Livv
Décisions

Cass. 3e civ., 19 mai 2004, n° 02-19.908

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Weber

Rapporteur :

M. Betoulle

Avocat général :

M. Cédras

Avocats :

SCP Monod et Colin, SCP Boré, Xavier et Boré, SCP Waquet, Farge et Hazan, la SCP Célice, Blancpain et Soltner

Papeete, du 2 mai 2002

2 mai 2002

Sur le moyen unique de chacun des pourvois :

Vu l'article 1719 du Code civil ;

Attendu que le bailleur est obligé, par la nature du contrat et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière, de faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Papeete, 2 mai 2002), que la SCI du n° 4 de la rue du commandant Destremeau (la SCI) est propriétaire d'un immeuble notamment occupé, au rez-de-chaussée, par un restaurant assuré auprès de la compagnie d'assurances QBE et, au second étage, par les bureaux de la Caisse des règlements pécuniaires des avocats au barreau de Papeete (CARPAP), assurée auprès des Mutuelles du Mans, ainsi que par la société Tahiti Pest Control ; que cet immeuble a été partiellement détruit le 11 mai 1995 par un incendie ayant pris naissance dans les locaux occupés par la société Tahiti Pest Control ; que le 26 août 1996, la compagnie QBE a assigné la SCI, propriétaire de l'immeuble, ainsi que son assureur l'Union des assurances de Paris, devenue Axa assurances Iard, puis Axa France Iard (UAP) afin d'obtenir leur condamnation à lui payer une somme correspondant aux indemnités qu'elle avait versées à son assuré pour l'indemniser des dégâts causés par l'incendie ; que la CARPAP est volontairement intervenue à l'instance pour obtenir condamnation de la SCI et de l'UAP à réparer le préjudice qu'elle avait subi du fait de cet incendie ; que les Mutuelles du Mans sont également volontairement intervenues pour se faire rembourser des sommes déjà versées à la CARPAP ;

Attendu que pour rejeter comme non fondées l'ensemble de ces demandes, l'arrêt retient que l'article 1719 du Code civil n'est pas applicable en matière d'incendie, matière régie par les dispositions spécifiques de l'article 1384, alinéa 2, du Code civil qui exige la preuve de la faute du propriétaire de l'immeuble pour que le tiers obtienne réparation du préjudice qu'il a subi du fait de l'incendie, et que les causes de l'incendie étant restées indéterminées, la preuve de la faute de la SCI n'est pas rapportée ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le bailleur est responsable envers le preneur des troubles de jouissance causés par les autres locataires et n'est exonéré de cette responsabilité qu'en cas de force majeure, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 mai 2002, entre les parties, par la cour d'appel de Papeete ;

remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Papeete, autrement composée.