Cass. 1re civ., 6 octobre 2021, n° 20-16.892
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Défendeur :
Les Laboratoires Servier (SAS), La Caisse Primaire d'Assurance Maladie Des Bouches-Du-Rhône
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Duval-Arnould
Rapporteur :
M. Mornet
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 23 janvier 2020), Jean Da S. à qui a été prescrit, à compter de l’année 2000, du Mediator pour remédier à des troubles métaboliques, a présenté une valvulopathie. Il est décédé le 8 juillet 2013.
2. A l’issue d’expertises ordonnées en référé, Mme Sabine B., M. Christian Da S., Mme Chloé Da S. et Mme Claire B. (les consorts Da S.), agissant en leur nom personnel et en qualité d’ayants droit de Jean Da S., ont assigné la société Les Laboratoires Servier, producteur du Mediator (la société), en responsabilité et indemnisation et mis en cause la caisse primaire d’assurance maladie des Bouches du Rhône (la caisse) qui a demandé le remboursement de ses débours.
3. La société été condamnée à payer différentes sommes aux consorts Da S. et à la caisse au titre de sa responsabilité dans la survenue de la valvulopathie.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
4. Les consorts Da S. font grief à l'arrêt de dire que le lien de causalité entre la prise du Mediator et le décès de Jean Da S. n’est pas démontré et que la société n’est pas responsable de ce décès et de limiter en conséquence leur indemnisation, alors « que les juges du fond ne peuvent rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fourmis par les parties ; que devant la cour d’appel les exposants ont versé aux débats le rapport du docteur Irène F. spécialiste reconnue du Mediator lanceuse d’alerte, ayant fait une analyse approfondie du cas de Jean Da S. et concluant que son décès était lié à la prise du Mediator ; que la Cour d’appel qui a décidé que le lien entre la prise du médicament Mediator et le décès de Jean Da S. n’était pas établi sans examiner même sommairement ce document déterminant et longuement commenté dans les conclusions des exposants, a violé l’article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l’article 455 du code de procédure civile :
5. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé.
6. Pour écarter la responsabilité de la société au titre du décès de Jean Da S., l’arrêt se fonde sur les rapports de M. F., expert judiciaire et l’avis de M. A., sapiteur, et en déduit que le décès ne peut être rattaché de façon directe et certaine à la prise du Mediator.
7. En statuant ainsi, sans examiner, même sommairement, l’avis médical amiable établi par Mme F., relatif à la cause du décès de Jean Da S., versé aux débats en cause d’appel par les consorts Da S., la cour d'appel n’a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il dit que le lien de causalité entre la prise de médiator et le décès de Jean Da S. n’est pas démontré, que la société Les laboratoires Servier n’est pas responsable du décès de Jean Da S. et limite en conséquence l’indemnisation des consorts Da S., l'arrêt rendu le 23 janvier 2020, entre les parties, par la cour d'appel d’Aix-en-Provence ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Condamne la société Les laboratoires Servier aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Les laboratoires Servier et la condamne à payer à Mmes Sabine et Claire B., M. Christian Da S., Mme Chloé Da S. la somme globale de 3 000 euros.