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Décisions

CA Nouméa, ch. civ., 28 octobre 2021, n° 19/00257

NOUMÉA

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Nouméa Perles

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Allard

Conseillers :

M. Billon, Mme Magherbi

Avocats :

Selarl d'avocats Denis Casies, Me Le Thery

Ti Nouméa, du 22 juill. 2019

22 juillet 2019

Procédure de première instance

Le 23 décembre 2014, Mme Z a acheté auprès de la société Nouméa perles un bracelet moyennant un prix de 200.000 FCFP.

Selon requête introductive d'instance déposée le 2 février 2017, Mme Z, qui dénonçait des bris répétés des maillons du bracelet, a introduit devant le tribunal de première instance de Nouméa une action rédhibitoire à l'encontre de la société Nouméa perles.

La société Nouméa perles s'est opposée à cette demande en contestant tout vice caché.

Par jugement du 22 juillet 2019, la juridiction saisie, observant qu'aucune preuve certaine d'un vice caché n'était rapportée et que la demanderesse ne démontrait pas avoir été victime d'un dol, a :

- débouté Mme Z de toutes ses demandes,

- condamné Mme Z à payer à la société Nouméa perles la somme de 200.000 FCFP en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Mme Z aux dépens, dont distraction au profit de la société Cabinet d'affaires calédonien.

Selon requête déposée le 5 août 2019, Mme Z a interjeté appel de cette décision.

Selon ordonnance sur incident de mise en état en date du 21 juillet 2021, la demande d'expertise présentée par Mme Z a été rejetée.

Aux termes de ses conclusions déposées le 17 août 2020, Mme Z demande à la cour de :

- déclarer fondées les demandes de Mme Z ;

- constater que le bracelet litigieux est affecté d'un vice caché ;

- prononcer la résolution de la vente ;

- dire que Mme Z devra rendre le bracelet litigieux à la société Nouméa perles qui devra restituer le prix ;

- pour autant que de besoin, condamner la société Nouméa perles à restituer à Mme Z la somme de 200.000 FCFP ;

à titre subsidiaire,

- constater que le bracelet litigieux est affecté d'un vice caché ;

- dire que la société Nouméa perles devra rendre à Mme Z une partie du prix, soit la somme de

100.000 FCFP ;

à titre plus subsidiaire,

- constater que la société Nouméa perles a engagé sa responsabilité en n'informant pas Mme Z, ni son époux, de la grande fragilité de son bracelet et des conditions d'utilisation de ce dernier ;

- prononcer la résolution de la vente ainsi intervenue ;

- dire que Mme Z devra rendre le bracelet litigieux à la société Nouméa perles, qui devra restituer le prix ;

- pour autant que de besoin, condamner la société Nouméa perles à restituer à Mme Z la somme de 200.000 FCFP ;

- à titre subsidiaire, déclarer la société Nouméa perles entièrement responsable du préjudice subi par Mme Z ;

- condamner la société Nouméa perles à payer à Mme Z une somme de 100.000 FCFP en réparation du préjudice subi ;

à titre encore plus subsidiaire,

- constater la réticence dolosive de la société Nouméa perles, sinon l'erreur sur les qualités substantielles du bracelet dans le cadre de la vente du bracelet litigieux ;

- prononcer la nullité de la vente ainsi intervenue ;

- dire que Mme Z devra rendre le bracelet litigieux à la société Nouméa perles, qui devra restituer le prix ;

- pour autant que de besoin, condamner la société Nouméa perles à restituer à Mme Z la somme de 200.000 FCFP ;

en tout état de cause,

- condamner la société Nouméa perles à payer à Mme Z une somme de 1 FCFP à titre symbolique en réparation du préjudice subi du fait de sa résistance abusive;

- condamner la société Nouméa perles à payer à Mme Z la somme de 210.000 FCFP sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de premiere instance et condamner encore la société Nouméa perles à payer à Mme Z la somme de 210.000 FCFP sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel ;

- condamner la société Nouméa perles aux dépens dont distraction au profit de la selarl d'avocat Denis Casies.

Selon conclusions transmises le 30 janvier 2021, la société Nouméa perles prie la cour de :

- constater que le bracelet litigieux n'est affecté d'aucun vice caché ;

- constater qu'aucune manœuvre n'a été pratiquée par le vendeur ;

- constater que Mme Z a été parfaitement informée ;

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré ;

- condamner Mme Z à payer à la société Nouméa perles la somme de 250.000 FCFP en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel ainsi qu'aux dépens dont distraction au profit de la société Cabinet d'affaires calédonien.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 21 juillet 2021.

SUR CE, LA COUR,

1) Mme Z soutient que le bracelet litigieux était affecté d'un vice caché tenant à la « fragilité excessive de la maille ». Pour caractériser cette fragilité, elle fait valoir que le bracelet s'était cassé à quatre reprises à quelques semaines d'intervalle.

Le bracelet litigieux, dérobé depuis la saisine de la cour, était constitué d'une chaîne en or blanc, en « mailles serpent », d'un diamètre de 1,4 mm, ornée de cinq perles de Tahiti serties.

Si les concurrents de la société Nouméa perles, consultés par l'appelante, stigmatisent la fragilité du maillage utilisé pour confectionner le bracelet, il sera observé que la résistance d'une chaîne marine n'est pas une caractéristique attendue d'un bijou.

Les circonstances dans lesquelles le bracelet a cédé sont indéterminées et ainsi que l'a noté le premier juge, des conditions d'utilisation inaptées dont devrait répondre Mme Z ne peuvent pas être écartées.

La circonstance que la société Nouméa perles ait accepté de réparer gratuitement à trois reprises le bijou n'autorise pas la cour à induire que la venderesse « savait que les désordres provenaient d'un vice du bijou ». En effet, la familiarité des emails échangés atteste d'une proximité entre Mme Z et le gérant de la société Nouméa perles qui allait bien au-delà de simples rapports commerciaux ; celle-ci est de nature à expliquer la remise de 20 % sur le prix affiché dont a bénéficié Mme Z au moment de l'achat puis les interventions gratuites de la société Nouméa perles dans le cadre du service après-vente.

Le dossier ne démontre pas que l'employé de la société Nouméa perles aurait reconnu que le bracelet avait été « mal conçu ».

La société intimée note, sans être contredite, que la conception et la confection d'un bracelet ne sont soumises à aucune norme particulière.

En l'état du dossier, l'existence d'un vice caché n'est pas démontrée de sorte que tant l'action rédhibitoire que l'action estimatoire subsidiaire présentées par Mme Z seront rejetées.

2) Mme Z recherche la responsabilité contractuelle de la société Nouméa perles au motif que celle-ci avait failli à son obligation de renseignement.

L'élégance attachée à la finesse du maillage avait présidé à la décision d'achat du bracelet litigieux.

Un bijou est un objet commun, dont le port n'exige aucune compétence technique particulière et Mme Z, cliente normalement avisée, était à même d'avoir conscience de la fragilité du bracelet et de son incapacité à supporter des efforts imposés par des frottements ou des étirements. Dans son email du 20 avril 2016 (annexe n° 7 de l'appelante), le gérant de l'intimée rappelait à Mme Z qu'elle devait en « prendre soin ».

En l'absence de manquement contractuel du bijoutier, Mme Z sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts.

3) Mme Z ne caractérisant pas les artifices auxquels aurait eu recours la société Nouméa perles pour parvenir à la vente, la cour entérinera le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la demande en annulation de la vente pour dol.

La résistance aux étirements et aux torsions n'étant pas une qualité essentielle d'un bracelet, à la différence de l'authenticité des perles ornant le bijou ou de la nature du métal utilisé pour tresser les mailles, et Mme Z n'établissant pas que cette caractéristique était entrée dans le champ contractuel, un vice de consentement pour erreur ne sera pas retenu.

En conclusion, la vente ne sera pas annulée.

4) L'ensemble de ses demandes ayant été rejeté, Mme Z ne peut prétendre à des dommages et intérêts pour résistance abusive.

5) Mme Z sera condamnée à une somme complémentaire de 210.000 FCFP au titre de l'article 700 du code de procédure civile, somme qu'elle même réclamait à son adversaire, acquiesçant ainsi au coût des frais irrépétibles de la procédure.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme le jugement entrepris ;

Y ajoutant, déboute Mme Z de ses demandes fondées sur le manquement au devoir de conseil et sur l'erreur ;

Condamne Mme Z à payer à la société Nouméa perles une somme complémentaire de 210.000 FCFP sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme Z aux dépens d'appel, dont distraction au profit de la société Cabinet d'affaires calédonien.