère aberrant de l’empreinte réelle obtenue pour cette zone50, les parts de marché des parties et de leurs concurrents sont les suivantes :

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85. La nouvelle entité disposera d’une part de marché de [40-50] % à l’issue de l’opération, et sera le groupe le plus représenté dans la zone du point de vue du nombre de magasins (huit points de vente). Dans cette zone, l’accroissement du degré de concentration du marché est conséquent (l’IHH est de [2 000-3 000] avant l’opération, contre [3 000-4 000] post-opération, soit un delta d’IHH de [800-900]). La nouvelle entité sera confrontée à la concurrence de trois enseignes GSS : l’enseigne Naturalia adossée au groupe Casino, avec sept magasins représentant [30- 40] % des surfaces de vente, et deux enseignes appartenant à des groupes spécialisés dans la vente de produits biologiques, à savoir La Vie Claire et Biocoop, représentant respectivement [20-30] % et [5-10] % des surfaces de vente. L’Autorité ne peut exclure que la frange concurrentielle subsistante soit en l’espèce insuffisante pour discipliner efficacement le comportement de la nouvelle entité dans la zone. En effet, l’enseigne Biocoop, avec un seul magasin sur les 19 que compte la zone et seulement [5-10] % des surfaces de vente, est fortement marginalisée dans la zone, ce qui tendrait à affaiblir la pression concurrentielle à laquelle fera face la nouvelle entité.

86. Afin de conforter l’analyse fondée sur l’empreinte réelle moyenne observée à Paris, l’Autorité a procédé à des analyses de sensibilité visant à étudier si une modulation à la marge de l’empreinte réelle moyenne sur la zone de Paris Cléry pouvait mener à l’inclusion de groupes concurrents (en cas d’agrandissement de la zone) ou à d’éventuelles exclusions (en cas de rétrécissement de la zone). En l’espèce, cette analyse de sensibilité peut mener à intégrer un autre point de vente de la cible (Paris Renard, situé à 1,32 km du point de vente cible). À l’inverse, un éventuel rétrécissement de la zone peut conduire à l’exclusion du magasin Biocoop, situé à 1,16 km du magasin cible, lequel constituait un des deux groupes alternatifs aux groupes Casino et Carrefour sur la zone.

87. Compte tenu de ce qui précède, l’Autorité considère que l’opération est susceptible de porter atteinte à la concurrence dans la zone autour du magasin Bio c’ Bon de Paris Cléry.

88. La partie notifiante a toutefois présenté des engagements, analysés en section IV de la présente décision, destinés à remédier aux risques d’atteinte à la concurrence identifiés.

Zone de Paris Hauteville

89. Dans la zone située autour du magasin de Paris Hauteville51, les parts de marché des parties et de leurs concurrents sont les suivantes :

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90. La nouvelle entité disposera d’une part de marché de [30-40] % à l’issue de l’opération et sera présente par le biais de neuf magasins. Dans cette zone, malgré l’accroissement du degré de concentration du marché (l’IHH est de [2 000-3 000] avant l’opération, contre [2 000-3 000] post-opération, soit un delta d’IHH de [600-700]), la nouvelle entité sera confrontée à la concurrence de cinq enseignes GSS.

91. Au surplus, l’un des magasins cibles ayant fait l’objet des engagements soumis par la partie notifiante et analysés en section IV (Paris Cléry) est situé dans la zone de chalandise du magasin de Paris Hauteville. La cession de ce point de vente contribuera donc à diminuer la part de marché de la nouvelle entité dans la zone autour du magasin de Paris Hauteville. La part de marché de la nouvelle entité sera dès lors de [30-40] % dans la zone de Paris Hauteville.

92. Par conséquent, compte tenu de l’existence d’une offre alternative crédible et suffisante et, par ailleurs, des engagements présentés par la partie notifiante et analysés en section IV, tout risque d’atteinte à la concurrence peut être écarté dans la zone de Paris Hauteville.

Zone de Paris Boulevard de Strasbourg

93. Dans la zone située autour du magasin de Paris Boulevard de Strasbourg52, les parts de marché des parties et de leurs concurrents sont les suivantes :

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94. La nouvelle entité disposera d’une part de marché de [40-50] % à l’issue de l’opération et sera présente par le biais de cinq magasins. Dans cette zone, malgré l’accroissement du degré de concentration du marché (l’IHH est de [2 000-3 000] avant l’opération, contre [3 000- 4 000]post-opération, soit un delta d’IHH de [700-800]), la nouvelle entité sera confrontée à la concurrence de trois enseignes GSS : l’enseigne Naturalia adossée au groupe Casino, avec cinq magasins représentant [20-30] % des surfaces de vente, et deux enseignes appartenant à des groupes spécialisés dans la vente de produits biologiques, à savoir La Vie Claire et Biocoop, représentant respectivement [20-30] % et [5-10] % des surfaces de vente.

95. Par ailleurs, les enseignes Naturalia et Biocoop sont présentes en bordure de zone immédiate par le biais de deux magasins de surfaces respectives de [confidentiel] m² et [confidentiel] m².

96. Au surplus, l’un des magasins cibles ayant fait l’objet des engagements soumis par la partie notifiante et analysés en section IV (Paris Cléry) est situé dans la zone de chalandise du magasin de Paris Boulevard de Strasbourg. La cession de ce point de vente contribuera donc à diminuer la part de marché de la nouvelle entité dans la zone autour du magasin de Paris Boulevard de Strasbourg. La part de marché de la nouvelle entité sera, dès lors, de [30-40] % dans la zone de Paris Boulevard de Strasbourg.

97. Par conséquent, compte tenu de l’existence d’une offre alternative crédible et suffisante et, par ailleurs, des engagements présentés par la partie notifiante et analysés en section IV, tout risque d’atteinte à la concurrence peut être écarté dans la zone de Paris Boulevard de Strasbourg.

Zone de Paris Bergère

98. Dans la zone située autour du magasin de Paris Bergère, étudiée en ayant recours à l’empreinte réelle moyenne observée à Paris (1,2 km) compte tenu du caractère aberrant de l’empreinte réelle obtenue pour cette zone53, les parts de marché des parties et de leurs concurrents sont les suivantes :

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99. La nouvelle entité disposera d’une part de marché de [40-50] % à l’issue de l’opération et sera présente par le biais de 7 magasins. Dans cette zone, malgré l’accroissement du degré de concentration du marché (l’IHH est de [2 000-3 000] avant l’opération, contre [3 000-4 000] post-opération, soit un delta d’IHH de [700-800]), la nouvelle entité sera confrontée à la concurrence de trois enseignes GSS : l’enseigne Naturalia adossée au groupe Casino, avec sept magasins également représentant [30-40] % des surfaces de vente, et deux enseignes appartenant à des groupes spécialisés dans la vente de produits biologiques, à savoir La Vie Claire et Biocoop, représentant respectivement [10-20] % et [5-10] % des surfaces de vente.

100. Comme pour la zone de Paris Cléry, l’Autorité a procédé à des analyses de sensibilité visant à étudier si une modulation à la marge de l’empreinte réelle moyenne sur la zone de Paris Bergère pouvait mener à l’inclusion de groupes concurrents (en cas d’agrandissement de la zone) ou à d’éventuelles exclusions (en cas de rétrécissement de la zone). En l’espèce, cette analyse de sensibilité peut mener à intégrer la pression concurrentielle du magasin Cœur de Nature (situé à 1,29 km du point de vente cible). En revanche, aucune enseigne GSS concurrente n’est exclue dans l’hypothèse d’un rétrécissement à la marge de la taille de la zone.

101. Au surplus, l’un des magasins cibles ayant fait l’objet des engagements soumis par la partie notifiante et analysés en section IV (Paris Cléry) est situé dans la zone de chalandise du magasin de Paris Bergère. La cession de ce point de vente contribuera donc à diminuer la part de marché de la nouvelle entité dans la zone autour du magasin de Paris Bergère. La part de marché de la nouvelle entité sera dès lors de [30-40] % dans la zone de Paris Bergère.

102. Par conséquent, compte tenu de l’existence d’une offre alternative crédible et suffisante et, par ailleurs, des engagements présentés par la partie notifiante et analysés en section IV, tout risque d’atteinte à la concurrence peut être écarté dans la zone de Paris Bergère.  Zone de Paris Pyrénées

103. Dans la zone située autour du magasin de Paris Pyrénées54, les parts de marché des parties et de leurs concurrents sont les suivantes :

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104. La nouvelle entité disposera d’une part de marché de [30-40] % à l’issue de l’opération par le biais de deux magasins. Néanmoins, le groupe Carrefour ne sera pas le premier opérateur de la zone. Dans cette zone, malgré l’accroissement du degré de concentration du marché (l’IHH est de [2 000-3 000] avant l’opération, contre [3 000-4 000] post-opération, soit un delta d’IHH de [500-600]), la nouvelle entité sera confrontée à la concurrence de trois enseignes GSS : l’enseigne Naturalia adossée au groupe Casino, avec trois magasins représentant [30-40] % des surfaces de vente, et deux enseignes appartenant à des groupes spécialisés dans la vente de produits biologiques, à savoir La Vie Claire et Biocoop, représentant respectivement [10-20] % et [5-10] % des surfaces de vente.

105. Par ailleurs, l’enseigne Naturalia est présente en bordure de zone immédiate par le biais de quatre magasins, de surfaces respectives de [confidentiel] m², [confidentiel] m², [confidentiel] m² et [confidentiel] m². La pression concurrentielle exercée par ces magasins en bordure de zone rendrait plus difficile une augmentation unilatérale de prix, ou une réduction de la qualité des services offerts de la part de la nouvelle entité, puisqu’elle se traduirait par un report des consommateurs vers les magasins concurrents.

106. Compte tenu du nombre de magasins limité des parties dans cette zone, de l’existence d’une frange concurrentielle importante ([60-70] %), diversifiée et crédible, et de la présence additionnelle de magasins de l’enseigne Naturalia en bordure de zone, l’Autorité considère que, dans la zone de Paris Pyrénées, tout risque d’atteinte à la concurrence peut être écarté.  Zone de Paris Vavin

107. Dans la zone située autour du magasin de Paris Vavin55, les parts de marché des parties et de leurs concurrents sont les suivantes :

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108. La nouvelle entité disposera d’une part de marché de [30-40] % à l’issue de l’opération. Dans cette zone, malgré l’accroissement du degré de concentration du marché (l’IHH est de [2 000- 3 000] avant l’opération, contre [2 000-3 000] post-opération, soit un delta d’IHH de [500- 600]), la nouvelle entité sera confrontée à la concurrence de quatre enseignes (représentant trois groupes) GSS : l’enseigne Naturalia adossée au groupe Casino, avec deux magasins représentant [10-20] % des surfaces de vente, et trois enseignes appartenant à deux groupes spécialisés56 dans la vente de produits biologiques, à savoir Les Nouveaux Robinson et Biocoop, représentant respectivement [10-20] % et [20-30] % des surfaces de vente.

109. La prise en compte de la bordure de la zone immédiate, bien que menant à l’inclusion d’un magasin supplémentaire de la nouvelle entité (Bio c’ Bon Saint-André des Arts), conduit également à l’inclusion de deux points de vente Naturalia de surfaces de [confidentiel] m² et [confidentiel] m² et d’un autre groupe concurrent (La Vie Claire, par le biais d’un magasin d’une surface de [confidentiel] m²).

110. Compte tenu du nombre de magasins limité des parties dans cette zone, de l’existence d’une frange concurrentielle importante ([60-70] %), diversifiée et crédible, et de la présence additionnelle de magasins concurrents en bordure de zone, l’Autorité considère que, dans la zone de Paris Vavin, tout risque d’atteinte à la concurrence peut être écarté.

Zone de Paris Grenelle

111. Dans la zone située autour du magasin de Paris Grenelle57, les parts de marché des parties et de leurs concurrents sont les suivantes :

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112. La nouvelle entité disposera d’une part de marché de [30-40] % à l’issue de l’opération. Néanmoins, le groupe Carrefour ne sera pas le premier opérateur de la zone. Dans cette zone, malgré l’accroissement du degré de concentration du marché (l’IHH est de [3 000-4 000] avant l’opération, contre [3 000-4 000] post-opération, soit un delta d’IHH de [600-700]), la nouvelle entité sera confrontée à la concurrence de deux groupes GSS spécialisés dans la vente de produits biologiques, à savoir La Vie Claire et Biocoop, représentant respectivement [40-50] % et [10-20] % des surfaces de vente.

113. Par ailleurs, l’enseigne Naturalia est présente en bordure de zone immédiate par le biais d’un magasin d’une surface de [confidentiel] m². La pression concurrentielle supplémentaire exercée par ce magasin en bordure de zone tend à complexifier toute augmentation unilatérale de prix, ou toute réduction de la qualité des services offerts de la part de la nouvelle entité, puisqu’elle se traduirait par un report des consommateurs vers les magasins concurrents.

114. Compte tenu de l’existence d’une frange concurrentielle importante ([60-70] %) et crédible et de la présence additionnelle de l’enseigne Naturalia en bordure de zone, l’Autorité considère que, dans la zone de Paris Grenelle, tout risque d’atteinte à la concurrence peut être écarté.

Zone de Paris Saint-André des Arts

115. Dans la zone située autour du magasin de Paris Saint-André des Arts, les parts de marché des parties et de leurs concurrents sont les suivantes : 

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116. Cette zone présentait un faible degré de concentration du marché avant l’opération, puisque l’IHH y était inférieur au seuil de 2 000 usuellement considéré comme critique. Post-opération, le marché sera plus concentré de par le rapprochement entre un magasin sous enseigne So Bio appartenant au groupe Carrefour de taille importante ([confidentiel] m²), et de trois magasins sous enseignes Bio c’ Bon : l’IHH sera de ([2 000-3 000], conséquence d’un delta d’IHH du fait de l’opération de ([600-700].

117. La nouvelle entité disposera dans cette zone d’une part de marché de [30-40] % à l’issue de l’opération, mais elle sera confrontée à la concurrence de six enseignes GSS.

118. Par conséquent, compte tenu de l’existence d’une offre alternative crédible et suffisante, tout risque d’atteinte à la concurrence peut être écarté dans la zone de Paris Saint-André des Arts.

Zone de Paris Poteau

119. Dans la zone située autour du magasin de Paris Poteau58, les parts de marché des parties et de leurs concurrents sont les suivantes :

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120. L’opération a pour effet de renforcer de façon significative la part de marché de la nouvelle entité dans la zone, puisque la nouvelle entité disposera d’une part de marché de [40-50] % en surface de vente à l’issue de l’opération, tandis que ne subsistera qu’une seule enseigne concurrente, en l’occurrence l’enseigne Naturalia du groupe Casino, disposant d’une part de marché de [50-60] % en surface de vente. Aucun groupe spécialisé dans la seule distribution de produits biologiques n’est présent dans cette zone ou à proximité59.

121. Dans cette zone, l’opération se traduit donc par le passage de trois à deux enseignes concurrentes et la constitution d’un duopole local autour des enseignes de Carrefour et de Casino. On observe également que ce duopole local présente des caractéristiques similaires tant du point de vue du profil des groupes en présence (deux groupes détenteurs d’enseignes GSS et GSA), que du nombre de magasins détenus ou des parts de marché en surface observées. La disparition de l’enseigne Bio c’ Bon entraîne donc, pour le consommateur, la perte d’une alternative, sur un marché qui était déjà fortement concentré avant l’opération (IHH égal à [4 000-5 000] pré-opération, l’opération induisant un delta d’IHH de [600-700]). L’opération se traduit donc par un risque d’appauvrissement significatif de la diversité de l’offre et une baisse de la pression concurrentielle sur les prix.

122. Compte tenu de ces éléments, l’opération est susceptible de porter atteinte à la concurrence dans la zone autour du magasin Bio c’ Bon de Paris Poteau.

123. La partie notifiante a toutefois présenté des engagements, analysés en section IV de la présente décision, afin de remédier aux risques d’atteinte à la concurrence identifiés.

Zone de Puteaux

124. Dans la zone située autour du magasin de Puteaux60, les parts de marché des parties et de leurs concurrents sont les suivantes :

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125. L’opération a pour effet de renforcer de façon significative la part de marché de la nouvelle entité dans la zone, puisque la nouvelle entité disposera d’une part de marché de [30-40] % en surface de vente à l’issue de l’opération, tandis que ne subsistera qu’une seule enseigne concurrente, en l’occurrence l’enseigne Naturalia du groupe Casino, disposant d’une part de marché de [60-70] % en surface de vente. Qui plus est, les deux magasins situés en bordure de zone immédiate sont des magasins sous enseigne Carrefour Bio appartenant à l’acquéreur61.

126. Dans cette zone, l’opération se traduit donc par le passage de trois à deux enseignes concurrentes et la constitution d’un duopole local autour des enseignes de Carrefour et de Casino. La disparition de l’enseigne Bio c’ Bon entraîne donc, pour le consommateur, la perte d’une alternative, sur un marché qui était déjà fortement concentré avant l’opération (IHH égal à [4 000-5 000] pré-opération, l’opération induisant un delta d’IHH de [600-700]). L’opération se traduit donc par un risque d’appauvrissement significatif de la diversité de l’offre et une baisse de la pression concurrentielle sur les prix.

127. Compte tenu de ces éléments, l’opération est susceptible de porter atteinte à la concurrence dans la zone autour du magasin Bio c’ Bon de Puteaux.

128. La partie notifiante a toutefois présenté des engagements, analysés en section IV de la présente décision, afin de remédier aux risques d’atteinte à la concurrence identifiés.  b) Analyse des 8 zones dans lesquelles la part de marché de la nouvelle entité est supérieure à 50 %

129. La part de marché de la nouvelle entité excédant 50 % dans 8 zones, ces dernières ont également fait l’objet d’un examen approfondi de la structure concurrentielle à l’issue de l’opération62.

Zone de Paris Bourgogne

130. Dans la zone située autour du magasin de Paris Bourgogne63, les parts de marché des parties et de leurs concurrents sont les suivantes :

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131. La nouvelle entité disposera d’une part de marché de [60-70] % à l’issue de l’opération, et sera également le groupe le plus représenté dans la zone du point de vue du nombre de magasins. Dans cette zone, l’accroissement du degré de concentration du marché est conséquent (l’IHH est de [2 000-3 000] avant l’opération, contre [4 000-5 000] post-opération, soit un delta d’IHH de [1 000-2 000]). 132. Quatre enseignes GSS concurrentes sont présentes : l’enseigne Naturalia adossée au groupe Casino, avec trois magasins représentant [10-20] % des surfaces de vente, et trois enseignes appartenant à des groupes spécialisés dans la vente de produits biologiques, à savoir La Vie Claire, Les Nouveaux Robinson et Biocoop, représentant respectivement [5-10] %, [5-10] % et [5-10] % des surfaces de vente.

133. Compte tenu du niveau de part de marché de la nouvelle entité, traduisant la création d’un pouvoir de marché important dans la zone pour le groupe Carrefour, l’Autorité ne peut exclure que la frange concurrentielle subsistante soit en l’espèce insuffisante pour discipliner efficacement le comportement de la nouvelle entité dans la zone. Les magasins des groupes Biocoop et La Vie Claire sont en particulier très éloignés du point de vente cible64 et la pression concurrentielle qu’ils exerceront sur la nouvelle entité pourrait ainsi être atténuée.

134. Au vu de ce qui précède, l’Autorité considère que l’opération est susceptible de porter atteinte à la concurrence dans la zone autour du magasin Bio c’ Bon Bourgogne.

135. Carrefour a toutefois présenté des engagements, analysés en section IV de la présente décision, afin de remédier aux risques d’atteinte à la concurrence identifiés.

Zone de Paris Lecourbe

136. Dans la zone située autour du magasin de Paris Lecourbe65, les parts de marché des parties et de leurs concurrents sont les suivantes :

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137. La nouvelle entité disposera d’une part de marché de [50-60] % à l’issue de l’opération. Dans cette zone, l’accroissement du degré de concentration du marché est conséquent (l’IHH est de [2 000-3 000] avant l’opération, contre [3 000-4 000] post-opération, soit un delta d’IHH de [1 000-2 000]).

138. Trois enseignes GSS concurrentes sont présentes : l’enseigne Naturalia adossée au groupe Casino, avec trois magasins représentant [10-20] % des surfaces de vente, et deux enseignes appartenant à des groupes spécialisés dans la vente de produits biologiques, à savoir La Vie Claire et Biocoop, représentant respectivement [10-20] % et [10-20] % des surfaces de vente.

139. Compte tenu du niveau de part de marché de la nouvelle entité, traduisant la création d’un pouvoir de marché important dans la zone pour le groupe Carrefour, l’Autorité ne peut exclure que la frange concurrentielle subsistante soit en l’espèce insuffisante pour discipliner efficacement le comportement de la nouvelle entité dans la zone. 140. Au vu de ce qui précède, l’Autorité considère que l’opération est susceptible de porter atteinte à la concurrence dans la zone autour du magasin Bio c’ Bon Lecourbe.

141. Carrefour a toutefois présenté des engagements, analysés en section IV de la présente décision, afin de remédier aux risques d’atteinte à la concurrence identifiés.  Zone de Paris Caulaincourt

142. Dans la zone située autour du magasin de Paris Caulaincourt66, les parts de marché des parties et de leurs concurrents sont les suivantes :

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143. La nouvelle entité disposera d’une part de marché de [50-60] % à l’issue de l’opération. Dans cette zone, l’accroissement du degré de concentration du marché est important (l’IHH est de [4 000-5 000] avant l’opération, contre [5 000-6 000] post-opération, soit un delta d’IHH de [900-1 000]). La nouvelle entité sera a priori confrontée uniquement à la concurrence de l’enseigne Naturalia, détenant cinq points de vente dans la zone.

144. Néanmoins, la prise en compte de la bordure de zone immédiate permet d’inclure dans la zone la pression concurrentielle de plusieurs points de vente concurrents, parmi lesquels deux magasins sous enseigne Naturalia, respectivement de [confidentiel] m² et [confidentiel] m², un magasin sous enseigne Biocoop d’une surface de 190 m², ainsi qu’un magasin sous enseigne Biomonde d’une surface de [confidentiel] m². La prise en compte de ces magasins permet de ramener la part de marché de la nouvelle entité et le degré de concentration du marché à des niveaux beaucoup plus raisonnables. Dans un rayon de 1 km, la nouvelle entité observe ainsi une part de marché de [30-40] %, tandis que sont présents trois groupes concurrents. Le delta d’IHH associé à l’opération n’est plus que de [0-500], soit en dessous du seuil de 500 fixé pour les besoins de l’analyse de la présente opération. La pression concurrentielle exercée par ces différents magasins en bordure de zone tend à complexifier toute augmentation unilatérale de prix, ou toute réduction de la qualité des services offerts et donc l’exercice d’un pouvoir de marché de la part de la nouvelle entité, puisque cela se traduirait par un report des consommateurs vers les magasins concurrents.

145. Par conséquent, compte tenu de l’existence d’une offre alternative crédible et suffisante au sein de la zone et en bordure de zone immédiate, tout risque d’atteinte à la concurrence peut être écarté dans la zone de Paris Caulaincourt.  Zone de Nancy

146. Dans la zone située autour du magasin de Nancy67, les parts de marché des parties et de leurs concurrents sont les suivantes :

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147. La nouvelle entité disposera d’une part de marché de [60-70] % à l’issue de l’opération. Dans cette zone, l’accroissement du degré de concentration du marché est conséquent (l’IHH est de [2 000-3 000] avant l’opération, contre [4 000-5 000] post-opération, soit un delta d’IHH de [1 000-2 000]).

148. Trois enseignes GSS concurrentes sont présentes : l’enseigne Naturalia adossée au groupe Casino, avec trois magasins représentant [10-20] % des surfaces de vente, et deux enseignes indépendantes et qui ne sont pas d’envergure nationale, à savoir Croc Us et Rayon Bio, représentant respectivement [10-20] % et [10-20] % des surfaces de vente.

149. Compte tenu du niveau de part de marché de la nouvelle entité, traduisant la création d’un pouvoir de marché important dans la zone pour le groupe Carrefour, l’Autorité ne peut exclure que la frange concurrentielle subsistante soit en l’espèce insuffisante pour discipliner efficacement le comportement de la nouvelle entité dans la zone.

150. Au vu de ce qui précède, l’Autorité considère que l’opération est susceptible de porter atteinte à la concurrence dans la zone autour du magasin Bio c’ Bon de Nancy.

151. Carrefour a toutefois présenté des engagements, analysés en section IV de la présente décision, afin de remédier aux risques d’atteinte à la concurrence identifiés.

Zone de Levallois Perret

152. Dans la zone située autour du magasin de Levallois Perret68, les parts de marché des parties et de leurs concurrents sont les suivantes :

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153. L’opération a pour effet de renforcer de façon significative la part de marché de la nouvelle entité dans la zone, puisque la nouvelle entité disposera d’une part de marché de [60-70] % en surface de vente à l’issue de l’opération, tandis que ne subsistera qu’une seule enseigne concurrente, en l’occurrence l’enseigne Naturalia du groupe Casino, disposant d’une part de marché de [30-40] % en surface de vente.

154. Dans cette zone, l’opération se traduit donc par le passage de trois à deux enseignes concurrentes et la constitution d’un duopole local autour des enseignes de Carrefour et de Casino. La disparition de l’enseigne Bio c’ Bon entraîne donc, pour le consommateur, la perte d’une alternative, sur un marché qui était déjà fortement concentré avant l’opération (IHH égal à [3 000-4 000] pré-opération, l’opération induisant un delta d’IHH de [1 000-2 000]). L’opération se traduit donc par un risque d’appauvrissement significatif de la diversité de l’offre et une baisse de la pression concurrentielle sur les prix.

155. Compte tenu de ces éléments, l’opération est susceptible de porter atteinte à la concurrence dans la zone autour du magasin Bio c’ Bon de Levallois Perret.

156. La partie notifiante a toutefois présenté des engagements, analysés en section IV de la présente décision, afin de remédier aux risques d’atteinte à la concurrence identifiés.

Zone de Toulouse Frères Lion

157. Dans la zone située autour du magasin de Toulouse Frères Lion69, les parts de marché des parties et de leurs concurrents sont les suivantes :

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158. La nouvelle entité disposera d’une part de marché de [50-60] % à l’issue de l’opération et sera la plus représentée du point de vue du nombre de magasins. Dans cette zone, l’accroissement du degré de concentration du marché est conséquent (l’IHH est de [2 000-3 000] avant l’opération, contre [4 000-5 000] post-opération, soit un delta d’IHH de [1 000-2 000]).

159. Deux enseignes GSS concurrentes sont présentes : l’enseigne Biocoop, avec deux magasins représentant [20-30] % des surfaces de vente et une enseigne indépendante, La Dispute aux Oiseaux, représentant [10-20] % des surfaces de vente.  160. Compte tenu du niveau de part de marché de la nouvelle entité, traduisant la création d’un pouvoir de marché important dans la zone pour le groupe Carrefour, l’Autorité ne peut exclure que la frange concurrentielle subsistante, constituée en l’espèce de seulement deux enseignes dont l’une n’est pas d’envergure nationale, soit insuffisante pour discipliner efficacement le comportement de la nouvelle entité dans la zone.

161. Au vu de ce qui précède, l’Autorité considère que l’opération est susceptible de porter atteinte à la concurrence dans la zone autour du magasin Bio c’ Bon de Toulouse Frères Lion.

162. Carrefour a toutefois présenté des engagements, analysés en section IV de la présente décision, afin de remédier aux risques d’atteinte à la concurrence identifiés.

Zone de Toulouse Paul Vidal

163. Dans la zone située autour du magasin de Toulouse Paul Vidal70, les parts de marché des parties et de leurs concurrents sont les suivantes :

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164. La nouvelle entité disposera d’une part de marché de [50-60] % à l’issue de l’opération et sera la plus représentée du point de vue du nombre de magasins. Dans cette zone, l’accroissement du degré de concentration du marché est conséquent (l’IHH est de [2 000-3 000] avant l’opération, contre [4 000-5 000] post-opération, soit un delta d’IHH de [1 000-2 000]).

165. Trois enseignes GSS concurrentes sont présentes : l’enseigne Biocoop, avec deux magasins représentant [20-30] % des surfaces de vente, et deux enseignes indépendantes, La Dispute aux Oiseaux et Bioasis, représentant respectivement [10-20] % et [5-10] % des surfaces de vente.

166. Compte tenu du niveau de part de marché de la nouvelle entité, traduisant la création d’un pouvoir de marché important dans la zone pour le groupe Carrefour, l’Autorité ne peut exclure que la frange concurrentielle subsistante, constituée en l’espèce de trois enseignes dont deux ne sont pas adossées à des groupes d’envergure nationale, soit insuffisante pour discipliner efficacement le comportement de la nouvelle entité dans la zone.

167. Au vu de ce qui précède, l’Autorité considère que l’opération est susceptible de porter atteinte à la concurrence dans la zone autour du magasin Bio c’ Bon de Toulouse Paul Vidal.

168. Carrefour a toutefois présenté des engagements, analysés en section IV de la présente décision, afin de remédier aux risques d’atteinte à la concurrence identifiés.  Zone de Toulouse Rémusat

169. Dans la zone située autour du magasin de Toulouse Rémusat71, les parts de marché des parties et de leurs concurrents sont les suivantes :

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170. La nouvelle entité disposera d’une part de marché de [50-60] % à l’issue de l’opération et sera la plus représentée du point de vue du nombre de magasins. Dans cette zone, l’accroissement du degré de concentration du marché est conséquent (l’IHH est de [2 000-3 000] avant l’opération, contre [3 000-4 000] post-opération, soit un delta d’IHH de [1 000-2 000]).

171. Trois enseignes GSS concurrentes sont présentes : l’enseigne Biocoop, avec deux magasins représentant [20-30] % des surfaces de vente, et deux enseignes indépendantes, La Dispute aux Oiseaux et Bioasis, représentant respectivement [5-10] % et [5-10] % des surfaces de vente.

172. Compte tenu du niveau de part de marché de la nouvelle entité, traduisant la création d’un pouvoir de marché important dans la zone pour le groupe Carrefour, l’Autorité ne peut exclure que la frange concurrentielle subsistante, constituée en l’espèce de trois enseignes dont deux ne sont pas adossées à des groupes d’envergure nationale, soit insuffisante pour discipliner efficacement le comportement de la nouvelle entité dans la zone.

173. Au vu de ce qui précède, l’Autorité considère que l’opération est susceptible de porter atteinte à la concurrence dans la zone autour du magasin Bio c’ Bon de Toulouse Rémusat.

174. Carrefour a toutefois présenté des engagements, analysés en section IV de la présente décision, afin de remédier aux risques d’atteinte à la concurrence identifiés.

C. ANALYSE DES EFFETS CONGLOMÉRAUX DE L’OPÉRATION

175. Une concentration produit des effets congloméraux non-coordonnés lorsqu'elle permet à la nouvelle entité de restreindre ou d'empêcher l'accès à un ou plusieurs marchés. En effet, une entreprise qui bénéficie d’une position forte sur un marché peut être en mesure d’exploiter cette position pour verrouiller l'accès à un ou plusieurs marchés connexes.

176. Dans ses lignes directrices72, l'Autorité de la concurrence explique qu'il est peu probable qu'une concentration emporte un risque d'effet congloméral si la nouvelle entité ne possède pas, sur le marché liant, une « forte position » ou des « actifs, produits ou services, ou d'une ou plusieurs marques, considérés par de nombreux clients comme particulièrement importants, voire incontournables, et qui ne possèdent que peu de substituts acceptables » à partir duquel elle pourra faire jouer un effet de levier pour verrouiller un autre marché. Elle estime en particulier qu'il est peu probable qu'une entreprise ayant une part de marché inférieure à 30 % sur un marché donné puisse verrouiller un marché connexe. Si ce seuil est franchi, elle examine (i) si l'entité fusionnée aurait la capacité de verrouiller ce marché connexe, (ii) si elle aurait une incitation à adopter une telle stratégie et (iii) si cette stratégie est susceptible de porter atteinte de manière significative à la concurrence sur les marchés concernés par des ventes couplées.

177. En l'espèce, les services d'instruction ont envisagé la possibilité que l'opération projetée puisse emporter de tels effets congloméraux entre les marchés aval de la distribution de produits à dominante alimentaire sur lesquels le groupe Carrefour est actif, et les marchés aval de la distribution de produits biologiques sur lesquels Carrefour et la cible sont actifs.

178. Ces effets congloméraux pourraient découler de remises de couplage, i.e., des rabais ou bons d'achats proposés dans les magasins GSS du groupe Carrefour à utiliser dans les magasins GSA du groupe Carrefour, ou des rabais ou bons d'achats proposés dans les points de vente GSA du groupe Carrefour à utiliser dans les magasins GSS du groupe Carrefour. Elle pourrait aussi s'appuyer sur une utilisation croisée des bases de données clients. Par exemple, les clients des magasins GSS (resp. GSA) du groupe Carrefour pourraient devenir destinataires de publicités pour les magasins GSA (resp. GSS) du groupe Carrefour.

179. Ces deux types de stratégies sont examinés tour à tour.

1. SUR LE RISQUE CONGLOMÉRAL SUSCEPTIBLE DE RÉSULTER DE L’UTILISATION CROISÉE DE BASES DE CLIENTÈLE

180. En premier lieu, au niveau national, la part de marché du groupe Carrefour sur le marché aval de la distribution de produits à dominante alimentaire est inférieure à 30 %, tout comme le sera, suite à l'opération, la part de marché du groupe Carrefour sur le marché aval de la distribution de produits biologiques.

181. En deuxième lieu, toujours au niveau national et dans de nombreux marchés locaux, l'enseigne Carrefour fera face à d'autres groupes présents sur les deux marchés et capables de riposter à de telles stratégies tels que les groupes Intermarché, Casino, Leclerc par exemple.

182. En troisième lieu, au niveau local, l'opération ne modifie pas de façon significative la position du groupe Carrefour sur le marché de la distribution à dominante alimentaire en GSA. Préalablement à l'opération, le groupe Carrefour n'utilisait pas ses données de clients GSA pour faire la promotion de ses magasins GSS. Il est dès lors peu probable que ses incitations à effectuer ce type d'utilisation croisée de base de clientèle se soient accrues du fait de l'opération, la part de marché du groupe Carrefour sur les GSA n'étant pas significativement modifiée.

183. De surcroît, selon le sondage effectué pour l'instruction de cette opération, les consommateurs de produits biologiques en GSS sont très fidèles à leur magasin GSS. À supposer que sur une zone de chalandise donnée, le groupe Carrefour détienne une position si forte qu'il disposerait de beaucoup plus de données de clientèle que les magasins GSS concurrents, il est peu probable que la seule utilisation de messages publicitaires visant les magasins GSS du groupe Carrefour à destination des clients des magasins GSA du groupe Carrefour, sans mise en œuvre de rabais tarifaires spécifiques et significatifs, soit de nature à entraîner une perte significative de clientèle pour les magasins GSS concurrents.

184. Réciproquement, s'agissant d'une utilisation des données de clientèle des GSS biologiques du groupe Carrefour pour faire la publicité des magasins GSA Carrefour, l'avantage pris par le groupe Carrefour ne serait significatif que si le poids de Carrefour sur le marché de la distribution de produits biologiques en GSS était suffisamment fort. Mais l'analyse concurrentielle des marchés de la distribution alimentaire de produits biologiques en GSS menée dans la présente décision, et les engagements présentés par Carrefour, permettent de s'assurer que, dans chacune des zones où Carrefour exploitait déjà des magasins GSS, ses parts de marché demeureront à des niveaux limités et inférieurs à 50 %. Carrefour continuera, en outre, à faire face dans ces zones à la concurrence de plusieurs groupes actifs sur les marchés de la distribution de produits biologiques, dont certains détiennent également sur ces zones des magasins GSA. De surcroît, dans la mesure où les consommateurs présents en GSS ne représentent qu'une fraction de l'ensemble des consommateurs fréquentant des GSA, l'avantage ainsi pris par Carrefour sur ses concurrents GSA sera moindre une fois rapporté à la taille du marché de la distribution à dominante alimentaire.

185. En dernier lieu, les enseignes concurrentes de celles du groupe Carrefour disposent d'autres moyens que l'utilisation de données de clientèle pour faire connaître leurs magasins, par exemple au travers de campagnes publicitaires classiques locales ou nationales, et l'avantage apporté par une utilisation croisée de bases de données clients n’apparaît pas, au vu de l’instruction, comme particulièrement significatif.

186. Ainsi, il est peu probable que l'opération modifie de façon significative les incitations du groupe Carrefour à mettre en œuvre une stratégie d'utilisation croisée de base de clientèle et, en tout état de cause, les effets anticoncurrentiels qui pourraient en découler seraient peu significatifs, sinon inexistants.

2. SUR LE RISQUE CONGLOMÉRAL SUSCEPTIBLE DE RÉSULTER DE L’EMPLOI DE REMISES DE COUPLAGE

187. Comme rappelé supra, le risque d'effet congloméral suppose que la nouvelle entité s'appuie sur sa position forte sur l'un des marchés où elle est présente pour prendre, sur un marché connexe, un avantage auquel ses rivaux ne pourront riposter. Or, comme indiqué supra, au niveau national, la part de marché du groupe Carrefour sur le marché aval de la distribution de produits à dominante alimentaire est inférieure à 30 %, tout comme le sera, à la suite de l'opération, la part de marché du groupe Carrefour sur le marché aval de la distribution de produits biologiques.

188. De même, au niveau local, des remises ou bons d'achats proposés aux clients des magasins GSA Carrefour et utilisables dans les magasins GSS biologiques détenus par Carrefour ne permettront au groupe Carrefour de prendre un avantage significatif sur ses rivaux que si sa position sur un marché local de la distribution de produits biologiques en magasins GSA est suffisamment forte. Or, comme indiqué supra, l'opération ne modifie pas de façon significative les parts de marché de Carrefour sur les marchés de la distribution de produits à dominante alimentaire, si bien que les incitations de Carrefour à employer ce type de remise, qu'elle a indiqué ne pas utiliser à ce jour ni par le passé, ne devraient pas être accrues du fait de l'opération.

189. Réciproquement, des remises ou bons d'achats proposés aux clients des magasins GSS Carrefour et utilisables dans les magasins GSA détenus par Carrefour ne permettront au groupe Carrefour de prendre un avantage significatif sur ses rivaux que si sa position sur le marché de la distribution de produits biologiques en GSS est suffisamment forte. Or, comme indiqué supra, l'analyse concurrentielle des marchés de la distribution alimentaire de produits biologiques en magasins GSS menée dans la présente décision et les engagements présentés par Carrefour permettent de s'assurer que, dans chacune des zones où Carrefour exploitait déjà des magasins GSS spécialisés dans la distribution de produits biologiques, ses parts de marché demeureront à des niveaux limités et inférieurs à 50 %. Carrefour continuera en outre à faire face dans ces zones à la concurrence de plusieurs groupes actifs sur les marchés de la distribution de produits biologiques. De surcroît, à supposer que les magasins GSS du groupe Carrefour détiennent une position forte dans une zone, dans la mesure où les consommateurs présents en GSS ne représentent qu'une fraction de l'ensemble des consommateurs fréquentant des GSA, l'avantage que pourraient en retirer les magasins GSA du groupe Carrefour sera moindre, une fois rapporté à la taille du marché de la distribution à dominante alimentaire.

190. De plus, comme indiqué supra, les résultats du sondage effectué lors de l'instruction montrent que les consommateurs de produits biologiques en GSS sont très fidèles à leur magasin GSS. L'effet des remises sur les enseignes GSS concurrentes serait donc limité.

191. Enfin, à supposer que ces rabais aient un effet significatif sur le marché, les enseignes GSS concurrentes seraient en mesure de riposter à ces remises, soit parce qu'elles appartiennent à des groupes exploitant eux aussi des magasins GSA sur les mêmes zones (par exemple, Intermarché, Casino, Leclerc), soit parce qu'elles pourraient effectuer des opérations promotionnelles croisées avec d'autres GSA.

192. Au regard de ces éléments, il est peu probable que l'opération modifie de façon significative les incitations du groupe Carrefour à mettre en œuvre des remises de couplage et, en tout état de cause, les effets anticoncurrentiels qui pourraient en découler seraient peu sensibles, sinon inexistants.

IV. Les engagements

A. LES ENGAGEMENTS PROPOSÉS

193. Carrefour a présenté le 22 juillet 2021 une première proposition d’engagements visant à remédier aux risques d’atteinte à la concurrence liés à l’opération sur le marché aval de la distribution à dominante alimentaire de produits biologiques. Le 2 août 2021, Carrefour a déposé la version finale de la proposition d’engagements. Cette version finale est présentée ci- dessous. Le texte des engagements, joint en annexe, fait partie intégrante de la présente décision.

194. Les engagements proposés consistent en la cession de huit magasins visant à remédier aux risques d’atteinte à la concurrence identifiés dans les zones visées précédemment aux points 83 et suivants, dans un délai de [confidentiel] mois à compter de la date de la présente décision.

195. Afin d’assurer l’efficacité de ces engagements de cession, Carrefour s’engage à ne pas acquérir à nouveau les magasins cédés, ni acquérir sur ceux-ci une influence directe ou indirecte, pour une durée de 10 ans.

B. APPRÉCIATION DES ENGAGEMENTS PROPOSÉS

1. SUR L’OBJECTIF DES ENGAGEMENTS

196. S’agissant d’une concentration horizontale, l’Autorité de la concurrence recherche, en priorité, des mesures correctives structurelles73, qui visent à garantir des structures de marché compétitives par des cessions d’activités à un acquéreur approprié, susceptible d’exercer une concurrence réelle, ou l’élimination de liens capitalistiques entre des concurrents

197. Les engagements proposés par la partie notifiante ont pour effet, soit de supprimer tout chevauchement d’activité dans les territoires où un risque d’atteinte à la concurrence a été identifié, soit de limiter le renforcement d’activités entre les parties à une position qui permet de créer une offre alternative crédible et d’écarter, partant, toute préoccupation de concurrence.

198. En outre, l’efficacité des remèdes dépend de la cession des actifs concernés à un ou plusieurs acquéreurs appropriés. Pour rétablir des conditions de concurrence suffisantes, le ou les repreneurs devront être capables de concurrencer la nouvelle entité de manière effective sur les marchés concernés. Ceci suppose que les repreneurs présentent toutes les garanties de viabilité et d’indépendance, tant juridique que commerciale, vis-à-vis de Carrefour. Les repreneurs potentiels devront donc être des acteurs de la distribution de produits biologiques à dominante alimentaire au travers de l’exploitation de grandes surfaces spécialisées, à la fois indépendants de Carrefour, sur toute la chaîne de valeur, de l’approvisionnement à la vente au détail, et capables d’assurer l’exploitation pérenne des actifs cédés.

199. Enfin, l’acquisition du point de vente ne doit pas être susceptible de créer de nouvelles atteintes à la concurrence sur la zone concernée, en créant ou en renforçant la position d’un concurrent déjà fortement implanté.

2. SUR L’ADÉQUATION DES ENGAGEMENTS PROPOSÉS

200. Les engagements proposés par la partie notifiante consistent en la cession de magasins présents dans les zones de chalandise dans lesquelles l’opération risque de porter atteinte à la concurrence.

201. Les points de vente concernés par les engagements sont les suivants :

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202. Dans leur principe, de tels engagements sont adéquats, en ce qu’ils délient les points de vente concernés de tout lien vis-à-vis de la nouvelle entité en permettant à des enseignes concurrentes d’en acquérir le fonds de commerce. En outre, les engagements prévoient que ces cessions doivent intervenir dans un délai suffisamment rapide pour rétablir une concurrence suffisante sur les marchés concernés, la partie notifiante s’engageant à ce que les cessions interviennent dans un délai de [confidentiel] mois.

203. Dans les zones de Paris Lecourbe, Levallois-Perret, Nancy, Puteaux, Toulouse Frères Lion, Toulouse Paul Vidal, les cessions de points de vente ont pour effet de supprimer les chevauchements d’activité entre les parties à l’issue de l’opération.

204. Dans les zones de Paris Bourgogne, Paris Cléry, et Paris Poteau et Toulouse Rémusat, les cessions permettront la réduction des parts de marché de la nouvelle entité à un niveau raisonnable et en tout état de cause inférieur à 50 % et permettront, en outre, aux enseignes concurrentes de renforcer leur présence ou de s’implanter dans les zones concernées et, ainsi, d’exercer une concurrence plus efficace sur la nouvelle entité.

205. Pour ce qui est de la mise en œuvre des engagements, Carrefour proposera à l’Autorité de la concurrence la nomination d’un mandataire, dit « mandataire de contrôle », qui aura pour mission de veiller au respect des obligations résultant de la présente décision.

206. Il devra notamment s'assurer de la préservation de la viabilité économique, de la valeur marchande et de la compétitivité des magasins à céder. Il devra également examiner et évaluer les acquéreurs potentiels ainsi que l'état d'avancement des engagements.

207. Par ailleurs, si Carrefour ne trouve pas d’acquéreurs aux huit magasins précités dans un délai de [confidentiel] mois, un mandataire sera chargé de trouver les acquéreurs des magasins cédés et de négocier avec eux, pour le compte du groupe Carrefour, les conditions de la cession, ce qui renforce la crédibilité des engagements souscrits par la partie notifiante.

208. Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, l’Autorité de la concurrence considère que les engagements proposés par la partie notifiante sont suffisants pour éliminer les risques d’atteinte à la concurrence résultant de l’opération. DÉCIDE

Article unique : L’opération notifiée sous le numéro 20-188 est autorisée sous réserve des engagements décrits aux paragraphes 193 à 208 ci-dessus et annexés à la présente décision.

La présidente, Isabelle de Silva

 Autorité de la concurrence

NOTES

1 Ce résumé a un caractère purement informatif. Seuls font foi les motifs de la décision numérotés ci-après.

2 Les produits biologiques sont issus d’un mode de production et de transformation spécifique qui est encadré par une réglementation européenne depuis 1991, ayant pour objectif le respect de l’environnement, de la biodiversité et du bien-être animal. Ce mode de production vise notamment au maintien des qualités nutritionnelles des produits et interdit l’usage de produits chimiques et de synthèse. Seuls les produits issus de ce mode de production peuvent être certifiés et porter le logo bio européen et la marque AB. La réglementation en agriculture biologique ne s’applique pas aux produits non agricoles et non alimentaires. L’utilisation du terme bio pour qualifier ces produits est cependant possible s’il y a un lien direct avec des ingrédients certifiés issus de l’agriculture biologique.

3 L’indice Herfindahl-Hirschman (IHH) est égal à la somme des carrés des parts de marché de chacune des entreprises présentes sur le marché. La différence entre le niveau de cet indice après l’opération et en l’absence de l’opération est appelée delta. Voir paragraphes 573 et 627 des Lignes directrices de l’Autorité relatives au contrôle des concentrations. Cet indice est couramment utilisé pour apprécier le degré de concentration d’un marché donné.

4 Les produits biologiques sont issus d’un mode de production et de transformation spécifique qui est encadré par une réglementation européenne depuis 1991, ayant pour objectif le respect de l’environnement, de la biodiversité et du bien-être animal. Ce mode de production vise notamment au maintien des qualités nutritionnelles des produits et interdit l’usage de produits chimiques et de synthèse. Seuls les produits issus de ce mode de production peuvent être certifiés et porter le logo bio européen et la marque AB. La réglementation en agriculture biologique ne s’applique pas aux produits non agricoles et non alimentaires. L’utilisation du terme bio pour qualifier ces produits est cependant possible s’il y a un lien direct avec des ingrédients certifiés issus de l’agriculture biologique.

5 Le groupe exploite des magasins en Belgique, Italie, en Suisse, en Espagne, au Portugal et au Japon.

6 « En cas de nécessité particulière dûment motivée, les parties qui ont procédé à la notification peuvent demander à l'Autorité de la concurrence une dérogation leur permettant de procéder à la réalisation effective de tout ou partie de la concentration sans attendre la décision mentionnée au premier alinéa et sans préjudice de celle-ci. L'octroi de cette dérogation peut être assorti de conditions. »

7 Voir notamment les décisions n° 13-DCC-90 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Monoprix par la société Casino Guichard- Perrachon, n° 17-DCC-11 relative à la prise de contrôle de Colruyt France SAS par Metro AG, n° 20-DCC-72 du 26 mai 2020 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Vindémia Group par la société Groupe Bernard Hayot et n° 20-DCC-116 du 28 août 2020 relative à la prise de contrôle conjoint d’un fonds de commerce de détail à dominante alimentaire par la société Soditroy aux côtés de l’Association des Centres Distributeurs E. Leclerc, n° 20-DCC-164 du 17 novembre 2020 relative à la prise de contrôle exclusif d’actifs de la société Franprix Leader Price Holding par Aldi.

8 Voir notamment la décision de la Commission européenne du 3 février 1999 rendue dans l’affaire M.1221, Rewe Meinl, et du 25 janvier 2000 rendue dans l’affaire M.1684 Carrefour / Promodès. Voir également la lettre du ministre C2008-32 du 9 juillet 2008, Carrefour/SAGC et les décisions de l’Autorité de la concurrence n° 09-DCC-50 du 1er octobre 2009 relative à l’acquisition du groupe Team Ouest par la société France Frais, et n° 13-DCC-90, n° 20-DCC-116 et n° 20-DCC-164 précitées.

9 Voir la décision de la Commission COMP/M.1221 précitée.

10 Voir par exemple les décisions n° 13-DCC-90, n° 17-DCC-11, n° 20-DCC-72, n° 20-DCC-116 et n° 20-DCC-164 précitées, ainsi que les décisions de l’Autorité de la concurrence n° 14-DCC-173 du 21 novembre 2014 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Dia France SAS par la société Carrefour France SAS, n° 15-DCC-80 du 26 juin 2015 relative à la prise de contrôle par Ponoma SA de huit adhérents du réseau Relais d’Or Miko et de la société Lux Fraiset n° 15-DCC-141 du 27 octobre 2015 relative à la prise de contrôle exclusif de Davigel par Bain Capital et n° 20-D-13 du 22 octobre 2020 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la grande distribution à dominante alimentaire par les groupes Auchan, Casino, Metro et Schiever.

11 Voir les avis n° 97-A-14 relatif à la prise de participation de la société Carrefour dans le capital de la société Grands Magasins B et n° 98- A-06 relatif à l’acquisition par la société Casino-Guichard-Perrachon de la société TLC Béatrice Holdings France SA, l’avis de l’Autorité n° 15-A-06 du 31 mars 2015 relatif au rapprochement des centrales d’achat et de référencement dans le secteur de la grande distribution et les décisions n° 17-DCC-11, n° 20-DCC-116 et n° 20-DCC-164 précitées.

12 Un des fournisseurs interrogés a mentionné une durée de l’ordre de trois ans pour un producteur afin de se convertir aux produits biologiques.

13 Les grandes surfaces spécialisées désignent dans cette décision les magasins spécialisés dans la distribution de produits biologiques. Ces magasins se distinguent des GSA dans la mesure où elles n’offrent pas de produits dits « conventionnels » (i.e. non-issus de l’agriculture biologique).

14 Voir, par exemple, les décisions de l’Autorité n° 12-DCC-73 du 30 mai 2012 relative à la création d’une entreprise commune de plein exercice par la société Retail Leader Price Investissement (groupe Casino) et Messieurs Planes et Vernat et n° 12-DCC-63 du 9 mai 2012 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Guyenne et Gascogne SA par la société Carrefour SA et la décision COMP/M.7669 du 7 août 2015, Lion Capital/Aryzta/Picard Groupe.

15 Voir, par exemple, la décision n° 19-DCC-72 du 17 avril 2019 relative à la prise de contrôle exclusif d’un fonds de commerce à dominante alimentaire par la société ITM* Alimentaire International.

16 Voir l’étude XERFI sur la distribution de produits alimentaires biologiques, janvier 2018 fournie par la partie notifiante.

17 Le sondage a été réalisé en utilisant les consommateurs du panel Harris Interactive/Toluna constitué de 814 000 Français. Deux échantillons de consommateurs ont été constitués à partir de ce panel de consommateurs. Dans un premier temps, un échantillon de 1505 consommateurs de produits biologiques, quel que soit le format de magasin fréquenté, a été constitué en utilisant la méthode des quotas à partir des caractéristiques sociodémographiques des acheteurs de produits biologiques obtenues grâce à l'étude réalisée par l'Agence Bio en 2020. Cet échantillon est utilisé seul pour l’ensemble des questions du sondage portant sur l’ensemble des consommateurs de produits biologiques. Il a également permis de déduire les caractéristiques sociodémographiques des acheteurs de produits biologiques en GSS. Dans un second temps, à partir de ces caractéristiques, un second échantillon de 664 consommateurs de produits biologiques en GSS a été constitué par la méthode des quotas. Cet échantillon complète l’échantillon initial pour les questions portant sur les comportements des consommateurs fréquentant spécifiquement des GSS, aboutissant à un échantillon de 1 024 répondants consommant des produits biologiques dans des grandes surfaces spécialisées.

18 L’Autorité a interrogé les groupes actifs dans la distribution de produits à dominante alimentaire détenteurs d’enseignes de GSA (certains de ces groupes étant également détenteurs d’enseignes de GSS spécialisées dans la distribution de produits biologiques) et les groupes spécialisés dans la distribution de produits biologiques détenteurs d’enseignes de GSS.

19 Une étude récente réalisée pour le magazine « Linéaires », spécialisé dans la grande distribution, montre qu’acheter des produits biologiques en GSA coûte 75 % plus cher que d’acheter des produits conventionnels. La méthodologie employée pour évaluer cet écart n’est toutefois pas décrite. Une étude de l’observatoire des prix de grande consommation, datant de 2018, précise qu’en moyenne le bio coûte 65 % plus cher que le panier moyen (composé de marques nationales et de premiers prix), 20 % plus cher que le panier de marque nationale et près de 2 fois plus cher que le panier premier prix.

20 Voir l’étude XERFI précitée, p. 15. Cette étude estime que les produits biologiques sont en moyenne 60 % plus chers que leurs équivalents conventionnels en GSA, ce qui peut constituer un frein à l’achat pour de nombreux consommateurs.

21 Voir l’étude XERFI précitée, p. 65.

22 Voir « Les chiffres 2020 du secteur bio » publié par l’Agence française pour le développement et la promotion de l’agriculture biologique (« Agence Bio »). D’après cette Agence, les GSA représentent ainsi 54,7 % des ventes de produits bio et les GSS 28,5 %.

23 À titre d’exemple, le site leader des produits biologiques sur internet Greenweez a déclaré en 2020 un chiffre d’affaires de 100 millions d’euros, ce qui représente largement moins de 1 % du chiffre d’affaires de la distribution de produits biologiques en 2020 (12,6 milliards d’euros selon les chiffres 2020 de l’Agence Bio).

24 Voir l’avis n° 94-A-30 du 6 décembre 1994 relatif à l'acquisition de la société Picard Surgelés par la société Carrefour S.A.

25 Voir la décision n°13-DCC-90 du 11 juillet 2013 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Monoprix par la société Casino Guichard-Perrachon.

26 La méthodologie de ce sondage a été décrite précédemment, en note de bas de page 17.

27 Ces tests ont par exemple montré qu’il n’existait pas de différence significative entre les comportements de la clientèle parisienne des GSS et les comportements de la clientèle de province de ces magasins.

28 Augmentation faible mais significative et non transitoire des prix, en anglais « small but significant and non-transitory increase in price ».

29 Seule une enseigne a indiqué fournir approximativement 1 000 références de produits biologiques dans ses magasins de moins de 400 m².

30 5 des 8 enseignes de GSA répondantes et 5 des 13 enseignes de GSS répondantes.

31 6 des 8 enseignes de GSA répondantes.

32 Une table de chaînage vise à associer, pour chaque produit biologique distribué en GSA, un équivalent proche distribué en GSS dans l’optique de comparer leurs prix.

33 Source : https://www.ouest-france.fr/economie/consommation/magasin-bio-ou-grande-surface-qui-est-vraiment-le-plus-cher-4736938

34 Source :         https://www.nouvelobs.com/alimentation/20190822.OBS17410/eh-bien-non-le-bio-n-est-pas-forcement-moins-cher-en- supermarche.html

35 Les paniers moyens observés en GSA sont globalement homogènes : le panier moyen en GSA est de l’ordre de 133 euros et le panier moyen le moins cher est de 127 euros. Seul le panier moyen de Casino présente un prix très élevé (163 euros), proche des prix pratiqués par les GSS. L’enseigne Casino semble donc faire figure d’exception parmi les GSA. L’exclusion de l’enseigne Casino de l’échantillon contribuerait à renforcer le constat de différences de prix importantes entre GSS et GSA en matière de produits biologiques.

36 Les zones suivantes sont usuellement définies s’agissant des surfaces de moins de 2 500 m² par la pratique décisionnelle en matière de distribution alimentaire classique (cf. par exemple la décision n °20-DCC-164 précitée) :

-              S’agissant des supermarchés (surfaces supérieures à 400 m² et inférieures à 2 500 m²) situés à Paris, l’Autorité considère que des zones de chalandise de 500 mètres à pied autour des points de vente pouvaient être retenues ;

-              S’agissant des supermarchés situés en petite couronne (départements 92, 93 et 94), l’Autorité considère des zones de chalandise de 10 minutes en voiture autour des magasins concernés ;

-              S’agissant des supermarchés situés en grande couronne (départements 77, 78, 91 et 95) et en grande ville de province (Marseille, Lyon, Toulouse, Bordeaux, Strasbourg, Lille, Rennes, Montpellier, Nantes, Nice), l’Autorité considère des zones de chalandise de 10 ou 15 minutes en voiture autour des points de vente cibles ;

-              S’agissant des supermarchés situés en province (hors couronnes parisiennes et grandes villes), l’Autorité considère des zones de 15 minutes de temps en voiture autour des points de vente cibles ;

-              S’agissant du petit commerce de détail (magasins dont la surface est inférieure à 400 m²), l’Autorité retient des zones de 500 mètres à pied autour des points de vente cibles hors Paris intra-muros. Cette zone est réduite à 300 mètres pour les magasins situés dans Paris intra-muros.

37 Les points de vente cibles ont, à l’exception de cinq d’entre eux, des surfaces inférieures à 400 m². L’application de la pratique décisionnelle classique de l’Autorité en matière de distribution de produits à dominante alimentaire à ces magasins conduirait donc à analyser, en grande majorité, des zones de 300 à 500 mètres à pied autour de ces points de vente. L’ensemble des éléments présents au dossier confirme que ces zones ne seraient vraisemblablement pas adaptées en matière de distribution de produits biologiques.

38 Au cas d’espèce, douze zones ont fait apparaître des empreintes réelles aberrantes, parmi les 100 zones qui ont été étudiées par la partie notifiante. Neuf de ces zones sont situées à Paris, les trois autres étant situées en petite couronne. Ont été considérées comme aberrantes les empreintes réelles présentant un temps de trajet supérieur à 30 minutes à pied pour les zones situées à Paris, et à plus de 10 minutes en voiture pour les zones situées en petite couronne.

39 Au cas d’espèce, les empreintes réelles moyennes des magasins cibles sont les suivantes :

-              A Paris : 1,2 km à pied autour des magasins cibles ;

-              En petite couronne : 6 minutes en voiture autour des magasins cibles ;

-              En grande couronne : 7 minutes en voiture autour des magasins cibles ;

-              En grande ville de province : 11 minutes en voiture autour des magasins cibles, à l’exception des magasins de plus de 400 m² : 15 minutes en voiture ;

-              En province hors grandes villes : 12 minutes en voiture, à l’exception des magasins de plus de 400 m², 20 minutes en voiture.

40 Voir les §731 et suivants des lignes directrices précitées.

43 Voir note de bas de page 36.

44 Voir par exemple la décision n° 18-DCC-148 du 24 août 2018 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Jardiland par la société InVivo Retail.

45 Lignes directrices de l’Autorité de la concurrence relatives au contrôle des concentrations, §624.

46 Ibid, §622.

47 Ce seuil de trois concurrents est utilisé à titre conservateur par l’Autorité sur un marché qu’elle définit pour la première fois.

48 L’indice Herfindahl-Hirschman (IHH) est égal à la somme des carrés des parts de marché de chacune des entreprises présentes sur le marché. La différence entre le niveau de cet indice après l’opération et en l’absence de l’opération est appelée delta. Cet indice est couramment utilisé pour apprécier le degré de concentration d’un marché donné. Voir à cet effet les paragraphes 573 et 627 des lignes directrices relatives aux concentrations de l’Autorité, qui indiquent qu’il est probable que la concentration entraîne un risque d’effet horizontal lorsque l’IHH à l’issue de la concentration est supérieur à 2000 et que le delta excède 150. Le seuil d’un delta de 150 est néanmoins atteint facilement dans des marchés de structure oligopolistique. Dans les 5 zones avec chevauchement pour lesquelles la part de marché est comprise entre 25 % et 50 % et le delta d’IHH entre 150 et 500, tout problème de concurrence a pu être écarté. L’Autorité se concentre donc dans la présente décision sur l’analyse concurrentielle de zones présentant un delta d’IHH plus élevé, suggérant une modification plus importante de la structure concurrentielle dans la zone.

49 Carrefour a fait part de son intention de convertir le magasin de Puteaux en GSA. Néanmoins, comme expliqué au §66 et suivants, les conséquences de l’opération sont analysées avant prise en compte de tout changement de format des magasins cibles.

50 3,8 kilomètres à pied autour du point de vente cible.

51 Rayon de 1,7 km autour du point de vente cible.

52 Rayon de 900 m autour du point de vente cible.

53 2,5 kilomètres à pied autour du point de vente cible.

54 Rayon de 1 km autour du point de vente cible.

55 Rayon de 1,6 km autour du point de vente cible.

56 L’enseigne Le retour à la terre indique sur son site internet qu’ « à compter du 1er septembre 2021, les magasins Le retour à la terre deviennent indépendants et ne font donc plus partie du réseau Biocoop ».

57 Rayon de 1 km autour du point de vente cible.

58 Rayon de 1,2 km autour du point de vente cible.

59 Le magasin le plus proche en bordure de zone est un magasin du groupe Casino sous enseigne Naturalia.

60 6 minutes en voiture autour du point de vente cible.

61 Situés respectivement à 6,2 minutes et 7,3 minutes en voiture du point de vente cible.

62 Carrefour a fait part de son intention de convertir les magasins de Toulouse Paul Vidal et Toulouse Rémusat en GSA. Néanmoins, comme expliqué au §66 et suivants, les conséquences de l’opération sont analysées avant prise en compte de tout changement de format des magasins cibles.

63 Rayon de 2 km autour du point de vente cible.

64 Respectivement à 1,8 km et 2 km du point de vente cible.

65 Rayon de 1,2 km autour du point de vente cible.

66 Rayon de 900 m autour du point de vente cible.

67 Rayon de 14 minutes en voiture autour du point de vente cible.

68 Rayon de 6 minutes en voiture autour du point de vente cible.

69 Rayon de 7 minutes en voiture autour du point de vente cible.

70 Rayon de 12 minutes en voiture autour du point de vente cible.

71 Rayon de 15 minutes en voiture autour du point de vente cible.

72 Voir les §720 et 721.

73 Voir le §414 des lignes directrices précitées.