Cass. com., 27 juin 2000, n° 97-22.222
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Dumas
Rapporteur :
Mme Garnier
Avocat général :
Mme Piniot
Avocats :
Me Garaud, SCP Thomas-Raquin et Benabent
v
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 8 octobre 1997), que M. André Z, viticulteur, est titulaire de la marque dénominative "Z", déposée le 16 août 1990 sous le n° 16 10 518, et de la marque complexe représentant la demeure familiale associée au nom de Z déposée le 3 juin 1992 et enregistrée sous le n° 92 421 807 ;
que, le 6 mars 1992, il a assigné en contrefaçon de marques et en concurrence déloyale son cousin, M. Paul Z, viticulteur, copropriétaire de la maison figurant sur la marque complexe, aux droits duquel se trouve l'EURL Paul Z et fils, anciennement dénommée GAEC Paul Z et fils (le GAEC) ; que M. Paul Z a formé une demande reconventionnelle en annulation des marques ; que la cour d'appel a annulé les deux marques susvisées et rejeté la demande en contrefaçon de ces marques ;
Attendu que M. André Z fait grief à l'arrêt d'avoir statué comme il l'a fait, alors, selon le pourvoi, d'une part, que le droit au patronyme "Z" que portent deux cousins exerçant tous deux la profession de viticulteur dans la même localité et dont chacun use, précédé de son prénom pour identifier son entreprise et ses produits, ne fait pas obstacle à ce qu'un l'un d'eux dépose ultérieurement avec un graphisme et une calligraphie spécifique ce patronyme à titre de marque, le cousin non dépositaire ne pouvant s'y opposer, faute de justifier, comme en l'espèce, d'un droit sur le patronyme ainsi spécifié qui soit antérieur au dépôt, ce dont il résulte qu'en se déterminant comme elle l'a fait, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 4 et 25 de la loi du 4 janvier 1991 dont elle a déclaré faire application ; alors, d'autre part, que, dans les mêmes circonstances de fait et de droit que ci-dessus, n'est pas de nature à créer dans l'esprit du public une confusion entre les deux entreprises et leurs produits l'usage que, pour la sienne et ses produits, le cousin dépositaire fait du patronyme à titre privatif dans la limite seulement des spécificités enregistrées au registre des marques, dès lors que le cousin non dépositaire conserve le port du patronyme et l'usage qu'il en fait auprès du public et peut à tout instant remédier à une improbable confusion en déposant à son tour le patronyme Z à titre de marque avec un graphisme et une calligraphie autres que ceux déjà employés et protégés ; d'où il suit qu'en se déterminant comme elle l'a fait, la cour d'appel a rendu une décision "infectée du même vice" que celui précédemment dénoncé ; alors, enfin, que dès lors que le GAEC conservait la faculté de se procurer un avantage identique à celui que M. André Z s'était légalement procuré tant par le dépôt du patronyme Z à titre de marque à raison du graphisme et de la calligraphie spécifique choisis que par le dépôt fait ultérieurement à titre de marque de la combinaison du patronyme protégé avec une reproduction de la maison familiale déjà protégée à titre de marque depuis 1970, la cour d'appel ne pouvait annuler les deux derniers dépôts comme frauduleux ou comme effectués par M. André Z pour se procurer un avantage illicite ou encore dans le but d'interdire au GAEC tout emploi du patronyme Z non précédé du prénom Paul, sans, ce faisant, violer par fausse application les textes susvisés,
la circonstance que, sur son dépliant publicitaire, M. André Z ait mentionné "maison de tradition depuis 1750" constituant, par ailleurs, un fait inopérant en l'état de l'ascendance commune de MM. André et Paul Z ;
Mais attendu que l'arrêt relève que les entreprises viticoles, dirigées l'une par M. André Z, l'autre par M. Paul Z, étaient connues de longue date sous le patronyme Z, auquel chacun d'eux adjoignait son prénom ; qu'il retient qu'en déposant le nom Z à titre de marque, M. André Z a tenté d'interdire à M. Paul Z et au GAEC de faire usage de ce nom sans l'adjonction du prénom Paul et de l'apposer au centre de l'étiquette, restreignant ainsi ce droit d'usage du nom patronymique ; qu'ayant déduit de ces constatations et appréciations que l'usage du patronyme Z sans adjonction du prénom avait pour effet d'entraîner la confusion dans l'esprit de la clientèle, la cour d'appel a légalement justifié sa décision, peu important que le GAEC eût pu déposer d'autres marques comprenant, dans les compositions différentes, le patronyme Z ; que le moyen ne saurait être accueilli en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.