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Décisions

Cass. 3e civ., 4 novembre 2021, n° 20-11.099

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

La commune de Nîmes

Défendeur :

Dexia Crédit Local (SA), Caisse Française De Financement Local (SA), Sfil (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

M. Blanc

Avocat général :

Mme Guinamant

Avocats :

SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, SCP Lesourd

Versailles, du 21 nov. 2019

21 novembre 2019

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 21 novembre 2019), la société Dexia crédit local (la société Dexia), agissant pour elle-même et sa filiale, la société Dexia Municipal Agency, a consenti en 2010 à la commune de Nîmes quatre prêts destinés à refinancer des prêts antérieurs.

2. Le contrat de prêt n° MPH270207EUR, d'un montant de  11 028 053,81 euros et d'une durée de 8 ans et 10 mois, stipulait que le taux d'intérêt serait égal à 4,78 % par an si le CMS (« Constant Maturity Swap ») EUR 30 ans était inférieur ou égal à 7 % et que, dans le cas contraire, ce taux serait égal à la somme de 4,78 % et de cinq fois la différence entre le CMS EUR 30 ans et 7 %.

3. Le contrat de prêt n° MON270199EUR, d'un montant de o 12 651 604,89 euros et d'une durée de 11 ans, stipulait que le taux d'intérêt serait égal à 4,52 % par an si la différence entre le CMS EUR 30 ans et le CMS EUR 2 ans était supérieure ou égale à zéro et que, dans le cas contraire, ce taux serait égal à la différence entre 4,52 % et 4,5 fois la différence entre le CMS EUR 30 ans et le CMS EUR 2 ans.

4. Le contrat de prêt n° MPH273353EUR, d'un montant de  11 033 990,88 euros et d'une durée de 10 ans et 11 mois, stipulait que le taux d'intérêt serait égal à 4,49 % par an pendant une première phase de 23 mois et que, pour la durée restante, ce taux serait égal à 4,49 % si l'indice Euribor 12 mois était inférieur à 6 % et égal à cet indice dans le cas contraire.

5. Le contrat de prêt n° MPH273723EUR, d'un montant de 31 464  009,02 euros et d'une durée de 21 ans et 7 mois, stipulait que le taux d'intérêt serait égal à 4,10 % par an pendant une première phase de 19 mois, que, pendant une deuxième phase de 18 ans, ce taux serait égal à 4,02 % par an si le cours de change de l'euro en francs suisses était supérieur ou égal au cours de change de l'euro en dollars US et, dans le cas contraire, égal à la somme de 4,02 % et de 28,25 % fois la différence entre le cours de change de l'euro en dollars US et le cours de change de l'euro en francs suisses, et que, pendant la durée restante, ce taux serait égal à l'indice Euribor 12 mois.

6. La commune a assigné la société Dexia, ainsi que la société Dexia Municipal Agency, devenue la société Caisse française de financement local (la société Caffil), et la Société de financement local, devenue la société Sfil, laquelle avait été chargée en 2013 de la gestion et du recouvrement des prêts inscrits au bilan de la société Caffil, aux fins de voir juger que les stipulations relatives au taux d'intérêt des prêts et au calcul de l'indemnité de remboursement anticipé étaient réputées non écrites et, subsidiairement, de voir annuler la stipulation d'intérêts du contrat de prêt n MPH273723EUR.  

Examen des moyens

Sur les premier et quatrième moyens, ci-après annexés

7. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

8. La commune fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes tendant à voir réputer non écrites les stipulations d'intérêt des contrats de prêts n° MPH273723EUR, n° MON270199EUR, n° MON270207EUR et  n° MPH273353EUR et les clauses de ces contrats se rapportant au calcul de l'indemnité de remboursement anticipé, en raison de leur caractère abusif, alors « qu'une commune qui conclut des prêts afin de financer ses investissements n'exerce pas d'activité professionnelle en ce qu'elle agit dans un but d'intérêt général et non à des fins lucratives, et doit dès lors être considérée comme un non-professionnel ; qu'en retenant, pour refuser d'examiner le grief tiré du caractère abusif des stipulations d'intérêt des contrats de prêt n° MPH273723EUR, n° MON270199EUR, n° MON270207EUR et n° MPH2733353EUR et de leurs clauses de  remboursement anticipé respectives, que la commune ne pouvait être qualifiée de non-professionnel dès lors que les emprunts, contractés pour financer ses activités et notamment ses investissements, étaient « en rapport direct avec son activité », la cour d'appel a violé l'article L. 132-1 du code de la consommation, ensemble l'article liminaire du même code. »  

Réponse de la Cour

9. Une commune, qui est réputée agir pour régler les affaires de sa compétence, ne peut être qualifiée de non-professionnel au sens de l'article L. 132-1, devenu L. 212-1, du code de la consommation et ne peut donc se prévaloir du caractère abusif d'une clause d'un contrat pour demander que cette clause soit réputée non écrite.

10. Le moyen, qui postule le contraire, n'est donc pas fondé.  

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

11. La commune fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande d'annulation de l'indexation sur le différentiel des cours de change EUR/CHF et EUR/USD du taux d'intérêt du contrat référencé n MPH273723EUR/29236, alors « qu'est nulle une clause d'indexation qui o exclut la réciprocité de la variation ; qu'en retenant, pour refuser d'annuler l'indexation sur le différentiel des cours de change EUR/CHF et EUR/USD, qu'en cas de déclenchement de la condition « l'indexation se trouv[ait] activée et [qu']elle s'appliqu[ait] à la hausse comme à la baisse du taux, tant que la condition suspensive res[ait] déclenchée », sans rechercher, comme elle y était invitée, si la société Dexia ne pouvait pas bénéficier sans limite de la hausse du taux d'intérêt, contrairement à la commune qui devait payer un taux d'intérêt fixe de base en cas de baisse importante du taux d'intérêt indexé sur le différentiel des cours de change EUR/CHF et EUR/USD, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 112-1 du code monétaire et financier. »

Réponse de la Cour

12. Aucune disposition légale ou réglementaire, ni aucun principe jurisprudentiel, n'interdit aux parties à un contrat de prêt de prévoir une clause d'indexation du taux d'intérêt excluant la réciprocité de la variation de ce taux et, lorsque le contrat stipule le paiement d'intérêts à un taux variable, de convenir que, quelle que soit l'évolution des paramètres de calcul de ce taux, celui-ci demeurera supérieur à un plancher, inférieur à un plafond ou compris entre de telles limites.

13. Le moyen, qui postule le contraire, n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la commune de Nîmes aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la commune de Nîmes et la condamne à payer à la Société de financement local (Sfil) et à la société Caisse française de financement local (Caffil) la somme globale de 2 000 euros et à la société Dexia crédit local la somme de 2 000 euros.