CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 6 octobre 2021, n° 21/00227
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Air Propreté (SAS)
Défendeur :
Bnblord (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Dallery
Conseillers :
Mme Depelley, Mme Lignières
Avocats :
Me Blanc, Me Despujol, Me Autier
Vu le jugement du 28 avril 2020, du tribunal de commerce de Bordeaux qui a débouté la société Air Propreté de l'ensemble de ses demandes, notamment de sa demande de dommages intérêts pour rupture brutale des relations commerciales établies avec la SAS Bnblord ;
Vu la déclaration du 4 septembre 2020 par laquelle la société Air propreté a interjeté appel de la décision devant la cour d'appel de Paris ;
Vu les conclusions d'incident de la société Guestready (anciennement Bnblord) sollicitant du conseiller de la mise en état, sur le fondement des articles 125, 528, 538 et 914 du code de procédure civile, L. 442-6 (ancien), L. 442-4 (nouveau) et D. 442-3 du code de commerce, qu'il déclare l'appel irrecevable comme tardif ;
Vu l'ordonnance du 23 février 2021 du conseiller de la mise en état qui a :
Dit que l'appel est irrecevable comme tardif,
Condamné la société Air propreté à payer à la société Bnblord une somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamné la société Air propreté aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile,
Rejeté toute autre demande
Vu la requête en déféré déposée le 4 mars 2021 par la société Air propreté à l'encontre de cette ordonnance ;
Vu les dernières conclusions de la société Air propreté déposées et notifiées le 03 août 2021 demandant à la cour d'appel de Paris de :
Vu les articles 125, 538, 700, 914 et 916 du Code de procédure civile,
REFORMER l'ordonnance du conseiller de la Mise en état du 23 février 2021
EN CONSEQUENCE,
DÉCLARER recevable l'appel n° 20/19828 interjeté par la SAS AIR PROPRETE le 4 septembre 2020,
REJETER l'ensemble des demandes formées par la société GUESTREADY France (anciennement dénommée BNB LORD) au titre de l'incident,
CONDAMNER la société GUESTREADY France (anciennement dénommée BNB LORD) à verser à la société AIR PROPRETÉ la somme de 2 000,00 sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
CONDAMNER la société GUESTREADY France (anciennement dénommée BNB LORD) aux entiers dépens de l'instance.
Vu les dernières conclusions de la société Guestready (anciennement Bnblord) déposées et notifiées le 30 juillet 2021, demandant à la cour d'appel de Paris de :
Vu les articles 125,528, 538,700, et 914 du Code de procédure civile,
Vu les articles L. 442-6 (ancien), L. 442-4 (nouveau) et D. 442-3 du Code de Commerce,
Déclarer la société GUESTREADY France (anciennement dénommée BNB LORD) recevable et bien fondée en toutes ses demandes, fins et conclusions,
Débouter la société AIR PROPRETE de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
Confirmer l'ordonnance du 23 février 2021 en ce qu'elle a :
- Déclaré l'appel interjeté par la SAS AIR PROPRETE le 4 septembre 2020 (DA n°20/19828) irrecevable,
- Condamné la société AIR PROPRETE à verser à la société BNB LORD la somme de 1 500 au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
- Condamné la société AIR PROPRETE aux dépens de l'instance,
STATUANT A NOUVEAU :
Condamner la SAS AIR PROPRETE à verser à la société GUESTREADY France (anciennement dénommée BNB LORD) la somme de 2 000 au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
Condamner la même aux entiers dépens de l'instance.
SUR CE, LA COUR,
La société Air propreté soutient que son appel est recevable dans la mesure où l'appel qu'elle avait interjeté le 27 juillet 2020 devant la cour d'appel de Bordeaux revêt un effet interruptif, ayant été transmis à la cour d'appel de Paris. Elle fait valoir à cet égard que le désistement ne permet de regarder l'interruption de la prescription comme non avenue que lorsqu'il s'agit d'un désistement d'instance pur et simple mais que « quand il est motivé par l'incompétence de la juridiction devant laquelle il est formulé et qu'il fait suite à la saisine d'une autre juridiction compétente pour connaître de la demande, le désistement maintient l'effet interruptif de l'article 2241 du Code civil attaché à la citation en justice ».
Elle ajoute qu'il ressort des conclusions de désistement d'instance produites devant la cour d'appel de Bordeaux qu'elle avait la volonté de maintenir le lien d'instance issu de la saisine du 27 juillet 2020 et de transférer ce lien au juge compétent en prenant l'initiative de le saisir avant même de se désister de l'instance en cours.
Enfin, elle affirme que l'adage « appel sur appel ne vaut » est inapplicable en l'espèce, se fondant sur un arrêt de la Cour de cassation aux termes duquel « la circonstance que le désistement de l'appel porté devant la juridiction incompétente n'était pas intervenu au jour où l'appel a été formé devant la cour d'appel territorialement compétente ne fait pas obstacle à la régularisation de l'appel. » (Cass., Civ. 2e, 2 juillet 2020, n° 19-14.086)
Elle ajoute que l'effet interruptif attaché à l'appel formé devant la cour de Bordeaux n'a jamais été non avenu et que celui-ci persiste, conformément aux dispositions de l'article 2241 du Code civil. Elle argue que son désistement, avant toute décision de rejet et motivé par l'incompétence de la Cour, conduit au maintien du lien d'instance dans la mesure où ce n'est que si « l'appel est définitivement rejeté par un moyen de fond ou par une fin de non-recevoir » que l'interruption du délai est non avenue (Civ. 2e, 21 mars 2019, n° 17-10.663 P.) alors qu'en l'espèce, la cour de Bordeaux était incompétente pour connaître de cet appel.
En tout état de cause, dans le cas où la situation donnant lieu à une fin de non-recevoir est susceptible d'être régularisée, elle fait valoir que l'irrecevabilité est écartée si sa cause a disparu ou moment où le juge statue, de sorte que la fin de non-recevoir serait régularisée du seul effet du désistement et de la déclaration d'appel intervenue devant la cour compétente, avant même tout prononcé d'une irrecevabilité.
Mais, la société Guestready (anciennement Bnblord) oppose à bon droit l'irrecevabilité de l'appel interjeté par la société Air Propreté en raison de son caractère tardif.
En effet, l'appel interjeté le 27 juillet 2020 devant la cour d'appel de Bordeaux n'a eu aucun effet interruptif s'agissant d'un délai de recours et non de prescription.
Le conseiller de la mise en état a justement rappelé que la méconnaissance de l'article D. 442-3 du code de commerce est une fin de non-recevoir et non une incompétence.
Aucun relevé de forclusion ni cause légale d'interruption n'est applicable au délai pour interjeter appel.
Le jugement rendu le 17 avril 2020 ayant été signifié à la société Air Propreté le 29 juin 2020, celle-ci avait jusqu'au 29 juillet 2020 minuit pour interjeter appel du jugement devant la cour d'appel de Paris. Sa déclaration d'appel en date du 4 septembre 2020 intervenue postérieurement au délai de recours d'un mois mentionné à l'article 538 du Code de procédure civile, est tardive et aucune régularisation n'est possible.
L'ordonnance déférée est confirmée.
La société Air Propreté est condamnée aux dépens du déféré, déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamnée à payer à la société Guestready (anciennement Bnblord) la somme de 2 000 euros sur ce dernier fondement.
PAR CES MOTIFS :
Confirme l'ordonnance déférée ;
Déboute la société Air Propreté de ses demandes ;
La condamne aux dépens du déféré et à payer à la société Guestready (anciennement Bnblord) la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.