CA Aix-en-Provence, 1re ch. sect. 1, 19 octobre 2021, n° 18/20588
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Ed Concept (SARL)
Défendeur :
Consumer Finance (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Brue
Conseillers :
Mme Dampfhoffer, Mme Demont
EXPOSE DU LITIGE
M. André V. et Mme Chantal née R. ont signé le 5 octobre 2014 lors de la Foire de Marseille un bon de commande auprès de la société Solar Clim System pour un montant de 24'986 , visant à l'installation de panneaux photovoltaïques sur leur maison à usage d'habitation sise à Sausset-les Pins. Ils ont versé le même jour un acompte d'un montant de 1286.
Le 7 octobre 2014, un conseiller du vendeur se rendait à leur domicile et leur proposait de souscrire pour financer l'opération un crédit auprès de la société Sofinco devenue la SA CA Consumer Finance.
Ils signaient le même jour un contrat de crédit pour un montant de 23'700, remboursable en 60 mensualités.
Les 15 et 16 janvier 2015 les panneaux photovoltaïques ont été installés au domicile des époux V.
Par exploit du 29 avril 2016 et 9 mai 2016 les époux V. ont assigné la société Solar Clim System et la société Sofinco aux fins principalement de voir prononcer la nullité du bon de commande du 5 octobre 2014 et celle du contrat de crédit accessoire.
Par jugement en date du 19 novembre 2018 le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence a :
prononcé la nullité de la vente résultant du bon de commande du 5 octobre 2014 entre les époux V. et la SARL Solar Clim System ;
ordonné la restitution par cette société Solar Clim System aux époux V. de la somme de 24'986 ' au titre du bon de commande du 5 octobre 2014 contre restitution du matériel photovoltaïque ;
constaté la résolution de plein droit du contrat de crédit Sofinco du 7 octobre 2014 ;
ordonné la restitution par les époux V. à la SA CA Consumer Finance de la somme de 23'700 versée au titre du crédit dont seront déduites les sommes perçues par la société la SA CA Consumer Finance au titre du remboursement du prêt ;
débouté les époux V. de leur demande de dommages-intérêts ;
condamné la société Solar Clim System à leur verser la somme de 2000 au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens ;
et ordonné l'exécution provisoire du jugement.
Le 28 décembre 2018, la SARL Solar Clim System a relevé appel de cette décision.
Par conclusions du 27 mars 2019 elle demande à la cour de réformer le jugement entrepris, de débouter les époux V. de toutes leurs demandes, et de les condamner à lui payer la somme de 1500 ' au titre de l'article 700 du code de procédure civile
Par conclusions du 24 juin 2019 M. André V. et Mme Chantal née R. demandent à la cour de confirmer le jugement entrepris, y ajoutant, de condamner la société Solar Clim System à leur payer la somme de 10'000 à titre de dommages-intérêts et celle de 3000, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
Par conclusions du 13 mai 2019 la SA CA Consumer Finance, anciennement dénommée Sofinco, demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a ordonné la nullité des contrats de vente et de crédit sur le fondement du dol, statuant à nouveau, de débouter les époux V. de toutes leurs demandes, et de les condamner à lui payer la somme de 800 ' au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.
La société ED Concept, anciennement dénommée Solar Clim System, a conclu à nouveau le 30 août 2021.
Par conclusions de procédure du 7 septembre 2021 M. André V. et Mme Chantal née R. ont justement conclu au rejet des conclusions et pièces signifiées par l'appelant le 30 août 2021 au mépris du contradictoire, la veille de l'ordonnance de clôture datée du 31 août 2021.
Il sera fait droit à cette demande de rejet.
La cour renvoie aux écritures précitées pour l'exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties.
MOTIFS
Attendu que la société ED Concept, anciennement dénommée Solar Clim System fait valoir au soutien de son appel qu'elle ne s'est jamais engagée sur une autonomie d'énergie à hauteur de 80 % ; qu'il est impossible pour cette société de s'engager sur une économie d'énergie précise sans une étude personnalisée préalable ; que le bon de commande n'a donc pu en aucun cas engager la société sur ce point ; que par ailleurs les conditions générales de vente figurant au verso du bon de commande et qui ont été acceptées par les époux V. précisaient expressément à l'article 9 que 'Le client reconnaît être informé que la production d'énergie et le rendement de l'installation dépendait de nombreux paramètres et que les économies d'énergie sont fournies par le vendeur à titre purement indicatif, non contractuel. Le vendeur ne souscrit aucun engagement au titre des économies d'énergie, il ne saurait garantir aucun volume ou revenu' ; que les intimés opèrent confusion quant aux engagements de la concluante ; que le bon de commande précisait seulement que le matériel vendu a un rendement garanti de 25 ans à 80 %,ce qui ressort clairement de la notice du constructeur ; que les intimés ne peuvent sérieusement prétendre qu'ils pensaient que la société leur avait indiqué que cette installation entraînerait une économie d'énergie à hauteur de 80 % de leur consommation habituelle ; qu'ils avaient pleinement capacité pour contracter, même âgés de 65 ans et 83 ans ; et qu'en 2017 les époux V. ont réduit leur consommation d'électricité distribuée par le réseau EDF de 38 %, ce qui est tout à fait acceptable pour ce type d'installation ;
Mais attendu que le premier juge a exactement retenu qu'en mentionnant sur le bon de commande « rendement garanti 25 ans à 80 % » et en ne fournissant aucune information de nature à permettre aux acquéreurs de connaître les possibilités réelles de rendement des panneaux photovoltaïques, la société venderesse a usé de manoeuvres dolosives sans lesquelles les époux V. n'auraient pas contracté, la rentabilité du dispositif, en raison du coût élevé de l'investissement, nécessitant que ces derniers puissent réaliser des économies d'énergie très supérieures à celle que révèlent les factures d'énergie qui sont produites ;
Attendu que si les acquéreurs ont signé le bon de commande comportant une clause de renvoi à un article 9 des conditions générales de vente figurant au verso, en page 4, et précisant, en lettres grises minuscules, peu lisibles, que 'les économies d'énergie sont fournies par le vendeur à titre purement indicatif non contractuel', il convient de relever d'une part que le bon de commande ne comporte aucune indication relative à ces économies d'énergie qui seraient fournies à titre indicatif non contractuel, autre que la mention manuscrite litigieuse qui annonce ostensiblement au contraire un « Rendement garanti 25 ans à 80 % » ;
Attendu que d'autre part le terme : « garanti » contredit celui « à titre indicatif » des conditions générales ;
Attendu qu'en présence de deux clauses contraires d'un contrat, celles-ci s'interprètent en faveur de celui qui s'engage et donc en faveur des époux V. ;
Attendu qu'en réalité ces époux, par la présentation de manière manuscrite, très lisible, qui était faite d'un « Rendement garanti 25 ans à 80 % » ont pu légitimement penser que des conditions particulières dérogatoires s'appliquaient à eux ; que sans intention dolosive, le vendeur eût indiqué qu'il s'agissait simplement d'un rendement « prévisible » ;
Que le vendeur plaide vainement qu'il s'agissait là de reprendre la notice du constructeur laquelle mentionne 'garantie du fabricant de 25 ans à 85 % de la puissance nominale', termes que le vendeur s'est abstenu de reprendre sur le bon de commande ;
Attendu en conséquence que le jugement qui a retenu l'existence d'un dol et qui a prononcé la nullité du contrat principal de vente et du contrat accessoire de crédit doit donc être entièrement confirmé ;
Attendu qu'aucun abus du droit d'ester en justice ne peut être retenu, d'où il suit le rejet de la demande reconventionnelle indemnitaire.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, contradictoirement, et en dernier ressort,
Ecarte des débats les conclusions et pièces déposées par l'appelante le 30 août 2021,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Y ajoutant
Déboute les intimés de leur demande reconventionnelle tendant à l'octroi de dommages intérêts,
Condamne la Sarl ED Concept anciennement dénommée Solar Clim System à payer à M. André V. et à Mme Chantal née R., ensemble, la somme de 2000 ' au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens, et dit que ceux-ci pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.