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Décisions

CA Angers, ch. civ. a, 12 octobre 2021, n° 16/00306

ANGERS

Arrêt

PARTIES

Défendeur :

Sombat (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Avocats :

Me Gaudre, Me Blanchard, Me Rubinel, Me George

TGI Angers, du 16 nov. 2015

16 novembre 2015

FAITS ET PROCÉDURE

Par acte notarié du 29 décembre 2009, Mme F A épouse B a vendu à Mme X D L une maison d'habitation sur un terrain de 34 a 34 ca situé ... (49), moyennant le prix de 160 000 euros.

L'opération a été effectuée par l'intermédiaire de la société Foncière Anjou.

Mme X D L soutenant avoir constaté divers désordres (impossibilité d'utiliser la cheminée, dénivellation de l'extension entraînant des fissures, absence de scellement de la fenêtre de la salle de bain et défectuosité de l'installation électrique), une expertise amiable a été diligentée à la demande de son assureur de protection juridique le 28 avril 2010.

Par actes d'huissier du 24 avril 2012, Mme X D L a fait assigner Mme F B et la société Foncière Anjou devant le juge des référés du tribunal de grande instance d'Angers aux fins d'obtenir l'organisation d'une mesure d'expertise en application de l'article 145 du code de procédure pénale. Par ordonnance du 7 juin 2012, le juge des référés, qui a fait droit à sa demande, a commis M. I J Z pour y procéder. L'expert a déposé son rapport le 9 avril 2013.

Par acte d'huissier du 29 septembre 2014, Mme X D L a fait assigner Mme F B devant le tribunal de grande instance d'Angers sur le fondement des articles 1641 et suivants du code civil aux fins de la voir condamner à lui payer 66 132,96 euros TTC au titre des travaux de remise en état de la maison, 10 000 euros à titre de dommages intérêts en réparation de son préjudice moral et de jouissance, 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens incluant ceux du référé expertise et les honoraires de l'expert judiciaire.

Par jugement du 16 novembre 2015, le tribunal de grande instance d'Angers a :

-  débouté Mme X D L de l'ensemble de ses demandes,

-  condamné Mme X D L à payer à Mme F B la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

-  condamné Mme X D L aux dépens,

-  ordonné l'exécution provisoire.

Pour statuer ainsi il a considéré que :

-  l'action de Mme X D L concernant la cheminée était prescrite,

-  l'acte de vente incluant une clause de non garantie, devait être écartée toute caractérisation de vices cachés par la demanderesse au titre des désordres qu'elle allègue (contrefort en béton en renfort du mur, fissures extérieures et intérieures, absence de mise en œuvre du joint extérieur des fenêtres de salle de bain), relevant, en s'appuyant sur le rapport d'expertise, que ces désordres étaient visibles et n'étaient pas liés à des phénomènes structurels de l'immeuble, daté des années 1850, ou à des phénomènes d'ampleur de nature à mettre en péril la construction.

Par déclaration du 5 février 2016, Mme X D L a interjeté appel total du jugement précité.

Les parties ont conclu au fond.

Une ordonnance de clôture a été rendue le 25 janvier 2018.

Par arrêt du 17 avril 2018, la cour d'appel d'Angers a :

-  confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré l'action relative à la cheminée prescrite,

-  pour les autres désordres invoqués par Mme X D L, ordonné, avant dire droit, une nouvelle expertise

-  commis, pour y procéder, M. M E, lequel aura pour mission, après avoir dûment convoqué les parties et leurs conseils, et s'être fait remettre tous les documents utiles de :

* se rendre à Soulaire et Bourg, ...,

* rechercher et décrire les désordres affectant l'immeuble relativement aux fissures intérieures et extérieures -à l'exception de la façade arrière-, et le basculement allégué de l'extension,

* se prononcer sur le caractère suffisant du contre fort érigé sur la propriété voisine et, au vu des pièces produites et des explications des parties, indiquer quel était l'objet recherché lors de sa réalisation,

* rechercher les causes des désordres, décrire et chiffrer les travaux de nature à y remédier,

* indiquer si, à son avis, la venderesse était en mesure d'avoir connaissance, le cas échéant, du basculement de l'extension, et de l'insuffisance des travaux de confortement entrepris,

* donner son avis sur les préjudices subis par Mme L,

* répondre aux dires des parties,

-  dit que Mme L devra consigner une somme de 2000 euros au plus tard le 30 mai 2018, auprès du régisseur de la cour d'appel,

-  dit que l'expert pourra s'adjoindre tout spécialiste de son choix à charge pour lui d'en informer préalablement le magistrat chargé du contrôle des expertises et de joindre l'avis du sapiteur à son rapport ; dit que si le sapiteur n'a pas pu réaliser ses opérations de manière contradictoire, son avis devra être immédiatement communiqué aux parties par l'expert,

-  dit que l'expert devra communiquer un pré rapport aux parties en leur impartissant un délai raisonnable pour la production de leurs dires écrits auxquels il devra répondre dans son rapport définitif,

-  dit que l'expert devra déposer son rapport dans les 5 mois de la saisine,

-  commis le conseiller de la mise en état pour surveiller les opérations d'expertise,

-  dit qu'en cas d'empêchement de l'expert commis, il sera pourvu à son remplacement par ordonnance de ce magistrat rendue sur simple requête ou même d'office,

-  sursis à statuer sur le surplus,

-  renvoyé l'affaire à la mise en état du 19 décembre 2018,

-  réservé les dépens.

Pour statuer ainsi elle a considéré que :

-  s'agissant de la défectuosité de la cheminée, l'acquéreur était informé, dès le 13 janvier 2010, du vice l'affectant, à le supposer caché au moment de la vente. Il n'a agi en référé expertise que le 24 avril 2012, de sorte que l'action fondée exclusivement sur la garantie des vices cachés sur le fondement de l'article 1641 du code civil est prescrite au regard des dispositions de l'article 1648 du même code,

-  pour le reste, à supposer que les fissures aient été, au moins pour certaines, visibles lors de l'acquisition, l'action en garantie des vices cachés serait toujours ouverte à Mme X D L, dès lors qu'elle n'était pas en mesure d'appréhender le vice dans son ampleur, ce qui serait le cas si ces fissures résultent d'un mouvement structurel du bâtiment pouvant aller jusqu'au basculement de l'extension édifiée en 1970,

-  la clause de non garantie n'aurait pas vocation à s'appliquer pour des désordres dont la venderesse avait connaissance. Or la proximité des travaux de confortement réalisées par rapport à la vente et le fait qu'ils aient été intégralement payés par Mme B est de nature à susciter des interrogations.

Par acte d'huissier du 25 juin 2018, Mme X D L a assigné en intervention forcée devant la cour d'appel d'Angers la société Sombat.

Par conclusions du 25 juillet 2018, la société Areas Dommages a demandé à la cour de lui décerner acte de son intervention volontaire à la procédure, sous les plus expresses réserves de garantie vis-à- vis de son assurée, la société Sombat.

La société Sombat, citée à domicile, n'a pas constitué avocat.

Après deux prorogations du délai, l'expert a déposé son rapport final le 21 juillet 2020.

Les parties ont conclu au fond après le dépôt du rapport d'expertise.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 mars 2021.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions du 10 mars 2021, Mme X D L demande à la cour, au visa des dispositions de l'article 1641 et suivants du code civil, de :

-  lui décerner acte de ce qu'elle se désiste de toutes demandes à l'encontre tant de la SARL Sombat que de la société Areas Dommages,

-  infirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de grande instance d'Angers du 16 novembre 2015, et statuant à nouveau,

-  condamner Mme F A épouse B à lui verser la somme TTC de 120 000 euros correspondant au coût estimé par M. K H, architecte DPLG ou, si mieux la cour préfère, surseoir à statuer en l'attente d'une estimation plus détaillée et approfondie de ces travaux de remise en état de l'extension de la maison d'habitation de Mme X D L,

A titre infiniment subsidiaire,

-  condamner Mme F A épouse B à verser à Mme X D L, sauf mémoire, la somme 104 500 euros TTC correspondant au décompte ci-après,

* frais de diagnostic général préalable et étude complète par maître d'œuvre (campagne géotechnique sur sol, sous-sol, fondations et dallage, chaînages horizontaux et verticaux) : 55 000 euros HT soit 66 000 euros TTC,

* préconisation de travaux postérieurs au diagnostic et étude, préalables après déduction de l'estimation de 66 000 euros,

* réfection des aménagements intérieurs (menuiseries, plâtrerie, électricité, appareillage sanitaire, embellissements, etc') 35 000 euros HT soit 38 500 euros TTC,

* soit un total de 104 500 euros TTC,

-  surseoir à statuer sur le décompte exact du coût des travaux de réfection consécutifs aux investigations préalables préconisées par M. E en page 21 de son rapport,

En tout état de cause,

-  condamner Mme F A épouse B à verser à Mme L :

* la somme de 478,40 euros selon facture TECHNIS en date du 29 mars 2013,

* la somme de 250 euros selon facture REDUREAU en date du 15 février 2014,

* la somme de (59,92 + 298,24) 358,16 euros en remboursement des frais d'huissier selon procès-verbal de constat en date du 11 février 2016,

* la somme de 262,24 euros en remboursement des frais d'huissier selon procès-verbal de constat en date du 4 octobre 2016,

* la somme de 264,09 euros en remboursement des frais d'huissier selon procès-verbal de constat en date du 6 décembre 2017,

-  condamner Mme F A épouse B à verser à Mme L une indemnité de 10 000 euros à titre de dommages intérêts en réparation de son préjudice moral et de jouissance,

-  condamner F A épouse B à lui verser une indemnité de 8 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

-  condamner F A épouse B aux entiers dépens, lesquels comprendront ceux inhérents au référé expertise, à la première instance et les honoraires des deux experts judiciaires.

A l'appui, elle fait valoir qu'à la lecture du rapport de l'expert, la mauvaise foi de Mme B, caractérisée par les abstentions dolosives de nature à engager sa responsabilité, est démontrée par :

-  le fait qu'elle ait dû commander ces contreforts pour maintenir un mur en schiste fragilisé par l'extension (cf les parpaings reposant sur ce mur) et éviter, ainsi, l'écroulement de cette propre extension ;

-  le fait qu'elle se soit abstenue de mentionner l'existence du contre mur et ces trois contreforts, invisibles à défaut de pénétrer sur la parcelle voisine, alors qu'ils venaient d'être réalisés ;

-  le fait qu'elle se soit abstenue d'évoquer les discussions avec le voisin relatives au mur, ou encore la déclaration de catastrophe naturelle ;

-  le fait qu'elle ait affirmé devant Notaire qu'aucun gros travaux n'avaient été réalisés dans le délai de dix ans précédent la vente (page 12 de l'acte de vente) et que, par ailleurs, la maison n'a subi les effets d'aucune catastrophe naturelle (page 17 de l'acte de vente) ;

-  le fait qu'elle ait indiqué devant l'Expert et par voie de dire que ce contre mur et ces trois contreforts n'étaient destinés qu'à 'réparer un vieux mur mitoyen en mauvais état' se gardant bien de dire que l'extension reposait dessus et l'avait donc fragilisé (cf son dire en date du 8 février 2013);

-  le fait qu'elle ait indiqué devant l'expert et dans le cadre de ses écritures, tant de première instance que d'appel, ne rien savoir des travaux commandés par sa mère... alors qu'elle a pu ensuite produire devant le Tribunal deux factures émises à son nom et à son adresse, factures qu'elle a donc nécessairement reçues et réglées (Pièces N°  43 et 44) ;

-  le fait qu'elle a nécessairement eu connaissance des mouvements structurels de la maison, ce du fait, d'une part, de l'ouverture des fissures en été et à leur fermeture en hiver et du fait, d'autre part, des précédentes catastrophes naturelles ayant révélé 'ainsi' et 'naturellement' la fragilité 'intrinsèque' de l'immeuble pour amplifier les conséquences des mouvements subis, l'immeuble ne pouvant plus reprendre son positionnement initial et restant soumis aux aléas climatiques (rapport page 23).

Elle souligne que si la venderesse n'est juridiquement plus responsable, eu égard aux délais passés, de 'la vétusté des ouvrages intérieurs (notamment ceux de doublage), des méthodes de construction anciennes mal adaptées, voire d'une méthodologie suivie inefficace lors de leur réalisation» (rapport page 24), elle l'est, en revanche, pour ne pas lui avoir indiqué non seulement la fragilisation de l'immeuble du fait de la survenance des catastrophes naturelles mais également, et surtout, qu'existait ce phénomène d'ouverture et de fermeture des fissures, consécutif selon l'expert à un mouvement de bascule du support de ces ouvrages, à savoir l'extension elle-même. En conséquence, elle doit l'indemniser du coût des travaux de réfection lui permettant de disposer d'une maison en bon état d'habitation comme elle lui a été présentée. A ce titre, l'expert préconise la destruction et la reconstruction de la partie extension, la solution subsidiaire évoquée par lui n'étant pas de nature à remédier aux désordres constatés, puisque risquée, même si elle apparaît simple et immédiate. Le devis produit par elle est par ailleurs inférieur aux estimations de l'expert judiciaire. De même, elle est légitime à solliciter le remboursement des frais annexes tout comme la réparation de son préjudice moral et de jouissance compte tenu des inquiétudes liées à la solidité de la maison et l'inconfort lié à l'exécution des travaux de remise en état.

Aux termes de ses dernières écritures du 15 février 2021, Mme F B demande à la cour sur le fondement des dispositions de l'article 1641 du code civil et de la clause d'exonération des vices cachés insérée dans l'acte de vente, de :

-  déclarer Mme X D L irrecevable et en tous les cas mal fondée en son appel,

L'en débouter,

-  confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme X D L de toutes ses demandes,

-  l'infirmer en ce qu'il a octroyé une indemnité de 3 000 euros à Mme B et condamner Mme X D L au paiement d'une indemnité de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au profit de Mme B pour les frais engagés à l'occasion de la procédure de référé, pendant l'expertise judiciaire et lors de l'instance au fond,

-  condamner Mme X D L à payer à Mme F A épouse B une indemnité de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés à l'occasion de la procédure devant la cour d'appel de Céans,

-  condamner Mme X D L aux dépens conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

A l'appui, elle fait valoir les conclusions de l'expert judiciaire sur l'absence de lien entre les travaux réalisés par elle en 2008 sur les contreforts extérieurs du mur et les désordres dont se plaint l'appelante sur l'extension de sa maison. L'instabilité évolutive par alternance de cette extension, phénomène ancien et classique en lien avec l'influence du sous-sol, entraîne des désordres provenant uniquement de la qualité de la construction réalisée courant 1970. Enfin, l'expert estime que le masquage des désordres n'est pas démontré. Il souligne qu'il n'existe, à ce jour, aucun basculement de la partie du mur surélevé ni d'insuffisance des travaux de confortement. Si la proximité des dates entre les travaux et la vente peut susciter des interrogations, il n'en demeure pas moins que le contre mur n'a pas été réalisé pour que puisse être validée une intention de vice caché d'autant moins que les contreforts réalisés étaient parfaitement visibles dans un but de confortement en l'occurrence efficace d'un ouvrage ancien et vétuste. Elle rappelle qu'elle n'a jamais habité cette maison, ne l'occupant que dix à quinze jours par an, après en être devenu propriétaire au décès de sa mère. Si elle a omis, faute de connaissance juridique, de mentionner l'existence des travaux de confortement lors de la lecture de l'acte par le notaire, cette omission n'a aucune conséquence négative pour Mme L puisque celui-ci, en parfait état, ne souffre d'aucun désordre.

En outre, la consolidation de ce mur mitoyen ne constitue pas un élément faisant corps avec l'immeuble tel que formulé dans l'acte de vente. Contrairement aux affirmations dénuées de preuve de l'appelante, les travaux effectués dans la maison, qui dataient de plus de dix ans, n'ont pas été réalisés pour cacher les fissures en vue de la vente. Aucun des désordres apparents lors de la vente ne pouvait ni n'a été caché à Mme X D L. La lettre de son époux, dans le cadre d'une démarche préventive si un décret de catastrophe naturelle intervenait, à laquelle en définitive elle n'a accordé aucune suite, concerne des fissures horizontales sur le mur de pignon de la partie ancienne de la maison totalement à l'opposé de l'extension, et donc sans aucun lien. Très subsidiairement, les chiffrages des travaux de reprise, produits après les opérations d'expertise sans possibilité de discussion par l'expert, sont déraisonnables. Les préjudices moral et de jouissance injustifiés dans leur existence et dans leur quantum.

Dans ses dernières conclusions du 4 janvier 2021, la société Areas dommages demande à la cour de :

-  décerner acte à Mme X D L de son désistement d'instance et de toute demande à l'encontre tant de la SARL Sombat que de la société Areas dommages,

-  décerner acte à la société Areas dommages de son acceptation du désistement d'instance de Mme X D L,

-  condamner tout succombant aux entiers dépens.

A l'appui, elle fait valoir que Mme X D L a, dans ses conclusions, indiqué se désister de l'instance engagée à l'égard de la société Sombat et de la société Areas dommages.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le désistement d'instance à l'encontre de la société Sombat et de la société Areas dommages

Il convient de donner acte à Mme X D L de son désistement de toutes demandes à l'encontre tant de la SARL Sombat que de la société Areas Dommages et de le déclarer parfait celui-ci ayant été expressément accepté par la société Areas Dommages et n'ayant pas besoin de l'être par la SARL Sombat qui n'a pas constitué avocat.

Sur l'existence des vices cachés

L'article 1641 du code civil dispose que le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage à laquelle on la destine, ou qui en diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.

Il appartient à celui qui entend se prévaloir de la garantie des vices cachés de rapporter la preuve de l'existence d'un défaut caché précis, déterminé, antérieur et présentant un caractère de gravité suffisant pour rendre la chose impropre à l'usage à laquelle on la destine.

Par ailleurs, l'article 1643 du même code prévoit que le vendeur est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie.

Entre non professionnel, une clause de non garantie ne peut être écartée qu'en la présence d'un vendeur de mauvaise foi, c'est-à- dire qu'il avait connaissance du vice de la chose, à charge de celui qui l'invoque de la démontrer.

En l'espèce, en page 10 de l'acte de vente du bien immobilier à Mme X D L, il est stipulé : 'L'ACQUÉREUR prend G Y dans son état au jour de l'entrée en jouissance, tel qu'il l'a vu et visité, sans recours contre LE VENDEUR pour quelque cause que ce soit et notamment pour mauvais état du sol ou du sous-sol, vices même cachés, erreur dans la désignation, le cadastre ou la contenance, toute différence, excédât elle un vingtième devant faire son profit ou sa perte'.

Aux termes de son rapport déposé le 21 juillet 2020, l'expert judiciaire constate que :

-  le contre mur réalisé courant août 2008, destiné à conforter le mur ancien fissuré élevé en schiste qui annonçait des signes de basculement, ne souffre d'aucun désordre, ni déformation ni basculement,

-  la construction de l'extension dans les années 70 a conduit les opérateurs à élever une maçonnerie en blocs de parpaing sur le dessus du mur initial en schiste,

-  sur l'emprise de l'extension, l'ancien mur de clôture avait manifestement déjà été conforté intérieurement par un contre mur intérieur (1970) puis le sera ultérieurement depuis l'extérieur par un autre contre mur (2008), ce qui garantit sa stabilité, sa surélévation ne pouvant plus avoir de conséquence maintenant. Il reste possible que l'ensemble ne se soit stabilisé que dans les mois qui ont suivi la construction de celui-ci expliquant l'apparition de mouvements ultérieurs à l'origine de fissuration,

-  le basculement du mur de clôture de schiste non conforté par un contre mur extérieur a entraîné des désordres par arrachement sur l'angle du mur de l'extension, d'autant que la constitution de ce mur est fragilisée par la dislocation des éléments le constituant qui sont mal hourdés,

-  à l'intérieur, les désordres consistent en :

* des fissurations longilignes en cueillies du plafond de la salle de bains, avec retour vertical dans les angles des cloisons,

* une fracture d'un carreau de faïence murale en angle du châssis de la salle bains, tracé en diagonal sur la largeur du carreau,

* un décollement de l'huisserie de la porte d'accès à la cuisine - ouverture +/-1 cm, avec faux aplomb de +/-2 cm sur toute la hauteur- à noter que le désaffleure est manifestement d'origine,

* un faux aplomb de +/-2 cm sur toute la hauteur de la porte d'accès à la salle de bains,

* une fracture de deux carreaux de sol au seuil de ladite porte

-  les mesures effectuées lui permettent de conclure qu'il n'y a aucun rapprochement à établir entre la stabilité démontrée du mur de schiste qui a été conforté d'un contre mur et l'instabilité évolutive des ouvrages de cloisonnement intérieur et de celle du mur de clôture non conforté.

Sur les origines, l'expert indique :

-  l'évolution continuelle de la partie du mur de schiste non renforcé d'un contre mur démontre sa fragilité intrinsèque, comme l'était le mur qui a été ultérieurement conforté d'un contre mur

-  le mouvement est la conséquence de la réalisation de dispositifs constructifs non adaptés à la situation, ledit mur étant, rappelons-le, un mur de soutènement (absence de chaînage, de raidisseur, de fondation suffisamment ancrée dans un bon sol),

-  les mouvements alternatifs affectant les ouvrages intérieurs démontrent sans aucun doute l'influence des sous-sols (probablement constitués d'argiles dites gonflantes) dont la résistance mécanique varie selon les conditions climatiques (hydratation/dessiccation), avec la conséquence de déstabiliser la partie récente agrandie du pavillon, et probablement, mais en moindre importance, la partie ancienne : la partie agrandie bascule dans son ensemble, et se déforme entraînant avec elle les ouvrages secondaires restés solidaires de la partie ancienne, savoir :

-  la cloison de doublage de la chambre,

-  les ouvrages de doublage et de faux plafond dans le cabinet de toilettes,

-  le carrelage au seuil de la porte qui se fracture, rendant le désordre spectaculaire (pouvant donner l'image d'une aggravation), surtout en période de sécheresse.

-  le phénomène constaté est ancien et tout à fait classique, et son origine est bien à rechercher dans la qualité médiocre de la construction des ouvrages réalisés courant 1970 (mais également ceux réalisés lors de la première construction), particulièrement les assises et la portance des fondations qui se modifient (ce qui permet de conclure à un dispositif de structure équipant les bâtiments non adapté et à un dallage porté sur un remblai non fiable) : ainsi s'expliquent notamment les désordres de fissuration affectant les maçonneries, en façade

-  les désordres constatés ne sont absolument pas à rattacher à la construction de l'ouvrage de contre mur réalisé par l'entreprise, mais a une mise en œuvre d'ouvrages anciens n'ayant pas tenu compte des particularités de la nature du sous-sol, à la présence (évolutive) de végétation, à l'absence de réalisation de dispositif constructif (joint de fractionnement entre des constructions d'âges différents dont l'évolution reste aussi consécutive à une prise d'assise différente), aux discontinuités, voire absence de chaînages horizontaux et verticaux

-  à considérer également, la qualité douteuse de la réalisation des ouvrages de doublage et de faux plafond (fixation des plaques de plâtre, des rails d'ossature, faiblesse ou absence des bandes de pontage, etc ...) équipant la partie de l'immeuble édifiée courant 1970.

-  ces mouvements sont totalement indépendants du mur litigieux, et il est assuré que les ouvrages sinistrés ne reprendront jamais leur position initiale;

Pour l'homme de l'art, 'le masquage' des désordres, notamment des fissures affectant le mur litigieux, n'est pas démontré. Comme il n'est démontré à ce jour aucun basculement de la partie du mur qui a été surélevée ni d'insuffisance des travaux de confortement (réalisation du contre mur).

Le contre mur ne semble pas avoir été réalisé pour que puisse être validée une intention de vice caché mais dans le but du confortement, en l'occurrence efficace, d'un ouvrage ancien vétuste dont la fragilité était dénoncée depuis longue date par les anciens propriétaires.

Cependant, force est de constater que si les contreforts du dit contre mur sont visibles selon l'expert, ils sont néanmoins édifiés, avec l'autorisation des propriétaires, sur la parcelle voisine et, ni le compromis de vente du 19 septembre 2009, ni l'acte de vente de l'immeuble du 29 décembre 2009, ne font état des travaux de confortement du mur pourtant récemment engagés.

Bien plus, l'acte de vente de l'immeuble du 29 décembre 2009 précise en page 12 : 'LE VENDEUR déclare que G Y n'est pas concerné par les dispositions des articles 1792 et suivants du code Civil, aucune construction, surélévation ou addition d'éléments d'équipement faisant corps avec l 'immeuble n'ayant été effectué depuis moins de dix ans'.

Dans ce contexte, Mme X D L, qui n'a aucune raison d'aller voir sur la propriété des voisins, ni même de soupçonner qu'il soit nécessaire de le faire, ne peut pas avoir connaissance de l'existence de celui-ci.

Le statut de ce mur est d'ailleurs tellement indéterminé que l'expert recommande d'effectuer une régulation cadastrale, après bornage d'un géomètre, pour se prémunir de toutes difficultés ultérieures en cas de revente de l'une ou l'autre des propriétés.

Contrairement à ce que soutient l'appelante, la consolidation du mur mitoyen fait corps avec l'immeuble vendu en ce que l'extension repose sur une surélévation de ce mur, de sorte qu'elle aurait dû être déclarée au titre des travaux relevant des dispositions des articles 1792 et suivants du code civil effectués depuis moins de dix ans

Mme F B ne peut pas se réfugier derrière une absence de connaissance juridique pour expliquer son omission de mentionner l'existence des travaux de confortement lors de la lecture de l'acte par le notaire.

En effet, si ce contre mur ne souffre d'aucun désordre, il a été réalisé pour maintenir un ouvrage ancien qui attestait effectivement de la fragilité intrinsèque de l'immeuble dans son ensemble puisqu'il s'agit d'un mur de soutènement ce que n'ignore pas la venderesse au regard des démarches initiées en décembre 2007 auprès des propriétaires voisins pour la réalisation des travaux de confortement.

De même, par un courrier du 5 octobre 2003, l'époux de Mme F B dénonce à la Mairie de Soulaire et Bourg de « graves fissures » en vue d'une reconnaissance du sinistre au titre des conséquences d'une catastrophe naturelle. Le fait qu'il s'agissait d'une démarche préventive qui n'a en définitive pas abouti ne change rien au constat, d'une part, de la confirmation de la fragilité de l'immeuble dans son ensemble, et, d'autre part, que Mme F B ne l'ignorait pas.

En revanche, le fait que cette procédure n'ait pas été menée à son terme ne permet pas d'imputer à la venderesse une fausse déclaration quand l'acte de vente mentionne, en page 17, que Mme F B « déclare qu'à sa connaissance, G Y n'a jamais connu de sinistres résultant de catastrophes naturelles ou technologiques ».

Dans ces conditions, la fragilité de l'immeuble est constitutive d'un défaut caché précis, déterminé, antérieur et présentant un caractère de gravité suffisant pour rendre la chose impropre à l'usage à laquelle on la destine, l'expert précisant en réponse à un dire (page 23) qu'il ne peut être argumenté que l'immeuble était en bon état en date de sa vente.

Par ailleurs, la venderesse ne pouvant, compte tenu des éléments développés ci-dessus, ignorer cette fragilité, la clause de non garantie ne peut qu'être écartée.

En conséquence, il convient, par la voie de l'information, de faire droit à l'action en garantie de Mme X D L à l'encontre de Mme F B.

Sur les demandes d'indemnisation

L'article 1644 du code civil dispose que dans le cas de l'article 1641, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix.

* Les travaux de remise en état

Sur ce point, si l'expert précise qu'aucun désordre ne résulte des travaux de confortement, force est de constater, qu'il ne se prononce pas clairement sur les mesures nécessaires pour remédier à la fragilité de l'immeuble et sur leur coût.

Et ce d'autant que les devis ont été produits par l'appelante après les opérations d'expertise empêchant tout examen par l'expert et discussion contradictoire entre les parties.

En conséquence, il convient sur ce point, avant dire droit, d'ordonner une expertise complémentaire et de désigner M E pour y procéder.

Mme X D L devra, en application de l'article 269 du code de procédure civile, faire l'avance des frais d'expertise.

* Le préjudice moral et de jouissance

Compte tenu du complément d'expertise ordonné ci-dessus, il convient de surseoir à statuer sur ce point dans l'attente de cette mesure.

* Le remboursement des frais annexes

Ces frais, relatifs à des constats d'huissier et des avis techniques qui relèvent de l'article 700 du code de procédure civile, seront traités à ce titre.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Les dispositions du jugement sur les dépens sont infirmées.

Mme F B, partie perdante, devra supporter les dépens de première instance et d'appel exposés à ce jour,

Par ailleurs, il est équitable que Mme F B soit condamnée à verser à Mme X D L la somme de 6 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. En revanche, il convient de la débouter de sa propre demande de ce chef tant en première instance qu'en appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement et par arrêt réputé contradictoire,

DONNE ACTE à Mme X D L de son désistement de toutes demandes à l'encontre de la SARL Sombat et de la société Areas Dommages ;

INFIRME le jugement entrepris ;

Et statuant à nouveau,

FAIT DROIT à l'action en garantie de Mme X D L à l'encontre de Mme

F B sur le fondement de l'article 1641 du code civil ;

ORDONNE, avant dire droit sur les demandes d'indemnisation, une expertise complémentaire ;

-  COMMET pour y procéder , Philippe GOUNAUD , courriel : philippe.gounaud@expert de justice.org, lequel aura pour mission, après avoir dûment convoqué les parties et leurs conseils, et s'être fait remettre tous les documents utiles de :

1°) se rendre à nouveau si nécessaire à Soulaire et Bourg, ...,

2°) dire quels travaux sont nécessaires pour remédier à la fragilité de l'immeuble mise en évidence dans son expertise initiale; en évaluer le coût et la durée d'exécution,

3°) répondre à tous dires écrits des parties et au besoin, entendre tous sachants,

-  DIT que l'expert accomplira sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile, qu'en particulier il pourra se faire autoriser à s'adjoindre tout spécialiste de son choix, dans une spécialité autre que la sienne,

-  DIT que l'expert donnera connaissance aux parties de ses conclusions et répondra à tous dires écrits de leur part, formulés dans le délai qu'il leur aura imparti, avant d'établir un rapport définitif qu'il déposera au secrétariat greffe du tribunal judiciaire dans les six mois du jour où il aura été avisé de la consignation de la provision par le greffe,

-  DIT que dans les deux mois du présent arrêt, Mme X D L devra consigner au régisseur de la cour d'appel d'Angers une somme de 2 000 euros à titre de provision à valoir sur la rémunération de l'expert,

-  DIT qu'à défaut de consignation dans le délai imparti, la désignation de l'expert sera caduque, conformément aux dispositions de l'article 271 du code de procédure civile, sauf prorogation du délai de consignation,

-  DIT que l'expert, si le coût probable de l'expertise s'avère beaucoup plus élevé que la provision fixée, devra communiquer au magistrat chargé du contrôle et aux parties l'évaluation prévisible de ses frais et honoraires en sollicitant, le cas échéant, la consignation d'une provision complémentaire,

-  C, en application de l'article 964-2 du code de procédure civile, le conseiller chargé du contrôle des mesures d'instruction de la cour d'appel d'Angers pour suivre l'exécution de la présente mesure d'expertise,

Y ajoutant,

CONDAMNE Mme F B à payer à Mme X D L la somme de 6 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE Mme F B de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Mme F B aux entiers dépens de première instance et d'appel exposés à ce jour, qui comprendront la somme de 478,40 euros selon facture TECHNIS en date du 29.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

C. LEVEUF M. C. THOUZEAU

Composition de la juridiction : Marie Cécile THOUZEAU, MULLER (Mrs), Christine LEVEUF, Régine GAUDRE, Me BLANCHARD, SELARL Dominique, Boucheron et Associés, Me Inès RUBINEL, Me Benoit GEORGE, SELARL LEXAVOUE Rennes Angers, Me d' AUDIFFRET, SELARL CAPPATO GAUDRE

Décision attaquée : Tribunal de grande instance Angers Juge des référés 2015-11-16